Sahara Occidental occupé : Des centaines de manifestants au pied du mur de la honte et à Guerguerat

Depuis lundi, dans la zone bordant le mur marocain de la honte dans la ville sahraouie libérée de M’heris, des dizaines de Sahraouis se sont rassemblés au pied d’un poste militaire marocain et ont manifesté leur rejet de la situation actuelle de blocage au Sahara occidental.

Une situation de passivité de l’ONU et de blocage du processus de paix du fait notamment de la nomination d’un envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies pour faire avancer le processus à travers des négociations directes entre le Maroc et le Front Polisario. Une autre caravane de la societe civile sahraouie se dirige vers la brèche illégale d’El Guerguerat, au sud du Sahara occidental, pour organiser une manifestation populaire avec le même objectif: dénoncer le blocus dans le plan de paix. Dans cette zone en particulier (El Guerguerat), il existe une brèche illégale ouverte par l’occupant marocain depuis 2000 et à travers laquelle des milliers de véhicules passent quotidiennement avec des marchandises à vendre dans toute l’Afrique, en plus d’être l’un des principaux points que les mafias font le trafic de drogues en provenance du Maroc et les acheminent sur tout le continent. Aujourd’hui, les Sahraouis disent assez, ils le disent au Maroc, qui envahit le territoire sahraoui depuis plus de 45 ans, ils disent à l’ONU qui traite ce conflit avec passivité et parti pris envers l’occupant colonial marocain. Une position scandaleuse accentuée depuis le mandat du SG de l’ONU.

Les Sahraouis disent aussi honte aux puissances qui soutiennent le Maroc dans son occupation du Sahara occidental, et elles le disent aussi à tous ceux qui, avec le Maroc, exploitent les ressources naturelles du Sahara occidental. Les manifestants qui se rendent vers la brèche de guéguerre sont soutenus et accompagnés par des dizaines de citoyens sahraouis qui résident habituellement dans les zones libérées du Sahara occidental et il n’est pas exclu que davantage de Sahraouis se joignent également à eux. Pour le moment, tout indique que Guerguerat sera la destination finale où les militants planteront leur camp de base et matérialiseront leur protestation dans le but de combler complètement ce fossé illégal et d’envoyer un message clair au Maroc et à la communauté internationale, et le message est le même que celui qui se répète depuis plus de quatre décennies: les Sahraouis ne renonceront pas à leur terre ou à leurs droits légitimes d’étendre leur souveraineté sur l’ensemble de leur territoire.

Cette caravane, va protester et fermer temporairement toutes les brèches illégales ouvertes par le Maroc le long du mur de la honte qui divise le Sahara occidental, et sa protestation aboutira enfin dans la région d’El Guerguerat , avec pour objectif de montrer le soutien et la fraternité de la société civile sahraouie avec les troupes de l’armée nationale sahraouie présentes dans la zone.

Pour rappel le président sahraoui Brahim Ghali avait assuré dans un entretien à la télévision algérienne que toute attaque des forces d’occupation marocaines contre des civils sahraouis dans la région d’El Guerguerat serait considérée comme une déclaration de guerre.Le président sahraoui a également rappelé que les troupes de l’armée nationale sahraouie sont plus que préparées et pleinement disponibles pour engager tout acte militaire nécessaire à la défense de l’intégrité des civils sahraouis. La tension est montée en flèche après que cette semaine des dizaines de civils sahraouis – y compris des responsables de la société civile sahraouie – se soient déplacés vers le mur militaire marocain pour protester contre l’occupation et l’incapacité de l’ONU à résoudre le conflit. . Pour calmer les manifestations, des membres de la mission des Nations unies (Minurso) ont essayé de dissuader les manifestants sahraouis de protester. Pour rappel après la démission inattendue de l’ancien envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Horst Kohler, le processus de paix et l’élan créé après les deux cycles de négociations à Genève sont au point mort.

Le président sahraoui, dans une lettre adressée à l’ONU, demande une plus grande implication du Conseil de sécurité pour sortir de l’impasse actuelle au Sahara occidental. Le Front Polisario demande la nomination d’un nouvel émissaire de l’ONU pour réactiver le dialogue tandis que le Maroc préfère un blocage pour perpétuer l’occupation du Sahara occidental.
M. Bendib

Le Courrier d’Algérie, 21 oct 2020

Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, El Guergarat, mur de la honte, ONU, MINURSO, spoliation pillage, ressources naturelles,

Algérie : Plaidoyer pour la formation d’une armée africaine

Toutes les interférences et interventions militaires étrangères en Libye et au Mali « ont été des problèmes plus que des solutions » ce qui augure mal de l’avenir de la région, a fait observé l’ancien diplomate algérien, Hocine Meghlaoui, se prononçant ainsi en faveur de la « formation d’une armée africaine » pour parvenir à préserver la paix dans le continent et mieux lutter contre le terrorisme.

« Au Mali, au Niger et en Libye, il y a beaucoup d’intervenants mais peu de résultats, malheureusement. Alors, est-ce que ce n’est pas le moment d’indigéniser la lutte contre le terrorisme ? Pourquoi ne pas former une armée totalement africaine, bien équipée et bien entrainée ? », a plaidé hier ce chercheur, auteurs de plusieurs ouvrages, sur les ondes de la Chaine 3 de la Radio nationale. « Est-ce que les Maliens ou les Nigériens ne sont pas capables de lutter par eux-mêmes contre le terrorisme ? », s’interroge également Meghlaoui, dont la conviction est fondée sur l’expérience algérienne.

« L’Algérie a vaincu le terrorisme toute seule. Nous avons été mis pratiquement sous embargo et nous avons réussi à vaincre le terrorisme. C’est aussi la même chose pour la Libye », a-t-il soutenu.

L’ancien diplomate a plaidé également pour « l’implication » de l’Algérie dans la résolution des conflits des pays de voisinage, dont le rôle recherché n’est pas d’interférer dans les affaires internes de ces pays, mais pour préserver la stabilité de ces pays frontaliers, qui sont sans un impact sur sa stabilité intérieure, estimant aussi que la situation sécuritaire dans ces pays représente une menace pour l’Algérie « dans la mesure où le terrorisme risque de s’étendre au voisinage ».

« Il s’agit d’enjeux vitaux même pour la sécurité de l’Algérie. L’Algérie doit être impliquée dans ce qui se passe dans la région, pas uniquement en Libye, mais aussi dans tout le Sahel car n’oublions pas le Mali, le Niger, la Mauritanie et le Tchad qui sont aussi des pays frontaliers à nous », a-t-il indiqué. Il juge ainsi que l’Algérie, qui partage plus de 6 000 KM avec ces pays, « ne peut pas rester indifférente ». « Il faut stabiliser ces pays. Mais malheureusement ce qui a été fait jusqu’à présent n’a pas permis de les stabiliser. Il y a trop d’interférences étrangères et aussi trop d’inté- rêts. L’Algérie doit aussi défendre ses intérêts. Et ces derniers priment sur tous autres intérêts car il y a d’abord l’intérêt sécuritaire. Nous devons défendre notre sécurité », a estimé Hocine Meghlaoui.

« L’Algérie doit jouer un rôle important en Libye »

Cela explique aussi pourquoi l’Algérie doit jouer un rôle important dans la résolution de la crise libyenne, dont la multiplication des interventions des pays occidentaux de la Turquie a transformé le pays en poudrière. « La Libye est un pays voisin. Nous partageons près d’un millier de kilomètres de frontières. Nous avons des tribus issues de mêmes familles qui sont installées dans les deux côtés des frontières. Nous ne pouvons pas tourner le dos à cette question.

Il s’agit de questions très compliquées et très délicates, nous devons y aller franchement parce que nous avons le droit en tant que pays voisin d’être impliqués, voire même plus que les autres », a-t-il souligné. Évoquant les échecs des opérations militaires étrangères au Mali dans la préservation de la paix et la stabilité dans ce pays, comme Serval, Barkhane (initiées par l’armée française), Minusma (par les Nations unies) et Takuba (une task force européenne ; française et Estonienne), l’ancien diplomate estime que cela démontre l’ampleur des intérêts économiques et géopolitiques dans la région.

« Prenons l’exemple de la Turquie. Ça a surpris tout le monde que la Turquie soit en Libye, dernier pays africain de l’empire ottoman. La Turquie a quitté la Libye en 1912. Et la Turquie maintenant confirme cette tendance que les anciens colonisateurs reprennent un peu le pied dans leurs anciennes colonies. Ça on le constate très clairement lorsque on est dans les conférences internationales », a-t-il décortiqué.

Il a cité aussi que la Turquie a trouvé en la Lybie une extension stratégique, économique, militaire, et maritime, soulignant que les entreprises turques dans ce pays ont un portefeuille de 16 milliards de dollars. « Mieux encore, le gouverneur de la Banque centrale libyenne – celle de Tripoli – est allé à Istanbul et même rencontré le président Erdoğan (…) et fait un dépôt de 8 milliards de dollars à la Banque centrale turc pour 4 ans, sans intérêts et sans frais. Cela a permis d’ailleurs de soulager la livre turc qui est en baisse », a-t-il ajouté.

Meghlaoui arrive ainsi à la conclusion : « les pays ne bougent pas sans qu’il y ait des intérêts ». Estimant que la diplomatie algérienne est « une diplomatie de paix » dont les principes « sont contenues dans la charte de l’ONU », l’ancien diplomate remarque qu’« il y a très peu d’États qui respectent encore les principes de la diplomatie comme c’est le cas actuellement pour l’Algérie. Je pense qu’il est temps de revoir un petit peu notre diplomatie et faire un bilan sérieux pour voir où nous en sommes et définir les objectifs et les moyens ».
Hamid Mecheri

Le Courrier d’Algérie, 12 oct 2020

Tags : Algérie, Libye, Mali, Turquie, colonisation, colonialisme, exploitation, spoliation, pillage, pétrole, richesses, ressources naturelles, Afrique, Union Africaine,

Sahara Occidental : Fin des fournitures suédoises pour la mine de Boucraa

La société suédoise d’équipement minier Epiroc a annoncé qu’elle ne fournirait plus la mine de phosphate controversée de Bou Craa au Sahara Occidental occupé. La société allemande Continental devrait suivre l’exemple, commente WSRW.

Depuis 12 ans des entreprises suédoises fournissant des équipements de forage pour l’exploitation de la mine controversée de Bou Craa au Sahara Occidental occupé, c’est maintenant fini.

« Nous n’avons aucun accord pour la maintenance ou la fourniture de la mine de Boucraa au Sahara Occidental et nous n’avons pas l’intention de fournir la mine à l’avenir », a écrit Camilla Goldbeck-Löwe, vice-présidente de la responsabilité d’entreprise, dans un courriel à Western Sahara Resource Watch (WSRW) du 8 septembre 2020. WSRW a depuis reçu confirmation de cette information de plusieurs sources.

Epiroc est une société suédoise assez récente, créée en 2018. La société a été créée à la suite d’une décision de la société suédoise Atlas Copco de scinder son ancienne activité d’équipement minier. Au moment de la scission, Atlas Copco vendait et entretenait depuis plusieurs années du matériel pour la mine controversée du Sahara Occidental. Ses premières ventes datent de 2008 et l’accord n’a été révélé par WSRW qu’en 2013.

Bien qu’Atlas Copco et Epiroc n’aient pas commenté la question pendant longtemps après la création d’Epiroc, les propriétaires des deux sociétés s’entendaient pour dire que le contrat avec OCP avait été repris par Epiroc, comme c’était le cas avec d’autres contrats d’Atlas Copco. Un courrier adressé à Epiroc en novembre 2019 n’a pas reçu de réponse, mais lorsqu’elle a été interpellée par le Centre de ressources sur les entreprises et les droits de l’homme plus tôt cette année, la société a déclaré qu’elle « examinait actuellement cette question ».

Cependant, un tweet d’Atlas Copco le 10 avril 2019 a semé la confusion quant à la société qui détenait effectivement l’obligation contractuelle. Atlas Copco a déclaré sur les réseaux sociaux que « l’extraction du phosphate faite par notre client suit les règles du droit international ». Le tweet est toujours en ligne.

Maintenant, Atlas Copco affirme qu’aucune des deux sociétés ne joue un rôle dans la mine. « Atlas Copco n’exerce aucune activité au Sahara Occidental. Le client de la mine de Bou Craa et d’Atlas Copco a convenu qu’il n’y aurait pas de nouvelles commandes pour la livraison d’équipements, de pièces de rechange et de services au Sahara Occidental », a déclaré par écrit à WSRW la vice-président à la durabilité d’Atlas Copco, Sofia Svingby, dans un courrier du 18 septembre 2020. Cela a été confirmé au Centre de ressources pour les entreprises et les droits de l’homme dans un courrier du 9 mars 2020. « Atlas Copco n’a pas d’opérations au Sahara Occidental. Le secteur des équipements miniers fait désormais partie d’un société publique différente, Epiroc AB. […] Il n’y a aucun service rendu par le personnel d’Atlas Copco au Sahara Occidental », écrivait la société à l’époque.

Western Sahara Resource Watch demande désormais à la société allemande Continental – qui fournit des courroies en caoutchouc pour l’importante infrastructure de convoyage de la mine – de suivre l’exemple donné par la société suédoise. Le contrat de plusieurs années de Continental pour la fourniture du système de bande transporteuse a expiré en juillet 2020. WSRW ne sait pas s’il a été renouvelé.

« Nous demandons à Continental de clarifier et de dire ce qu’il est advenu du contrat expiré avec l’OCP. Epiroc a montré qu’il est parfaitement possible pour une entreprise de maintenir des opérations commerciales au Maroc, tout en arrêtant l’approvisionnement de la mine de Bou Craa en Sahara Occidental occupé. Une compagnie nationale marocaine n’a pas le droit d’exploiter une mine de phosphate au Sahara Occidental sans avoir obtenu le consentement du peuple du territoire. En contribuant aux opérations de la mine, des sociétés internationales contribuent à l’occupation illégale. Continental doit maintenant suivre l’exemple d’Epiroc, et exprimer immédiatement et sans condition qu’elle a mis fin à son engagement. Nous félicitons Epiroc d’avoir fait preuve de responsabilité et d’avoir pris les devants », a déclaré Tim Sauer de Western Sahara Resource Watch en Allemagne.

Les autres sociétés fournissant la mine sur les terres occupées sont Siemens, Caterpillar et Worley Ltd.

Ce n’est pas la première fois que la restructuration d’entreprises conduit à un remaniement sur les controverses au Sahara occidental. En 2018, le grand groupe allemand Dr.Oetker a vendu sa division maritime Hamburg Süd au géant danois des conteneurs Maersk. La filiale britannique de Hamburg Süd, Furness Withy, était à l’époque l’affréteur responsable des transports de phosphates vers l’Australie / Nouvelle-Zélande. L’acquisition de Hamburg Süd par Maersk étant finalisée, Maersk s’est assuré d’interrompre les transports en Oczanie. Furness Withy était l’affréteur du vraquier NM Cherry Blossom qui a été détenu en Afrique du Sud pour avoir expédié illégalement le minerai de la zone de conflit hors du territoire occupé.

WSRW, 5 oct 2020

Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, phosphates, Boucraa, OCP, spoliation, pillage, ressources naturelles, 

La francophonie patrimoine universel ou françafrique par d’autres moyens ?

Chems Eddine Chitour*

«Passionnée, étais-je à vingt ans, par la stature d’Averroes, cet Ibn Rochd andalou de génie dont l’audace de la pensée a revivifié l’héritage occidental, mais alors que j’avais appris au collège l’anglais, le latin et le grec, comme je demandais en vain à perfectionner mon arabe classique » Assia Djebbar de l’Académie française(…) j’ai dû restreindre mon ambition en me résignant à devenir historienne, En ce sens, le monolinguisme français, institué en Algérie coloniale, tendant à dévaluer nos langues maternelles, nous poussa encore davantage à la quête des origines ».
Assia Djebbar de l’Académie française

La ministre ruandaise Louise Mushikiwabo a été intronisée par « consensus » comme la nouvelle secrétaire générale, Michaelle Jean la secrétaire générale sortante n’a même pas pu défendre son bilan. La Francophonie est entre les mains d’un petit pays anglophone qui a supprimé le français de l’enseignement ! De plus , il ne brille pas sur le chapitre des droits de l’homme ou de l’alternance. Voilà pour la politique et ses desseins impénétrables !

Qu’est ce que la francophonie ?

Le terme francophonie désigne l’ensemble des gouvernements, pays ou instances officielles qui ont en commun l’usage du français dans leurs travaux ou leurs échanges. La carte de la francophonie se confond largement avec celle de l’expansion coloniale française. Dès le début des années 1960, des chefs d’État, des anciennes colonies françaises, comme le Sénégalais Léopold Senghor,- l’agrégé de grammaire- proposent de regrouper les pays nouvellement indépendants, désireux de poursuivre avec la France des relations fondées sur des affinités culturelles et linguistiques.

La Francophonie naît officiellement en 1970, à la conférence de Niamey. La francophonie est elle seulement au nom de la realpolitik, une continuation de la Franceafrique ? Ou est-ce, aussi un vecteur culturel universel qui paradoxalement ferme la porte à celles et ceux qui maîtrisent de loin la langue de Voltaire au profit , de pays qui n’ont qu’un lointain rapport avec le français .

Abdelkader Kherfouche écrit à ce propos Au cours d’un point de presse organisé au musée copte du Caire le 18 avril, François Hollande a déclaré : « La francophonie n’est pas un cadeau simplement de ceux qui parlent français. La francophonie c’est un combat, un combat pour des valeurs, un combat pour la culture, un combat pour la diversité » Les mots qu’utilise le président ne sont pas sans rappeler la rhétorique qu’employaient les élites françaises du XIXe siècle pour justifier la colonisation. La langue française, la langue d’une nation civilisée pour faire sortir le colonisé de sa barbarie primitive, la langue française comme un don « humanitaire et civilisateur » pour reprendre la formule de Jules Ferry. Comme le rappelle l’écrivaine algérienne d’expression française, ce n’est pas par les œuvres de Pierre de Ronsard ou de Jean Racine que les Algériens sont entrés dans la langue française, c’est la langue française qui est entrée par effraction en Algérie () La langue française était un outil au service de la colonisation. Une partie des colonisés était formée en français,« la langue des autres, celle des colonisateurs, ses maîtres », la langue de l’école coloniale : Le français donc, celui de l’école, celui de « nos ancêtres, les Gaulois », or ils n’étaient pas « nos ancêtres », et ils n’étaient pas Gaulois ! Mes, nos ancêtres parlaient, ou criaient, ou chantaient en arabe, en berbère, en Ma grand-mère, en arabe, racontait aux enfants autour d’elle, la guerre, les otages, l’incendie des oliviers, à la zaouïa. À l’école française, l’institutrice venue de France racontait Charlemagne, et même Charles Martel à Poitiers confie Assia Djebar dans un poème »(1).

Les «défenseurs grincheux» du français

C’est un fait, et de l’avis de plusieurs spécialistes, la langue française perd du terrain dans le domaine scientifique «l’usage du français dans les sciences tombe en désuétude, la moitié des publications scientifiques est en anglais, seulement 7% en français. Aux Nations unies, le français bataille pour garder son rang: aujourd’hui, seulement 14% des discours sont tenus en français, plus de la moitié le sont en anglais. L’écart entre les deux langues se creuse aussi à l’Union européenne, notamment dans la rédaction des rapports de la Commission, et ce phénomène s’est accentué depuis l’entrée des dix nouveaux pays membres qui parlent plutôt l’anglais. La domination de l’anglais sur les ondes, est aussi avérée. (2)

Promouvoir la francophonie en parlant anglais, le paradoxe n’a pas manqué d’irriter les inconditionnels de la langue française . Après l’injonction vaine en son temps, de Jaques Toubon à parler français, après le prix de la carpette, décernée à ceux qui parlent anglais : « un organisme québécois de défense de la langue française a décerné dimanche un «prix citron» au président français Emmanuel Macron pour des propos défendant son usage occasionnel de l’anglais sur la scène internationale. L’organisme culturel «Impératif français» a choisi le président Macron pour avoir, créé en 1975, Impératif français se décrit comme un «oranisme voué à la promotion de la langue française, de la culture d’expression française et de la francophonie.» Lors de la visite à Paris début mars du Premier ministre québécois, le président Macron avait déclaré ne pas faire partie «des défenseurs grincheux» de la langue française, égratignant au passage les tenants d’une stricte prééminence du français. «lors de la visite du Premier ministre du Québec Philippe Couillard, déclaré vouloir renouveler le logiciel’ de la francophonie en s’inspirant de l’exemple nord-américain’ selon lequel parler l’anglais renforce la francophonie’! Ouf!», écrit cet organisme sur son site ». (3)

La francophonie et l’arabophonie

On pourrait se demander pourquoi l’Algérie veut prendre la défense de la langue arabe en France en lieu et place de plusieurs pays arabes qui sont dans la francophonie. Pourtant l’un des vecteurs de l’acculturation croisée, en l’occurrence la langue arabe , perd elle aussi du terrain en France. Ce que dit Assia Djebbar est important, en ce sens que la langue arabe est consubstantielle de notre personnalité. L’enseignement de la langue arabe est ancien sur le territoire français. Il remonte à l’époque de François 1er. L’agrégation d’arabe fut créée en 1905. A l’époque, l’enseignement de l’arabe était essentiellement lié au phénomène colonial. Durant la période coloniale, la politique «intégro-assimilationniste» de la puissance coloniale fut en grande partie menée contre la langue arabe. Après la décolonisation, la langue arabe continua d’être enseignée et en 1975 le Capes d’arabe fut créé. Depuis, l’arabe semble appelé à connaître un déclin inéluctable. En 2005, la session du Capes d’arabe a été supprimée Pourtant, la langue arabe ne peut pas être considérée comme une langue «rare» puisqu’elle est parlée par plus de 250 millions d’individus dans le monde et qu’elle est la langue officielle de plus de vingt pays (.. 😉 L’éducation nationale en France considère que l’arabe est une langue étrangère alors qu’elle fait partie intégrante du patrimoine culturel de millions de Français. Elle est usitée dans les familles, dans les cages d’escaliers, dans les quartiers. Elle domine dans les banlieues, dans les prisons. Pourtant, elle n’est pas enseignée à l’école primaire, elle est marginalisée au lycée. L’arabe en France est la langue des sous-scolarisés et des savants.»(3)

Etat des lieux de l’usage du français en Algérie

Avant 1962 l’enseignement du français à dose homéopathique faisait que les Algériens étaient des v oleurs de feu selon l’élégante expression de Jean Amrouche. Ce fut pour nous la la langue du roumi mais aussi la langue pain On dit que les Algériens sont comme monsieur Jourdain ils font de la prose sans le savoir, ils «font de la francophonie» sans le savoir. Ils contribuent efficacement au rayonnement de la langue française sans y émarger ou attendre un quelconque subside. Les Algériens font autant pour la diffusion de la langue française -belle langue au demeurant- que plusieurs pays faisant partie de la liste des pays francophones sans plus mais qui, au premier vent défavorable, tournent casaque, comme c’est le cas des pays de l’Est ou des pays anglophones. L’usage du français véritable butin de guerre pour Kateb Yacine que nous avons préservé sans réciprocité est quotidien. C’est un lieu commun que de dire que l’Algérie est le deuxième pays francophone. Qu’est-ce que cela veut dire au juste? C’est d’abord l’enseignement du français depuis l’indépendance d’une façon intensive avec des fortunes diverses mais tout de même déterminée à telle enseigne qu’il y avait à l’indépendance moins de cent mille francophones- il y a de nos jours plus de 12 millions – d’autres sources parlent d’un tiers des Algériens- qui, d’une façon ou d’une autre, parlent le français de Voltaire . C’est le rai, le cinéma Ce sont des centaines de mots arabes notamment algériens qui sont passés dans la cagnotte de la langue française..

La génération de l’indépendance qui a été acculturée à son corps défendant s’était faite un point d’honneur d’être partout autant que possible malgré tous les obstacles, à l’école ou au lycée, la première notamment en orthographe et en mathématiques. En discutant avec des collègues universitaires français il m’est arrivé de les reprendre gentiment quand ils se prenaient les pieds dans des subjonctifs pas commodes. J’étais étonné de leurs « insuffisances » et ils étaient étonnés de constater que l’enseignant des sciences dures, paléo-bougnoule que j’étais, venu du plus profond du bled se permettait de leur apprendre la fameuse poésie de Malherbes : « Et rose elle a vécu ce que vivent les roses l’espace d’un matin » ou encore la belle poésie la ballade des pendus de François Villon Nous sommes à nous demander, en le paraphrasant mais où est la langue d’antan ? La Révolution de 1789 nous a accompagnés par le vent de liberté qu’elle avait déclenché. Bien plus tard au collège nous récitions le Chant des Partisans pendant que les valeureux moudjahid se battaient pour arracher l’indépendance du pays . Bref tout a été fait par le pouvoir colonial pour magnifier la langue française, l’histoire de France et faire apparaitre les indigènes que nous étions comme des êtres in-civilisés. Il nous fallait cependant nous battre avec les armes de la colonisation pour avoir des chances d’émerger après un parcours du combattant à travers les interstices de tolérance du pouvoir colonial

Les humains dit on ne sont pas seulement eux-mêmes , ils sont aussi le milieu où ils sont nés , le foyer ou la chaumière où ils ont appris à faire les premiers pas, les contes qu’ils ont entendus de leurs grands-mères, les poètes qu’ils ont lus les auteurs qui ont bercé leurs enfances au point de les mettre sur des piédestaux comme ce fut en l’occurrence les auteurs du Moyen âge au XIXe siècle qui ont bercé notre enfance, notamment décrits dans le Lagarde et Michard C’est enfin les instituteurs « ces hussards noirs de la République » Ces instituteurs, on ne le rendra jamais assez justice pour avoir traversé le no man’s land qui nous séparait des européens d’Algérie Ils nous ont appris outre le bon usage du français, le bel usage du français.

La francophonie du XXIe siècle entre l’Algérie et la France

La France apprécie-t-elle à sa juste mesure l’apport inconditionnel des millions d’Algériennes et d’Algériens qui, qu’on le veuille ou non, font plus pour la langue française que des dizaines de pays qui émargent au râtelier de la Francophonie ? Il faudra bien qu’un jour «on rende à César ce qui appartient à César», en reconnaissant à l’Algérie un rôle majeur dans la diffusion du français.

C’est toute la littérature algérienne d’expression française, c’est une cinquantaine de quotidiens francophones, c’est 80% des vols des Algériens vers la France, c’est des milliards de dollars pour le tourisme c’est enfin le marché algérien qui fait que la France est le deuxième partenaire depuis l’indépendance malgré toutes les vicissitudes. Quand on parle français, on consomme français, on roule français et ceci malgré la mondialisation. De la même manière, la culture francophone est toujours prégnante, notamment dans la fonction publique que nous avons héritée pour le meilleur et pour le pire, la littérature, la musique, les arts plastiques, le cinéma, la mode vestimentaire.Bref le vécu au quotidien.

Enfin, il ne faut pas cacher la réalité; des dizaines de milliers d’universitaires, ingénieurs, médecins s’installent en France, participant de ce fait au dynamisme scientifique de la France et ceci sans que la France n’ait déboursé un maravédi à l’Algérie qu’il faut rappeler et les normes de l’Unesco l’attestent, près de 100.000 dollars pour la formation d’un universitaire. Mieux encore, l’Algérie participe enfin à l’enrichissement de la langue française en y apportant de nouveaux mots qui ont été adoptés. Cette acculturation croisée est peut-être un signe que la vitalité d’une langue a besoin de sang exogène pour conjurer son dépérissement. Malgré cela, la France des arts, des armes et des lois selon du Bellay fait une sélection incompréhensible. Il nous parait qu’il est plus facile d’obtenir un visa commercial qu’un visa pour les intellectuels, notamment les enseignants.

Tout d’abord et pour toutes les raisons, deuxième pays francophone, pays arabophone et amazighophone, l’Algérie ne peut pas et ne devrait pas de mon point de vue être traitée comme les autres pays pour ce qu’elle fait pour la langue française En tant qu’universitaires qui, pendant des dizaines d’années, avons enseigné en français, nous sommes nombreux à penser que la France doit développer une relation spéciale avec l’Algérie au nom de l’histoire des liens de sang tissés, du sang versé sans rapport dominant dominé mais avec une parole désarmée et une réelle volonté de faire un aggiornamento de notre histoire commune pour la reconnaissance du fait que la colonisation ne fut pas un long fleuve tranquille

La « reconnaissance objective» de l’Algérie pour la France passe par la résolution des contentieux en premier lieu, la restitution sans condition des restes des patriotes algériens qui sont entreposés dans les musées de France et de Navarre, C’est aussi la mémoire constituée par toutes archives qui contribueront certainement à la sérénité des relations , c’est enfin cette diaspora trait d’union qui peut être un vecteur de stabilité et vivification de la langue dans une acculturation apaisée Un signe fort et symbolique serait celui de la mise en place d’une grande bibliothèque numérique qui contribuerai ce faisant à l’apaisement des mémoires, par la restitution sous une forme ou une autre des fonds d’archives .

Souvenons nous ! Quand Mitterrand a inauguré la Bibliothèque d’Alexandrie, les députés égyptiens anglophones qui se sont fait traduire son discours l’ont acclamé debout Pour rappel il faut bien le dire que l’armée d’invasion a brûlé en 1837 la bibliothèque de Sidi Hammouda Constantine et comme rapporté par Adrien Berbrugger : « chaque soldat voulait avoir «son Coran» et que faute de bois, on allumait le feu avec les ouvrages. » .Dans le même ordre du plaidoyer il est utile de rappeler qu’un matin de juin 1962 , le cadeau de l’OAS a pris la forme d’un gigantesque incendie. Ce furent 600.000 ouvrages de la Bibliothèque d’Alger dont certains uniques, qui furent dévor és par le feu.

Si on y ajoute la mise en place d’une présence culturelle digne de ce nom en France dans sa double dimension arabe et amazighe, rien ne s’opposerait alors de mon point de vue à l’acceptation par l’Algérie de donner la pleine mesure de son talent au sein de la Francophonie. Cependant et pour terminer la question qui se pose est la suivante : La francophonie devra t-elle continuer à être une sorte de « françafrique » par d’autres moyens ? Ou doit elle s’affranchir du passé pour aller vers l’universel ? De notre point de vue si elle veut perdurer la francophonie ne doit pas se départir de sa fonction culturelle qui devrait , sans condescendance, favoriser le dialogue des cultures qui peuvent s’exprimer en langue française tout en favorisant une altérité croisée par un accueil bienveillant des autres expressions linguistiques.

Note

1.Abdelkader Kherfouche http://orientxxi.info/magazine/l-heritage-colonial-de-la-francophonie,1356,1356

2.Chems Eddine Chitour https://www.mondialisation.ca/francophonie-que-peut-faire-de-plus-lalgerie/5304176

3.https://www.huffingtonpost.fr/2018/03/25/macron-recoit-un-prix-quebecois-parodique-pour-ses-propos-sur-la francophonie_a_23394921/?

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique Alger

Source : Blog du Professeur Chitour

Tags : Afrique, France, françafrique, Francophonie, coloniaslime, colonisation, exploitation, spoliation, pillage, ressources naturelles, 

Sahara Occidental : L’histoire des légionnaires espagnols qui ont rallié le Polisario

Parmi les contingents militaires espagnols opérant au Sahara Occidental jusqu’à 1975 se trouve le 3ème Tercio Millan Astray de la Légion. Celle-ci offrait l’aministie à toute personne qui s’y engage dont beaucoup d’étrangers.

En novembre 1975, il était claire que la présence espagnole dans son ex-colonie arrivait à sa fin. Certains légionnaires ont décidé de fuir les mauvais traitement subis dans la légion et rallier le Front Polisario, notamment parce qu’il avait des amis sahraouis. Parmi ceux que je connais il y avait deux espagnols, un vénézuélien et un portugais.

Le réglement interne du Polisario exigeait de changer de nom pour assurer la clandestinité. Un des légionnaires était connu sous le nom de « Abdala ». Il a participé à la bataille d’Amgala et selon ses compagnons, il a brillé par son courage et son génie dans l’utilisation du mortier. Il est tombé dans la première bataille d’Amgala le 29 janvier 1976. Il est resté dans la mémoire de tous ceux qui l’ont côtoyé. Ceux-ci raconte que lorsque les combattants ont reçu l’ordre de « Linsihab » (retrait), il disait « Non, pas de linsihab », il ne voulait pas fuir devant les marocains.

L’autre légionnaire espagnol se trouvait à Rabouni, où j’ai eu l’occasion de le rencontrer à plusieurs reprises. Il est disparu en 1978. Personne ne connaît son sort, mais on s’en doutait tous. Il a été assassiné. Les dirigeants sahraouis voyaient des « espions » partout, même parmi les sahraouis dont nombreux ont été tués et emprisonnés dans la tristement célèbre prison d’Errachid.

Le vénézuélien se faisait appeler Larosi, mais les amis l’appellaient Larry. Il a forgé le respect grâce à sa broche, c’était un artiste dont les toiles sont restés dans l’histoire de la peinture sahraouie. Ses traces se trouvent dans les écoles, les wilayas et les murs construits à l’occasion des congrès et des fêtes d’anniversaire de la RASD et du Front Polisario. Il a asauvé sa peau grâce à son art et sa capacité d’adaptation. A présent, se trouve à Barcelone où il s’est marrié à Montserrat Aizcorbe, une ancienne infirmière qui a exercé dans les camps des réfugiés sahraouis en Algérie dans les premières années de l’exile.

Le 4ème légionaire, le portugais Joseph Henrique Furtado travaillait avec moi dans la base arrière de la 2ème Région Militaire à Ouediane Towtrate, en territoire algérien, tout près de la ville sahraouie de Mahbes. Il s’occupait de la boulangerie. Plus tard, Babia Chiaa, chef de la base à l’époque et actuel ministre du commerce de la RASD, l’a chargé de l’utilisation et la maintenance du générateur d’électricité. Un générateur qui était une véritable bénédiction à une époque où la seule lumière étaient les lampes de pétrole. Ce générateur fait partie du butin d’un bateau qui a été détruit par les unités de la marine sahraouie, des unités formés à Cuba et dont l’action était un véritable cauchemar et pour le Maroc et pour l’Espagne dont les bateaux de pêche opéraient dans les eaux territoriales du Sahara Occidental en vertu des closes des Accords illégaux de Madrid du 14 novembre 1975. Accords qui ont permis au Maroc et à la Mauritanie de partager le territoire sahraoui riche en ressources naturelles.

Le pseudonyme de Joseph était Hosein et se donnait à coeur à son travail malgré le mépris de ses compagnos sahraouis dont la mentalité était archaïque. Souvent, je me rendais dans sa chambre pour bavarder et lui remonter le moral.

Au mois de janvier 1981, j’ai quitté la base pour rejoindre un groupe de jeunes selectionnés pour la formation en Libye sur les missiles anti-aériens connus sous le nom de Sam-6. Hosein a disparu après mon départ. Une autre victime de la paranoïa des leaders sahraouis.

Prochain récit : La formation sur les misiles SAM-6 en Libye

Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, légion espagnols, crimes, assassinats, Espagne, pêche, ressources naturelles, 

Maroc : Le pillage de la RASD ne remplit plus les caisses du Makhzen

La machine de propagande du makhzen, chargée généralement d’étouffer toute voix dénonçant l’illégalité de l’occupation des territoires du Saharaoui, est également appelée à soigner l’image du royaume. Très souvent, des articles de presse et des reportages vantant la réussite politique et économique du royaume de Mohammed VI sont diffusés sur différents supports.

Mais la crise du covid-19 a vite fait de rappeler la réalité aux marocains. Dès le début de la pandémie, le Maroc va solliciter une aide du FMI en recourant à la ligne de précaution et de liquidité d’un montant de 3 milliards de dollars. Mais le gouvernement marocain a besoin de plus d’argent pour faire face aux conséquences économiques de la pandémie. Selon le gouvernement marocain d’autres demandes de crédits seront faites auprès d’autres institutions financières internationales tout au long de l’année en cours.

La raison, le Maroc à une dette extérieure de 34 milliards de dollars et doit payer 4,15 milliards de dollars à de service de la dette en 2020. Face à cet endettement plus ou moins élevé, le Maroc ne dispose pas d’importantes réserves de change. Ces dernières s’élevaient à 24,4 milliards de dollars à fin février 2020, alors que l’Algérie dispose de 60 milliards de dollars. Mais la situation se complique davantage quand on aborde la structure du commerce extérieur de nos voisins de l’ouest. Le déficit commercial des biens s’est élevé à plus de 21 milliards de dollars en 2019, alors qu’il n’a été que de 6,11 milliards de dollars pour l’Algérie.

Les performances économiques du Maroc, tant chanté par le makhzen, étale au grand jour une fragilité structurelle. L’économie marocaine doit importer deux dollars pour exporter un seul dollar. Ce lourd déficit du commerce extérieur des biens est plus ou moins atténué grâce aux rentrés en devises du tourisme et des transferts de l’argent de la diaspora. Enfin, les investissements directs étrangers ont chutés de 45% en 2019 pour n’atteindre que 1,8 milliards de dollars. Remettant en cause l’attractivité de l’économie marocaine.

Le gouvernement marocain s’attend à une année très difficile sur le plan économique et social. La sécheresse qui frappe l’agriculture va réduire du tiers la production céréalière. Les principaux secteurs économiques exportateurs sont presque à l’arrêt. Le tourisme sera long à la reprise vu que les principaux pays émetteurs maintiennent leurs frontières fermées. Tandis qu’on s’attend à une baisse mondiale des transferts d’argent des émigrés de l’ordre de 20%. Une situation tellement critique que le gouvernement marocain n’a d’autres choix que de s’endetter encore plus.

Puis il y a le Sahara occidental. La colonisation de ce territoire coute cher à Rabat. Le mur qui sépare les territoires libérés de ceux occupés par le Maroc, long de2700 kilomètres, doit être régulièrement entretenu. Des dizaines de milliers de soldats marocains, avec leurs équipements, sont mobilisés tout au long de ce mur. Le gouvernement accorde des avantages financiers pour encourager les marocains à s’implanter dans les territoires occupés pour modifier la démographie.

La facture est tellement élevées que les richesses pillées du Sahara occidental, phosphate et poissons, ne couvrent que faiblement les dépenses engagées par le palais royal pour maintenir la colonisation d’une partie des territoires Sahraouis. A titre d’exemple, les exportations de phosphate du Sahara occidental n’ont rapportés que 90,4 millions de dollars en 2019 contre 164 millions de dollars en 2018, tandis que le pillage des ressources halieutiques a généré 100 millions de dollars la même année. Ces montants sont loin de couvrir le cout annuel de la colonisation, qui est en réalité supporté par le peuple marocain.

Le Jeune Indépendant, 20 mai 2020

Tags : Maroc, Sahara Occidental, Makhzen, Front Polisario, phosphates, pillage, ressources naturelles, armée, mur de la honte,

Les sociétés opérant au Sahara Occidental occupé risquent gros (Financial Times)

Une action en justice sur un territoire africain contesté affecte les liens de l’UE avec le Maroc
John Dizard
Ce que les militaires appellent la guérilla de guerre asymétrique combattant les armées régulières – est venu au monde de la conformité.
Les mouvements politiques qui ont peu d’actifs financiers, sans parler de leur supériorité militaire, peuvent gagner devant les tribunaux contre des entreprises ou des acteurs gouvernementaux.
Grâce à leur capacité à tirer parti de leurs gains en influençant des milliards de milliards de dollars des investisseurs, ou des fonds souverains sensibles, ils peuvent produire un effet énorme.
Prenons une affaire déposée devant la Cour européenne de justice le 29 avril par le Front Polisario, un groupe politique qui exige la pleine souveraineté du Sahara Occidental occupé par le Maroc. Ses avocats affirment que Bruxelles viole le droit européen des droits de l’homme en autorisant, voire en encourageant, l’importation de ressources naturelles du territoire.
Si le Polisario gagne le premier tour de son procès contre le Conseil européen, lui et ses alliés du monde entier pourraient intenter des poursuites contre des entreprises et des institutions faisant affaire avec le Maroc, qui affirme avoir la souveraineté sur le Sahara Occidental.
En soi, le Polisario n’est peut-être pas un adversaire impressionnant. Mais que se passerait-il s’il bénéficiait du soutien du fonds souverain norvégien, les compagnies d’assurance suédoises, et des 12 millions de dollars d’actifs immobilisés dans des produits financiers sélectionnés selon des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance?
Le Maroc, pour sa part, est soutenu par la France et l’Espagne pour des raisons à la fois humanitaires, telles que les droits de pêche et les investissements, et politiques, notamment pour éviter une crise semblable à celle de la Libye aux portes de l’Europe.
Le retrait discret des entreprises ou des investisseurs ne fonctionnera pas, puisque des groupes de défense des droits humains tels que Western Sahara Resource Watch notent chaque expédition de phosphate du territoire et chaque entreprise européenne qui a une autorisation de pêche ou de survol.
Les responsables de la conformité des entreprises ont peut-être pensé que les investisseurs ESG* afficheraient simplement des votes par procuration pour les réunions annuelles ou accepteraient des diaporamas anodins sur le soutien aux clubs de football locaux et la contribution étrange aux cliniques de santé. Mais non. Des règles de gouvernance d’entreprise plus strictes en Europe et dans d’autres marchés développés ne fonctionnent pas seulement au profit des investisseurs militants, tels que les fonds spéculatifs vautours. Ils exercent également des pressions pour qu’on respecte explicitement les lois et les traités sur les droits de la personne. Les compagnies allemandes telles que Heidelberg Cement et Continental sont de plus en plus assiégées par le biais de questions difficiles face aux groupes militants alignés Polisario.
Ce qui aurait pu être des extensions de routine des lignes bancaires ou des groupes de souscription d’obligations sont maintenant compliqués par des questions sur la teneur en carbone et l’utilisation de minéraux de conflit. Les consultants de criblage ESG tels que Sustainalytics aux Pays-Bas considèrent maintenant les phosphates, une exportation clé du Sahara Occidental, comme l’un de ces minéraux de conflit.
Pensez à ce qui est arrivé au financement de la production d’électricité à partir du charbon. Autrefois, c’était strictement l’affaire d’une société d’énergie qui voulait construire. Maintenant, il est difficile, voire impossible, d’obtenir un soutien bancaire.
Le Polisario a déjà réussi à persuader le tribunal de déclarer en février de l’année dernière qu’un accord de déclaration de l’UE avec le Maroc « ne s’appliquait pas au Sahara occidental et aux eaux adjacentes ».
Les marocains enragés persuadent le Conseil européen et le Parlement européen de concocter une solution de contournement juridique, qui a été adoptée en janvier.
Ce n’était pas la fin de l’histoire.
La plainte du Polisario à la fin du mois d’avril appelle un tribunal à annuler le nouvel accord économique avec le Maroc, plus ou moins pour les mêmes raisons que la CJUE a affirmé dans des affaires précédentes. Des proches du tribunal affirment qu’il faudra entre six mois et un an pour que l’affaire soit acceptée pour un procès.
On ne peut pas dire comment le tribunal statuera mais un examen du dossier montre beaucoup de sympathie pour les arguments du Polisario. L’UE, la France et l’Espagne, et les sympathisants marocains pensent probablement qu’ils courent un risque sérieux d’une nouvelle défaite.
Si le Polisario a cette première victoire en main, il est probable qu’il poursuivra les partenaires commerciaux et financiers du Maroc devant d’autres tribunaux en Europe et ailleurs. Je crois comprendre qu’il pourrait demander des dommages-intérêts civils aux entreprises qui ont importé du phosphate, du poisson et des produits agricoles au fil des ans.
Bien sûr, les Français et les Espagnols apparaîtront dans les mêmes salles de réunion que les consultants en conformité et les avocats, et démontreront que les sociétés, les banques et les investisseurs continuent de faire affaire avec un partenaire géopolitique clé. Sinon, laisseront-ils entendre, le Maroc pourrait permettre à davantage de migrants de traverser la Méditerranée.
Ainsi, si une banque, une entreprise ou un gestionnaire d’actifs a accepté la notion de conformité ESG, elle pourrait se retrouver au milieu de conflits comme celui entre le Polisario et le Maroc, sans parler des Français et des Espagnols.
Oui, c’est bien d’avoir une petite certification décorée de feuilles vertes de la part des consultants en développement durable, mais cela veut dire aussi que vous avez été attiré dans des jeux à haut risque.
Financial Times, 17 mai 2019

*Note de la rédaction : ESG (Environmental, Social, and Governance Criteria)

Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, ressources naturelles, spoliation, Western Sahara Resources Watch, 

Le colonialisme et le néocolonialisme

On peut faire l’hypothèse qu’il existe une relation entre colonisation et sous-développement puisque les pays jadis colonisés sont les les plus pauvres de la planète

Par Guy Bajoit

S’il faut commencer par parler du colonialisme, c’est parce que les pays qui furent colonisés sont, encore aujourd’hui, à quelques rares exceptions près, les pays les plus pauvres de la planète. On peut donc, au moins, faire l’hypothèse qu’il existe une relation entre colonisation et sous-développement. Je me limiterai ici, aux grandes étapes de l’histoire coloniale et post (ou néo) coloniale, au cours des cinq derniers siècles.

L’hégémonie du Portugal et de l’Espagne

Déjà, ce sont les besoins de l’économie des pays les plus puissants, combinés avec la conjoncture politique du moment, avec les découvertes scientifiques et, bien sûr, avec beaucoup d’audace, d’imagination et de chance, qui expliquent la découverte et la colonisation de ce que l’on a appelé « l’Amérique ». Les bourgeoisies du sud de l’Europe avaient grand besoin de développer le commerce, surtout avec l’Asie (la Chine, les Indes) : elles cherchaient des épices, des soieries et surtout des métaux précieux. Mais il fallait, pour cela, faire la concurrence aux Vénitiens et aux Génois, et s’arranger avec les Turcs, qui contrôlaient le Moyen-Orient. Les Portugais et les Espagnols cherchèrent donc une voie maritime pour se rendre en Asie : les premiers en contournant l’Afrique (dès 1485 et surtout, à partir de 1497, avec Vasco de Gama) ; les seconds, en naviguant vers l’Ouest (dès 1492, après le succès de Christophe Colomb). Or, justement, les progrès de la navigation (connaissances géographiques, pilotes expérimentés, bons bateaux — la caravelle, le galion — et nouveaux instruments comme l’astrolabe nautique et l’arbalète) rendaient possible de tels projets. Le Portugal et l’Espagne financèrent de nombreuses expéditions, qui aboutirent à trouver un continent qu’ils ne cherchaient pas puisqu’ils ignoraient son existence. Et Christophe Colomb put réaliser pleinement les promesses de son nom : il porta le Christ (Christophe) en terre colonisée (Colomb) !

Dès 1493, mais surtout en 1494, avec le Traité de Tordesillas, le Pape Alexandre VI (un Espagnol) confirme le partage du « nouveau monde » entre le Portugal et l’Espagne. Et la colonisation commence : les populations indigènes sont christianisées, mais aussi réduites au servage dans les encomiendas ; des tonnes d’or et d’argent (les mines de Potosí produisent, à elles seules, cinq fois plus d’argent que toute la production européenne) sont ramenées à Séville par les galions espagnols ; les guerres, les maladies et les conditions de travail déciment la population autochtone (elle serait passée de 80 à 10 millions au cours du XVIe siècle) ; la traite des noirs, à laquelle prennent part non seulement les Portugais et les Espagnols, mais aussi les Français, les Anglais et les Hollandais, introduit une main-d’œuvre nouvelle ; des populations d’origine européenne vont y chercher fortune.

Cette « œuvre » coloniale fut légitimée par la christianisation. L’Église, après avoir douté de l’humanité des « indiens » (voir la controverse de Valladolid, où Bartolomé de las Casas plaida leur cause), admit qu’il s’agissait bien d’hommes et de femmes, et, par conséquent, justifia l’entreprise par son devoir de sauver leurs âmes, de lutter contre leur idolâtrie, leur ignorance, leur infantilisme et contre les sacrifices humains ! Ils étaient hommes, c’était entendu, mais d’un niveau inférieur : il y a, pensait-on, des hommes que Dieu à condamnés à rester esclaves, qui sont serviles par nature ! S’ils manifestaient quelque résistance (ce qu’ils ont fait), la guerre ne pouvait être que juste : c’était pour leur bien… Pour ceux que ces arguments ne convainquaient pas, on en invoquait d’autres : le droit de chacun de circuler et de s’établir partout sur la terre, la propriété commune des richesses naturelles (du sol, du sous-sol et de la mer)… Dès le départ, l’Espagne et le Portugal se heurtèrent à la concurrence des Anglais, des Hollandais et des Français, les puissances montantes de l’époque qui, elles aussi, se mirent à chercher une route vers l’Asie, et des territoires pour promouvoir leurs activités commerciales.

L’or et l’argent faciles, provenant du pillage de l’Amérique du Sud, a permis à la noblesse espagnole et portugaise de vivre dans le luxe, en achetant, notamment, des produits fabriqués dans d’autres pays européens et, paradoxalement, chez ses rivaux. La hausse des prix stimula fortement l’économie, surtout anglaise, hollandaise et française. On le sait, Marx a vu dans cette dilapidation, l’origine de ce qu’il appelait « l’accumulation primitive du capital », qui a été l’une des conditions de l’essor du capitalisme industriel, mettant fin à l’hégémonie des Espagnols et des Portugais et consacrant, du même coup, celle des Anglais et des Français.

Après environ trois siècles de résistance contre ces puissances montantes et de lutte contre des rébellions internes à leurs colonies, l’Espagne et le Portugal durent lâcher prise. Des mouvements de décolonisation, conduits par des dirigeants créoles, aidés par des Européens, finirent par l’emporter, et, au début du XIXe siècle (vers 1810-1830), les États latino-américains se constituèrent, et jouirent, au moins formellement, de leur indépendance politique, et de l’aide « protectrice » de leurs nouveaux « amis » (l’Angleterre, la France, et plus tard, les États-Unis).

L’hégémonie de la Grande Bretagne et de la France

Leur rivalité avec les Espagnols et les Portugais mena les Anglais, les Français et les Hollandais, au moins en partie, vers d’autres rivages : le nord du nouveau continent, que l’on appelait maintenant l’Amérique, ainsi que l’Afrique et l’Asie. Ils bourlinguaient depuis longtemps sur toutes les mers du monde, mais n’avaient pas, à proprement parler, installé de colonies. Ils avaient plutôt coutume d’établir des comptoirs, comme l’avaient fait aussi les Portugais, sans pénétrer profondément dans les terres, se limitant à installer des ports et à faire du commerce. Ils confiaient cette activité à des « compagnies à charte » (chaque pays avait la sienne : par exemple les Compagnies des Indes). Bien sûr, les comptoirs constituaient bien une forme de colonisation, mais très limitée, si l’on considère les méthodes des Espagnols en Amérique latine, et celles que pratiqueront ensuite les autres puissances européennes.

En Amérique du Nord, les Français et les Anglais rivalisèrent, entre eux et avec les « Indiens », pendant au moins un siècle (de la moitié du XVIIe jusqu’en 1763), pour s’approprier des territoires. Les Français arrivèrent les premiers : après les expéditions de Jacques Cartier (1534-1536), Samuel de Champlain, le père de la Nouvelle-France, fonda la ville de Québec (1608) et quelques colons commencèrent à s’installer dans la vallée du Saint-Laurent. Leurs commanditaires, cependant, furent déçus : ils cherchaient une route vers l’Asie, des métaux précieux et ils trouvèrent des fourrures, du poisson et un climat plutôt hostile ! Un peu plus bas, les Anglais s’installèrent d’abord en Virginie (1607) et en Nouvelle-Angleterre (1620 : le Mayflower). Un siècle et demi plus tard, ils occupaient de nombreuses colonies, qui se répartissaient sur toute la côte Est du sous-continent et, déjà, à l’intérieur des terres, sur la moitié Est des États-Unis et du Canada actuels. Après quelques décennies de querelles et de guerres locales, les Anglais s’imposèrent et éliminèrent les Français (Traité de Paris, 1763).

Néanmoins, les colons, d’origine anglaise principalement, jugèrent que la pression fiscale exercée par la Couronne britannique était excessive. Ils commencèrent à s’organiser pour revendiquer leur indépendance. Ils l’obtinrent, après plusieurs affrontements violents, et avec l’aide de l’armée française (victoire de Yorktown, 1781). À l’exception du Canada (qui gagna progressivement son autonomie par rapport à l’Angleterre et ne fut vraiment indépendant qu’après la Première Guerre mondiale) et de quelques autres petits territoires, on peut dire qu’au cours des trois premières décennies du XIXe siècle, le continent américain — les États-Unis d’abord, les pays latino-américains ensuite — se libérèrent de la colonisation, au moins formellement (car, dans les faits, les Anglais, principalement, prirent la relève des Espagnols et des Portugais en Amérique Latine). La colonisation se poursuivit donc sous d’autres latitudes : en Asie, en Afrique, et dans le monde arabe, sous l’égide de la Grande-Bretagne, de la France et, secondairement, de quelques autres pays européens.

Les Anglais surtout construisirent un empire colonial énorme : « Vers 1914, alors que le Royaume-Uni compte 45 millions d’habitants, regroupés sur 310 mille kilomètres carrés, il régit le destin d’une Inde peuplée de 322 millions d’habitants et vaste de ses 5 millions de kilomètres carrés, gouverne directement soixante colonies dépendantes, peuplées de 5,2 millions d’habitants dispersés sur plus de 8 millions de kilomètres carrés et conserve des droits étendus dans cinq dominions, où 24 millions d’hommes, la plupart de race blanche, occupent 19 millions de kilomètres carrés » [1]. Cet empire comportait principalement le Canada, l’Inde, l’Australie et pratiquement tout l’Est de l’Afrique (une continuité territoriale s’étendant du nord au sud du continent, de l’Égypte à l’Afrique du Sud). Il s’agrandit encore, après le premier conflit mondial, lorsque certaines possessions coloniales allemandes (Traité de Versailles, 1919) et une partie de l’Empire ottoman furent confiées à la Grande-Bretagne.

Bien que plus modeste, l’empire colonial français fut lui aussi très vaste. En Afrique du Nord, la conquête de l’Algérie, commencée en 1830, se heurta à la résistance du sultan Abd-el-Kader, qui dura jusqu’en 1847 ; la Tunisie devint protectorat en 1883 ; le Maroc, très disputé par les autres puissances, ne le devint qu’en 1912. « En 1914, l’influence française s’étend à l’Afrique du Nord […], à l’Afrique occidentale et à l’Afrique équatoriale placées sous l’autorité de gouverneurs, à l’Indochine (Cochinchine, Annam, Tonkin, Cambodge, Laos) […], à Madagascar, aux Antilles, à l’Océanie et aux comptoirs de l’Inde » [2]. Comme les Britanniques, les Français profitèrent du dépècement de l’empire ottoman et de la fin de la colonisation allemande.

D’autres pays européens participèrent, beaucoup plus modestement, à la colonisation : la Belgique eut le Congo (qu’elle considérait comme sa dixième province, 86 fois plus grand qu’elle !), puis le Ruanda-Urundi ; l’Italie eut la Libye et l’Éthiopie (qu’elle arracha de haute lutte en 1936) ; la Hollande, qui avait participé à la première phase de la colonisation (avec ses compagnies à charte et ses comptoirs), participa aussi à la seconde, avec l’Indonésie et la Guyane ; il en fut de même pour l’Espagne, qui eut une partie du Maroc et du Sahara, et pour le Portugal, qui garda l’Angola, la Mozambique et les Îles du Cap Vert jusqu’en 1974.

La course aux matières premières et aux produits alimentaires était la raison principale de cette seconde phase : le développement du capitalisme industriel en Europe occidentale en avait le plus grand besoin. Mais il fallait aussi trouver des débouchés pour investir des capitaux et des marchés pour les produits de l’industrie. En outre, au tournant du XXe siècle, de nombreux émigrants européens cherchaient à s’installer ailleurs pour fuir le chômage et la pauvreté.

Le régime dit « de l’exclusif » s’imposait : chaque métropole s’assurait le monopole du commerce avec ses colonies. Seuls les Anglais étaient un peu plus souples que les autres dans l’application de cette règle : ils pouvaient se le permettre parce qu’ils craignaient moins la concurrence, étant donné les performances de leurs industries. Déjà, entre colonisateur et colonisé, la division du travail s’appliquait : les colonisés devaient se contenter de produire des matières premières (du coton, par exemple), alors que les métropoles se réservaient les produits manufacturés (comme le tissu). Toute tentative d’une colonie pour produire et vendre des produits finis était systématiquement détruite, par n’importe quel moyen (l’Inde et l’Égypte l’apprirent à leurs dépens), afin d’éviter toute concurrence avec l’industrie européenne.

La justification idéologique de cette seconde étape de l’entreprise coloniale ne se faisait plus tellement au nom de la christianisation (même si cette préoccupation ne fut pas oubliée), mais plutôt au nom de la civilisation moderne : il s’agissait d’apporter la culture et la technologie à des populations arriérées, ignorantes et souvent barbares, et de leur apprendre, (très) progressivement, à se gouverner seules.

L’hégémonie des États-Unis et de l’Union Soviétique

Le régime colonial européen dura jusqu’après la Seconde Guerre mondiale. Celle-ci, en effet, modifia fondamentalement la répartition des cartes de l’hégémonie entre les États : les Soviétiques avaient gagné la guerre sur le front de l’Est et les États-Unis, avec l’aide des Alliés, l’avaient gagnée sur le front de l’Ouest ; tous les autres États, notamment la France, n’avaient plus qu’à reconnaître, modestement, ces faits. La Conférence de Yalta (1945) réunit donc les vainqueurs — Staline, Roosevelt (puis Truman) et Churchill — et confirma l’hégémonie des deux nouvelles puissances.

Fondamentalement, les nouveaux maîtres du monde avaient besoin, pour l’expansion de leur économie, de briser les frontières des marchés exclusifs instaurés par les métropoles coloniales européennes, et de construire des zones d’influence, aussi vastes que possible. Puisqu’ils étaient deux prétendants à vouloir se partager le monde, leur entente initiale n’a pas tardé à se dégrader et fut bientôt remplacée par les relations tendues, que l’on a appelé guerre froide. Ils se partagèrent d’abord l’hégémonie sur les pays européens, qu’ils venaient de libérer du fascisme : un rideau de fer et, à Berlin, un mur séparèrent le monde de l’Est de celui de l’Ouest. L’ingérence était pratique courante. Elle passait par des pressions économiques, politiques et militaires : plus négociées à l’Ouest (le Plan Marshall, les investissements des multinationales, la participation à l’Otan) ; plus imposées et, au besoin, violentes, à l’Est (Pacte de Varsovie, Comecon, interventions à Berlin, Varsovie, Budapest, Prague…).

Dans le « troisième » monde (que l’on commençait à appeler le tiers monde), la constitution de zones d’influence passait par la destruction du système colonial européen. Le but des États-Unis et de l’URSS fut donc de favoriser les indépendances nationales des pays colonisés, comme le voulait déjà, après la Première Guerre mondiale, la Société des Nations, et comme l’avait confirmé, après la Seconde, l’ONU. L’heure était à la décolonisation, et de nombreux dirigeants politiques du tiers monde ont su saisir cette occasion historique. Dès la fin des années 1940, l’Indonésie, l’Inde, la Chine lancèrent le processus de libération nationale, qui fut suivi, dans les années cinquante, par plusieurs autres pays, surtout asiatiques et arabes, et qui se généralisa au cours de la décennie suivante. Parfois, le processus se déroula sans trop de heurts (le cas du Congo belge, par exemple) ; d’autres fois, l’ancienne métropole résista longtemps et il fallu arracher l’indépendance par la lutte armée (le cas de l’Algérie, notamment).

Dans beaucoup de pays du tiers monde, les grandes puissances réussirent à s’allier avec des dirigeants nationaux qui contrôlaient fermement le pouvoir et se situaient clairement dans l’un ou l’autre camp ; parfois cependant, le contrôle du pouvoir resta incertain, passant d’un camp à l’autre, avec des guerres civiles incessantes ; certains encore tentèrent, avec des succès très divers, de rester neutres (le mouvement des non-alignés), de jouer sur la rivalité entre les puissances, avec l’aide des anciennes métropoles.

Il s’ensuivit la mise en place d’un « nouvel ordre politique et économique international ». On a dit de cet ordre qu’il était néocolonial, parce que, dans beaucoup de cas, l’indépendance des nouveaux États était plus formelle que réelle. Même si le discours disait exactement le contraire, le système reposait, en effet, sur l’ingérence, dont le but était de mettre au pouvoir des « amis », et de les aider à s’y maintenir (notamment par une coopération militaro-industrielle), en éliminant les forces contraires. Outre l’ingérence politique, cet ordre reposait aussi sur l’endoctrinement idéologique et, bien entendu, sur la dépendance économique.

L’endoctrinement consistait à convaincre les populations de ces nouvelles nations de la légitimité de cet ordre. Après avoir voulu les christianiser, on a voulu les civiliser, et voici que maintenant, on voulait les développer, c’est-à-dire les industrialiser, en les modernisant. Mais, pour atteindre ce but, chaque camp imposait sa méthode, son modèle : le capitalisme versus le communisme. Les courants d’opposition étaient étroitement surveillés par des services de sécurité (aidés soit par la CIA, soit par le KGB), et plus ou moins durement réprimés.

Malgré les beaux discours sur le développement et l’industrialisation, la dépendance économique a été généralement maintenue par les grandes puissances, avec l’aide de leurs « complices » locaux souvent corrompus. Rares sont les États qui ont réussi à y échapper : il fallait, pour cela, des circonstances exceptionnelles, comme celles que connaissent la Corée du Sud ou Taiwan, à cause de leur position géostratégique. La coopération, même quand elle a été conçue et réalisée avec les meilleures intentions, n’a pas suffi à relever un tel défi. On peut même penser qu’une partie de cette aide (pas toute, heureusement) a surtout servi à huiler les engrenages de ce système, et ce, de plusieurs manières : soit en facilitant les transferts du Sud vers le Nord (pour rembourser les dettes, pour rapatrier des bénéfices, pour importer des produits manufacturés) ; soit en ouvrant la voie aux investissements des multinationales ; soit encore en favorisant le maintien au pouvoir de dirigeants locaux complices (dépenses de répression, de prestige) ou même, en s’en servant pour les corrompre. Ce n’est donc pas sans raison que l’on a dit de cet impérialisme qu’il était « néocolonial » : il reprenait et poursuivait, ce qui avait fait l’essence du colonialisme.

Certains s’étonneront de nous voir traiter de la même manière la domination des États-Unis et celle de l’URSS. C’est que, même si chaque puissance avait évidemment sa manière de mener ses relations avec les nouveaux États, l’idée centrale était la même : constituer, grâce à une ingérence politique et militaire, une zone d’influence, économiquement exploitable et/ou stratégiquement utile, en maintenant dans la dépendance des gouvernements et des peuples étrangers. Que les uns aient fait cela au nom du capitalisme et les autres au nom du communisme n’y change, tout compte fait, pas grand-chose !

La domination des grandes organisations supranationales

Le système néocolonial que nous venons de décrire est encore bien vivant. Pourtant, depuis la fin de l’empire soviétique, il est en train de changer suffisamment pour que l’on puisse déjà augurer de la mise en place d’un nouvel ordre politique et économique mondial. Voyons cela de plus près.
Après quarante ans de rivalité, de guerres indirectes, l’URSS s’effondre, les États-Unis triomphent, et du même coup, ils imposent au monde entier la légitimité de leur modèle, le capitalisme néolibéral. Toutefois, pendant la même période, beaucoup d’autres choses ont changé, qui concernent notre propos. Nous observons trois mouvements de fond.

• Premier mouvement : l’organisation d’un système dans lequel les acteurs qui exercent l’hégémonie ne sont plus (ou en tout cas, plus seulement) des États, où la base territoriale d’exercice de l’hégémonie n’est plus la nation et où le droit d’ingérence est de plus en plus reconnu. Beaucoup d’organisations internationales (les Nations Unies et toutes les instances qui en dérivent ; le FMI ; la Banque mondiale ; l’OMC ; les unions économiques et politiques régionales, etc.), cherchent à imposer leurs décisions à toutes les nations du monde ou, tout au moins, à une grande partie d’entre elles. Ces organisations cherchent à faire prendre aux États nationaux des engagements qu’ils doivent respecter (même s’ils se font parfois tirer l’oreille) et qui réduisent leur autonomie de décision : après d’innombrables tractations, ils ont signé une multitude de chartes, d’accords, de règlements… Progressivement, un droit et une jurisprudence se constituent ; des tribunaux internationaux interviennent dans les affaires intérieures des États nationaux et prononcent des jugements, des condamnations auxquelles ceux-ci sont obligés de se plier. Peu à peu – avec peine il est vrai, car c’est sans doute le niveau le plus difficile –, on observe des tentatives visant à mettre en place une force militaire agissant au niveau mondial.

• Second mouvement : le phénomène de mondialisation des échanges économiques, selon la logique néolibérale. Les barrières économiques qui protégeaient les nations s’affaiblissent ou tendent à disparaître ; le commerce international s’accroît ; les investissements directs étrangers sont en pleine expansion ; le volume des transactions financières augmente de façon effrénée ; les coûts de transport se réduisent de plus en plus ; les nouvelles technologies dans le domaine des communications se diffusent partout ; les informations circulent avec une très grande fluidité sur toute la surface du globe…

• Troisième mouvement : le déplacement vers les pays du Sud de certaines des activités du capitalisme industriel. On peut penser que ce déplacement est une des conséquences du passage des pays du Nord à une nouvelle étape du développement technologique et économique. En effet, leur nouveau modèle repose plus sur l’accumulation de profits commerciaux que sur l’extraction de la plus-value du travail, du moins, celle de leurs propres travailleurs. Il est donc vital que cette plus-value salariée soit produite ailleurs. Du coup, les pays du Sud et de l’Est sont invités, par les grandes organisations du pilotage économique mondial, à s’industrialiser. Quelques-uns semblent être en bonne voie : la Russie, certains anciens satellites de l’URSS, les « dragons » asiatiques, la Chine, l’Inde, le Brésil et certains pays d’Amérique du Sud ou du Moyen-Orient. Pour piloter cette évolution – entendez, pour imposer cette nouvelle division du travail –, il n’y a plus qu’un seul modèle : le néolibéralisme, installé dans les pays dépendants à grands coups d’ajustements structurels.

Ces trois mouvements essentiels indiquent clairement, nous semble-t-il, qu’un nouveau mode d’exercice de l’hégémonie est en train de se mettre en place. Il ne repose plus sur la base territoriale des nations, mais bien sur des réseaux d’échange d’informations et de capitaux, contrôlés par des organisations internationales et par les États les plus puissants (G8). Quant aux légitimations idéologiques, elles suivent cette évolution. Après la christianisation, la civilisation et le développement, c’est maintenant au nom de la lutte contre la pauvreté et contre le terrorisme que les pays hégémoniques prétendent imposer leurs vues. Le développement est peu à peu remplacé par l’aide alimentaire, et le terrorisme prend la place du communisme pour former le nouvel « axe du mal ». Ainsi, quand on bombarde l’Afghanistan pour en chasser les Talibans, des avions y déversent aussi des rations alimentaires !

De la même manière que, jadis, le Nord avait intérêt, pour mieux justifier le colonialisme, à croire et à faire croire à la répugnante impiété et à la monstrueuse barbarie des peuples du Sud, aujourd’hui il a intérêt à croire et à faire croire que le Sud constitue pour le Nord une épouvantable menace terroriste. Après avoir inspiré la pitié, voici que les pauvres font peur : on ne peut pas laisser traîner des « armes de destruction massive » en Irak, ni laisser l’Iran ou la Corée du Nord fabriquer tranquillement la bombe atomique ! Ainsi, au nom de la répression, soigneusement légitimée, dudit terrorisme, les États impérialistes peuvent, en invoquant la démocratie et les droits de l’homme, justifier toutes leurs ingérences dans les pays du Sud. Et, du même coup, créer dans le Sud exactement les conditions qui… y font progresser plus de terrorisme encore ! Car il est évident que la manière dont les Etats-Unis, la Russie, la Chine ou Israël gèrent la menace terroriste ne fait que la renforcer en Afghanistan ou en Irak, en Tchétchénie, au Tibet ou en Palestine ! Remarquable mystification idéologique (on cache des intérêts sordides derrière des idéaux pleinement légitimes) et cercle terriblement vicieux : les États hégémoniques entretiennent ou accentuent un phénomène néfaste, qu’ils ont intérêt à maintenir pour pouvoir le réprimer, et du même coup, justifier leurs ingérences à finalités économiques ou politiques. Cependant, rien de nouveau sous le soleil : les Espagnols et les Portugais faisaient déjà cela avec le « nouveau Monde » !
par Guy Bajoit

[1] Encyclopaedia Universalis, vol. 4, 1993 p. 547.

[2] Encyclopaedia Universalis, vol. 9, 1993, p. 846.

Source: Iteco.be

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Le Front Polisario traduit en justice le Fonds néo-zélandais pour les importations illégales de phosphate sahraoui

La représentation du Front Polisario en Australie et en Nouvelle-Zélande a déclaré jeudi que le Front avait engagé une action en justice devant la Haute Cour de Nouvelle-Zélande contre le Fonds de pension de retraite néo-zélandais, pour son investissement dans les importations de phosphates extraits et importés illégalement des territoires occupés du Sahara occidental.

Le Front Polisario a « entamé une action en justice dans le cadre de ses efforts pour arrêter les importations illégales de phosphate naturel du Sahara occidental occupé vers la Nouvelle-Zélande », a rapporté l’Agence SPS, soulignant que « certaines décisions d’investissement néo-zélandaises soutiennent l’occupation illégale continue du Maroc du Sahara occidental, ainsi que l’extraction et l’exportation illégales de phosphate sahraoui ».

Le représentant sahraoui en Australie et en Nouvelle-Zélande, Kamal Fadel, a déclaré que « le peuple sahraoui est déterminé à protéger ses ressources
naturelles par tous les moyens disponibles. Cette action en justice est un message à tous ceux qui sont impliqués dans l’exploitation illégales des ressources naturelles sahraouies ».

Cette demande fait suite à une action en justice couronnée de succès par le Front Polisario à l’étranger, y compris la saisie et la vente d’une cargaison de phosphate du Sahara occidental en 2017 qui transitait par l’Afrique du Sud en route vers la Nouvelle-Zélande. Dans cette affaire, la Haute Cour d’Afrique du Sud a conclu que le gouvernement sahraoui était propriétaire de la cargaison et a observé que le Sahara occidental était illégalement occupé par le Maroc par le recours à la force armée.

L’Organisation des Nations Unies ne reconnaît pas le Maroc en tant que puissance souveraine ou administrante du Sahara occidental et, en 1975, la
Cour internationale de Justice a conclu que le Maroc n’avait pas de liens historiques avec le Sahara occidental susceptibles de soutenir une revendication de souveraineté, a rappelé le Front Polisario dans son communiqué.

« Le Front Polisario a été reconnu par les Nations Unies comme le représentant légitime du peuple sahraoui du Sahara occidental. En 1976, le Polisario a proclamé la République arabe sahraouie démocratique (RASD) comme gouvernement légitime représentant le peuple sahraoui. En 1982, la RASD est devenue membre de l’Organisation de l’unité africaine, pour devenir en 2001 membre fondateur de l’Union africaine », a-t-on encore
soutenu.

Située dans la zone du Sahara occidental occupée par le Maroc, se trouve une mine de phosphate à Bou Craa. Tout au long de l’occupation marocaine,
le phosphate a été extrait à Bou Craa et exporté via le port d’El-Ayoune (également dans le territoire occupé) par Phosphates de Boucraa, qui appartient à la famille royale marocaine Le Front Polisario a expliqué que l’extraction et l’exportation annuelles de phosphate incitent le Maroc à poursuivre son occupation illégale du Sahara occidental et à diriger une économie en extension de son annexion du territoire. « Cela encourage le Maroc à continuer de retarder un référendum sous les auspices des Nations Unies qui permettrait au Sahara occidental d’affirmer sa souveraineté indépendante », a souligné le Front Polisario.

Au cours de la dernière décennie, un certain nombre d’entreprises dans le monde ont cessé d’importer du phosphate sahraoui pour des raisons éthiques, et des pays comme l’Australie, le Canada et les Etats-Unis n’importent plus de phosphate du territoire occupé.

Cependant, souligne le Front Polisario, les sociétés néo-zélandaises « Ballance Agri-Nutrients Limited (Ballance) et Ravensdown Limited (Ravensdown) » continuent d’acheter et d’importer illégalement du phosphate sahraoui et, par leur intermédiaire, la Nouvelle-Zélande est le seul importateur restant de phosphate sahraoui dans le monde occidental.

APS

Tags : Sahara Occidental, Maroc, ressources naturelles, Front Polisario, Nouvelle Zélande, Fonds de pension de retraite néo-zélandais,

Pourquoi cette déclaration de l’UE continue à disparaître ?

Une clarification de la Commission Européenne sur l’étiquetage des produits du Sahara Occidental a été publiée, puis supprimée, puis publiée à nouveau et a été supprimée à nouveau des sites Internet de l’UE.

Mis à jour le: 24.02 – 2020 16:41Imprimez cette page
« Nous invitons la Commission européenne à publier sa déclaration pour la troisième fois », a déclaré Sara Eyckmans de WSRW.

Le 5 février 2020, la Commission européenne a annoncé que les produits du Sahara Occidental devraient être étiquetés en conséquence. Mais environ 24 heures plus tard, toutes les traces de cette déclaration ont été supprimées des sites Internet de l’UE.

Le 19 février, la déclaration de la Commission a été publiée à nouveau, sans aucun changement. Le texte était identique à celui du 5 février (traduction non officielle) :

« Tous les produits importés, y compris ceux originaires du Sahara Occidental, doivent se conformer à la législation pertinente, y compris l’obligation de fournir des informations exactes et non trompeuses sur le pays d’origine ou la provenance de ces produits, qui dans ce cas doit donc être « Sahara Occidental ».

Le 21 février, dans cette suite d’événements des plus étranges, cette déclaration a de nouveau disparu du site Internet du Parlement européen.

« C’est indéchiffrable. La raison pourrait être le fait d’un web-technicien impatient de partir en week-end, jusqu’à la pression de Rabat qui ne sera certainement pas satisfait de cette reconnaissance claire que le Sahara Occidental n’est pas le Maroc. Dans les deux cas, nous attendons avec impatience des éclaircissements de la Commission, à la fois sur cette tournure des événements et sur la question de l’étiquetage », conclut Eyckmans.

Source : WSRW, 24 fév 2020

Tags : Sahara Occidental, Union Européenne, Comisión Européenne,  ressources naturelles, Maroc, étiquetage,