La nouvelle Algérie et le conflit du Sahara Occidental
Rien n’a filtré sur son programme : La visite de Ross entourée de secret
LARBI BOUHAMIDA
Libération, 31 Octobre 2012
Sahara Occidental : Le retour en force de Christopher Ross
L’envoyé spécial des Nations unies pour le Sahara Occidental Christopher Ross fait son come-back dans la région. A première vue, le retour du diplomate américain missionné par les Nations unies ne devrait pas provoquer des changements ni une évolution significative dans ce vieux dossier de décolonisation et dont la genèse remonte à 1975.
Les parties belligérantes campent toujours sur leurs positions respectives. Le Maroc défend comme avant le principe d’une «large autonomie» des territoires qu’il dispute au Front Polisario tandis que les indépendantistes sahraouis ne veulent rien d’autre qu’un «référendum sur l’autodétermination du peuple sahraoui». A Rabat, lundi dernier, le roi Mohammed VI a, en effet, rappelé cette réalité en déclarant après l’audience accordée à M. Ross que son pays considère que le conflit sahraoui est «artificiel» et qu’il demeure «attaché à sa proposition d’une large autonomie».
Dans une longue tribune publiée vendredi dernier par le journal El Pais, le représentant du Front Polisario auprès de l’ONU, Ahmed Boukhari, a, pour sa part, expliqué que «le référendum pour le peuple sahraoui doit être au centre des négociations».
«La troisième voie» proposée par Rabat, a écrit le diplomate sahraoui, «n’est en fait qu’une solution unilatérale, conçue pour légitimer un butin de guerre. Son péché capital réside dans l’hypothèse irréaliste que la communauté internationale et le Polisario accepteraient, d’emblée et d’évidence, son principe de base, c’est-à-dire la souveraineté marocaine unilatéralement proclamée sur le Sahara Occidental».
Rien de nouveau, donc, sous le soleil du Sahara Occidental sous contrôle marocain ? On pourrait être tenté de le croire. Mais le retour de Christopher Ross dans la région, après son épreuve avec le Maroc qui avait commis une faute diplomatique grave en le rabrouant en mai dernier après une résolution critique du Conseil de sécurité, s’effectue cette fois-ci avec le soutien du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, et de l’appui ferme de Washington où il jouit d’un grand respect auprès du département d’Etat et de la diplomatie américaine. Cet atout n’est pas anodin aux yeux de ceux qui ont appris que les nuances à propos du conflit sahraoui sont importantes à décrypter. Il permet à M. Ross de reprendre en main le dossier dans une position de force qui le rend plus persuasif face aux belligérants marocains et sahraouis.
Aucune des deux parties, soulignait hier un observateur avisé, ne peut désormais aller dans la confrontation avec l’émissaire onusien. En particulier où il tenterait cette fois-ci de faire bouger les lignes et de sortir du statuquo dans lequel le dossier sahraoui s’enlise depuis cinq ans. «Je suis venu faire le point sur cinq ans de négociations», a déclaré à ce propos M. Ross. Cette précision n’est pas anodine et indique bien que sa volonté, à l’issue de la mission qu’il effectue actuellement et qui devrait se terminer en Europe le 15 novembre prochain avant un rapport qui devrait être publié à la fin du même mois, est de dégeler le dossier. Mais dans quelle direction ? Si l’on s’en tient aux positions affirmées de Paris et aux préférences de Washington, et qui ne semblent avoir été contredites depuis, cela devrait se faire dans le sens des thèses marocaines de «large autonomie».
Il reste que depuis le printemps dernier et depuis un mois principalement beaucoup de choses se sont produites dans la région. Le Sahel et la crise malienne peuvent inciter le département d’Etat et le Quai d’Orsay à déplacer le curseur de leurs priorités vers une solution rapide et efficace à la crise au Sahel. L’intervention annoncée au nord du Mali peut alors faire apparaître de nouveaux éléments importants qui peuvent contribuer une nouvelle fois au gel du dossier. Il ne sera pas forcément au bénéfice du Maroc.
Pourquoi maintenant ?
Le destin du Sahara occidental entre les mains de Ross
![](https://maghrebnewsblog.files.wordpress.com/2020/03/ada04-minurso-mapa.jpg)
L’envoyé personnel du Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies pour le Sahara occidental, Christopher Ross, qui se trouve depuis samedi au Maroc dans le cadre d’une tournée en Afrique du Nord et en Europe a rencontré des personnalités marocaines non gouvernementales pour recueillir leurs points de vue sur le conflit du Sahara occidental.
Dans une déclaration à la presse, à l’issue de cet entretien, Ross a indiqué que son séjour avait pour but de faire le point sur les cinq dernières années de négociations directes et de recueillir des idées sur les meilleures façons de réaliser un progrès réel dans le processus de négociation. Il a exprimé la volonté de l’ONU d’aider à parvenir à une solution politique, juste, durable et mutuellement acceptable.
Il a également annoncé qu’à son retour à New York, il transmettra ses conclusions au secrétaire général des Nations unies et présentera son rapport au conseil de sécurité vers fin novembre. Outre sa rencontre avec le roi du Maroc, l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU a eu une série d’entretiens politiques à Rabat avec les autorités marocaines et des personnalités non gouvernementales sur le conflit du Sahara occidental.
Pour rappel, l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU devait se rendre dans la région à la mi-mai dernier avant que le gouvernement marocain ne décide, unilatéralement, de lui retirer sa confiance, et ce, quelques semaines après la publication d’un rapport de l’ONU qui avait critiqué les autorités marocaines.
Dans ce rapport adressé en avril dernier au Conseil de sécurité, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon avait dénoncé les obstacles posés par le Maroc à la Mission des Nations unies pour l’organisation du référendum au Sahara occidental (MINURSO), en citant les entraves qui empêchent cette dernière d’accomplir pleinement sa mission et de s’acquitter de son mandat de manière crédible dans les territoires sahraouis occupés.
» La MINURSO n’est pas dans la capacité d’exercer pleinement ses fonctions de surveillance de maintien de la paix et d’observation, et ne dispose pas de toute l’autorité lui permettant d’empêcher l’érosion de son rôle », avait affirmé Ban Ki-moon.
Suite de la décision marocaine de retirer unilatéralement sa confiance à M. Ross, le secrétaire général de l’ONU avait à plusieurs reprises réitéré sa confiance et son total appui à son envoyé personnel au Sahara occidental, rappelle-t-on.
Le référendum doit être au centre des négociations
Le représentant du Front Polisario auprès de l’ONU, Ahmed Boukhari, a indiqué de son côté, que le référendum pour le peuple sahraoui « doit être au centre des négociations » lors de la tournée de l’envoyé personnel du Secrétaire général de l’Onu au Sahara occidental, Christopher Ross, dans la région et en Europe, a estimé lundi l’agence de presse sahraouie (SPS).
» La tournée de Ross aura pour but, selon l’Onu, d’échanger les points de vue entre les acteurs principaux sur la manière d’accélérer le processus afin de parvenir à la réalisation de son principal objectif identifié par les résolutions successives du Conseil de sécurité à savoir une solution politique mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara Occidental « , a déclaré Boukhari.
Le CNASPS s’organise à partir d’aujourd’hui en soutien au peuple sahraoui
Le Comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui (CNASPS) organisera du 31 au 2 novembre une série d’activités pour réaffirmer son soutien au peuple sahraoui en lutte et dénoncer les violations massives » des droits de l’Homme dans les territoires occupés du Sahara occidental, a déclaré lundi le président du CNASPS, M. Mahrez Lamari.
Le CNASPS s’honore d’accueillir à Alger une série d’activités pour commémorer l’histoire anti-coloniale de la révolution populaire algérienne par fidélité aux principes historiques hérités de « la glorieuse révolution du 1er novembre 1954, à la noblesse de l’engagement, la détermination et de la générosité de l’Algérie d’un million et demi de chouhadas morts pour la liberté, la dignité, l’honneur et la réhabilitation dans un combat certes national mais à dimension et au bénéfice de notre continent africain.
» Ces activités seront une tribune pour nos honorables invités qui participeront à cette rencontre pour réaffirmer leur soutien au peuple sahraoui en lutte et dénoncer les violations massives des droits de l’Homme par l’administration marocaine d’occupation, violations vérifiées et établies par les institutions internationales « , a déclaré à l’APS Lamari.
Pour lui, cette rencontre sera une occasion d’exiger de l’ONU que soit organisé rapidement un référendum honnête et transparent comme réclamé par les multiples résolutions du Conseil de sécurité.
» Un message fort sera délivré par la société civile et le mouvement citoyen du monde épris de paix et de justice et attaché aux principes du droit des peuples de disposer d’eux-même. Surtout que Cristopher Ross visite la région, donc la responsabilité des Nations unies reste entière et complète jusqu’au parachèvement de la décolonisation du Sahara occidental « , a affirmé Lamari.