Un ex-prisonnier marocain devient le héros du Maroc

Comment l’ex-prisonnier Karim d’Utrecht est devenu le héros du Maroc

UTILE AU TEMPS DE LA CORONA

Dans une jeep pleine de cartables, Karim Boulidam (33 ans) d’Utrecht traverse le Maroc avec son ami Jamal (33 ans). Le duo d’Utrecht distribue environ 150 cartables par jour aux enfants. « Nous rendons ces enfants super heureux, soulageons les parents et aidons l’économie locale. »

« Attends, je vais mettre la voiture de côté pendant un moment. » Il s’avère qu’il n’est pas si facile de raconter son histoire via un téléphone portable en roulant sur un chemin de terre au Maroc. Depuis Al Hoceima, ville portuaire du nord du Maroc, Karim est en route pour les montagnes de l’Atlas où il espère à nouveau ravir un certain nombre d’enfants avec un cartable. Il avait déjà fait cela dans les montagnes près de la ville côtière, où il était initialement en vacances avec sa famille.

Ennui

Au bout d’un mois, l’ennui s’est installé, dit-il. « La plupart des Marocains européens restent chez eux à cause de la couronne, il n’y avait donc pas grand chose à faire. » Karim a décidé de se rendre utile et a acheté 20 cartables dans un magasin local. Avec un ami, il est allé dans les montagnes du Rif, où il a distribué les sacs aux écoliers. Il a posté une vidéo sur Instagram et ce fut un grand succès. «J’ai immédiatement reçu beaucoup de messages de personnes qui voulaient m’aider et donner de l’argent», dit Karim avec enthousiasme.

24 heures après la diffusion de sa vidéo sur les réseaux sociaux, 60 donateurs s’étaient déjà inscrits. « Au bout de deux jours, j’ai dû appeler de l’aide, car je ne pouvais pas y faire face par moi-même. » Il a fondé la fondation RizQ, qui travaille contre la pauvreté en général, pour rendre disponible un numéro de compte pour les dons. De plus, il était assisté d’un ami, Youssef Amakran, un voyageur du monde qui partage ses expériences via Facebook et Instagram. « Les paiements via Tikkies n’étaient bientôt plus possibles pour moi. » Les dons pour le projet caritatif provenaient principalement des Pays-Bas, mais aussi de Belgique et de France, d’importants dons ont été faits.

Karim distribuait des cartables aux enfants. Il y a environ six ans, il a acheté un gros lot aux Pays-Bas qu’il avait expédié au Maroc. Il s’est inspiré de la politicienne Fatima Talbi, décédée l’année dernière, qui collectait chaque année des cartables pour orphelins au Maroc dans le cadre du projet «Chaque enfant un cartable».

Karim a été touché par cette initiative et, avec Fatima, l’a étendue à d’autres endroits au Maroc. En 2014, il a distribué 8000 cartables à plusieurs amis, en 2015 il y en avait déjà 22000. Et maintenant, en partie par ennui, mais surtout par engagement avec son pays d’origine, Karim choisit de relancer cette campagne.

Beaucoup de Marocains ont autre chose en tête que d’acheter des cartables pour leurs enfants, dit Karim: «Ils pensent: nous n’avions pas ces sacs avant, pourquoi nos enfants en auraient-ils besoin? Ces fournitures scolaires peuvent également être stockées dans un sac en plastique ou un sac en toile de jute. Et les cartables sont assez chers, ils peuvent les manger pendant deux semaines. « 

Histoire différente

Pour les enfants, c’est une histoire complètement différente: «S’ils voient que quelqu’un de la classe a un joli sac, ils veulent en avoir un eux-mêmes. Sinon, ils n’ont pas du tout envie d’aller à l’école.

Karim dépense environ 18 euros par cartable. Par son action, il soutient non seulement les parents et les enfants, mais aussi l’économie locale. Les petits entrepreneurs sont gravement touchés par le fait que les Marocains européens restent à l’écart à cause de la couronne. «Nous avons déjà aidé vingt magasins en cette période de crise. Ils ont dû passer des commandes supplémentaires pour nous », dit Karim.

Au total, il a maintenant distribué environ 2 500 sacs dans les écoles du Maroc, et il y en aura au moins 2 000 de plus, assure-t-il. Selon l’âge, les cartables sont remplis d’étuis à crayons, stylos, gommes à effacer, crayons, crayons de couleur, peinture, tableaux noirs et craie. Les tout-petits reçoivent un gobelet, une boîte à lunch et un tableau noir, les enfants plus âgés peuvent compter sur des feutres et des ciseaux.

Bienfaiteurs

Quelle est la réponse aux deux bienfaiteurs inconnus? « Nous nous rendons toujours visite la veille pour informer les enfants et la direction. » Tôt le lendemain, Karim conduit dans les montagnes avec son compagnon. «Certains enfants sont surpris et un peu méfiants. Ils ne nous connaissent pas non plus, bien sûr. D’autres sautent en l’air, ouvrent immédiatement le sac et se mettent à courir. Que Karim parle leur langue est un gros avantage. «Mais cela ne s’applique pas au sud du Maroc. Heureusement, mon ami connaît cette langue. Et sinon, nous montrons simplement les sacs, alors ils comprendront!

Sporadiquement, le contact est plus difficile. Dans une mise à jour récente sur Facebook, Karim dit que lui et son ami se sont vu refuser l’entrée dans un village de montagne de l’Atlas. Les villageois méfiants craignaient que des enfants soient enlevés ou violés. Cela s’était déjà produit dans un autre village, ont-ils dit aux deux garçons. Il dit via WhatsApp que le froid est à l’improviste: « Nous avons eu une bonne conversation avec ces gens et maintenant nous sommes heureusement les bienvenus. »

Chaussures cassées

Le projet avec les cartables a depuis été élargi. Les gens peuvent également faire un don pour acheter des vêtements et des chaussures d’hiver. «Nous avons vu de nombreux enfants dans les montagnes marcher avec des chaussures cassées, des tongs ou des pieds nus. Même maintenant, les dons affluent, nous avons rapidement atteint 12 000 euros.

Karim prévoit de travailler sur ce projet au moins jusqu’à la fin du mois d’octobre. Karim tire en grande partie la motivation du projet de son expérience. «Mes parents ont fui le Maroc à cause de la pauvreté. Mon père s’est également promené ici pieds nus. J’aurais pu être un tel enfant moi-même. J’ai eu la chance d’avoir grandi en Europe. Mais je n’oublierai jamais d’où je viens.

Une autre partie de son passé a également incité Karim à faire quelque chose de bien pour les autres. Dans sa jeunesse, il a été détenu pendant environ quatre ans. Après sa libération, il s’est consacré aux anciens détenus par le biais du magazine Made in Prison et a commencé à enseigner l’éducation dans les écoles pour garder les jeunes sur la bonne voie. «J’ai fait beaucoup de mauvaises choses», dit-il. « J’en ai pris beaucoup et maintenant je veux donner quelque chose en retour. » Le projet avec les cartables s’intègre parfaitement dans sa vision actuelle de la vie. «Faire quelque chose de bien me donne une grande satisfaction et j’obtiens beaucoup de gratitude en retour. Cela approfondit ma vie. Mais je le fais aussi par amour pour le pays et pour mes parents.

Règles de corona strictes

Les mesures Corona s’appliquent également au Maroc. «Les règles sont assez strictes ici. La moitié des enfants vont à l’école le matin, l’autre moitié l’après-midi. Ils ne sont pas autorisés à s’asseoir les uns à côté des autres et ils portent tous une casquette en classe. Certaines écoles réagissent même un peu effrayées. «Ils veulent que nous nettoyions les sacs avant de les distribuer. Et cette distance de 1,5 mètre est difficile à maintenir lorsque les enfants viennent à vous. Le strict respect des règles varie d’une école à l’autre. « Dans d’autres endroits, ils ne sont pas difficiles et ils sont un peu plus détendus. »

Source: AD.NL, 22 oct 2020 (traduction automatique)

Tags : Maroc, Pays Bas, RME, cartables scolaires, élèves, écoles, pauvreté,

Le Soudan et l’Algérie, nouveaux alliés des Etats-Unis ?

Washington veut passer par Khartoum pour convaincre les pays arabes de normaliser leurs relations avec Israël, et par Alger pour lutter contre le terrorisme sur le continent.

L’Afrique revient dans le viseur des Etats-Unis. Alors que le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, est engagé dans une course contre la montre pour dénouer le contentieux de son pays avec le Soudan avant l’élection présidentielle aux Etats-Unis, le chef du Commandement militaire américain en Afrique (Africom), Stephen Townsend, s’est rendu mercredi 23 septembre en visite en Algérie.

« Les Etats-Unis ont une occasion qui ne se présente qu’une fois d’assurer enfin une compensation aux victimes des attentats terroristes de 1998 menés par Al-Qaïda contre les ambassades des Etats-Unis au Kenya et en Tanzanie », a écrit Mike Pompeo dans une lettre à des sénateurs dont l’AFP a eu connaissance. « Nous avons aussi une fenêtre unique et étroite pour soutenir le gouvernement de transition dirigé par un civil au Soudan, qui s’est enfin débarrassé de la dictature islamiste », a-t-il ajouté.

Au cœur de ce dossier, l’inscription du Soudan dans la liste noire américaine des Etats soutenant le terrorisme. Cette sanction, synonyme d’entrave aux investissements pour le pays, remonte à 1993. La crise s’est envenimée avec les attentats de 1998, qui avaient fait plus de 200 morts. Le Soudan d’Omar al-Bachir était alors devenu un paria pour avoir accueilli le chef d’Al-Qaïda, Oussama ben Laden.

Ces dernières années, Washington a changé de ton lorsque l’ex-autocrate soudanais a commencé à coopérer dans la lutte antiterroriste et joué le jeu de la paix au Soudan du Sud. Les Etats-Unis ont renoué avec Khartoum, déjà sous l’ex-président démocrate Barack Obama, puis engagé un dialogue pour retirer le Soudan de leur liste noire. La révolution qui a balayé Omar al-Bachir, en 2019, n’a fait qu’accélérer le mouvement. Depuis, Mike Pompeo ne ménage pas son soutien au premier ministre de transition, Abdallah Hamdok.

Mais les négociations achoppaient sur l’épineux dossier judiciaire de l’indemnisation des familles des victimes des attaques de 1998. Le secrétaire d’Etat pense désormais qu’une solution est en vue et en a fait « une de ses premières priorités », a dit à l’AFP une porte-parole de la diplomatie américaine. Son « plan » prévoit le versement par Khartoum, sur un compte bloqué, de fonds qui ne seront versés que sous conditions aux Etats-Unis pour indemniser les plaignants. Des médias américains ont cité le montant total de 335 millions de dollars (environ 287 millions d’euros).

Parmi ces conditions, le retrait du Soudan de la liste noire antiterroriste et l’adoption d’un texte de loi proclamant la « paix légale » avec Khartoum, pour écarter le risque de nouvelles poursuites. Dans son courrier, Mike Pompeo fait pression sur le Congrès américain afin qu’il vote cette disposition. « Cette loi doit entrer en vigueur mi-octobre au plus tard afin de garantir le paiement des indemnisations aux victimes dès que le Soudan sera retiré de la liste des Etats soutenant le terrorisme », ce qui interviendra « très probablement » d’ici fin octobre, a-t-il expliqué. C’est-à-dire avant l’élection présidentielle américaine du 3 novembre. Au sein du gouvernement, on s’inquiète toutefois d’une résistance de quelques influents sénateurs démocrates.

Pourquoi un tel empressement de la part d’un secrétaire d’Etat par ailleurs peu intéressé par l’Afrique ? C’est probablement au nom d’un autre dossier cher à l’administration Trump. Mike Pompeo s’est rendu fin août à Khartoum lors d’une tournée pour convaincre des pays arabes de normaliser leurs relations avec Israël. Le camp du président-candidat veut capitaliser sur les accords historiques conclus sous son égide par l’Etat hébreu avec les Emirats arabes unis et Bahreïn – un succès qui manquait à son bilan diplomatique, qui plus est favorable aux intérêts israéliens et donc susceptible de galvaniser son électorat évangélique.

Abdallah Hamdok avait semblé doucher les espoirs américains, en affirmant qu’il n’avait « pas de mandat » pour trancher cette question sensible. Mais les tractations se poursuivent en coulisses, avec des positions peut-être moins figées. Le général Abdel Fattah al-Burhane, chef du Conseil souverain au Soudan, qui avait rencontré en février le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a eu trois jours de pourparlers cette semaine à Abou Dhabi avec une délégation américaine. Au menu, bien entendu, la sortie de la liste noire, mais aussi, selon l’agence officielle soudanaise Suna, « l’avenir de la paix arabo-israélienne » et « le rôle que le Soudan devrait jouer dans la réalisation de cette paix ».

En parallèle à ce front, mais plus au nord sur le continent, le général Stephen Townsend, chef de l’Africom, a effectué mercredi une visite à Alger dans un contexte de tensions régionales, en particulier en Libye et au Mali, a-t-on appris de source officielle. Le général Townsend, « accompagné de membres de l’ambassade américaine en Algérie », a été reçu par le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, précise un communiqué de la présidence algérienne, qui ne divulgue pas la teneur des discussions. Le gradé de haut rang américain a également eu des entretiens avec le chef d’état-major de l’armée algérienne, le général Saïd Chanegriha, et le ministre des affaires étrangères, Sabri Boukadoum.

« Nous avons beaucoup à apprendre et à partager les uns avec les autres. Renforcer cette relation est très important pour nous », a expliqué le chef de l’Africom, cité dans un communiqué de l’ambassade des Etats-Unis en Algérie. « L’Algérie est un partenaire engagé dans la lutte contre le terrorisme. Affaiblir les organisations extrémistes violentes, les activités malveillantes et renforcer la stabilité régionale est une nécessité mutuelle », a plaidé le général Townsend. Il s’agissait de la première visite en Algérie d’un commandant de l’Africom depuis 2018.

L’Algérie, qui craint les risques d’instabilité à ses frontières, s’efforce de réactiver son rôle sur la scène diplomatique régionale et tente d’endosser un rôle de médiateur dans les crises en Libye et au Mali.

Source : Decryptnews.com, 27 sept 2020

Tags : Afrique, Armement, Économie, terrorisme, sécurité, sanctions, sahel, pauvreté, négociations, mali, islam, international, Algérie, Soudan, Etats-Unis,

La Banque Mondiale au coeur d’une arnaque africaine ?

Une partie de l’aide aux pays pauvres est détournée par les élites africaines qui placent l’argent dévoyé dans les paradis fiscaux, accuse une étude. Papa Demba Thiam, un ancien fonctionnaire de la Banque mondiale, appelle à des réformes en profondeur et suggère que l’institution aiderait davantage l’Afrique en y menant une politique active d’industrialisation.

Dévoilé il y a une dizaine de jours, le scandale de détournement de l’aide au développement versée par la Banque mondiale à des pays pauvres défraie la chronique, particulièrement en Afrique. Selon l’étude «Elite Capture of Foreign Aid» réalisée par l’un de ses cadres et deux collaborateurs extérieurs, une partie des financements serait dévoyée par les élites des pays assistés et placée dans des comptes offshore en Suisse, au Luxembourg et dans d’autres paradis fiscaux. Pour Papa Demba Thiam, un économiste sénégalo-suisse qui a travaillé pendant quatorze ans à la Banque mondiale, le rapport qui incrimine les dirigeants africains corrompus reflète la réalité. Mais ce n’est que le côté pile de la pièce.

Côté face, selon Papa Demba Thiam, «la corruption est à la Banque mondiale. Ses cadres sont présents à chaque étape – de la conception à l’évaluation finale, en passant par le financement par tranches – de tout projet, détaille-t-il. Le décaissement ne se fait pas sans avoir obtenu le satisfecit de la mise en œuvre. Il y a forcément des complicités à l’intérieur.»

Ce n’est pas la première fois que la Banque mondiale est confrontée à de telles accusations. Pour ne pas rester les bras croisés, elle a mis en place une unité spécialisée dans la lutte contre la corruption. Une unité qui traque les pots-de-vin dans l’exercice d’appel d’offres pour des projets financés par elle. Mais pour Papa Demba Thiam qui dit connaître le mal de l’intérieur, la bureaucratie étouffe les initiatives. «Des lanceurs d’alerte sont censurés et dans certains cas, ils sont licenciés sous des prétextes divers», accuse-t-il. Mais plus généralement, selon lui, des collaborateurs ne daignent pas dénoncer leurs collègues ou leurs supérieurs.

L’économiste sénégalais tient à signaler que des centaines de collaborateurs de la Banque mondiale, originaires d’Afrique et d’Asie, se complaisent dans leurs rôles respectifs par peur d’être licenciés. «Ils préfèrent garder leur emploi de fonctionnaire international avec les privilèges (le salaire moyen est de 15 000 dollars, sans taxe) qui vont avec, y compris le permis de séjour aux Etats-Unis, raconte-t-il. Pour certains, il est impensable de sacrifier leur emploi dans la mesure où leurs enfants sont scolarisés aux Etats-Unis ou ont des prêts à rembourser.» Et d’ajouter: «Le système se nourrit de lui-même et tous les maillons sont solidaires.»

La Banque Mondiale au coeur d’une arnaque africaine ?
La Banque mondiale est mise dans une position inconfortable par l’étude. Cette dernière était prête déjà en novembre 2019 mais, pour la direction, les conclusions étaient trop à charge. C’est seulement après que l’un des auteurs l’a publiée sur son propre site internet, faisant éclater le scandale au grand jour, que la Banque mondiale l’a adoptée et finalement fait paraître le 18 février, non sans avoir nuancé certains propos. C’est dans le sillage de cette affaire que sa cheffe économiste Pinelopi Goldberg a démissionné de son poste.

Dans une note laconique postée sur son site internet le même jour, l’institution reconnaît que l’étude commençait à attirer beaucoup l’attention. «La direction prend au sérieux la corruption et les risques de fiduciaire, peut-on lire. L’étude «Elite Capture of Foreign Aid» a été revue plusieurs fois et a, par conséquent, été améliorée.»

Selon Papa Demba Thiam, cette étude serait restée dans les tiroirs sans le courage de ses auteurs. Le fait qu’elle a été réalisée par trois économistes ressortissants de pays nordiques a joué un rôle décisif. «Ils ont une culture de bonne gouvernance et du respect de la loi, commente-t-il. Ils ont bravé le système d’autant plus que leurs pays sont les premiers pourvoyeurs d’aide.»

La Banque mondiale reste-t-elle tout de même pertinente? Papa Demba Thiam, qui la qualifie de «gestionnaire de la pauvreté», affirme que David Malpass, son président depuis avril 2019, est partisan des réformes. «Il faut aller revoir la mission de cette institution de sorte qu’elle fonctionne comme une banque commerciale. Elle ne doit prêter que pour financer des projets solides et avérés. Mais surtout, elle doit promouvoir en Afrique une politique d’industrialisation fondée sur les matières premières locales, avec des partenaires qui acceptent qu’une partie de la valeur ajoutée revienne au continent.»

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Tags : Afrique, banque mondiale, arnaque, détornement, corruption, développement, crime, éducation, emploi, environnement, économie, sécurité, pauvreté, Sahel,



Maroc : Au plus beau pays au monde

Abdelkader a 55 ans, il est analphabète. Père de 7 fillettes, rongé par le diabète. « Butagaz » au dos de sa blouse et « FBI » sur la casquette. Abdelkader est gardien de voitures, malgré son arthrose qui lui interdit les filatures, il collectionne les insolations et les courbatures. Musulman pratiquant, il ne connait que la droiture et dans son parcours rares sont les ratures. Sur les recommandations de l’Imam, Abdelkader a fait 7 gosses à ses 2 femmes. Ce serait une prescription prophétique que de multiplier les handicaps, mais la fertilité dans ce milieu est une soupape : avoir des garçons est un retour d’investissement d’une certaine façon. Les grossesses se suivent mais toujours pas de petit maçon qui annoncerait la saison des moissons; ce n’est qu’au bout de la septième qu’il retiendra la leçon : la méiose ne cède pas aux caprices. La famille ne comptera aucun fils. Tous les midis il se rend au café du coin pour échanger sa petite monnaie, les billets étant moins lourds à transporter. Il passe devant le cyber d’à coté et ce qu’il y voit ne semble plus l’alerter. En face d’un poste, une de ses filles est assise; maquillage et décolleté, la panoplie requise. Sa fille se vend comme une marchandise sur le marché saoudien. Il est loin d’apprécier, mais ne dit rien. C’est cette webcam qui paye ses séances de dialyse. La discrétion est donc de mise. Il baisse la tête avant de sortir, ravale sa fierté et demande le repentir. Depuis des décennies, feue sa dignité est morte, il n’a plus que sa foi pour continuer à trainer cette carcasse qui le porte. Son épaule heurte celle d’un jeune homme pressé à la porte.
Khalil a 35 ans, handicapé depuis sa tendre enfance suite à des crises convulsives. Devant les récidives successives, ses parents voyant leur enfant s’étouffer dans sa salive, l’emmenèrent aux urgences. Ne voulant pas perdre leur fils par négligence, ils durent soudoyer chacun du personnel de l’hôpital malgré leur indigence. Mais petit bémol, dans l’hôpital il y a que des ampoules de calcium et du paracétamol. Une injection plus tard il fut gardé en surveillance, et depuis Khalil ne pourra apprendre aucun pas de dance. En plus de l’usage de ses pieds, il a perdu tous ses cheveux malgré son jeune âge, Khalil a le cancer du chômage. La beauté intérieure pour seul charme, le courage et la foi pour seule arme, contre une vie au gout mortuaire : le paraplégique habite dans un cimetière. Il ne s’appelle pas Michael, mais vit chaque soir son Thriller. Maintes fois tabassé devant le parlement alors qu’il ne faisait que présenter ses doléances vaillamment; Khalil le militant est désormais vendeur ambulant. Dans son fauteuil à roulettes, derrière sa petite charrette, il prépare des bols d’escargots et du thé à la menthe dont il tient la recette. Fatigué de devoir se contenter des miettes, il ne rêve que de quitter son pays qui l’a condamné aux oubliettes. Ses recettes médiocres, l’empêchent hélas de quitter la ville ocre. Aujourd’hui, garé sous un réverbère à coté d’un café, il est interpellé par deux gendarmes faisant leur ronde dans le quartier qu’ils ont l’habitude de parapher. Ils réclament un billet vert pour ne pas lui confisquer sa cocotte, ses bols et sa théière.
Tags : Maroc, misère, pauvreté, inégalité, 

: Quand un plein de voiture peut nourrir un africain pendant un an : L’anomie du monde.

« Contrôlez le pétrole et vous contrôlerez les nations, contrôlez la nourriture et vous contrôlerez la population. » Henry Kissinger

Ces mots de Kissinger cités par le professeur Michel Chossudovsky résument mieux que mille discours l’état des lieux du monde. En effet, cette devise est mise en oeuvre d’une façon magistrale. En effet, le pétrole est sous contrôle et on dit souvent suivez les routes du pétrole pour voir où sont implantées les bases américaines. De plus, à travers la nourriture, on peut tenir en apnée des peuples entiers et les faire basculer, à volonté, dans la famine par bioéthanol interposé. « Qu’en est-il de la récurrence des famines dans l’histoire ? La pénurie alimentaire se fit sentir dès le printemps. En chaque pays le prix du blé enfla : en France, l’hectolitre qui valait 17,15 francs monta à 39,75 francs et même à 43 francs à la fin de l’année… La crise des subsistances se traduisit aussitôt par des désordres populaires… » L’historien Charles Pouthas décrivait la situation agricole européenne entre 1847 et 1848. Parti d’Italie, le vent de révolte gagnait la France puis Vienne, tout l’Empire austro-hongrois et bientôt les Etats allemands et même la Suisse. Phillippe Chalmin fait l’analogie avec le Printemps arabe. En Tunisie, en Egypte, ils vivent la même exaltation. Une situation très difficile, le prix du pain est d’autant plus douloureusement ressenti que le travail manque : plus de la moitié des ouvriers parisiens sont au chômage. (1)

Pour l’histoire, l’Algérie connut aussi plusieurs famines, celle de 1868 fut particulièrement atroce, la population algérienne, d’environ 3 millions à la veille de 1830, était tombée à 2,2 millions en 1872, du fait des morts de la conquête que Jacques Frémeaux a évalué à environ 400.000, et des victimes de l’épouvantable famine de 1867-1868 qui fut peut-être bien à elle seule aussi meurtrière. Se produisit ensuite ce que les Québécois appellent une « revanche des berceaux ». (2)

Les causes des famines

Les émeutes de la faim se rappellent d’une façon récurrente à notre bon souvenir les pays du Sud dépendant pour leur survie d’un Nord opulent qui, à bien des égards, est responsable de ces malheurs. Certes, le Nord jette des miettes sous forme d’APD qui, malheureusement, demeure sans lendemain. Si on ajoute à cela l’hypocrisie des promesses du Millénaire (réduire de moitié la faim d’ici 2015) , nous avons un tableau complet de la mise en scène des pays industrialisés qui laissent en 2011 sur le bord de la route un milliard de personnes menacées par la faim. Pour éradiquer ce fléau, il suffirait de seulement 30 milliards de dollars par an. En comparaison, le budget militaire de base du Pentagone est de 533,7 milliards de dollars pour l’exercice 2010. Washington prévoit de vendre pour 46,1 milliards d’équipements et de services militaires soit près de 50% de plus qu’en 2010. Par ailleurs, les institutions financières américaines ont distribué, pour l’année 2010, 144 milliards de dollars en seuls bonus, primes et stock-options à leurs dirigeants.

Parlant de l’instabilité des prix, devenue structurelle, Philippe Chalmin souligne le passage du stable à l’instable avec la fin des prix producteurs pour les métaux et des marchés agricoles organisés. La volatilité de ces marchés a, une fois de plus participé à la révolte qui a balayé l’autre rive de la Méditerranée. La « mondialisation » s’est de même étendue à l’ensemble de la planète. Mais la conscience du bouleversement n’est pas totale, estime Philippe Chalmin. « Le Printemps des peuples et malédiction des matières premières », souligne le rapport avec la vague révolutionnaire qui a emporté l’Europe en 1848. S’il ne s’agit pas en 2011 d’émeutes de la faim en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, la vie chère a fortement contribué à la naissance de ces mouvements. Et, encore une fois, ces mouvements ont eu lieu dans des pays qui se sont révélés incapables de gérer leurs richesses naturelles. (…) La situation est inquiétante pour les produits agricoles, avec des stocks de clôture en baisse, particulièrement pour le maïs. Des accidents climatiques majeurs auraient des conséquences catastrophiques, met-il en garde. (3)

Cette flambée des prix des matières premières en général et des produits alimentaires a connu une accélération ces dernières années. 2010 aura été l’année de toutes les hausses. Faiblesse du dollar, croissance chinoise, spéculation, raréfaction de l’offre, sont autant de facteurs qui tirent vers le haut le prix des matières premières. La part des spéculateurs sur les marchés alimentaires explique en partie la hausse continue des prix depuis l’été 2010. Les produits alimentaires sont devenus des actifs financiers comme les autres.

Difficile également de ne pas souligner le rôle des agrocarburants, qui ont détourné plus du tiers de la production de maïs des Etats-Unis, l’année dernière. Les Américains ont subventionné, en 2009, la transformation de 144 millions de tonnes de maïs et de centaines de millions de tonnes de blé en biodiesel et bioéthanol. Les terres qui y sont donc, consacrées, sont autant de terres disponibles en moins pour le soja ou le blé, ce qui explique la hausse corrélative des cours mondiaux, directement liés aux prix américains. De ce fait, la part des spéculateurs par rapport aux acteurs commerciaux (c’est-à-dire qui échangent réellement des biens agricoles) a explosé. Les produits alimentaires deviennent ainsi des actifs financiers comme les autres, dans une stratégie de rentabilité maximale des portefeuilles des investisseurs. (4)

Pour le professeur Michel Chossudovsky directeur du Centre d’analyse Mondialisation.ca, cette « mondialisation de la pauvreté, » qui a annulé bon nombre des progrès de la décolonisation d’après-guerre, a commencé dans le tiers-monde avec la crise de la dette du début des années 1980 et l’imposition des réformes économiques meurtrières du Fonds monétaire international (FMI). Avec de grands pans de la population mondiale déjà bien en dessous du seuil de pauvreté, la hausse des prix des denrées alimentaires de base, qui se produit sur une courte période, est dévastatrice. Des millions de personnes dans le monde sont dans l’incapacité d’acheter de la nourriture pour leur survie. Ces augmentations contribuent d’une manière très réelle à « éliminer les pauvres » à travers « la mort par la famine. » (…) L’escalade des prix des produits alimentaires est en grande partie le résultat d’une manipulation du marché. Elle est en grande partie attribuable à la spéculation boursière sur les marchés des matières premières. (…) Grâce à la manipulation concertée, les opérateurs institutionnels et les institutions financières font augmenter les prix. Ils placent alors leurs paris sur la hausse du prix d’un produit en particulier. La spéculation génère la volatilité du marché. À son tour, l’instabilité qui en résulte encourage la poursuite de l’activité spéculative. (…) Les famines à l’ère de la mondialisation sont le résultat de ces politiques. La famine n’est pas la conséquence d’un manque de nourriture, c’est en fait, tout le contraire : les surplus alimentaires mondiaux sont utilisés pour déstabiliser la production agricole dans les pays en développement. « Pourtant, écrit Michel Chossudovsky, qui dénonce le rôle des multinationales de l’agroalimentaire, l’agriculture mondiale a, pour la première fois de l’histoire, la capacité de satisfaire les besoins alimentaires de toute la planète, mais la nature même du marché mondial de ce système ne permet pas que ça se réalise ». (5)

Même appréciation de Jean Ziegler qui résume en quelques phrases le pourquoi de la désespérance et de l’impuissance des faibles à combattre la faim. Lui aussi cite le dumping, la spéculation, les agrocarburants : Toutes les cinq secondes, un enfant de moins de dix ans meurt de faim. Près d’un milliard d’êtres humains sont gravement sous-alimentés. Un enfant qui meurt de faim est donc un enfant assassiné. Il cite aussi la dette extérieure. Au 31décembre 2009, celle des 122 pays dits du « tiers-monde », était de 2100 milliards de dollars. La presque totalité de leurs gains à l’exportation est donc absorbée par les intérêts de la dette. (6)

L’alerte de l’ONG Oxfam

Pour nourrir les neuf milliards d’habitants de la planète en 2050, une réforme majeure du système alimentaire mondial s’impose alors que les récoltes de certaines régions sont menacées par le réchauffement climatique, a averti mardi l’organisation humanitaire Oxfam. Si rien n’est fait, le prix de certaines denrées alimentaires comme le maïs aura plus que doublé d’ici 2030, frappant en premier les plus pauvres qui dépensent déjà jusqu’à 80% de leurs revenus pour se nourrir, selon le rapport de l’ONG britannique. « Le système alimentaire ploie sous l’intense pression du changement climatique, de la dégradation écologique, de la croissance démographique, de la hausse des prix de l’énergie, de l’augmentation de la demande de viande et de produits laitiers, de la concurrence pour l’obtention de terres pour produire des biocarburants, de l’industrialisation et de l’urbanisation », selon le document. Selon l’ONG, la réforme du système alimentaire doit passer par davantage d’investissements dans l’agriculture paysanne et familiale, la valorisation des ressources naturelles, un meilleur accès aux marchés pour les petits exploitants, la lutte contre le gaspillage, d’eau notamment, et l’arrêt des subventions à la production de biocarburants dans les pays riches.

Le rapport a également, réclamé l’arrêt de la domination de quelques grandes multinationales sur le marché des matières premières agricoles et des semences. Prenant l’exemple de l’Inde, Oxfam a rappelé que la croissance économique y a plus que doublé entre 1990 et 2005 mais que le nombre de personnes souffrant de la faim a augmenté de 65 millions. En effet, les populations pauvres en milieu rural restent exclues du développement économique. En parallèle, l’engouement des Etats-Unis pour le bio-éthanol a conduit à utiliser 15% du maïs mondial pour en faire du carburant, même en période de forte crise alimentaire. Et l’ONG de rappeler que la quantité de céréales nécessaires pour faire le plein d’éthanol d’un véhicule 4×4 peut nourrir une personne pendant un an. (7)

Comment nourrir la planète ?

Le plus sérieusement du monde, on dit que la FAO étudie un scénario se basant sur une alimentation complémentaire d’insecte ! « On dit que les sauterelles frites ont un goût qui se rapproche de la crevette et que la majorité des insectes ont un goût de noisette. Il faut savoir que plus de 95% des millions d’espèces d’insectes qui peuplent la planète sont comestibles et sont consommés quotidiennement en Afrique, en Asie et en Amérique centrale. Pour de nombreux spécialistes, l’élevage d’insectes nécessite beaucoup moins de ressources alimentaires et peut être une alternative intéressante pour les décennies à venir dans la mesure où cela permettrait de subvenir aux besoins alimentaires des dix milliards d’habitants de la planète ». (8)

Les partisans de la réduction de la population

Déjà au début des années 1960, le Rapport Meadows du Club de Rome : « Halte à la croissance » donnait le « La ». Pour les experts, il fallait réduire la population. En 2100, nous risquons d’être non pas 9 mais 10 milliards d’individus dans le monde. C’est en tout cas ce que prévoit un nouveau rapport des Nations unies. « A 9 milliards, se disait-on, il faudra se serrer. Mieux, partager les ressources et les richesses. Mais à 10 milliards ? Un rapport des Nations unies, publié le 3 mai penche plutôt vers une poursuite de l’augmentation. Et prévoit que 10,1 milliard d’individus arpenteront le monde en 2100. (…) Il semble impossible d’éviter la crise écologique globale. Tout au plus, pouvons-nous l’atténuer. C’est en tout cas la tâche à laquelle s’attelle l’association Démographie responsable. Oui, il faut en finir avec l’apologie des familles nombreuses dans les pays du Sud (et du Nord) et cela passe par l’amélioration du niveau de vie et une meilleure éducation… malheureusement ces deux derniers critères sont liés fortement à la consommation d’énergie et à la destruction de l’environnement. Alors, que faire ? La décroissance n’est pas seulement économique, elle doit être aussi démographique. Toujours les grands mots et les grandes utopies…mais la Terre : forêts, cours d’eau, océans… animaux sauvages… ne pourront survivre à une telle quantité d’humains qui ne sont pas prêts à sacrifier leur mode de vie à la survie de la planète et qui veulent tous un grand confort…si les humains ne sont pas capables de limiter leur nombre il est évident que « la nature » s’en chargera d’une façon ou d’une autre. (8)

Même si à l’heure actuelle de nombreuses organisations alimentaires recommandent de consommer de préférence des insectes plutôt que de la viande, à la fois pour des considérations économiques et écologiques, il paraît difficile de changer les mentalités occidentales et de convaincre les Européens de consommer ces nouvelles espèces » (9).

Conclusion

L’astrophysicien bien connu Hubert Reeves voit dans l’anomie actuelle les signes d’une apocalypse. Il écrit « le gaspillage des ressources naturelles, les rejets de gaz carboniques et l’écart grandissant entre riches et pauvres sont en train de causer la perte de l’humanité ». Il s’en remet à une « volonté communautaire » pour que ce scénario catastrophe soit évité. D’après lui, la disparition de la race humaine bien qu’hypothétique, ne peut être écartée à court terme. « On ne touche pas à des milliers d’années, on parle d’une échelle de quelques décennies ». Si nous disparaissions, il s’agirait, depuis l’apparition de la vie sur terre, de la sixième extinction, la première depuis le départ des dinosaures il y a de cela 165 millions d’années. Reeves nous dit que « la seule différence, c’est que, pour la première fois, une espèce disparaîtra par sa faute ». Quand on y pense bien, la science qui devrait être la bouée de sauvetage de l’humanité, et somme toute, au service de notre bien-être, deviendrait-elle le fruit de notre décadence et de notre disparition ? » (10)

Le chauvinisme de la prospérité du Nord, la spéculation atroce, le détournement de la nourriture par bio-nécro-carburant interposés, pour les 4×4 et les changements climatiques de plus en plus récurrents, amènent inexorablement l’humanité au déclin. Cette anomie concerne, en priorité, les millions d’hommes de femmes et d’enfants des Sud épuisés qui seront les variables d’ajustements d’un eugénisme accepté tacitement dans ce XXIe siècle de tous les dangers. Manger pour rester en vie ou conduire d’une façon non indispensable l’humanité aura à choisir…

Chems Eddine Chitour

Legrandsoir

1. Philippe Chalmin 1848, 2011 : les révoltes de la faim, Le Monde économique 15.02.2011

2. Pierrette et Gilbert Meynier http://badjadja.e-************/rubrique,gilbert-meynier-4,797063.html

3. Daniel Krajka http://www.usinenouvelle.com/article/les-matieres-premieres-dans-l-age-de-l-instabilite.N152038 Le 17 mai 2011

4. Chems Eddine Chitour : Les émeutes de la faim. Mondialisation.ca, Le 8 février 2011

5. Michel Chossudovsky : La famine mondiale Global Famine Traduit Dany Quirion Alter Info 4 mai 2008 :

6. Jean Ziegler : « Le massacre de la faim se déroule dans une normalité glacée » L’Humanité des débats. 5 Février 2011

7. Faim dans le monde : catastrophe en 2050 Al Manar. Mercredi 1er Juin 2011

8. http://www.come4news.com/index.php?… (http://www.come4news.com/index.php?option=com_content&);task=view&id=44246&Itemid=999

9.http://www.terraeco.net/10-milliard… (http://www.terraeco.net/10-milliards-d-humains-en-2100),17220.html# 5. 05.2011

10.Mehr Licht. L’humanité va-t-elle disparaître ? Site Oulala 5.11.2003

Tags : Afrique, famine, pauvreté, développement,

La Banque Mondiale au coeur d’une arnaque africaine ?

Une partie de l’aide aux pays pauvres est détournée par les élites africaines qui placent l’argent dévoyé dans les paradis fiscaux, accuse une étude. Papa Demba Thiam, un ancien fonctionnaire de la Banque mondiale, appelle à des réformes en profondeur et suggère que l’institution aiderait davantage l’Afrique en y menant une politique active d’industrialisation.

Dévoilé il y a une dizaine de jours, le scandale de détournement de l’aide au développement versée par la Banque mondiale à des pays pauvres défraie la chronique, particulièrement en Afrique. Selon l’étude «Elite Capture of Foreign Aid» réalisée par l’un de ses cadres et deux collaborateurs extérieurs, une partie des financements serait dévoyée par les élites des pays assistés et placée dans des comptes offshore en Suisse, au Luxembourg et dans d’autres paradis fiscaux. Pour Papa Demba Thiam, un économiste sénégalo-suisse qui a travaillé pendant quatorze ans à la Banque mondiale, le rapport qui incrimine les dirigeants africains corrompus reflète la réalité. Mais ce n’est que le côté pile de la pièce.

Côté face, selon Papa Demba Thiam, «la corruption est à la Banque mondiale. Ses cadres sont présents à chaque étape – de la conception à l’évaluation finale, en passant par le financement par tranches – de tout projet, détaille-t-il. Le décaissement ne se fait pas sans avoir obtenu le satisfecit de la mise en œuvre. Il y a forcément des complicités à l’intérieur.»

Ce n’est pas la première fois que la Banque mondiale est confrontée à de telles accusations. Pour ne pas rester les bras croisés, elle a mis en place une unité spécialisée dans la lutte contre la corruption. Une unité qui traque les pots-de-vin dans l’exercice d’appel d’offres pour des projets financés par elle. Mais pour Papa Demba Thiam qui dit connaître le mal de l’intérieur, la bureaucratie étouffe les initiatives. «Des lanceurs d’alerte sont censurés et dans certains cas, ils sont licenciés sous des prétextes divers», accuse-t-il. Mais plus généralement, selon lui, des collaborateurs ne daignent pas dénoncer leurs collègues ou leurs supérieurs.

L’économiste sénégalais tient à signaler que des centaines de collaborateurs de la Banque mondiale, originaires d’Afrique et d’Asie, se complaisent dans leurs rôles respectifs par peur d’être licenciés. «Ils préfèrent garder leur emploi de fonctionnaire international avec les privilèges (le salaire moyen est de 15 000 dollars, sans taxe) qui vont avec, y compris le permis de séjour aux Etats-Unis, raconte-t-il. Pour certains, il est impensable de sacrifier leur emploi dans la mesure où leurs enfants sont scolarisés aux Etats-Unis ou ont des prêts à rembourser.» Et d’ajouter: «Le système se nourrit de lui-même et tous les maillons sont solidaires.»

La Banque Mondiale au coeur d’une arnaque africaine ?
La Banque mondiale est mise dans une position inconfortable par l’étude. Cette dernière était prête déjà en novembre 2019 mais, pour la direction, les conclusions étaient trop à charge. C’est seulement après que l’un des auteurs l’a publiée sur son propre site internet, faisant éclater le scandale au grand jour, que la Banque mondiale l’a adoptée et finalement fait paraître le 18 février, non sans avoir nuancé certains propos. C’est dans le sillage de cette affaire que sa cheffe économiste Pinelopi Goldberg a démissionné de son poste.

Dans une note laconique postée sur son site internet le même jour, l’institution reconnaît que l’étude commençait à attirer beaucoup l’attention. «La direction prend au sérieux la corruption et les risques de fiduciaire, peut-on lire. L’étude «Elite Capture of Foreign Aid» a été revue plusieurs fois et a, par conséquent, été améliorée.»

Selon Papa Demba Thiam, cette étude serait restée dans les tiroirs sans le courage de ses auteurs. Le fait qu’elle a été réalisée par trois économistes ressortissants de pays nordiques a joué un rôle décisif. «Ils ont une culture de bonne gouvernance et du respect de la loi, commente-t-il. Ils ont bravé le système d’autant plus que leurs pays sont les premiers pourvoyeurs d’aide.»

La Banque mondiale reste-t-elle tout de même pertinente? Papa Demba Thiam, qui la qualifie de «gestionnaire de la pauvreté», affirme que David Malpass, son président depuis avril 2019, est partisan des réformes. «Il faut aller revoir la mission de cette institution de sorte qu’elle fonctionne comme une banque commerciale. Elle ne doit prêter que pour financer des projets solides et avérés. Mais surtout, elle doit promouvoir en Afrique une politique d’industrialisation fondée sur les matières premières locales, avec des partenaires qui acceptent qu’une partie de la valeur ajoutée revienne au continent.»

Source : decryptnewsonline.com, 28 fév 2020

#Afrique, #Corruption, #Crime, #Education, #Emploi, #Environnement, #Économie, #sécurité, #pauvreté, #sahel, #mali, #négociations

Maroc : cette explosion sociale qui vient

Rabia Franoux Moukhlesse

Tous les expatriés volontaires du monde éprouvent un sentiment de nostalgie pour leur pays d’origine. Souvent ils fantasment sur la réalité de ce dernier n’ayant pas suivi les évolutions de mentalités, les changements urbains, les modifications politiques etc.

Mon cas est bien particulier ayant quittée le Maroc en 1999, soit à la mort du Roi, laissant derrière moi un Royaume plein d’espoirs sur les changements à venir avec ce nouveau souverain que l’on appelait le « roi des pauvres ». Après les années de plomb et malgré l’ouverture opérée dans les années 90, les marocains espéraient un renouveau total. Le changement étant toujours pour demain, le Maroc a vécu les révolutions arabes à travers ce que l’on a appelé le mouvement du 20 Février. Le trône a semblé vaciller et des changements constitutionnels ont été opérés pour calmer les esprits. Et voilà que 10 ans de plus ont passés et où en sommes-nous ?

PROMESSES NON TENUES

Les riches sont plus riches et les pauvres sont plus pauvres. Rien de choquant me direz-vous, puisque c’est le cas dans presque tous les pays ! Et bien pas tout à fait. Car le Maroc assume pleinement ces écarts humainement monstrueux. Casablanca recense plus de 8.000 millionnaires en dollars ce qui est plus que Londres, New York ou Hong-Kong. Les investisseurs étrangers se pressent attirés par les exonérations de taxes, la main d’œuvre bon marché et un point d’ancrage stable politiquement en Afrique.

Les grandes sociétés marocaines n’ont jamais gagné autant d’argent, des fortunes personnelles ont été multipliées par 3 ou 4 en moins de 5 ans. Vous pouvez croiser quotidiennement les derniers modèles de grosses voitures qu’un Européen ne verra que dans les publicités. Des maisons de 400 ou 500 m² habitables poussent comme des champignons.

Regardez cette masse de jeunes sans travail qui rêvent de l’Europe et risquent leur vie pour accéder à une vie sans faim.

Tout ceci côtoie une classe moyenne qui se paupérise face au coût de la vie après avoir récemment émergé et surtout une cohorte de pauvres faisant l’immense majorité du Maroc. Voyez au-delà des images de cartes postales touristiques ces bidonvilles où les eaux usées coulent au milieu du chemin. Tous ces gens qui s’entassent dans 20m² recouverts de tôles, souffrant de la chaleur et du froid. La populace qui prend à 7 ou 8 un taxi le matin pour aller pointer à l’usine ou venir dans les belles villas valant 1 million d’euros en tant que jardinier, femme de ménage, cuisinière, homme à tout faire pour 300 euros par mois.

Regardez cette masse de jeunes sans travail qui rêvent de l’Europe et risquent leur vie pour accéder à une vie sans faim. Croisez ces hordes de mendiants à chaque coin de rue… Et comprenez les attentes d’une jeunesse qui veut vivre décemment, qui souhaite un peu de liberté, qui attend une meilleure répartition de toutes ces richesses qui s’étalent avec indécence devant leurs yeux, qui veut des infrastructures dignes d’un pays en développement au lieu d’écoles privés, d’hôpitaux en souffrance et de mosquées pour seul refuge.

RÉPONSE SÉCURITAIRE

On obtient donc une situation explosive où les citoyens sont à bout de nerf et n’ont plus rien à perdre. Ils ne leur restent plus au pire qu’à se laisser embrigader dans un islam radicalisé qui leur promet un monde meilleur dans l’au-delà, un peu de considération ici-bas mais à condition d’essaimer leur vision délétère et la violence qui va avec. Et au mieux, de parler, revendiquer, dénoncer les injustices et les abus en espérant que les choses vont changer.

Vous avez le cocktail (sans alcool) d’une explosion programmée

Or, la réponse est toujours la même. Avant tout sécuritaire pour que rien ne change et surtout pas les privilèges. A chaque mot de trop, de critique, de manifestation ou d’information gênante pour les dirigeants, une cohorte de fonctionnaires zélés, nostalgiques des années de plomb où chaque tête qui dépassait disparaissait du paysage intervient et frappe de toutes ses forces. On assiste là aussi à une radicalisation de la répression. Toute personne ayant l’audace de dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas doit faire face au système judiciaire. La parole n’est pas libre. L’information n‘est pas libre.

La société n’est pas libre. Un simple tweet, un blog, une chanson, une enquête d’investigation, une attitude postée sur face book, une « morale » non conforme aux mœurs d’un autre temps et vous pouvez gouter à l’hospitalité des prisons marocaines pour 4, 5 ou 25 ans. Les exemples sont nombreux de ces condamnations et s’accélèrent ces derniers temps dans l’indifférence et la méconnaissance totale, volontaire ou non, du reste du monde.

Une population qui n’a rien à perdre même plus la vie, des privilégiés qui ne lâchent rien, des religieux qui ne rêvent que de mettre en place un califat basé sur la charia et vous avez le cocktail (sans alcool) d’une explosion programmée. Alors pour vos prochaines vacances, profitez vite du Maroc typique, de ses hôtels et golfs, de ses lieux de fêtes car il se pourrait bien qu’un jour il ressemble plus à l’Irak qu’au pays ouvert aux étrangers et à l’hospitalité légendaire.

#saffibaraka (Ca suffit)

Source : Marianne, 11 jan 2020

Tags : Maroc, inégalités, pauvreté, injustice, répression, richesse,

Maroc : Le Fléau De La Prostitution

Depuis l’interdiction du dernier long-métrage de Nabil Ayouch, «Much Loved», le thème de la prostitution au Maroc fait couler beaucoup d’encre. Le magazine américain Newsweek a publié un reportage sur le plus vieux métier du monde en suivant le quotidien de trois prostituées marocaines: deux à Tanger et une à Rabat, et en recueillant quelques chiffres clés. On y apprend que les villes de Rabat, Agadir, Tanger et Fès à elles seules abritent quelque 19.000 femmes qui vivent d’amours tarifées. La moitié d’entre elles est divorcée ou séparée, et environ la moitié a des enfants à charge, révèle le magazine qui se base sur une étude réalisée par le gouvernement marocain et rendue publique en mai dernier.

Autre révélation cette fois-ci sur le salaire. Selon Azzouz Ettoussi, président de la section de Rabat de l’Organisation Panafricaine de Lutte Contre le Sida (OPALS), les prostituées de luxe qui partent à l’affût de portefeuilles bien garnis dans les bars et boîtes de nuit empochent de 300 à 2.000 dirhams par soirée. Les autres, celles qui fréquentent les cafés et les lieux publics, agissent en général de manière indépendante et sans aucun intermédiaire. Elles gagnent environ 200 dirhams par jour, toujours d’après Azzouz Ettoussi. Mais cette somme paraît dérisoire lorsque l’on sait que la prostituée n’en bénéficie pas toujours pour elle seule. En effet, l’article souligne que la plupart des prostituées marocaines subviennent aux besoins d’au moins une autre personne dans leur entourage, que ce soit leurs enfants, leurs parents ou un proche. «L’Etat préfère la prostitution à la pauvreté», déclare pour sa part Abdessamad Dialmy, un chercheur spécialisé sur la sexualité et l’identité de l’Université Mohammed V à Rabat.

Selon lui, le gouvernement marocain ferme les yeux sur la prostitution parce qu’elle permet de diminuer le chômage. » La loi est là, mais elle n’est pas toujours totalement appliquée», poursuit-il.Le plus vieux métier du monde a encore de beaux jours devant lui. On n’a plus le «bousbir» (célèbre quartier de maisons closes) d’antan, cette antre de la prostitution légalisée du temps du Protectorat installée dans l’ancienne médina de Casablanca, où les soldats français, et autres marocains en mal de plaisir, venaient se divertir, mais le commerce du sexe fleurit toujours dans toutes les villes du pays.

«Durant les années 1970, raconte ce témoin sexagénaire, il n’existait pas de quartier où il n’y avait pas une maison close, sous la houlette d’une entremetteuse, pour accueillir les clients à longueur de journée. La passe ne coûtait pas plus de dix dirhams, et les jeunes y venaient vivre leur première expérience sexuelle. Les hôtels avaient aussi leur lot de prostituées, jeunes, belles et moins belles, l’entremetteuse les présentait au client, qui faisait son choix. On y proposait même des garçons». La loi interdisait, comme d’ailleurs de nos jours, la prostitution, mais, comme à l’époque, elle était pratiquée à grande échelle, pauvreté et précarité obligent. Mais pas seulement.

La nouveauté en effet en ce début de XXIe siècle est que le plus vieux métier du monde devient un business lucratif et une voie facile et rapide d’enrichissement, pour celles et ceux qui offrent leur corps comme marchandise, sur un marché de plus en plus demandeur. Ceci dit, la pratique de la prostitution comme on le sait est condamnée par les mœurs, abhorrée par la religion, interdite par la loi. Cela va de l’article 497 à l’article 504 du code pénal. Les peines d’emprisonnement vont de deux à dix ans et les amendes de 5 000 DH à un million de dirhams.

La prostituée et le client sont punis selon les dispositions de l’article 490 du code pénal, qui stipule que «toute relation sexuelle extraconjugale entre un homme et une femme est considérée comme prostitution et punie d’une peine d’emprisonnement ferme allant d’un mois à un an». Si une des personnes est mariée, c’est l’article 491 qui est appliqué et qui «punit d’une peine d’emprisonnement ferme d’un an à deux ans tout conjoint impliqué dans une affaire d’adultère». La poursuite est annulée si la conjointe annule la plainte. D’un autre côté il n’existe pas d’étude sur le sujet pour éclairer nos lanternes d’une manière scientifique, ni de statistiques officielles pour estimer le nombre de ces vendeurs de sexe.

«A défaut de ces statistiques officielles, nous ne disposons que de monographies préparées par nos étudiants sur le sujet, et elles montrent, toutes, que la prostitution est pratiquée partout au Maroc. Nouveauté : elle a changé de forme. La précarité et la pauvreté constituent toujours la cause principale, mais les choses ont évolué ces dernières années avec une société de consommation qui crée de plus en plus de frustrations», remarque Jamal Khalil, sociologue (voir entretien).

Le phénomène touche désormais toutes les catégories sociales, milieu estudiantin compris, et la misère n’en est plus le principal moteur. Les quelques fines études sur le sujet dont on dispose sont le produit d’associations de lutte contre le sida, car, elles savent que le principal facteur de propagation de cette maladie est la prostitution, et les enquêtes qu’elles mènent sur ce milieu sont riches d’enseignements. L’une d’elles, menée en 2008 par l’Organisation panafricaine de lutte contre le sida (OPALS), a révélé des réalités insoutenables. D’abord le jeune âge des prostituées : sur un échantillon de 500 travailleuses du sexe ayant fait l’objet de cette enquête, 32,6% ont eu leur premier rapport sexuel entre 6 et 15 ans (peut-on parler de rapport sexuel à cet âge ?), 59,4% ont été payées pour la première fois entre l’âge de 9 et 15 ans, et 90% des interrogées déclarent avoir intégré le monde de la prostitution avant l’âge de 20 ans. Ensuite, sur la manière dont des enfants sont exploités sexuellement : 13% de l’échantillon, ajoute l’enquête, sont des petites filles vierges qui proposent sodomie, fellation ou encore «coups de pinceaux» à la va-vite.

Maroc : le fléau de la prostitution

L’enquête de l’OPALS a touché la catégorie démunie de la population qui vend son corps pour gagner sa vie. On la trouve dans toutes les villes du Maroc, c’est la plus courante. «La grande majorité des prostituées ne l’est pas devenue par choix, ni par goût de luxe. Elles y ont échoué après une longue dérive et n’ont que leur corps comme source de revenus», coécrivent les deux sociologues, Soumia Naâmane et Chakib Guessous dans leur livre Grossesses de la honte (Ed. Afrique Orient, 2011). Mais, selon la catégorie sociale des vendeuses de sexe et de leurs clients, cette prostitution peut être «bon marché», comme elle peut être de luxe.

Commençons par la première, la prostitution dite «bon marché» : Casablanca, Boulevard Mohammed V. Les travaux du tramway ont eu un impact négatif sur les commerces de cette artère principale du centre-ville. Mais, s’il y a une activité qui n’a pas été touchée par ce remue-ménage, c’est bien la prostitution. Sur l’artère principale mais également dans les ruelles adjacentes, vers Mers Sultan, le centre-ville historique et ses multiples cafés sont les endroits du business de la chair. «A la terrasse des cafés, une clientèle normale vient s’attabler. Pour le reste et à l’étage, ce sont des lieux de marchandage pour des passes», explique Rachid, serveur dans une crémerie de Mers Sultan. Dans cet univers, le prix d’une passe est de 100 DH et les ébats se déroulent en majorité dans des appartement à proximité du café. Dans chaque quartier, c’est une entremetteuse qui assure le bon fonctionnement de ce système et qui se fait payer également la transaction sexuelle. «C’est 60 DH pour moi et 60 DH pour l’entremetteuse», avoue, Hanane, 30 ans, qui vend sa chair depuis déjà plusieurs années. Mais, d’où viennent ces femmes qui se prostituent pour moins de 100 DH la passe ? Qui les a poussées à devenir des professionnelles de la prostitution ? En fait, on trouve de tout dans ce marché de la chair. Notamment des quadragénaires, voire des quinquagénaires, qui travaillaient, plus jeunes, dans des bars, mais que la flétrissure de l’âge a fait dégringoler au bas de l’échelle. Une marchandise usée, à prix bas. On y retrouve également des mères célibataires, des filles violées et abandonnées par leurs familles… «Moi, je travaillais dans une usine de textile à Lissasfa pour 1 200 DH par mois. Mais je devais coucher impérativement avec le chef pour garder mon boulot. Coucher pour coucher, autant le faire pour de l’argent», explique Hanane, qui habite encore le même quartier. Les prostituées qui exercent au centre-ville vivent en général dans les quartiers périphériques de Casablanca, souvent à plusieurs sous un même toit. Elles choisissent également de vivre dans les zones surpeuplées, une façon de se noyer dans la masse et passer inaperçues.

Au centre de Casablanca, tout près du Marché central, nous avons rencontré Najiba, la quarantaine, affublée d’une djellaba. Elle y vient chaque jour chercher du «travail» : «Si c’est pour le ménage, c’est tant mieux. Mais si c’est pour une passe, je ne dis jamais non», lance-t-elle. Elle est de mèche avec une entremetteuse du quartier qui lui assure le gîte pour la passe. Cette dernière «arrose» les policiers et ces derniers ferment les yeux. Najiba, mère célibataire, deux enfants, vit avec cinq autres femmes dans une même maison à Sidi Elkhadir, à Sidi Maârouf. «Nous avons toutes des enfants. On doit payer 300 DH pour la propriétaire, 300 DH pour la personne qui nous garde les enfants. Il faut nourrir ces enfants, leur acheter des vêtements, les envoyer à l’école… Vous comprenez pourquoi je vends mon corps à 100 DH la passe», avoue Najiba, dépitée. Le lieu de la passe ? Chez l’entremetteuse, chez le client, ou encore dans certaines salles de cinéma. Les séances de l’après-midi servent à accueillir les ébats sexuels de ceux qui ne peuvent se payer une chambre chez l’entremetteuse. Une bonne partie des salles de cinéma, du moins celles encore ouvertes, sont concernées par ce business. D’ailleurs, il n’est pas rare de trouver à proximité de ces salles des femmes reconnaissables à leurs regards aguichants et à leur démarche provocante.

«La passe varie selon la tête du client et la nature de la prestation. Une salle de cinéma, c’est pas ce qu’il y a de plus confortable», explique le serveur d’un café à proximité d’une salle de cinéma au centre-ville. Les filles de joie, on les trouve aussi, la nuit, du côté du boulevard d’Anfa, à l’affût de clients potentiels. Le racolage bat son plein : des voitures s’arrêtent et disparaissent dans le noir à la recherche d’une «planque» où pratiquer, si ce n’est dans les voitures mêmes, ou dans les taxis en contrepartie d’un pécule pour le chauffeur. Parmi ces prostituées, quelques-unes sont des SDF. Là, l’ambiances est glauque, elles se contentent de montants dérisoires pour une passe (15 ou 20 DH), pour se procurer de quoi s’acheter de la drogue, ou leur bouteille de vin. Il leur arrive d’être brutalement agressées et poursuivies par la police. D’autres, un peu plus «préservées», se placent près des hôtels longeant le boulevard d’Anfa où elles se querellent constamment pour un meilleur emplacement. Ce même type de prostitution est répandu dans les quartiers populaires. A Sidi Bernoussi extension, là où de nouveaux immeubles poussent chaque jour, des prostituées vivant dans les bidonvilles avoisinants se rabattent sur les maçons et autres ouvriers des chantiers; la passe va de 20 à 50 DH et l’acte est consommé sur le chantier même.

La prostitution masculine, aussi, est en expansion. Cette prostitution bon marché n’est pas exclusivement féminine. Des hommes se travestissent et essaient de de se faire une place dans le milieu. Mais la clientèle n’est pas la même. «Ce sont des hommes ayant un goût affiché pour leurs semblables, et qui aiment ressembler aux femmes. Nous ne sommes pas en concurrence avec nos amies femmes prostituées», lance Foulla, Mohamed de son vrai prénom. Parmi leurs clients, on trouve bisexuels et hétérosexuels amateurs de ces homos travestis, mais on y trouve également «des personnes tellement ivres qui ne font plus la différence entre un homme et une femme», souligne Foulla, sur un ton amusant. La passe dépend du client, de 50 DH à 200 DH selon le physique du travesti et le portefeuille du client. Les travestis bas de gamme du parc de la Ligue arabe et des boulevards sont souvent une cible des agressions des clochards et des rafles policières. Les passes ont lieu là où l’on peut le faire, à l’abri des regards : dans un jardin, le bas d’un immeuble, dans le noir d’une ruelle ou d’une impasse.

En général, travestis et femmes prostituées s’entendent bien, et ne se livrent pas de concurrence. «Il m’arrive de passer le numéro de téléphone de mes copines prostituées à un client à la recherche d’une femme. Il ne faut pas oublier que nous sommes dans la même galère, et qu’il faut bien qu’on s’entraide», conclut Foulla.

Direction Tanger. La ville du détroit, la nuit tombée, vit au rythme de visiteurs venus goûter aux délices d’une chair, pas trop chère, assez attirante, abondante à satiété. Lieu : un hôtel trois étoiles, sur la corniche, face à la mer. Les passes y sont quotidiennes, dans un cadre plus feutré, plus confortable. A proximité : une discothèque. Une clientèle masculine diversifiée : nationaux, Espagnols, Français, Hollandais, MRE, ressortissants de pays du Golfe. De l’alcool à profusion, on s’amuse. La clientèle féminine : des prostituées, de 18 à 30 ans, venues en majorité d’autres villes (Fès, Meknès, Taounate, Azrou, Sefrou, Asilah, Larache…), pour être plus discrètes et pour rencontrer des clients plus généreux. Chacune a son histoire.

Là encore, c’est la misère qui pousse la fille à vendre son corps, mais ce n’est pas la seule raison. Il y a même des filles qui ont fait des études, certaines ayant des diplômes universitaires. Siham et Malika, deux sœurs, 30 et 22 ans, viennent de Sefrou. La première a une licence en langues, sa cadette a laissé tomber les études au niveau du collège. «Je me suis mariée à 16 ans avec un homme que je n’aimais pas, mes parents me l’ont imposé. Ça n’a pas duré plus de deux ans, j’ai eu avec cet homme une fille, elle a maintenant 12 ans. J’ai repris mes études après le divorce, mais une fois diplômée, pas de travail», se désole Siham. La suite coule de source : de Fès, elle met le cap sur Tanger, pour vendre son corps et gagner de l’argent.

«Ici, les clients sont généreux, et on passe inaperçues. On ne se plaint pas, nos corps sont encore jeunes et séduisants pour attirer une bonne clientèle, ce qui nous a permis de louer un appartement pas loin de cet hôtel à 3 500 DH le mois», reprend Siham. Malika, la cadette, était elle aussi, mariée, mais à un Saoudien. Pas pour longtemps. Juste ce qu’il fallait à ce dernier pour profiter d’une chair fraîche, et pour elle de se faire offrir quelques bijoux. Elle ne parle pas, écoute sa sœur raconter leur histoire, sans broncher. L’ambiance s’échauffe dans la boîte. Par grappes, les filles sont réunies en cercles autour de tables, en train de boire, et d’attendre un signe du client. La discothèque n’est qu’un lieu de rencontres, et la soirée qui dure jusqu’à trois heures du matin est égrenée par des passes dans l’hôtel d’à côté, ou dans d’autres. La passe coûte de 400 à 1 000 dirhams, c’est en fonction de l’heure de la nuit à laquelle elle a lieu, et selon sa durée. La moisson journalière de la fille peut atteindre jusqu’à 1 500 DH par jour, mais il y a des jours où elle ne gagne pas le moindre sou.

«Les filles ont des charges liées à leur activité, raconte un client habitué du lieu. Les intermédiaires sont nombreux, et pour continuer à fréquenter cette boîte elle se doit de s’acquitter des pourboires au serveur, à la préposée au vestiaire, au videur, au chauffeur de taxi et au réceptionniste de l’hôtel. A chacun d’eux elle donne entre 50 et 100 DH. Mais les clients mettent souvent la main à la poche pour les aider. Ici, les filles préfèrent l’hôtel à l’appartement, elles se méfient de clients agressifs et brutaux, elles y sont plus à l’aise. Il faut ajouter à ces charges la dîme de la police quand la fille est arrêtée lors d’une rafle, c’est pourquoi elles préfèrent ne jamais s’afficher dans la rue avec un client, mais que ce dernier les rejoint à l’hôtel». La prostitution de ce niveau bat son plein dans toutes les grandes villes. La clientèle est souvent constituée de cadres de sociétés, de fonctionnaires, de commerçants plus ou moins fortunés, et d’étrangers qui font miroiter leurs devises en échange de jeunes filles à peine pubères. Elle se pratique dans des hôtels moyenne gamme, ou dans des appartements appartenant à des entremetteuses.

Quant à la prostitution de luxe, c’est une autre affaire. Là, on passe à une autre catégorie sociale, à un autre standing, où le métier devient très rentable, et où beaucoup de filles ne s’avouent pas prostituées.

Source : decryptnewsonline, 29 mai 2016

Tags : Maroc, prostitution, pauvreté,

Photo : Citoyen mange de la poubelle au Maroc le premier jour du Ramadhan

Alors que le roi du Maroc occupe une haute position dans le ranking des rois les plus riches du monde, avec une fortune estimée à 6 milliards de dollars, selon le magazine américain Forbes, dépassant largement l’Emir du pétrole de Qatar, des milliers de citoyens marocains sont condamnés à se nourrir des poubelles, de la nouttiture jettée par ceux qui ont éte favorisés par le système corrompu.

Ce système qui se trouve à l’origine du soulèvement populaire dans la région du Rif et qui a conduit près de 400 activistes rifains à la prison dont certains ont été condamnés à des peines de 20 ans de réclusion. Pour la simple raison d’avoir dit non à la misère, l’injustice et la corruption.

Hier, Mouhcine Fikri a été écrasé par la benne du camion de la poubelle, aujourd’hui un citoyen a été photographié alors qu’il mangeait de cette poubelle. Des scénarios qu’on ne trouve au Maroc, où le peuple est abusé avec le soutien de la France, qui de la patrie des droits de l’homme est passée à patrie des pillages des peuple africains. Ses sociétés, en partenariat avec celles de Mohammed VI monopolisent l’économie au Maroc et obligent la population à une situation de précarité honteuse.

Voici un marocain qui se nourrit de la poubelle le premier jour du Ramadhan sacré au moment où les médias du pouvoir diffusent les images du roi en train de distribuer le panier de la honte et tourne le regard vis-à-vis du Maroc profond où le martyre est le pain quotidien du citoyen lambda.

Tags : Maroc, Makhzen, Mohammed VI, Ramadhan, misère, pauvreté, poubelle,

Oxfam : « Un Maroc égalitaire, une taxation juste »

Malgré la réduction de la pauvreté, les inégalités s’aggravent au Maroc. Elles menacent la cohésion sociale tout en freinant les efforts menés pour lutter contre la pauvreté.

Loin d’être une fatalité, elles peuvent être combattues par des politiques qui permettent un meilleur partage des richesses, l’accès à un travail décent, l’égalité femmes-hommes, une fiscalité socialement plus juste, le financement de services publics de qualité accessibles à toutes et tous.

Dans ce rapport, Oxfam dresse un état des lieux sur les inégalités au Maroc, et formule des recommandations pour faire de la fiscalité un instrument de réduction des inégalités.

Source : Oxfam

Mots-clés : justice fiscale, inégalités économiques, inégalités extrêmes, services sociaux de base, maroc, pauvreté,