Un Maroc de façade

par Alain Gresh, 3 juillet 2007
Le Monde diplomatiqueUn Maroc de façade↑
Lockerbie, une erreur judiciaire ?

C’est le 21 décembre 1988 qu’un Boeing du vol Pan Am 103 s’écrase au-dessus du village écossais de Lockerbie, faisant 270 morts. Bien que plusieurs autres pistes aient été évoquées, notamment celle de la Syrie, des groupes palestiniens, de l’Iran, c’est finalement la Libye qui sera visée par une longue enquête pleine de rebondissements. Deux suspects libyens seront livrés en avril 1999 à la justice écossaise pour jugement (ce qui permettra au colonel Kadhafi un retour sur la scène internationale et un allègement des sanctions prises contre lui par les Nations unies). Le 31 janvier 2001, un des suspects est condamné à la prison à vie, l’autre est acquitté.

Dans un texte de Jean-Pierre Langellier, son correspondant à Londres, et intitulé « Unique condamné pour l’attentat de Lockerbie, Al-Megrahi est autorisé à refaire appel, » Le Monde explique : « Ancien agent des services secrets libyens, Abdel Basset Ali Al-Megrahi, 55 ans, « pourrait avoir été victime d’une erreur judiciaire », a estimé une commission indépendante écossaise, sur la base d’éléments nouveaux recueillis pendant trois ans d’enquête. »

« Dans leur rapport, les huit membres de la Commission pour l’examen des affaires criminelles estiment que « certaines des choses (…) découvertes pourraient signifier que le condamné est innocent, certaines qu’il est coupable », mais « c’est à un tribunal d’en décider ». »

« L’affaire est donc renvoyée à la cour d’appel d’Edimbourg. Trois de ses juges examineront le rapport lors d’une procédure pouvant durer jusqu’à un an. La cour aura à choisir entre rejeter l’appel, ordonner un nouveau procès ou libérer le condamné. Al-Megrahi, détenu près de Glasgow, a toujours clamé son innocence. »

En conclusion, Langellier écrit : « Dans une lettre adressée à l’ONU en août 2003, la Libye a reconnu sa responsabilité dans l’attentat. Elle a signé peu après avec Londres et Washington un accord d’indemnisation des victimes – portant sur 2, 7 milliards de dollars – qui a permis la levée des sanctions imposées à Tripoli par l’ONU et les Etats-Unis. »

Rappelons que Pierre Péan, dans son livre Manipulations africaines (Plon, 2001), avait contesté la crédibilité de la piste libyenne. On pourra lire des extraits de ses thèses dans « Les preuves trafiquées du terrorisme libyen », Le Monde diplomatique, mars 2001. On notera le rôle du juge Bruguière, celui-là même qui a mordu la poussière lors des élections législatives de juin 2007 (sous la bannière de l’UMP).

Gaza, la Palestine et l’Arabie saoudite

Alors même que Mahmoud Abbas multiplie les déclarations intransigeantes concernant un éventuel dialogue avec le Hamas, l’Arabie saoudite, qui a parrainé les accords de La Mecque, semble développer une autre stratégie. Lors de sa tournée au Proche-Orient (après son voyage en France et en Europe), le roi Abdallah devait rencontrer Abbas à Amman. Cette rencontre a été annulée ,et la presse de la région donne comme explication le mécontentement du roi devant le refus obstiné d’Abbas d’explorer la voie du dialogue national. De plus, le président Moubarak, inquiet de la situation à Gaza, serait sur la même longueur d’onde que le souverain saoudien.

D’autre part, Le Monde diplomatique de juillet publie un article que j’ai écrit sur la crise actuelle en Palestine, intitulé « Comment le monde a enterré la Palestine », dont vous aurez un aperçu sur notre site, mais pour le lire intégralement il faut acheter le journal 🙂

A ceux qui douteraient encore que la création d’un gouvernement d’urgence par Abbas créerait les conditions d’une avancée de la paix, je conseille la lecture de l’analyse de Yezid Sayigh, « Hamas coup in Gaza », publiée par The International Institute for Strategic Studies, Londres.

Un Maroc de façade

Le Comité pour la protection des journalistes publie le un rapport accablant intitulé joliment Un Maroc de façade, signé de Joel Campagna et Kamel Labidi. Ce texte existe aussi en anglais et en arabe.

En voici quelques extraits.

(…) « Ce printemps, des responsables du gouvernement ont commencé à parler d’amendements au Code de la presse et de l’édition, appelant à la création d’un conseil national de la presse ayant le pouvoir de priver de publicité et d’interdire des journalistes pour de prétendues violations des règles déontologiques. Le projet de révision ne touche pas aux actuelles interdictions formulées en termes vagues sur le manque de respect à la monarchie, à l’islam, et sur la diffamation envers les institutions de l’Etat comme l’armée et l’appareil judiciaire. S’il limite le nombre d’infractions pouvant conduire un journaliste en prison, le projet de loi augmente cependant les amendes maximales pour des violations présumées de la loi. »

« En réaction à ces tendances inquiétantes, le CPJ a envoyé une délégation à Rabat et à Casablanca, qui a passé dix jours à rencontrer des journalistes marocains et des membres du gouvernement, enquêter sur les restrictions faites aux médias, évaluer leur impact, et exprimer leur inquiétude aux autorités. S’il se vante d’avoir une presse écrite vivante, estime le CPJ, le Maroc a fini par compter sur un système feutré de contrôle judiciaire et financier pour continuer à tenir sous surveillance les journalistes entreprenants. Le bilan montre que les conditions de la liberté de la presse sont loin de la reluisante version fournie par les autorités et par beaucoup de journalistes. »

(…) « Mais malgré un soi-disant régime parlementaire et une société civile dynamique, le pouvoir réel demeure fermement entre les mains du roi et du makhzen, un cabinet fantôme composé principalement de représentants du Palais, de dirigeants de l’appareil de sécurité et de l’armée, qui agissent en sous-main et donnent les principales orientations. Les critiques du régime disent que le roi et un petit groupe de proches collaborateurs accumulent le pouvoir plutôt qu’ils ne le libèrent, comme l’exigerait une vraie démocratie. La menace grandissante du terrorisme a aggravé les choses. Plusieurs attaques-suicides ont secoué Casablanca le 16 mai 2003, tuant 44 personnes. D’autres attaques, de plus faible ampleur, ont eu lieu depuis. Cet extrémisme violent combiné à un mouvement islamiste croissant a maintenu le Palais sur les dents et a peut-être poussé certains Marocains à vouloir donner la priorité à la sécurité sur les libertés publiques. »

Diffférents moyens sont utilisés pour faire pression contre la presse, notamment les tribunaux qui condamnent les journaux à de lourdes peines. La publicité est un autre « argument ».

« L’usage par les autorités de la publicité en guise de récompense ou de punition est un autre outil effectif. Selon de nombreux journalistes, compagnies d’Etat et agences gouvernementales privent les journaux critiques de ressources publicitaires cruciales. »

« Les compagnies privées proches du roi et du gouvernement ont aussi retiré leurs annonces de journaux ayant eu une prise de bec avec le gouvernement. Quand Le Journal a été provisoirement interdit en 2000, le magazine a perdu 80 % de ses publicités, selon Jamaï. L’éditeur de Al-Ousbouiya Al-Jadida, Abdelaziz Koukas, note que son hebdomadaire indépendant gagnait auparavant environ 100 000 dirhams (12 000 $) par mois en recettes publicitaires mais que, depuis qu’il a été accusé d’offense au roi pour avoir publié, en 2005, un entretien avec Nadia Yassine, fille du dirigeant islamiste Abdel Salam Yassine, il n’a perçu qu’un total de 250 000 dirhams (30 000 $) en publicité. De grandes compagnies comme Royal Air Maroc, ONA et Meditel ont toutes arrêté d’acheter des espaces publicitaires, dit-il. »

« La disparité des recettes publicitaires entre publications indépendantes et progouvernementales est évidente. Des journaux soutenant le régime, comme les quotidiens Aujourd’hui le Maroc et Le Matin, sont remplis de pages de publicité. « Dans Le Matin, il n’y a pas une page sans publicité », observe Anouzla en feuilletant l’édition du 2 avril. »

En conclusion, les auteurs du rapport écrivent :

« En dépit de l’amélioration par rapport aux années 1990, le CPJ conclut que la liberté de la presse a régressé notablement au cours des cinq dernières années. Malgré les progrès du Maroc, il reste encore beaucoup à faire dans un pays qui se décrit lui-même comme une monarchie constitutionnelle. »

« Huit ans après le début du règne du roi Mohammed, les dirigeants marocains doivent joindre les actes à la parole afin de démontrer leur engagement public en faveur de la démocratisation et de la liberté de la presse. La loi sur la presse actuellement en révision fournit une occasion propice à l’abolition de mesures qui permettent au Maroc d’emprisonner ou d’interdire des journalistes de la même manière que ce qui se passe dans d’autres pays arabes, présentés comme beaucoup plus répressifs. Une réforme judiciaire est nécessaire pour éliminer les poursuites à caractère politique et les coups bas. Car enfin, quand des juges rendent des verdicts alors que la défense ne se trouve pas dans le prétoire, le soutien déclaré du Maroc à la modération et à l’Etat de droit ne peut que sonner creux. »

Alain Gresh

Le Monde diplomatique, 3 juillet 2007

Tags : Maroc, Makhzen, réformes, Etat de droit, démocratie, répression, libertés, expression, presse, journaux, journalistes,

Les musulmans et la démocratie

En matière de relation entre l’islam et la démocratie, une grande partie des idées reçues est fausse.

D’abord, beaucoup sont ceux qui imaginent que c’est l’islam en tant que religion qui est hostile à la démocratie. Ensuite, il y a ceux qui pensent que se sont les musulmans -à cause de leurs sous-développement- qui sont hostiles à l’idéal démocratique. Et les deux, s’appuyant sur les vérités des sociétés musulmanes actuelles, concluent que les musulmans sont par nature anti-démocratiques.

Pour répondre à ces malentendus, j’ai choisit d’aborder la question sous deux angles différents. D’abord, sur le plan pratique, les pays musulmans sont-ils des démocraties ? Ensuite -et surtout- sur le plan théorique, quel regard porte les musulmans sur la démocratie ?

La démocratie dans les pays musulmans :

Il y a dans le monde aujourd’hui, 47 pays à majorité musulmane dans lesquels vivent entre 1,2 milliard et 1,5 milliard de musulmans constituant ainsi 20 % de la population mondiale.

Les 47 pays musulmans sont répartits sur tous les continents et le plus grand nombre d’entre eux se trouve au Proche-Orient et en Asie.

Contrairement à ce que pensent beaucoup, les pays arabes constituent moins de la moitié des pays musulmans et les arabes ne représentent que le 1/4 des musulmans.

Afin de bien comprendre le phénomène que nous analysons, il faut diviser le monde musulman en plusieurs catégories :

1- L’Islam asiatique –exclusion faite du Moyen-Orient- est parfaitement démocratique. Le plus grand pays musulman qu’est l’Indonésie est démocratique. Et la plus grande démocratie dans le monde qu’est l’Inde est gouverné par un musulman.

2- L’Islam Africain –exclusion faite de l’Afrique du Nord- a fait d’énormes pas vers la démocratie. Le Sénégal et le Mali sont aujourd’hui reconnus comme des démocraties.

3- L’Islam Arabe –comprenant l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient- n’est pas démocratique. Aucun pays des 23 pays arabes n’est incontestablement reconnu comme démocratique. Mais là aussi il y a des nuances à faire :

Au Maghreb Arabe : 4 des 5 pays du Maghreb (Mauritanie, Maroc, Algérie et Tunisie) sont en transition démocratique.
Au Machreq Arabe : L’ensemble de ces pays, en raison des régimes monarchiques qui gouvernent la majorité d’entre eux, sont encore loin de la démocratie. Exception faite du Liban (qui peut être considéré comme le pays arabe le plus démocratique) et le Kuweit qui se trouve en transition démocratique.

Deux conclusions peuvent être tirées de ce tableau :

1- La majorité des musulmans (950 millions de personnes) vivent dans des régimes démocratique ou en transition vers la démocratie.

2- C’est dans le monde arabe qu’il y a le moins de démocratie. C’est le monde arabe qui donne de l’Islam une mauvaise image en matière de démocratie.

On a ainsi clarifié certaines questions à propos de la démocratie dans le monde musulman en général, il importe maintenant de s’interroger sur le pourquoi de l’absence de la démocratie du monde arabe en particulier. Autrement dit, Cette absence s’explique-t-elle, comme le pense certains, par le refus des populations arabo-musulmanes de la démocratie ?

La démocratie dans l’opinion musulmane :

Dans les 10 dernières années, deux vagues de sondages ont étés réalisés par World Values Survey à propos de l’opinion des musulmans sur la démocratie.

Les sondages réalisés en 1995-1996 et en 2002-2003 dans cinq pays arabes (Algérie, Egypte, Jordanie, Arabie saoudite, Maroc) et neuf pays musulmans (Albanie, Azerbaïdjan, Bangladesh, Bosnie, Indonésie, Iran, Kirghizstan, Pakistan, Turquie) nous fournissent de très importantes indications.

En effet, la démocratie a une image très positive dans tous les pays arabes. Ainsi 61 % des personnes interrogées dans les pays arabes sont d’accords pour dire que « la démocratie peut avoir de nombreux problèmes, mais c’est la meilleure forme de gouvernement » contre 52 % des personnes interrogées dans 16 pays de l’Europe Occidental et … 38 % seulement dans l’ensemble Etats-Unis, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande.

Ainsi, non seulement les arabes sont favorables à la démocratie mais ils sont ceux qui ‘‘l’aiment’’ le plus dans le monde entier.

Nous voyons clairement que l’inexistence de démocratie dans le monde arabe n’est pas en elle même imputable aux musulmans.

Peut–on l’imputer alors à certaines interprétations extrémistes de l’Islam qui ont vu le jour dans le monde arabe et ne se sont pas développées dans le reste du monde musulman ?

Le débat est ouvert …

Source : Islamiqua, 18 nov 2006

Tags : Islam, démocratie, laïcité, religion, foi, culte,

Le Sénégal vu par Le Monde Diplomatique en 1974

Le fonctionnement des institutions : Démocratie et parti dominant

par Dmitri-Georges Lavroff

ituée sur le point le plus occidental de la côte africaine, la République du Sénégal occupe une place privilégiée parmi les Etats de l’Afrique au sud du Sahara. C’est une terre de rencontre qui a su combiner harmonieusement le fonds de civilisation négro-africaine avec les apports successifs de l’islam arabo-berbère et des valeurs et techniques de l’Occident. La République du Sénégal, parce qu’elle est ouverte vers l’extérieur et constitue la porte occidentale d’une partie du continent africain, s’efforce, ayant conscience de la diversité et de la complémentarité des civilisations, d’être un lieu dans lequel la modération et l’équilibre sont des valeurs fondamentales.

La loi-cadre du 23 février 1956 permit au Sénégal, comme aux autres anciennes colonies, de se donner une assemblée territoriale élue au suffrage universel et au collège unique, et un conseil de gouvernement.

Avec le référendum sur l’adoption du projet de Constitution de 1958, le pays allait franchir une étape décisive de son développement politique. Il se prononça massivement en faveur de l’adoption du projet de Constitution et opta pour le statut d’Etat membre de la Communauté. La Constitution du 24 janvier 1959 établissait un régime parlementaire comportant une prépondérance de l’exécutif. Avec une assemblée élue pour cinq ans au suffrage universel direct et un gouvernement dirigé par un président du conseil responsable, la Constitution sénégalaise de 1959 adoptait la plupart des mécanismes établis par la Constitution française de 1958. En même temps, le Sénégal tenta avec le Soudan, au sein de la fédération du Mali, une expérience d’organisation fédérale pour essayer de pallier les inconvénients de la « balkanisation » de l’Afrique noire. Elle échoua : fondée au mois de janvier 1959, la Fédération du Mali éclata le 20 août 1960. Le Sénégal devenait un Etat unitaire, indépendant et souverain.

Du modèle parlementaire au régime de type présidentiel

La Constitution du 20 août 1960 tirait les conséquences de l’évolution politique de la République. Elle établissait un régime parlementaire très proche de celui défini par la Constitution française de 1958. Le président de la République, élu par un corps électoral comparable à celui établi alors en France, politiquement irresponsable et assurant par son arbitrage le fonctionnement régulier des institutions, exerçait les fonctions habituellement attribuées au chef de l’Etat en régime parlementaire. En face, le gouvernement dirigé par le président du conseil était investi par l’Assemblée nationale et politiquement responsable devant elle. Chargé de la détermination et de la conduite de la politique de la nation, le gouvernement assurait l’exécution des lois et disposait pour ce faire de l’administration et de l’armée.

Quant à l’Assemblée nationale élue au suffrage universel direct pour une durée de cinq ans, elle exerçait le pouvoir législatif dans un domaine limité selon la technique de la Constitution française de 1958. L’aménagement constitutionnel mis en place contenait les germes de la crise qui devait éclater au mois de décembre 1962. Le dualisme de l’exécutif entraîna une opposition entre le président de la République, qui, bien que politiquement irresponsable, ne pouvait pas se contenter de « régner », et le président du conseil, qui devait être l’homme le plus important dans une interprétation classique du régime parlementaire. Finalement la thèse défendue par le président de la République l’emporta : il conclut que la crise avait démontré que, pour le moment, le dualisme de l’exécutif ne correspondait pas aux besoins du Sénégal.

Le président de la République élabora un projet de Constitution qui fut soumis au référendum le 7 mars 1963. Les leçons de l’expérience passée furent effectivement tirées. Le modèle parlementaire était abandonné au profit d’une Constitution de type présidentiel. Quatre organes constitutionnels étaient créés : le président de la République, élu au suffrage universel direct pour une durée de quatre ans, gardien de la Constitution et titulaire du pouvoir exécutif ; l’Assemblée nationale, élue au suffrage universel direct au scrutin majoritaire sur une liste nationale, qui détient le pouvoir législatif ; la Cour suprême, les cours et tribunaux qui exercent le pouvoir judiciaire, et un conseil économique et social, qui a un rôle consultatif. Les rapports entre les organes étaient, en principe, dominés par la règle de séparation entre les pouvoirs, fondamentale dans le modèle présidentiel.

La séparation des pouvoirs était effectivement respectée sur le plan organique ; le président de la République ne pouvait pas être renversé par l’Assemblée nationale et il n’avait pas le droit de la dissoudre. Par contre, il n’existait pas de véritable séparation fonctionnelle car le président de la République participait, notamment par l’initiative et le droit de recourir au référendum, à l’exercice de la fonction législative, il avait des pouvoirs exceptionnels et le pouvoir législatif de l’Assemblée nationale était limité. Ce déséquilibre en faveur de l’exécutif fut aggravé par la révision constitutionnelle du 20 juin 1967 qui attribuait, entre autres dispositions, au président de la République le droit de dissoudre l’Assemblée nationale au cours de la quatrième et de la cinquième année de son mandat.

Dualisme de l’exécutif et « domaine réservé »

Le 22 février 1970, le peuple sénégalais approuvait par référendum un nouveau projet de révision constitutionnelle préparé par le président de la République et soumis par lui à la Cour suprême et à l’Assemblée nationale. C’est ce texte, promulgué le 26 février 1973, qui est l’actuelle Constitution de la République du Sénégal. Les modifications importantes ainsi apportées à l’ancienne organisation transforment, à notre avis, la nature du régime présidentiel établi en 1963. La révision de la Constitution de 1963 introduit des éléments de régime parlementaire dans l’ancien cadre présidentiel. Il est probable que la crise que le Sénégal connut en 1968-1969 avec l’agitation étudiante et syndicale ainsi que la crainte des effets d’une « usure du pouvoir » résultant de la concentration de trop de responsabilités entre les mêmes mains expliquent le sens de la réforme.

Les organes constitutionnels ne sont pas fondamentalement modifiés. Le constituant de 1970 a maintenu le président de la République qui, politiquement irresponsable devant l’Assemblée, est élu au suffrage universel direct au scrutin majoritaire à deux tours pour une durée de cinq ans. Il n’est rééligible qu’une seule fois. L’unité de l’exécutif, déclarée indispensable en 1963, n’est pas maintenue. En effet, la Constitution crée un premier ministre qui, nommé par le président de la République, est placé à la tête du gouvernement. Le Sénégal est donc revenu à un dualisme de l’exécutif, mais il est aménagé pour maintenir la suprématie du président de la République. Celui-ci est le chef de l’Etat et dispose des pouvoirs qui sont traditionnellement attribués à cette autorité (droit de grâce, nomination des ambassadeurs, attribution des décorations, etc.). En outre, et c’est là une innovation, il dispose d’un « domaine réservé » qui comprend : les affaires étrangères, la défense nationale, les relations avec le pouvoir judiciaire. Dans ces matières, le président de la République agit directement, sans contreseing ministériel. Il exerce en outre un pouvoir général d’arbitrage et de direction qui s’exprime par la nomination du premier ministre et des ministres, la dissolution de l’Assemblée nationale quand celle-ci adopte une motion de censure, par des messages qu’il peut adresser à la nation et par le recours à la Cour suprême. En période de crise, il dispose des pouvoirs très étendus que lui donne l’article 47 de la Constitution, en vertu duquel il peut prendre « toute mesure tendant à rétablir le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et à assurer la sauvegarde de la nation à l’exclusion d’une révision constitutionnelle », « Lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacées d’une manière grave et immédiate ».

Le gouvernement n’a pas de pouvoir autonome. Il applique la politique de la nation sous la direction du premier ministre dans tous les domaines qui ne sont pas réservés au président de la République. Il est bien évident que la nature des rapports entre le président de la République et le premier ministre est fondamentale. La Constitution établit une incontestable prédominance du premier qui, maître du domaine qui lui est réservé, contrôle le reste de la politique menée par le premier ministre, qu’il a choisi et nommé. Pourtant les choses ne sont pas aussi simples en fonction des rapports qui s’établissent entre le premier ministre et l’Assemblée nationale.

L’Assemblée nationale est l’organe législatif. Elle est élue au suffrage universel et au scrutin majoritaire sur une liste nationale. La conséquence importante de ce mode de scrutin est l’homogénéité politique de l’Assemblée nationale, qui comprend des représentants d’un seul parti. Ses pouvoirs sont essentiellement législatifs : « l’Assemblée nationale détient le pouvoir législatif. Elle vote seule la loi » (art. 56 de la Constitution). Son domaine d’intervention est limité par la détermination de matières législatives hors desquelles elle ne peut légiférer. Les dispositions inscrites dans l’article 34 de la Constitution française de 1958 ont fait école en Afrique noire ! Elle vote le budget, donne l’autorisation de ratifier les traités internationaux, intervient dans la procédure de révision de la Constitution.

Les organes judiciaires, dont la Cour suprême, qui est juge de la constitutionnalité, le Conseil économique et social et la Haute Cour de justice complètent ces organes constitutionnels.

La nature constitutionnelle du régime établi par le texte de 1970 dépend des rapports entre les organes. Il y a à cet égard matière à controverse entre spécialistes de droit constitutionnel. Les hautes autorités sénégalaises ont insisté sur la nature présidentielle du régime établi. L’irresponsabilité politique du président de la République, le fait que, élu au suffrage universel, il représente la souveraineté populaire au même titre que l’Assemblée nationale, peuvent être invoqués en faveur de cette interprétation. Mais, d’un autre côté, plusieurs arguments permettent de la mettre en cause.

Il y a le fait que la séparation organique et fonctionnelle, qui est le critère essentiel du régime présidentiel, n’est pas appliquée. Sur le plan fonctionnel, le président de la République participe à l’exercice du pouvoir législatif par l’initiative des lois, le droit de demander une seconde lecture des textes votés, la possibilité de légiférer par ordonnances soit sur habilitation, soit en vertu de ses pouvoirs exceptionnels. Sur le plan organique, la séparation des pouvoirs n’est pas non plus appliquée : le droit de dissolution de l’Assemblée nationale appartenant au président de la République est l’illustration de cette situation ; dans le même sens, le droit attribué à l’Assemblée de voter une motion de censure pour obliger le premier ministre à démissionner manifeste une interdépendance organique entre l’Assemblée nationale et un élément de l’exécutif.

Si on devait qualifier juridiquement ce régime constitutionnel, on ne pourrait que le déclarer « sui generis ». Il y a un mélange d’éléments du régime présidentiel en ce qu’ils renforcent l’autorité du président de la République et de pratiques propres aux régimes parlementaires rationalisés. De toute manière, le problème du constituant n’est pas de faire une Constitution qui satisfasse les professeurs de droit constitutionnel désireux (il y en a) de trouver exprimés dans un texte les modèles théoriques établis par la doctrine. Il s’agit de mettre en place un aménagement juridique qui, respectant la liberté des citoyens, assure un bon fonctionnement des institutions, compte tenu des circonstances de temps et de lieu et des objectifs politiques poursuivis. A cet égard, la Constitution de 1970 paraît satisfaisante. L’existence d’un président de la République, incarnation de l’unité de la nation, statuant seul dans les domaines les plus importants, assure la stabilité. La présence d’un premier ministre, responsable devant l’Assemblée nationale et le président de la République, qui mène la politique journalière sous le contrôle des représentants du peuple, permet au président de la République de prendre du recul et d’éviter l’usure du pouvoir. Bien sûr, il ne faut pas oublier l’hypothèse théorique d’un premier ministre qui, s’appuyant sur une majorité dans l’Assemblée, s’opposerait au président de la République. Ce n’est plus alors un problème de textes mais d’hommes et de circonstances politiques.

Le rôle de l’Union populaire sénégalaise

Le fonctionnement du régime dépend très largement des conditions politiques, économiques et sociales dans lesquelles les mécanismes constitutionnels sont amenés à fonctionner. Les partis politiques jouent un rôle fondamental. Le nombre et la nature des partis politiques modifient le sens des règles constitutionnelles.

Le Sénégal a, comme la très grande majorité des Etats d’Afrique noire, renoncé au pluripartisme qui était la règle au moment de l’indépendance. Il fut déclaré responsable de tous les maux : obstacle à l’unification nationale, facteur d’instabilité gouvernementale, gêne pour le développement économique, etc. Ces arguments, dont certains ont une valeur sûre et d’autres le sens d’un plaidoyer pro modo, ont conduit à la généralisation du parti unique dans les Etats d’Afrique noire. Au Sénégal, on a préféré la formule du parti dominant. Si le pluripartisme est constitutionnellement possible et s’il existe effectivement plusieurs formations, l’Union progressiste sénégalaise (U.P.S.) est le parti largement dominant. Majoritaire au moment de l’indépendance, l’U.P.S., au cours des années, a absorbé la plupart des partis d’opposition.

Les mécanismes électoraux favorisent largement sa position dominante. Le système de l’élection sur une liste nationale fait que l’U.P.S. est certaine de conquérir tous les sièges de l’Assemblée nationale. Dès lors, les partis d’opposition, dont les chances d’une victoire électorale sont nulles, sont contraints soit à la fusion avec l’U.P.S., soit à la lutte clandestine avec les risques que cela comporte.

La présence d’un parti dominant fait que le gouvernement est composé de ministres appartenant à une même famille politique. Ainsi les mécanismes constitutionnels perdent de leur intérêt. A quoi sert-il de prévoir, avec un grand luxe de détails, des procédures destinées à assurer une séparation entre les pouvoirs quand les membres de l’Assemblée nationale et les membres du bureau politique de l’U.P.S. délibèrent en commun des projets qui, voulus par le gouvernement, seront ultérieurement soumis à l’Assemblée nationale ? Dire du président de la République qu’il est politiquement irresponsable ne l’empêche pas d’être soumis à la confiance des membres du parti, dont les députés, en tant que secrétaire général de l’U.P.S.

Il apparaît que les structures constitutionnelles ont surtout un rôle de légitimation juridique des décisions qui sont arrêtées par les organes du parti. Il en va ainsi à tous les niveaux. Lors des élections, le peuple ratifie le choix des candidats, que l’on sait devoir être élus, par les organes du parti. La loi est la volonté du parti, corrigée par les avis de la Cour suprême, confirmée par l’Assemblée nationale composée comme on sait. Les ministres sont les membres les plus influents du parti, et le président de la République en est le secrétaire général et le premier ministre le secrétaire général adjoint.

Les gouvernants africains ont fait le choix d’une méthode pour concilier les impératifs du gouvernement de pays en voie de développement économique et de la construction nationale avec leur idéal démocratique. Le parti unique ou dominant présente d’incontestables avantages, mais il a l’inconvénient de faciliter les tentations autoritaires. En fin de compte, la réalisation de la démocratie ne dépend pas tellement des structures constitutionnelles, mais surtout de la volonté démocratique des dirigeants et de l’organisation démocratique du parti.

(2) Voir les chiffres cités par J.-L. Marques, la Politique financière et le développement économique du Sénégal, thèse, Clermont-Ferrand, 1971.

Dmitri-Georges Lavroff

Directeur du département de droit public et science politique de l’université de Bordeaux-I.

Le Monde diplomatique, février 1974

Tags : Sénégal, Afrique, Maghreb, démocratie, partis politiques,

Tunisie / Commémoration de la révolution dans un climat de morosité: la démocratie, c’est dur

Pendant 8 ans, on avait commémoré la révolution du 14 janvier 2011 sur fond de désenchantement face à une crise multiforme qui ne fait que s’aggraver Ce sera malheureusement le cas cette année aussi.

A mesure que les années passent, on prend de plus en plus conscience du prix à payer pour passer de la dictature à la démocratie. On s’aperçoit que celle-ci n’est pas la panacée.

Au surplus, cette liberté que nous chérissons tant ne se décrète pas. Elle nécessite un long apprentissage, une nouvelle mentalité, des sacrifices et surtout elle n’a pas que des avantages, puisq’elle peut devenir une véritable malédiction si on en abuse.

C’est ce à quoi Churchill voulait attirer notre attention quand il a défini la démocratie comme le pire de systèmes à l’exception de tous les autres.

La démocratie, c’est la maîtrise de soi, c’est la rationalité, c’est la modération, c’est la tolérance, c’est le rejet de la violence, c’est le patriotisme, c’est toute une culture que nous n’avons pas encore. Ce qui ne veut pas dire qu’elle est hors de notre portée.

Au contraire, de par notre histoire, notre homogénéité, notre tempérament pacifique qui privilégie les solutions pacifiques et les compromis, nous sommes peut-être le peuple arabe le mieux qualifié pour y accéder. Il suffit de faire les efforts qu’elle requiert.

Leaders, 13 jan 2020

Tags: Tunisie, printemps arabe, démocratie,

Algérie : Entamer le changement

La santé va au plus mal. C’est le ministre qui qui pose son diagnostic à travers les symptômes les plus apparents de la déficience dans la prise en charge des patients et de la gestion des établissements hospitaliers. Ce paradoxe entre les énormes ressources financières injectées dans le système des soins et ses piètres performances n’est toutefois pas nouveau.

Les prédécesseurs de l’actuel ministre, entre autres, ont tous relevé cette inadéquation et posé autant de fois ce même diagnostic sans que la situation n’ait évolué d’un iota dans le bon sens.

Aujourd’hui le pays a besoin de solutions pratiques qui donnent des résultats sur le terrain en matière de qualité des prestations et qui ont des répercussions positives sur la charge financière. Les précédentes ont jusque-là totalement échoué, pour la bonne raison que le système dans son entièreté n’est pas tourné pour atteindre un tel impact et que les tergiversations autour du principe de la gratuité des soins et des plans de sa remise en cause provoquaient l’émergence d’appétits aussi féroces que ceux déjà en place, nourris par la gabegie qui y règne.

Creuser une franche tranchée entre les sphères des intérêts permettrait déjà de solutionner à moitié le problème ; l’autre moitié se dissoudra avec l’assainissement d’une administration trop impliquée dans le jeu des affaires.

Contrairement à l’idée répandue, l’accès aux soins n’est pas gratuit, il est financé par les deniers publics. Verrouiller les accès aujourd’hui faciles à la dépense stérile et impunie est le seul moyen réaliste et efficace pour entamer le changement de la culture prévalant dans le système actuel et amener ce dernier à se soumettre à une gestion plus conforme aux canons de l’économie de la santé.

Ne pouvant plus être entretenue, toute la fumée qui se dégage aujourd’hui à travers les comportements anomiques des uns et des autres finira forcément par se dissiper pour laisser place aux questions sérieuses de la formation, de l’organisation, de l’équité dans l’accès aux soins, de la performance, de la recherche médicale et, pourquoi pas, de la contribution à l’économie nationale à travers le tourisme médical, à l’instar de ces pays qui nous en administrent la leçon alors qu’ils ne sont pas forcément mieux dotés que l’Algérie.

Horizons, 1 jui 2019

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Les soulèvements non violents en Afrique ont connu le taux de réussite le plus élevé au monde

D’après le magazine de référence mondiale en matière de relations internationales Foreign Affairs, depuis les années 1970, les soulèvements non violents en Afrique ont connu le taux de réussite le plus élevé au monde. Environ 58% des soulèvements visant à renverser les dictatures ont réussi.

L’un des facteurs de cette efficacité est le long héritage de résistance de l’Afrique contre la domination coloniale et néo-coloniale.

Une nouvelle vague de pouvoir populaire monte en Afrique. Le 2 avril, un mouvement de résistance non-violent en Algérie a réussi à faire pression sur Abdelaziz Bouteflika pour qu’il démissionne après 20 ans de présidence. Neuf jours plus tard, des manifestants soudanais célébraient le limogeage du président soudanais Omar al-Bashir depuis 30 ans, après trois mois de soulèvement contre son régime.

Les renversements non-violents de Bouteflika et de Bashir ne sont pas des aberrations. Elles reflètent une tendance surprenante à travers le continent: malgré les perceptions communes de l’Afrique déchirée par la violence et les conflits, depuis 2000, la plupart des rébellions ont été pacifiques et sans armes. Au cours de la dernière décennie, les soulèvements de masse en Afrique ont représenté une campagne sur trois non violente visant à renverser les dictatures à travers le monde. L’Afrique a vu 25 nouveaux mouvements de masse non-violents, presque deux fois plus qu’en Asie, la deuxième région la plus active avec 16 pays.

Depuis les années 1970, les soulèvements non violents en Afrique ont également connu le taux de réussite le plus élevé au monde. Environ 58% des soulèvements visant à renverser les dictatures ont réussi, dans des pays aussi divers que le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, Madagascar, le Mali, l’Afrique du Sud, la Tunisie, la Zambie et, plus récemment, l’Algérie et le Soudan. Cela dépasse de loin le taux de réussite de 44% des mouvements contre les régimes autocratiques dans toutes les autres régions.

Qu’est-ce qui explique l’efficacité frappante des mouvements de masse africains? L’un des facteurs est le long héritage de résistance de l’Afrique contre la domination coloniale et néo-coloniale. Après tout, le Mahatma Gandhi a jeté les bases de sa résistance civile à la domination britannique en Inde pendant plus de 21 ans et s’est organisée avec des travailleurs migrants en Afrique du Sud. Les mouvements de résistance africains contemporains ont des racines profondes, allant des campagnes anti-fiscalité menées au début des années 1900 contre les occupants britanniques aux actions coordonnées visant à boycotter les entreprises soutenant l’apartheid en 1990 en Afrique du Sud. Les mouvements en Algérie et au Soudan se sont produits par de nombreuses vagues et font écho à des manifestations passées – en Algérie, les grèves générales survenues pendant la lutte pour l’indépendance, des micro-émeutes localisées et les bouleversements nationaux de 2010 à 2012; et au Soudan, les soulèvements de 1964 et de 1985. Outre les connaissances historiques dont la génération actuelle de manifestants a hérité, quatre autres facteurs clés sont à la base du succès des soulèvements en Afrique. Les activistes ont mobilisé des mouvements de masse, encouragé la participation et le leadership des femmes, suscité un soutien actif ou tacite de la part des services militaires et de sécurité et obtenu l’adhésion de la région.

Les ingrédients gagnants

Pour que les mouvements nationaux réussissent, ils doivent susciter une participation de masse qui transcende les frontières régionales, générationnelles, de classe, ethniques et religieuses. La résistance civile africaine a longtemps fait appel au pouvoir de leadership et de coordination d’associations professionnelles, de syndicats et d’autres institutions, telles que les églises, pour communiquer les principes d’un mouvement à un large éventail de participants. Au cours du soulèvement récent en Algérie, un journaliste et membre de l’association des éditeurs de livres a imprimé « 18 commandements » à l’intention des manifestants afin que la résistance reste non violente et efficace. À Khartoum et à Omdurman, l’Association des professionnels soudanais a réuni des membres des secteurs de la santé, de l’éducation et du droit sous une bannière non idéologique. Il a également aidé les participants au soulèvement à maintenir une discipline non-violente et à parler d’une seule voix. Les manifestations au Zimbabwe contre Robert Mugabe, l’un des présidents les plus anciens de l’Afrique, avaient mijoté pendant des années, mais ils n’ont menacé le dirigeant que lorsqu’un pasteur charismatique, Evan Mawarire, a commencé à mobiliser des professionnels et des jeunes. Ces efforts ont animé plus d’un an de manifestations de la part d’anciens combattants, de fidèles, d’avocats, de travailleurs pauvres et d’autres personnes, qui ont finalement renversé Mugabe en 2017.

Au cours de la dernière décennie, la mobilisation a réussi lorsque les activistes ont transcendé leur identité. Avec 62% de la population africaine âgée de moins de 25 ans, des coalitions couronnées de succès ont été mobilisées pour avoir le soutien des jeunes, comme dans le mouvement sénégalais Y’en a Marre (2011) et Balai Citoyen (Burkina Faso) (2013). En Algérie, les jeunesont envahi les rues pour protester contre le chômage, mais également leurs parents et leurs grands-parents, qui souhaitent un avenir meilleur pour leurs enfants.

Ces succès ont été étayés par le rôle de premier plan joué par les femmes dans l’organisation, la direction et la participation à des activités de résistance. En tant que moitié de la population, les femmes doivent participer si un mouvement de masse doit fonctionner. Mais elles ont fait plus que simplement se présenter: leur direction a ajouté une légitimité politique aux manifestations, renforcé la crédibilité des appels à une unité non partisane et a renforcé l’importance de la tactique non violente. Des images emblématiques du Soudan et de l’Algérie ont représenté des jeunes femmes dansant et récitant de la poésie, appelant les manifestants à célébrer et à s’unir face à la dictature. Au Soudan, Alaa Salah, âgée de 22 ans, surnommée la « reine nubienne » de la manifestation, a décrit sa résistance comme étant motivée par le patriotisme et non par la politique.

Les femmes ont également rejoint les manifestations en Algérie à une échelle sans précédent et ont occupé des postes de direction dans le mouvement des citoyens, composé de plusieurs partis. Ailleurs sur le continent, les femmes ont revitalisé des tactiques historiquement novatrices, telles que la nudité publique lors de mouvements écologistes au Kenya, la protestation pour la paix au Libéria et en Sierra Leone et la pression exercée sur l’ancien président de la Côte d’Ivoire pour qu’il démissionne. Au Zimbabwe, Women of Zimbabwe Arise organisait des manifestations contre la corruption et la répression de Robert Mugabe depuis le début des années 2000, bien avant les manifestations qui avaient contribué à son renversement. Et les femmes ont dirigé les efforts pour répondre aux besoins essentiels des manifestants: prenons, par exemple, la grand-mère de Khartoum qui a coordonné des volontaires pour fournir plus de 2 000 repas par jour au sit-in.

Les manifestations, quelle que soit leur taille et leur caractère inclusif, ont souvent du mal à susciter un changement immédiat, à moins que les élites économiques, les bureaucrates civils et les forces de sécurité ne cessent de protéger le statu quo. Par exemple, les forces de sécurité pourraient signaler la non-coopération avec le régime en jetant les armes, en refusant de se présenter au devoir, en ignorant l’ordre de tirer sur les manifestants, voire en défendant les manifestants contre la répression. L’armée soudanaise, qui était étroitement liée à Bashir, a choisi de protéger les manifestants des milices Janjaweed dans les rues de Khartoum (les groupes notoires pour leur rôle dans le génocide du Darfour) et d’autres forces de sécurité, alors même que les manifestants occupaient le siège de l’armée. Dans ce cas, la loyauté de l’armée est passée de bas en haut. Des fantassins se rangeaient aux côtés des manifestants dans la rue plusieurs jours avant que les hauts dirigeants ne convoquent une réunion à minuit pour renvoyer Bashir de ses fonctions.

Les manifestants ont souvent besoin de l’aide des forces de sécurité, mais les forces militaires risquent toujours de détourner les soulèvements populaires pour s’emparer du pouvoir. Au Soudan, l’opposition a réprimé cette menace en continuant à organiser des manifestations massives et des débrayages même après la démission de Bashir et en annonçant rapidement ses plans pour la mise en place d’un conseil de direction de transition civile. Les manifestants en Algérie ont exercé des pressions similaires sur leurs dirigeants de transition et ont tourné leur attention à la corruption perçue dans l’élite cercle de Bouteflika en attendant les détails sur les plans civils de la transition.

Alors que les manifestations persistent et que la pression monte, les acteurs régionaux jouent un rôle plus important en facilitant les transitions pacifiques et en consolidant les revendications populaires en matière de démocratie. L’Union africaine (UA) défend la gouvernance démocratique, mais elle a réagi de manière incohérente face à la résistance non-violente. La Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance , entrée en vigueur en 2012, rejette les changements inconstitutionnels de gouvernement. Cela empêche l’Union africaine d’adhérer explicitement aux manifestations populaires comme base légitime des transitions politiques. En raison de cette neutralité forcée, l’UA a échoué dans sa tentative d’intervenir dans la crise burundaise de 2015 en raison de la réélection controversée du président Pierre Nkurunziza pour un troisième mandat. L’UA a également envoyé des messages contradictoires lors des manifestations électorales de 2018 au République démocratique du Congo et a fermé les yeux sur les manifestations en cours au Cameroun ainsi que sur les récentes manifestations d’austérité au Tchad.

Pourtant, la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance énonce clairement ce qui devrait suivre les changements de dirigeants induits par la mobilisation de masse: une transition rapide vers des élections démocratiques, dans le respect et la protection des droits de l’homme. En conséquence, l’UA a pris le parti des peuples algérien et soudanais au lendemain des victoires de leurs mouvements, appelant à une transition menée par des civils vers un régime démocratique dans les deux pays. Cette évolution récente vers un soutien sans équivoque de l’UA au régime civil est importante car elle témoigne de la consolidation des normes démocratiques sur le continent, même (peut-être surtout) sans l’intervention américaine et européenne pour cette fin.

Les groupes sous-régionaux ont encore plus d’influence que l’UA dans la consolidation des acquis politiques obtenus grâce à la résistance non-violente. Des manifestations de masse en Côte d’Ivoire en 2011 , au Burkina Faso en 2014 et en Gambie en 2016 ont amorcé des transitions politiques en partie grâce à la médiation des dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. Les principaux alliés et les institutions qui soutiennent les autocrates peuvent également jouer un rôle décisif en retirant leur soutien. Par exemple, la décision de la Southern Africa Development Community de ne pas défendre Mugabe lors des manifestations était cruciale pour la transition politique au Zimbabwe.

Pouvoir au peuple

Les campagnes de résistance civile en Afrique ne réussissent pas toujours. Les récents mouvements en faveur de la démocratie au Cameroun et au Togo n’ont jusqu’à présent débouché que sur une répression violente de la part du gouvernement. Au Sahara occidental occupé par le Maroc, le mouvement d’autodétermination sahraoui n’a pas encore accédé à l’indépendance. Et même lorsque la résistance civile fonctionne à court terme, le nouveau système ne parvient parfois pas à apporter un réel changement. En Afrique du Sud, par exemple, de nombreux observateurs se plaignent de ce que, bien que l’apartheid légal ait pris fin en 1994, les inégalités, la ségrégation et le racisme persistent. Dans d’autres cas où des bouleversements populaires ont renversé des dictateurs, une deuxième vague de forces contre-révolutionnaires s’est mobilisée contre le nouvel ordre, comme ce fut le cas avec le coup d’État qui a installé Abdel Fattah Al Sisi à la présidence égyptienne.

Pourtant, les archives historiques fournissent un motif d’optimisme prudent. En Afrique plus que partout ailleurs dans le monde, les campagnes de résistance civile dépassent la lutte armée. Et les mouvements non-violents mènent généralement à des démocraties de meilleure qualité à long terme. Les acteurs internationaux et les organisations régionales, telles que l’Union africaine et ses huit communautés sous-régionales constitutives, ont un rôle important à jouer pour dénoncer la répression des manifestants pacifiques, protéger les institutions démocratiques et les droits de l’homme et aider à consolider la transition vers la démocratie. Les acteurs externes ne doivent pas renverser ou coopter les manifestations populaires, mais ils peuvent soutenir leurs aspirations à la démocratie et au respect des droits de l’homme.

Par Zoe Marks, Erica Chenoweth, et Jide Okeke

Source : Courrier du Rif

Tags : Afrique, printemps arabe, soulèvement pacifique, démocratie, dictature, répression,

Hicham Alaoui : « L’exception marocaine » est une idée française pour faire échec à l’aspiration démocratique au Maroc

Source : Alifpost, 29/04/2019

De l’exceptionnalisme à la singularité: L’expérience maghrébine dans une perspective contemporaine/ Hicham Alaui

Aujourd’hui sera un jour de débat délibératif, je ne vous accablerai donc pas de discussions académiques excessives. Par-dessus tout, je voudrais vous souhaiter à tous la bienvenue à cet atelier, qui représente l’aboutissement d’un riche voyage intellectuel. Ce voyage a commencé en 2015, lorsque le professeur Stephen King, le professeur Abdeslam Maghraoui et d’autres interlocuteurs ont commencé à organiser une conférence pour explorer la politique contemporaine en Afrique du Nord.

L’effort qui en a résulté en avril 2016 a rassemblé un cercle impressionnant d’universitaires dans un atelier chargé pour engager les courants sociaux, économiques et politiques du Maghreb. Les contributeurs à ce projet sont devenus les auteurs de divers chapitres de ce nouvel ouvrage, que nous sommes tous heureux de voir se concrétiser. En même temps, je suis intimidé par les connaissances dans cette salle. Beaucoup d’entre vous connaissent mieux que moi les nuances empiriques et les contours théoriques de la région. C’est pourquoi, dans cet esprit, permettez-moi de ne présenter qu’une seule idée en guise de réflexion dans le cadre de nos discussions. Je présente cette idée non pas comme un technicien académique mais comme un citoyen privé marocain qui, d’un point de vue unique en tant que chercheur et témoin, a vu cette région évoluer au fil des décennies.

Il y a longtemps eu une idée qui se cache dans le discours politique au sein du monde arabe, et même dans les milieux universitaires, sur l’exceptionnalisme maghrébin. Par ” exceptionnalisme “, j’entends l’idée que les États d’Afrique du Nord ne suivent pas le modèle général du Moyen-Orient ou d’autres pays en voie de modernisation. Au contraire, les pays du Maghreb évoluent à leur propre rythme en raison de leur spécificité culturelle.

Dans le passé, l’argument en faveur de l’exceptionnalisme maghrébin a été mis à profit par divers acteurs au service de projets antidémocratiques. La France a invoqué cette croyance pour justifier sa domination coloniale. Il l’exploiterait à nouveau au cours des décennies suivantes en insistant sur le fait que c’était la stabilité et l’ordre, et non la transformation politique, qui étaient recherchés par les sociétés de l’Afrique du Nord. N’oublions pas la quintessence de la déclaration de l’ancien président français Jacques Chirac, qui, dix ans avant le printemps arabe, proclamait que les Tunisiens voulaient du pain et de la nourriture, et non la liberté et les droits humains. Une telle déclaration est venue du président du lieu de naissance de l’illumination.

Ironiquement, de nombreux analystes ont réagi à la démocratisation tunisienne en affirmant que c’est le caractère exceptionnellement tolérant et libéral du pays qui a présidé à la révolution jasminienne. Il semble que l’exceptionnalisme ne meurt jamais. De même, pendant et après le printemps arabe, alors même que la Tunisie subissait ses changements révolutionnaires, les régimes marocains et algériens ont insisté sur le fait qu’ils restaient uniques par leur résistance et leur durabilité face aux troubles régionaux. La version algérienne de l’exceptionnalisme implique qu’une économie planifiée centralisée, une position géopolitiquement neutre et un tiers-mondisme d’origine révolutionnaire font du pays un candidat improbable à l’agitation révolutionnaire.

L’exceptionnalisme au Maroc a reposé sur la persistance du monarchisme. Le régime royal est présenté comme une panacée essentielle, mystérieuse et même orientaliste aux besoins de la société marocaine, ce qui rend le pays résistant au changement. Autre exemple, des observateurs ont parfois suggéré que l’islam et l’islamisme en Afrique du Nord sont exceptionnels par leur caractère modéré et leur pratique historique.

Cette notion plus large d’exceptionnalisme maghrébin peut aussi provenir en partie du discours postcolonial, qui a profondément imprégné la façon dont des générations d’Occidentaux sympathisent avec les luttes du monde arabe. Elle a été à son tour instrumentalisée par certaines élites françaises et leurs homologues autocratiques du Maghreb. Pourtant, aujourd’hui, près d’une décennie après le printemps arabe et alors que nous assistons à la dernière vague de changements politiques en Algérie, il est devenu évident que l’exceptionnalisme maghrébin est une idée qui doit être recalibrée.
Ce que je propose, c’est que l’Afrique du Nord ne soit pas considérée comme exceptionnelle, mais comme singulière. Il y a une singularité maghrébine que l’on peut observer aujourd’hui, une singularité qui ne se définit pas par son insularité par rapport à d’autres événements ou traits immuables arabes, mais plutôt par la manière dont les forces structurelles se combinent et se recombinent d’une manière dynamique. En effet, le Maghreb est un microcosme du monde arabe. C’est là que réside sa singularité.

Dans les seuls États d’Afrique du Nord, nous pouvons saisir les variations transversales spectaculaires qui caractérisent les tendances régionales plus larges. Nous voyons à la fois le monarchisme contre le républicanisme, la démocratie contre l’autoritarisme, l’ordre politique centralisé contre l’effondrement des États, la laïcité contre l’islamisme, et le rentierisme pétrolier contre le développement pauvre en ressources. La liste est longue : au sein de cette sous-région, nous avons une diversité extraordinaire. Le seul point commun entre les pays du Maghreb est peut-être la langue : tout le monde dans le monde arabe s’accorde à dire que nos différents dialectes nationaux sont tout aussi inintelligibles !

Il y a beaucoup à déballer ici, au carrefour de la singularité maghrébine. Je voudrais me concentrer sur un seul aspect, à savoir les possibilités de changement démocratique au niveau macroanalytique. Permettez-moi de considérer un sous-ensemble du Maghreb, à savoir le Maroc, l’Algérie et la Tunisie, que je connais bien. En Tunisie, comme nous le savons, il y a une démocratie électorale qui est en train de se consolider et qui lutte pour institutionnaliser l’État de droit. Sa démocratisation en 2011 n’était pas censée avoir lieu, étant donné les revendications répétées de l’exceptionnalisme maghrébin ou tunisien utilisé par les élites françaises dans leur soutien aux Ben Ali.

Tout comme la Troisième Vague de la Démocratie, la démocratie tunisienne a été conçue à travers des pactes entre acteurs politiques concurrents. En l’espèce, ces acteurs concurrents étaient des islamistes et des laïcs. Divisés par une discorde idéologique mais incapables de se conquérir mutuellement, les partis islamistes et non islamistes tunisiens ont coopéré à travers une gouvernance houillère pour jeter les bases de leur transition démocratique, y compris les élections et le constitutionnalisme. Ce chemin n’était ni facile ni parfait. Les négociations islamo-sécularistes ont été marquées par des tensions et ont failli s’effondrer à plusieurs reprises. De plus, les luttes économiques, les questions de justice transitionnelle et la corruption ont accablé l’Etat tunisien.

Pourtant, la Tunisie pourrait bien révéler que le mode de transition politique le plus avantageux au Moyen-Orient est la démocratie paritaire. Par conséquent, il peut être intellectuellement bénéfique de réengager l’étude comparative du pacting et des transitions pactées. Les acquis de la Tunisie ont également produit un fait extraordinaire qui n’a pas été mentionné dans les médias arabes. Lorsque Tunis a accueilli le 30e sommet de la Ligue arabe le mois dernier, c’était la première fois que la Ligue arabe se réunissait dans une démocratie arabe fonctionnelle.

L’Algérie, aujourd’hui, présente une dynamique différente. Comme le montrent les événements qui se déroulent encore, les Algériens se rebellent depuis des années contre deux contraintes politiques. Le premier est le fantôme de la guerre civile des années 1990 et le long effet paralysant que son héritage a eu sur la mobilisation populaire et le pluralisme politique. A bien des égards, le soulèvement d’aujourd’hui montre que le pays “rattrape” le Maroc et la Tunisie pour ce qui est d’avoir son printemps arabe. Plus profondément, elle “rattrape” son propre passé en reprenant là où elle s’était arrêtée en 1988. La deuxième contrainte est l’autoritarisme militarisé qui caractérise l’Algérie depuis son indépendance, un autoritarisme où les forces armées gouvernent derrière une façade de pouvoir civil. L’ère Bouteflika a été une modeste reconfiguration, car l’ancien président Bouteflika s’est taillé un petit royaume d’autonomie exécutive en faisant appel à de nouvelles élites commerciales et en réorganisant les services de sécurité.

En rejetant Bouteflika et le système autocratique au sens large, les Algériens rejettent également les trois formes d’évasion qui ont longtemps façonné la politique. Il s’agit de l’émigration vers l’Europe, du virage vers l’islamisme, de la déconnexion totale et de la marginalisation. Les Algériens appellent ceux qui ont fait ce dernier comme des hittistes, c’est-à-dire ceux qui s’appuient sur le mur. Ce que nous voyons aujourd’hui, c’est le renversement de la tendance hittiste, dans laquelle de nombreux citoyens ont cherché à sortir du traumatisme politique par un désengagement existentiel.

Ce moment politique marque la chute de Bouteflika aujourd’hui mais aussi le retour des militaires. Il s’agit d’une transition, mais pas nécessairement démocratique, car les manifestants continuent de faire pression contre l’État. En réponse, l’armée algérienne tente d’apprendre de son ennemi juré, le makhzen marocain. Il reflète le makhzen. Face à la contestation populaire, sa réaction sera de recycler le système afin de le pérenniser avec une nouvelle façade civile.

Cela nous amène au Maroc, où le makhzen observe avec appréhension les événements en Algérie. Si le soulèvement algérien aboutit à une véritable transformation politique, il se trouvera dans une position délicate, car il sera seul à s’accrocher à l’ordre ancien. La politique marocaine dégage un stéréotype différent de l’exceptionnalisme maghrébin. Ici, la monarchie et ses institutions ont été justifiées en tant que piliers de l’ordre marocain, qui est par conséquent imperméable aux courants révolutionnaires et aux exigences démocratiques.

Comme nous le savons, c’est trompeur. Le Maroc a connu des émeutes de grande ampleur dans les années 1960, deux coups d’État militaires qui ont failli renverser la monarchie, une mobilisation politique dans les années 1980 et 1990 et, au printemps arabe, une nouvelle vague de manifestations populaires. Plus récemment, avec l’atomisation de la société, les soulèvements se sont localisés. Le mouvement du Rif en est le dernier exemple, car les vives protestations qui y ont eu lieu depuis 2016 reflètent la colère politique, la marginalisation régionale et les exigences de dignité de la base.

D’une part, l’Etat marocain conserve des outils familiers de maintien du pouvoir. Contre les partis politiques, elle s’est longtemps engagée dans la cooptation politique ou dans la marginalisation juridique. Entre-temps, contre la société civile marocaine, qui est devenue la véritable source de changement politique, l’État est devenu plus intolérant. Bien qu’il n’ait pas encore adopté une mentalité purement contre-révolutionnaire comme ses homologues monarchiques du Golfe, le régime est devenu plus rigide et rigide dans ses attitudes répressives envers la dissidence civique. Il a également déployé un nouvel outil au sein de son répertoire de contrôle, à savoir l’utilisation du pouvoir judiciaire lui-même pour faire taire ses détracteurs les plus ardents.

Le sort de nombreuses ONG et organisations sociales qui sont victimes de la instrumentalization de la justice por la part de l Etat, telles que le mouvement de protestation Rif, Freedom Now o bien Racines, montre que le makhzen marocain reste implacable dans sa répression des opinions dissidentes.

D’autre part, la société marocaine est aussi résiliente que l’Etat. Sa génération de jeunes ainsi que la société civile sont toujours en mesure de se recalibrer continuellement en réponse aux pressions exercées d’en haut. Ils savent qu’historiquement, le monarchisme n’est pas insensible au changement. Comment interpréter ces marées changeantes qui minent la notion d’exceptionnalisme marocain ? J’invoquerais les deux optiques académiques les plus célèbres selon lesquelles les spécialistes des sciences sociales ont considéré l’ordre politique dans le royaume.

La première est la théorie de John Waterbury sur la segmentation de l’élite, qui met l’accent sur le fait que la création institutionnelle de réseaux de dépendance, de favoritisme et de clientélisme a été une stratégie délibérée par laquelle l’appareil royal maintient la classe politique enchaînée. La seconde est la théorie du maître et disciple d’Abdellah Hammoudi, qui suggère d’anciens fondements culturels et religieux sur lesquels les Marocains sont censés soumettre leur obéissance et leur autorité aux détenteurs du pouvoir absolu.

-Aujourd’hui, les deux optiques ont besoin d’être retouchées. Le sous-développement économique a fait en sorte qu’il reste très peu de mécénat pour alimenter la segmentation des élites en réseaux de dépendance clientéliste. Pourtant, les institutions politiques créées pour consacrer l’obéissance culturelle et religieuse sont incapables de se reproduire sous la pression populaire.

– En résumé, les règles de l’engagement politique au Maroc sont en train de changer.

-Ces trois vignettes de la Tunisie, de l’Algérie et du Maroc présentent un fil conducteur. Avant le printemps arabe, ils avaient tous des États de type “jacobin”, définis par un degré élevé d’autoritarisme centralisateur. Dans le même temps, ils ont également permis un pluralisme très limité, qui a été exploité en cas de besoin.

-Aujourd hui, ces vieilles stratégies de survie ne fonctionnent plus. En effet, la question intelligente n’est peut-être pas tant de savoir si les changemant prevue à grande échelle se produit, mais quand, comment et à quel prix, sur la base des tendances tunisiennes et algériennes.

Mon sentiment, enraciné dans la singularité maghrébine et sa représentation de la politique arabe au sens large, est que la démocratisation peut venir si elle se fait par un pacte. La démocratie sera poussée d’en bas, mais en fin de compte, elle devra être façonnée et institutionnalisée par le biais de compromis entre des acteurs concurrents. Il existe de nombreux groupes et forces en compétition qui revendiquent le pouvoir au Maghreb. Certains ont été historiquement réprimés, tandis que d’autres sont restés au pouvoir pendant des décennies. S’il y a une rupture populaire, il appartiendra à ces concurrents de forger une compréhension mutuelle afin de créer un ordre politique commun.

Si nous voyons de tels changements positifs catalysés de cette manière, nous parlerons peut-être dans quelques années non pas d’exceptionnalisme maghrébin, ou de singularité maghrébine, mais plutôt de leadership maghrébin pour le monde arabe en termes de son caractère démocratique. Et c’est une réalité qui mérite d’être étudiée.

Tags : Printemps Arabe, Printemps marocain, Maroc, Algérie, démocratie, exception maghrébine, exception marocaine, répression, dictature, despotisme,

Maroc : Texte et commentaires sur la constitution octroyée

ARTICLE 19: Le Roi, Amir Al Mouminine. Représentant Suprême de la Nation, Symbole de son unité, Garant de la pérennité et de la continuité de l’Etat, veille au respect de l’Islam et de la Constitution. Il est le protecteur des droits et libertés des citoyens, groupes sociaux et collectivités.

Commentaire : Et nous, qui va nous protéger de celui qui viole les « libertés des citoyens, groupes sociaux et collectivités » ?

Il garantit l’indépendance de la Nation et l’intégrité territoriale du Royaume dans ses frontières authentiques.

Commentaire : Il garantit avant tout que ses affaires marchent bien et que le pillage du Maroc par son entourage direct continue.

ARTICLE 20: La Couronne du Maroc et ses droits constitutionnels sont héréditaires et se transmettent de père en fils aux descendants mâles en ligne directe et par ordre de primogéniture de SA MAJESTÉ LE ROI HASSAN II, à moins que le Roi ne désigne, de son vivant, un successeur parmi ses fils, autre que son fils aîné. Lorsqu’il n’y a pas de descendants mâles en ligne directe, la succession au Trône est dévolue à la ligne collatérale mâle la plus proche et dans les mêmes conditions.

Commentaire : On comprend mieux maintenant pourquoi « Moulay Hicham », petit-fils de roi, neveu de roi et cousin de roi, premier de la « ligne collatérale mâle » pense qu’il des chances de piquer le trône à son cousin. Mais bon, il faudrait quand même que le futur « Hassan III » ou le possible « Rachid je ne sais combien » ne soient plus là pour le raconter.

ARTICLE 21: Le Roi est mineur jusqu’à seize ans accomplis. Durant la minorité du Roi, un Conseil de régence exerce les pouvoirs et les droits constitutionnels de la Couronne, sauf ceux relatifs à la révision de la Constitution. Le Conseil de régence fonctionnera comme organe consultatif auprès du Roi jusqu’au jour où il aura atteint l’âge de vingt ans (20) accomplis.

Le Conseil de régence est présidé par le premier président de la Cour Suprême. Il se compose, en outre, du président de la Chambre des Représentants, du président de la Chambre des Conseillers, du Président du Conseil régional des oulémas des villes de Rabat et Salé et de dix personnalités désignées par le Roi intuitu personae.

Les règles de fonctionnement du Conseil de régence sont fixées par une loi organique.

Commentaire : J’ai une proposition pour assurer la pérennité de la monarchie en cas de vacance du pouvoir. Changer la composition du Conseil de la régence et nommer comme membres dirigeants les personnes suivantes : Cheikh Abdeslam Yassine de Al Adl Wal Ihsane (Justice et spiritualité), Abdallah El Harrif de La Voie démocratique, Abdelhamid Amine le vice-président de l’AMDH et le putschiste militaire copain du général Mohamed Oufkir Ahmed Rami.

ARTICLE 22: Le Roi dispose d’une liste civile.

Commentaire : Bien sûr. Selon le quotidien espagnol El Pais, le budget de la famille royale marocaine est 28 fois supérieur à celui de la famille royale espagnole. C’est-à-dire que le Maroc est 28 fois plus riche que l’Espagne. Et après ils disent ne pas comprendre pourquoi certains ne sont pas contents de vivre sous cette « démocratie mohammedienne ».

ARTICLE 23: La personne du Roi est inviolable et sacrée.

Commentaire : Doucement les gars, personne n’a envie de violer quiconque ici ! Et puis, Pardon Majesté ! il n’y a de sacré que dieu.

ARTICLE 24: Le Roi nomme le Premier ministre.

Sur proposition du Premier ministre, Il nomme les autres membres du Gouvernement,

Il peut mettre fin à leurs fonctions.

Il met fin aux fonctions du Gouvernement, soit à Son initiative, soit du fait de la démission du Gouvernement.

Commentaire : Et qui peut mettre fin aux fonctions du roi ? C’est une simple et innocente question.

ARTICLE 25: Le Roi préside le Conseil des ministres.

Commentaire : Combien de fois il l’a fait présidé depuis son accension au trône ?

ARTICLE 26: Le Roi promulgue la loi dans les trente jours qui suivent la transmission au Gouvernement de la loi définitivement adoptée.

Commentaire : Pourquoi trente jours et pas trente ans ? Il peut faire ce qu’il veut. Le Maroc lui appartient. Ceux qui attendent continueront d’attendre.

ARTICLE 27: Le Roi peut dissoudre les deux Chambres du Parlement ou l’une d’elles seulement, par dahir, dans les conditions prévues aux articles 71 et 73 du titre V.

Commentaire : D’accord, d’accord… mais sur proposition du premier ministre SVP.

ARTICLE 28: Le Roi peut adresser des messages à la Nation et au Parlement. Les messages sont lus devant l’une et l’autre Chambre et ne peuvent y faire l’objet d’aucun débat.

Commentaire : Non mais, c’est quoi cette histoire ? C’est Big Brother ou quoi ? Et bien non. Du moment que ces « messages » ne sont pas relus avant par un premier ministre élu par les urnes, et qui le cas échéant peut apporter les corrections qu’il estime nécessaires, ces messages doivent être débattus et pourquoi pas refusés par un parlement dont les membres seraient élus démocratiquement.

ARTICLE 29: Le Roi exerce, par dahir, les pouvoirs qui Lui sont expressément réservés par la Constitution.

Les dahirs sont contresignés par le Premier ministre, sauf ceux prévus aux articles 21 (2° alinéa), 24 (1er, 3° et 4° alinéas) 35, 69, 71, 79, 849 91 et 105.

Commentaire : Après la réforme de la constitution par une assemblée constituante, les élus du peuple vont devoir diminuer considérablement les pouvoirs astronomiques du souverain. Certes, le roi, s’il est toujours là, peut continuer à exercer par dahir, ou par lettre de cachet si ça lui chante, mais uniquement sur proposition d’un premier ministre élu démocratiquement.

ARTICLE 30: Le Roi est le Chef Suprême des Forces Armées Royales.

Il nomme aux emplois civils et militaires et peut déléguer ce droit.

Commentaire : Pourquoi toutes ces majuscules ? « Roi », « Chef », « Suprême », « Forces »… On a compris que pour le moment c’est lui le boss. Il se prend pour dieu. Mais dans le futur son rôle consistera à porter un joli uniforme, à suivre les parades militaires conjointement avec le premier ministre et à inaugurer les chrysanthèmes.

ARTICLE 31: Le Roi accrédite les ambassadeurs auprès des puissances étrangères et des organismes internationaux. Les ambassadeurs ou les représentants des organismes internationaux sont accrédités auprès de Lui.

Il signe et ratifie les traités. Toutefois, les traités engageant les finances de l’Etat ne peuvent être ratifiés sans avoir été préalablement approuvés par la loi.

Les traités susceptibles de remettre en cause les dispositions de la Constitution sont approuvés selon les procédures prévues pour la réforme de la Constitution.

Commentaire : Pourquoi pas ? Mais, même réponse que pour l’article 29.

ARTICLE 32: Le Roi préside le Conseil Supérieur de la Magistrature, le Conseil Supérieur de l’Enseignement et le Conseil Supérieur de la Promotion Nationale et du Plan.

Commentaire : Pas de problème. Dans un Maroc démocratique on l’occupera aussi avec d’autres « Conseils Supérieurs ». Le Conseil Supérieur de la défense du tagine marocain, le Conseil supérieur de la Derbouka, etc…

ARTICLE 33: le Roi nomme les magistrats dans les conditions prévues à l’article 84.

Commentaire : Si vous voulez…. Mais rappelez-vous, cela doit être fait sur proposition du ministre de la justice et avec l’accord préalable du premier ministre.

ARTICLE 34: Le Roi exerce le droit de grâce.

Commentaire : Même réponse que pour l’article 33.

ARTICLE 35: Lorsque l’intégrité du territoire national est menacée ou que se produisent des événements susceptibles de mettre en cause le fonctionnement des institutions constitutionnelles, le Roi peut, après avoir consulté le président de la Chambre des Représentants. Le président de la Chambre des Conseillers ainsi que le président du Conseil Constitutionnel, et adressé un message à la Nation, proclamer, par dahir, l’état d’exception. De ce fait, Il est habilité, nonobstant toutes dispositions contraires, à prendre les mesures qu’imposent la défense de l’intégrité territoriale, le retour au fonctionnement des institutions constitutionnelles et la conduite des affaires de l’Etat.

L’état d’exception n’entraîne pas la dissolution du Parlement.

Il est mis fin à l’état d’exception dans les mêmes normes que sa proclamation.

Commentaire : Rien de tout cela. Dans les moments difficiles pour la Nation, c’est le Parlement sous la conduite du premier ministre et des chefs des groupes parlementaires qui mène la danse. Le roi, cantonné dans son beau palais, n’a qu’à signer les dahirs que lui présentera le premier ministre.

La défense du pays dans ses frontières internationalement reconnues est affaire de tous les Marocains.

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Tags : Maroc, constitution, printemps arabe, démocratie, Makhzen, mohammed VI

Accord d’Association UE-Maroc : Droits de l’homme, démocratisation et gouvernance

Accord d’Association UE-Maroc

Sixième session du Sous Comité

« Droits de l’homme,

démocratie et gouvernance »

Bruxelles, 20 octobre 2011

 Accord d’Association UE-Maroc
 Sous Comité « Droits de l’homme, démocratisation et gouvernance »
 Bruxelles, octobre 2011
 Projet d’ordre du jour

(Présidence UE)

  1. Introduction, adoption de l’agenda et accord sur le procès verbal de la cinquième réunion du sous-comité 9h00-9h30
  2. Session thématique : Discussion sur les récents développements au Maroc, en particulier :                                     9h30-11h15
  • Les nouveautés constitutionnelles en matière de droits de l’homme et libertés fondamentales
  • Schéma institutionnel sur les droits de l’homme (CNDH, Coordination interministérielle, Médiateur) ;
  • Processus de régionalisation
  • Compétences du Parlement ;
  • Loi sur l’observation électorale et projet de loi organique sur les partis politiques ;
  • Préparation des élections 2011 ;
  • Mise en œuvre des recommandations de l’IER

 

  1. Développements récents dans l’UE en matière de droits de l’homme (UE présente)                                                                                    11h15-11h45
  • Volet externe : Présentation des développements en matière de droits de l’homme dans le cadre de la nouvelle politique européenne de voisinage ;
  • Volet interne : adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme ; mise en œuvre de la Charte européenne des droits fondamentaux

 

  1. Droits de l’Homme et libertés fondamentales

 
4.1       Liberté d’association  et de rassemblement pacifique (Maroc présente)
11h45-12h15

  • Mise en œuvre des nouveautés constitutionnelles et juridiques en matière de liberté d’association et de rassemblement (loi sur les associations, les libertés syndicales, les défenseurs des droits de l’homme)

 
4.2 Liberté d’expression et liberté de la presse (Maroc présente)                 12h15-12h45
 

  • Nouveautés constitutionnelles et juridiques en matière de mise en œuvre de la liberté d’expression et de la liberté de la presse (y compris réforme du Code de la presse)
  • Pluralité et indépendance des médias (notamment libéralisation du marché audiovisuel)
  • Création du Conseil national de la presse
  • Constitutionnalisation de la Haute Autorité de la Communication
  • Mise en œuvre du droit d’accès à l’information (article 27 de la constitution)

 
4.3       Droits des femmes. (Maroc présente)                                                           12h45-13h00
 

  • Agenda gouvernemental pour l’égalité
  • Mise en œuvre de l’article 19 de la Constitution (y compris Création d’une Autorité pour la Parité et la Lutte contre toutes formes de Discriminations)
  • Lutte contre les discriminations et la violence envers les femmes, en application de la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) (notamment réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale ainsi que projet de loi sur la violence à l’égard des femmes, loi sur le travail domestique, levée des réserves et déclarations sur la CEDAW)
  • Mise en œuvre du fonds d’entraide familiale

PAUSE-DEJEUNER
4.4       Droits des personnes vulnérables (Maroc présente)                                                                                                                                                                 14h00-14h15
 

  • Consolidation des droits de l’enfant en application de la Convention relative aux droits de l’enfant et des Conventions de l’OIT sur l’âge minimum (Convention 138) et sur les pires formes de travail des enfants (Convention 182) (notamment projet de loi sur le travail des enfants de moins de 15 ans)
  • Etat des lieux du projet de loi sur les droits des personnes en situation d’handicap

 

  1. Etat de droit :

 
5.1       Fonctionnement de la justice (Maroc présente)                                14h15-15h00
 

  • Nouveautés introduites par la Constitution en matière de justice
  • Stratégie opérationnelle de réforme du secteur de la justice et renforcement de son indépendance;
  • Rôle et fonctionnement du Conseil supérieur du Pouvoir Judiciaire (art. 56, 112-116)
  • Rôle et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle (articles 129-134)
  • Réforme du Code pénal (en ce compris révision des dispositions sur la peine de mort)
  • Situation dans les prisons et conditions de détention (lutte contre la surpopulation carcérale, droits des détenus)

 
5.2       Gouvernance et moralisation de la vie publique (Maroc présente)                                     15h00-15h15
 

  • Nouveau statut et rôle de l’Instance nationale de la probité et de lutte contre la corruption
  • Etat d’avancement du rapport 2011
  • Mise en œuvre du plan gouvernemental de lutte contre la corruption
  • Projet de loi sur la protection des victimes et dénonciateurs de la corruption

 

  1. Coopération dans les enceintes multilatérale et mise en œuvre des Conventions internationales (UE présente)                               15h15-16h00

 
6.1.      Conseil de l’Europe
 

  • Adhésion aux conventions du Conseil de l’Europe
  • Coopération entre le Maroc et le Conseil de l’Europe (y compris adhésion au Centre Nord-Sud, obtention du statut de « partenaire pour la démocratie » auprès de l’Assemblée parlementaire, adhésion au Groupe Pompidou)
  • Perspectives de coopération tripartite Union européenne/Conseil de l’Europe/Maroc

 
6.2       Nations Unies
 

  • Coopération avec le Conseil des droits de l’Homme, le bureau du Haut Commissariat aux droits de l’Homme et les mécanismes spéciaux et préparation de l’Examen Périodique Universel 2012
  • Adhésion aux protocoles facultatifs relatifs aux conventions internationales  (notamment le protocole n°2 du Pacte sur les droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort, le protocole facultatif de la CEDAW et le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture (OP-CAT))
  • Mise en œuvre de la Convention contre la torture et de la CEDAW (plus particulièrement concernant le traitement des migrants)

 

  1. Conclusions opérationnelles 16h00-16h30

 
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