Lutte contre la prolifération nucléaire: La quadrature du cercle

Par Notre Bureau De Bruxelles: M’hammedi Bouzina Med 
La violence et les guerres sont la conséquence naturelle des injustices et des misères. Ce sont les données d’une équation vieille comme le monde. Pourtant… Résoudre la «quadrature du cercle» serait, certainement, l’expression la plus appropriée pour imager le débat actuel entre optimistes et pessimistes quant à un monde futur sans armes nucléaires stratégiques. Entre ceux qui y croient et y militent et ceux qui sont persuadés d’un inévitable cataclysme nucléaire qui emporterait, un jour, le monde, les arguments se valent sans avoir les mêmes fondements. Une évidence: neuf pays disposent d’un arsenal nucléaire qui peut détruire 10 ou 100 fois la planète terre. Ce sont les cinq du Conseil de sécurité, plus à des degrés moindres, l’Inde, le Pakistan, la Corée du Nord et Israël. Les deux premières puissances mondiales en termes de nombre (de force de frappe) d’ogives et missiles intercontinentaux sont les USA et la Russie. Cette évidence posée, notre casse-tête pour trouver la solution à l’équation mathématique posée depuis des siècles, «la quadrature du cercle» commence. D’abord les données du problème: ce sont bien les deux superpuissances mondiales nucléaires qui ont décidé de s’engager dans une réduction drastique du nombres de bombes et vecteurs porteurs d’ogives nucléaires. Personne ne peut, ni ne les a obligés. Ensuite, c’est bien la première puissance mondiale dans ce domaine qui a convoqué, depuis 1945, le premier Sommet mondial pour entamer un processus de désarmement nucléaire et l’interdiction de nouveaux essais nucléaires. Cette initiative marque, incontestablement, une prise de conscience du monde face au danger de sa propre destruction.
Dans le même temps, d’imminentes personnalités et sommités mondiales sont engagées dans un travail de réflexion pour accompagner cette prise de conscience et ce processus de retour vers un monde dénucléarisé sur le plan militaire. C’est le groupe dit «Global zéro» lancé à l’été 2008 à Paris. Cela suffit-il pour être optimiste pour l’avenir ? Oui et non. Le monde (l’homme moderne) a les moyens de sauver son avenir du spectre d’une conflagration mondiale pour peu qu’il y croie, y soit convaincu et s’y engage dans ce sens. Non, s’il met en doute toute initiative venant de surcroît de chez les puissants, et s’il voit dans cet engagement «historique» de pacification du monde, des calculs de domination stratégiques et uniquement cela.
Dans tous les cas, le reste du monde, c’est-à-dire la majorité des pays, qui ne disposent pas d’armement nucléaire ont-ils d’autre choix? Non et oui. Ils n’ont pas d’autre choix pour la simple raison qu’ils ne disposent ni de la bombe nucléaire, ni de moyens militaires, économiques ou autres d’imposer à ceux qui en disposent de s’en débarrasser. Oui, parce qu’ils sont la majorité des peuples du monde et qu’ils ont tout à gagner et rien à perdre à soutenir cette marche vers une dénucléarisation militaire du monde.
La «quadrature du cercle» est-elle pour autant, non pas résolue, mais au moins cernée dans ses données mathématiques ? Pas encore. Parce que si nous avons les chiffres indiquant la masse et le volume de l’arsenal nucléaire mondial, il nous manque les lettres. Nous avons le chiffre de l’équation, soit l’exposant, mais pas encore la lettre, soit «l’exposé» pour saisir le contenu de la fameuse équation. C’est la recherche de ces fameuses lettres que se doit de trouver le monde. Elles peuvent être un «J», comme «Justice», disparue du vocabulaire en Palestine, en Irak, en Afghanistan, au Congo, au Sahara Occidental, en Somalie et ailleurs. Elles peuvent être un «P», comme pauvreté à Haïti, au Bengladesh, en Ethiopie, dans les pays du Sahel africain, dans le Sud-Est asiatique… Elles peuvent être un «R» comme racisme; un «C» comme colonisation; un «M» comme misère; un «I» comme inégalité et ignorance ; un «F» comme fanatisme; un «T» comme terrorisme de toute sortes. Le mot est dit : terrorisme. Conséquence de toutes les autres injustices, misères, spoliations et avilissements.
C’est peut-être là, la seule critique «argumentée» à la Conférence de Washington sur le désarmement nucléaire et la lutte contre le terrorisme qui a ciblé particulièrement l’Iran et épargné Israël. Qui a parlé du danger des armes mais pas ceux de la misère et des injustices. Qui peut nier le phénomène terroriste mondial ? Qui ne craint pas qu’un groupe ou une secte d’illuminés terroriste ne s’empare, un jour, d’une arme à radiation nucléaire ou bactériologique (et non pas une bombe atomique) ? Le consensus international est acquis là-dessus. Seulement, accuser l’Iran de menace atomique et nucléaire sur le reste du monde est une aberration. Quand bien même l’Iran disposerait, dans les 10 ans à venir, d’une bombe nucléaire, ce ne sera «qu’une bombe». Certes, de trop, mais en aucun cas un danger pour le reste du monde. Même pas sur Israël. A Washington, personne n’a soulevé le mouvement des sous-marins nucléaires vers le Golfe persique, transitant par le canal de Suez avec la complicité de l’Egypte. A Washington, personne n’a soulevé le stationnement des porte-avions nucléaires américains dans ce même Golfe persique, face à l’Iran. Que peut faire l’Iran, même avec une bombe atomique face à l’armada américano-israélienne qui lui fait face ? Ces menaces nucléaires ont manqué d’être relevées les 12 et 13 avril à Washington et New York. Cependant, faut-il rejeter toute la Conférence et l’espoir qu’elle éveille ? L’initiative du président américain Barack Obama est à saluer, en ce qu’elle a déclanché, au moins, le débat sur l’éventualité d’un monde futur sans armes nucléaires. Peut-il y arriver seul, sans appui ? Aurait-il le droit de bénéficier du bénéfice de la «bonne intention sincère» ? Si chaque tentative de paix et de dialogue venant des USA d’aujourd’hui est accueillie avec scepticisme et doute, faut bien lui substituer autre chose. Mais quoi ? Peut-être des conférences internationales et des plans d’actions contre les injustices, misères et avilissements que vivent encore des peuples de par le monde.
Le Quotidien d’Oran, 15/4/2010

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