Le Courrier d’ Algérie, 07/07/2011
Pourtant, ces dossiers très importants ne peuvent être relégués au dernier rang des priorités puisque tout projet d’une coopération durable en dépend. Les autorités algériennes n’ont cessé de le répéter et le règlement de ces dossiers reste un préalable à toute idée de l’ouverture des frontières. Seulement, le Maroc refuse l’évidence et continue de persévérer dans une voie sans issue. Faut-il rappeler que la question du Sahara occidental et l’autodétermination du peuple sahraoui est l’une des priorités même si cette question reste du ressort de l’ONU. Et tout le monde connaît les subterfuges marocains dès qu’il s’agit de reposer le problème de l’autodétermination. Il existe, cependant, d’autres litiges comme la question de la contrebande, la drogue, en plus des terres des Algériens vivant au Maroc. L’Algérie ne peut pas donc faire fi de tous ces contentieux, pour aller se précipiter vers l’ouverture des frontières et se lancer dans une coopération qui ne profitera qu’au Maroc.
La diplomatie française semble croire qu’une relance est possible, le ministre français des Affaires étrangères, M. Alain Juppé, estimant qu’avec le « printemps arabe», cette initiative de Nicolas Sarkozy était «prémonitoire». On ne voit pas en quoi ce printemps sur lequel tout le monde veut prendre des actions serait d’un quelconque secours à un projet dont la finalité est de «normaliser» la relation entre les pays arabes et Israël.
L’entrée en lice des peuples arabes ne peut en aucun cas servir un tel dessein, bien au contraire. Plus le poids des opinions publiques se renforcera, plus les politiques des Etats devront prendre en compte l’indignation des peuples face à l’oppression subie par les Palestiniens.
Quant aux professions de foi démocratique des Occidentaux, il suffit de voir l’effort remarquable mis par la Grèce en état de banqueroute pour empêcher la flottille pour Ghaza, pour se convaincre qu’il n’est pas sérieux. Les militants de la flottille, dont beaucoup sont des Occidentaux, constatent donc que l’embargo criminel et illégal subi par les Palestiniens commence en Europe.
Sur le même registre, la Grande-Bretagne, grande démocratie s’il en est une, est en train de nous offrir le spectacle lamentable de sa totale soumission au lobby israélien en procédant à l’arrestation du Palestinien Cheikh Raed Salah. Cet aplatissement total d’une démocratie qui prétend aller en Libye défendre des civils est une illustration de la duplicité permanente des capitales occidentales.
L’Union pour la Méditerranée a été lancée avec les régimes, sans l’aval des opinions arabes et même contre elles. Elle n’est pas allée très loin même si elle n’a pas été totalement enterrée car même des régimes aussi serviles que ceux de Moubarak ou de Ben Ali ne pouvaient faire mine d’ignorer les massacres contre Ghaza. Les reports successifs des sommets en ont été l’illustration la plus parfaite.
L’Union pour la Méditerranée a été perçue comme un moyen d’obtenir une normalisation des Etats arabes avec Israël sans attendre une solution de la question palestinienne. Il s’agissait en somme de contourner la proposition, minimaliste, du Sommet arabe de Beyrouth, d’une normalisation totale en échange d’un Etat palestinien sur les frontières de 1967. Cet objectif reste de mise.
Mais le «printemps arabe», dont on se gargarise un peu trop facilement en Occident, s’énonce s’il n’est pas entravé par les interventions occidentales par un poids accru des peuples qui n’entendent pas oublier les Palestiniens. Le spectacle de la Grèce, en faillite, empêchant les bateaux d’appareiller et celui, vraiment affligeant, d’un gouvernement britannique arrêtant Raed Salah, tout en permettant à un général israélien responsable de la mort de nombreux Libanais de pérorer, est très significatif.
Ces opinions publiques arabes le diront toujours quand elles en ont la possibilité : les seuls qui peuvent permettre de donner une vraie vie à l’UPM, ce seront les Palestiniens libres et rétablis dans leurs droits élémentaires. Pour les opinions du «printemps arabe», la voix des Palestiniens est supérieure à celle de tous les gouvernements arabes. Les Palestiniens ont un droit de veto sur l’UPM.
Hier, le porte-parole du Quai d’Orsay, Romain Nadal, a affirmé que la France se félicite et se réjouit de l’annonce du roi. Sofiane Aït Iflis – Alger (Le Soir) – Dans son message au chef de l’Etat algérien, Abdelaziz Bouteflika, à l’occasion de la fête nationale de l’Indépendance, le roi du Maroc Mohamed VI a, rappelons-le, exprimé «sa ferme détermination à poursuivre l’action ( ) pour surmonter les obstacles entre les deux pays».
Un message qui ne semble pas avoir échappé à la «vigilance» diplomatique française qui, de suite, a réagi par déclarer toute sa réjouissance de cette volonté affichée par le Maroc de se rapprocher avec l’Algérie.
«Nous nous réjouissons de cette annonce forte, visant au rapprochement entre l’Algérie et le Maroc, deux pays avec lesquels la France entretient des relations particulièrement étroites et denses», a affirmé hier le porte-parole du Quai d’Orsay, ajoutant que «la persistance de blocages dans cette relation bilatérale constitue un obstacle à la construction d’un Maghreb intégré et prospère, que nous appelons de nos vux et qui représente un objectif d’autant plus important dans le contexte du printemps des peuples arabes.» Cela dit, il ne surprend guère que la France ait réagi de la sorte et avec autant d’empressement.
Lors de sa dernière visite à Alger, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, s’était dit confiant en la construction d’une relation algéro-marocaine positive. «Il m’a été clairement indiqué que la question du Sahara occidental n’est pas de nature à nuire aux relations entre les deux pays.» Alain Juppé, qui avait animé une conférence de presse conjointe avec Mourad Medelci, avait aussi jugé que les relations algéro-marocaines sont «dans une approche constructive et positive» et que son pays «ferait tout pour aller dans ce sens et instaurer un climat de confiance et d’amitié».
Il est clair donc que la France aide à la construction de cette relation que le Maroc apparemment désire apaisée. Cependant, ce qui importe de situer, c’est la nature des obstacles que le roi du Maroc a affirmé être déterminé à surmonter.
Faut-il comprendre que la monarchie voudrait revenir sur son attachement à son plan d’annexion du Sahara occidental en acceptant le règlement de la question à travers le référendum d’auto-dermination réclamé par le Polisario et soutenu par plusieurs Etats dans le monde ? Une telle option paraît invraisemblable dans l’immédiat.
«Arabes» est claire sur le sujet. Dans son point n°7, elle précise qu’ à court terme «l’ objectif collectif est d’éviter que l’instabilité ne compromette le processus de réformes politiques, et de concilier cohésion sociale et stabilité macroéconomique». Un cadre a été créé à cet effet qui s’appelle le «Partenariat de Deauville», chargé de mettre en place un «programme économique» tourné vers le privé et soutenu par le
FMI qui doit «fournir aux pays de la région qui s’engagent en faveur de la stabilité économique le soutien
nécessaire pour les aider à combler leurs besoins de financement extérieur». Parallèlement, les pays du G8 sont «déterminés à soutenir l’intégration des Pays du Partenariat dans l’économie régionale et mondiale
grâce à un développement du commerce et des investissements étrangers dans la région». Ces derniers
doivent, bien sûr, «faciliter le commerce, en réduisant les obstacles tarifaires et non tarifaires, en améliorant l’accès au secteur des services et en encourageant les investissements directs et la convergence réglementaire». Ces mesures seront réalisées sous étroite surveillance et «les stratégies de transition» examinées de façon à vérifier qu’elles correspondent bien au cursus voulu. Mais, tout ne roule pas comme prévu. Les «gouvernements provisoires» issus des «révolutions» ne semblent pas du tout tenir la route et ne réussissent pas à rétablir la «cohésion sociale». L’Egypte vient déjà de donner un grand coup de pied dans l’édifice deauvilien en remettant en cause l’intervention du FMI. Pas très rassurant pour la suite. Alors que, selon Alexandre Adler, «plutôt que de céder aux intimidations de la rue, le roi a pris les devants, dans la continuité (de la) monarchie marocaine». Ce qui explique qu’il en était fait un «modèle» et une «exception» parmi ces Etats qui sont loin de réussir là où le Makhzen sait y faire. Sauf cet imprévu qui a fait du 4 juillet, une journée de cauchemar, alors que tout semblait ficelé. Malgré les satisfécits des Grandes Démocraties, malgré les fleurs de la Grande Presse, malgré le filtrage des moteurs de recherche, Google en tête, les citoyens marocains ont crié «Sa Majesté le peuple !», «Son Excellence le peuple !», «Son Altesse le peuple !