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  • L’occupation du Sahara Occidental va bientôt électrifier l’UE ?

    L’Allemagne, la France, l’Espagne et le Portugal ont signé une feuille de route avec le Maroc pour travailler au commerce de l’électricité renouvelable entre le Maroc et l’UE.

    « La présente déclaration conjointe ne peut être interprétée comme une source d’obligations juridiques pour les signataires, pas plus qu’elle ne sera pas soumise au droit international », est l’étrange phrase finale de la « déclaration conjointe sur l’établissement d’une feuille de route pour un commerce durable d’électricité entre le Maroc et le Marché intérieur européen de l’énergie », signé par l’Allemagne, la France, l’Espagne, le Portugal et le Maroc lors de la COP22 à Marrakech. Lisez ici le document de trois pages, daté du 17 novembre 2016.
    Dans la déclaration, les parties signataires déclarent que « leur intention est de fournir les conditions pour rendre possible le commerce d’électricité renouvelable entre le Maroc et le Marché intérieur européen de l’énergie ». En conséquence, ils indiquent qu’ils sont disposés à élaborer une feuille de route dite « SET » (Sustainable Electricity Trade) et un accord pouvant être mis en œuvre « à la date de la COP23 ».
    L’Union européenne envisage une part de 27% des sources d’énergie renouvelable dans son approvisionnement énergétique d’ici à 2030. Le Maroc affiche plus d’ambition en fixant l’objectif à 52% d’ici 2030 comme prévu dans son plan national des énergies renouvelables. Une intégration progressive des marchés de l’énergie pourrait aider l’UE à atteindre son objectif, et semble faire part de la raison d’être du document.
    Mais ce que la déclaration conjointe omet, c’est qu’une partie importante des projets marocains servant cet objectif de 52% sera mise en oeuvre sur un territoire que le Maroc a brutalement envahi en 1975 et qu’il maintient depuis sous son joug : le Sahara Occidental. Si le Maroc réussit ce qu’il prévoit, plus d’un quart de sa capacité éolienne et solaire sera tiré du Sahara Occidental d’ici à 2020.
    Souvent désigné comme la dernière colonie d’Afrique, le Sahara Occidental est considéré comme un territoire non autonome sans pouvoir administrant. Le territoire fait l’objet de négociations de paix menées par l’ONU et une mission de l’ONU est présente sur le terrain. Aucun Etat au monde ne reconnaît la revendication du Maroc sur le territoire, tandis que le droit du peuple du Sahara Occidental à l’autodétermination – le droit de déterminer le statut du territoire et donc de ses ressources – est universellement reconnu. Il y a tout juste un mois, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a appelé à la réalisation du droit à l’autodétermination et réitéré la nécessité pour le peuple sahraoui d’exercer « son consentement préalable, libre et éclairé à la réalisation de projets de développement et d’opération d’extraction (de ressource naturelle) ».
    Début novembre, WSRW a publié un rapport détaillant les projets énergétiques éoliens du Maroc au Sahara Occidental. Les investisseurs, comme le KfW et la Banque européenne d’investissement, ont déclaré qu’ils n’accorderaient pas de financement pour de tels projets à l’intérieur du territoire. En conséquence, le Maroc a émis des obligations vertes pour financer les deux centrales solaires qu’elle envisage de construire au Sahara Occidental, en collaboration avec un consortium dirigé par la société saoudienne ACWA Power.
    La déclaration commune indique que la MASEN est disposé à fournir le secrétariat pour l’ensemble de l’entreprise. La MASEN est une entreprise marocaine d’énergies renouvelables essentiellement nationale et, comme le secteur des énergies renouvelables au Maroc, contrôlée par le roi.
    Actuellement, deux affaires juridiques sont en cours contre le Conseil de l’UE à l’instigation de la représentation politique du peuple du Sahara Occidental, contre l’inclusion du territoire du Sahara Occidental dans l’accord commercial UE-Maroc et dans l’accord de pêche.
  • L’arrêt de la CJUE confirme le consensus international sur le statut juridique du Sahara occidental

    EL AAYOUN OCCUPEE – L’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) qui a conclu que les accords d’association et de libéralisation entre l’UE et le Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental, « confirme le consensus international sur le statut juridique du Sahara occidental », soutenant le droit des Sahraouis à l’autodétermination, a souligné l’universitaire américain Stephen Zunes.
    Dans une interview récente avec l’Association pour le suivi des ressources et pour la protection de l’environnement au Sahara occidental (AMRPENWS), M. Zunes, spécialiste notamment des questions relatives au Moyen-Orient, a rappelé que la Cour européenne de justice qui a jugé, fin décembre, que l’accord de libre échange UE-Maroc et l’accord d’association UE-Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental « reconnaît le statut séparé et distinct garanti au territoire du Sahara occidental », en vertu de la charte des Nations unies.
    De plus, la CJUE juge, selon l’universitaire américain, qu’ »il est inacceptable que le terme territoire du Royaume du Maroc qui définit le champ d’application territoriale des accords d’association et de libéralisation, englobe le Sahara occidental ». Cela confirme l’avis juridique de l’avocat général de la CJUE, Melchior Wathelet, selon laquelle « le Sahara occidental « ne peut être considéré comme un territoire marocain », a-t-il dit.
    Cette décision confirme aussi « le consensus international de longue date sur le statut juridique du Sahara occidental et l’opposition du peuple sahraoui à l’occupation marocaine », a ajouté M. Zunes, co-auteur avec Jacob Mundy, d’un livre sur la question sahraouie.
    Pour l’analyste politique américain, les produits provenant des territoires sahraouis occupés ne peuvent désormais porter le label « Made in Maroc », à la suite de l’arrêt de la CJUE, ce qui constitue « un revers majeur aux efforts du royaume marocain pour légitimer son occupation ».
    Par ailleurs, Stephen Zunes a appelé les Sahraouis à « intensifier » leur lutte pacifique pour obtenir davantage de soutien international, soulignant que la résistance pacifique « est l’unique moyen » pour mettre en évidence les violations systématiques du droit international humanitaire par les forces d’occupation marocaines.
    La lutte pacifique, insiste l’universitaire dans son interview avec l’AMRPENWS, « fait gagner la sympathie et le soutien de la communauté internationale, de la société civile et des organisations des droits de l’Homme et augmentera la pression sur les gouvernements qui soutiennent l’occupation marocaine ».
    A une question sur les moyens pour gagner les batailles juridiques contre l’occupation marocaine, M. Zunes a estimé que « le fait de disposer d’un solide fondement juridique pour s’opposer à l’exploitation illégale des ressources naturelles au Sahara occidental pourrait permettre aux promoteurs du droit international et des droits de l’Homme de contester les gouvernements et les entreprises qui profitent de l’occupation, par des campagnes de boycott et des sanctions ».
    Inscrit depuis 1966 sur la liste des territoires non-autonomes, donc éligible à l’application de la résolution 1514 de l’Assemblée générale de l’ONU portant déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et peuples coloniaux, le Sahara occidental est la dernière colonie en Afrique, occupée depuis 1975 par le Maroc.
    Plusieurs rounds de négociations entre les parties en conflit, le Maroc et le Front Polisario, ont été organisés sous l’égide de l’ONU. Ils buttent sur la position de blocage de la partie marocaine, soutenue par la France, relative à l’organisation d’un référendum pour l’autodétermination du peuple sahraoui.
  • Des ONG et des juristes espagnols dénoncent le renvoi des migrants subsahariens de Ceuta

    Le renvoi dimanche par l’Espagne des migrants subsahariens ayant tenté de forcer le passage au niveau du poste frontalier de Ceuta a suscité de vives réactions de la part de collectifs humanitaires et de juristes espagnols, estimant que cette mesure est «contraire à la légalité des Nations unies et du Conseil de l’Europe».
    La fraternité ouvrière catholique a dénoncé sur les réseaux sociaux, l’action policière qui a eu lieu dimanche au poste frontalier de l’enclave de Ceuta. L’universitaire Margarita Martinez Escamilla, professeur de droit pénal a l’université de complutense de Madrid a demandé dans une déclaration à la presse, au ministre espagnol de l’Intérieur d’expliquer le protocole suivi par la Garde civile qui renvoie des immigrants «sans identification et sans respect du droit international», estimant par ailleurs que «le renvoi à chaud est illégal et ne pourra jamais être légal».
    Pour sa part, la représentante du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés en Espagne, Francesca Friz-Prguda a indiqué à l’agence Europa press que «si les migrants interceptés dans leur tentative de franchir les obstacles de Ceuta ou Melila ne sont pas identifiés et leurs besoins individuels non connus, le renvoi à chaud ne peut pas s’effectuer à la frontière car cet acte est illégal». «La réglementation espagnole stipule que le rejet à la frontière doit être fait en respectant la réglementation internationale des droits de l’Homme et de protection international dont l’Espagne est signataire», a-t-elle rappelé.
    La représentante du HCR a par ailleurs souligné que 25% des réfugiés dans le monde proviennent de l’Afrique subsaharienne et le renvoi automatique aux frontières peut grandement priver des «personnes de leur droit d’asile». L’organisation des droits de l’Homme d’Andalousie (APDH-A) a estimé, quant à elle, que «si l’Espagne continue de renvoyer automatiquement les migrants vers le Maroc, elle devrait se retirer de la convention de Genève, de la convention de prévention de la torture et de la convention européenne des droits de l’Homme», car a expliqué Charles Arce, de l’APDH-A «il y a de nombreux documents qui prouvent que le Maroc transgresse les droits fondamentaux des étrangers aux passages frontaliers».
    La tentative des migrants subsahariens d’entrée en Espagne, dimanche, par l’une des deux frontières terrestres de l’Afrique avec l’Europe est la troisième après celles des mois d’octobre et de décembre où environ 670 migrants originaires de quelques pays dévastés par la guerre, la violence ou la faim ont réussi à accéder sur le territoire espagnol et se trouvent actuellement dans le centre temporaire pour migrants à Ceuta.
    Un groupe de 1 100 personnes originaires d’Afrique subsaharienne qui voulaient gagner l’Europe, s’est précipité dimanche sur la clôture haute de six mètres, vers 4h locales (03h GMT), d’une manière «extrêmement violente et organisée», a indiqué la préfecture de Ceuta. Aucun d’entre eux n’a réussi à passer de l’autre côté, sauf deux migrants, grièvement blessés, qui ont été hospitalisés à Ceuta, selon la préfecture.
  • Les lunettes brouillées de Tahar Benjelloun – Les apparences et la réalité

    Il omet également de nous rappeler que l’affaire du Sahara occidental est aussi prise en charge par les Nations unies depuis près d’un demi-siècle.
    L’écrivain marocain Tahar Benjelloun aime beaucoup son pays. Les souvenirs et les odeurs de Fès où il est né en 1944, les légendes et les mythes du royaume parsèment ses livres depuis qu’il a commencé à écrire à la fin des années 1970.
    Il est arrivé en France vers 1971 fuyant le régime de Hassen II et fait des études en psychiatrie. Sa thèse sur la misère sexuelle des émigrés l’inspire d’ailleurs pour publier en 1977 « la plus haute des solitudes » qui le fit connaître. L’homme qui était longtemps collaborateur du journal Le Monde ne manque jamais de s’exprimer sur les faits politiques et les sujets qui alimentent l’actualité sociale comme le racisme, l’islamophobie. Il a été sollicité récemment pour faire partie de la fondation pour l’islam de France que dirige l’ex-ministre Jean-Pierre Chevènement.
     
    En apparence, les avis de l’écrivain sont marqués au coin par le bon sens et la modération. Sauf quand il s’agit de l’Algérie. Comme à chaque fois, il se déleste de sa liberté de jugement, de sa clairvoyance supposée d’intellectuel qui depuis toujours invite ses lecteurs à se méfier des pouvoirs et des faux-semblants. Mais il est connu des poètes qu’ils disent souvent ce qu’ils ne font pas. On n’a d’ailleurs pas manqué de lui faire le reproche d’avoir attendu des années après la disparition de Hassen II pour publier en 2002 « cette aveuglante absence de lumière » plongée dans l’univers impitoyable du pénitencier de Tazmamart. Les dernières positions de l’auteur de « La Nuit sacrée » sont dégoulinantes de fiel vis-à-vis de l’Algérie. Il ne rate pas une occasion de se montrer le défenseur acharné des positions du royaume sur le dossier sahraoui. Il ne met aucune distance entre Benjelloun et lui et semble ignorer qu’un processus de négociations entre le Polisario et son pays existe depuis plus de vingt ans. Il omet également de nous rappeler que l’affaire du Sahara occidental est aussi prise en charge par les Nations unies depuis près d’un demi-siècle. Emporté sans doute par son imagination de romancier, il suggère que si ce conflit n’existait pas, il n’y aura ni Daesh, ni instabilité en Libye ou en Tunisie. Fouillant dans l’histoire, il ressort la fraternité des Marocains durant la guerre de libération. C’est un fait avéré. En tant que Monsieur qui chausse des lunettes marocaines, il est dans la posture d’un Albert Camus qui préférait sa mère à la justice. Etrange et paradoxale filiation, le moins que l’on puisse dire sur un auteur dont la force et la qualité de l’écriture ne semblent pas protéger de la passion politique. 
    Rachid H.
  • AFRIQUE : La guerre au F CFA est lancée

    Le samedi 7 janvier, les panafricains organiseront, pour la première fois, de Paris à Dakar, en passant par Abidjan, Ouidah, Londres et Bruxelles, une journée internationale de mobilisation sur le thème du F CFA et la nécessité de se défaire de cette monnaie postcoloniale.
    Lorsque l’Afrique et sa diaspora s’unissent pour démanteler les jalons du colonialisme, il en découle un événement historique : le front contre le Franc des Colonies Françaises d’Afrique (CFA). L’appel a été lancé le 26 décembre 2016 par le militant panafricaniste, Kemi Seba, et par l’ONG, Urgences Panafricanistes (URPANAF).
    Créé en 1945, le F CFA est en cours aux Comores et dans quatorze Etats d’Afrique de l’Ouest et du Centre : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Mali, Niger, République Centrafricaine, République du Congo, Sénégal, Tchad et Togo.
    En Europe, comme dans les pays de la Zone Franc, et ailleurs, sur le continent, les citoyens et associations se mobilisent. Tous dénoncent les effets pervers de cette monnaie postcoloniale et réclament la fin de la servitude monétaire. Ils exigent la vérité sur les comptes d’opérations ouverts par les banques centrales auprès du Trésor français. Une information récente a circulé dans les réseaux sociaux selon laquelle les banques allemandes évaluent à 400 milliards d’euros, la somme astronomique que la France prélève, directement ou non, aux pays africains de la zone Franc, chaque année, à travers ce mécanisme (opaque) du compte d’opérations. On comprend pourquoi, malgré la disparition du Franc Français et l’adoption de la monnaie unique (euro) par la France, le gouvernement français a conservé sa mainmise sur ce dispositif colonial, refusant son transfert auprès de la banque centrale européenne. C’est, donc, le Trésor français, c’est-à-dire, le ministère français des Finances qui a la haute main (à la place de la Banque centrale) sur les finances de 14 pays souverains (notre photo montrant le ministre français des Finances Michel Sapin passant en revue les drapeaux des pays africains de la zone franc). Très étrange comme système !
    Pour les intellectuels, le temps est venu de faire autrement. Il faut imposer ce changement aux chefs d’Etat africains, qui sont effrayés par la simple idée d’évoquer la création d’une monnaie souveraine. Seul le président tchadien, Idriss Déby Itno, tient un discours ferme, de vérité, en demandant à ses homologues de créer leur propre monnaie. Mais depuis deux ans, au moins, qu’il le dit, aucun dirigeant africain n’épouse sa position. C’est le mutisme total.
    La mobilisation a pour objectif de contribuer aux débats en Afrique, en Europe et en Amérique, concernant les moyens de sortir de cette servitude monétaire, et d’informer l’opinion africaine, française et européenne des conséquences du lien qui attache, encore, l’ancienne métropole à ses ex-colonies. 
    Il s’agit, également, de discuter des transformations indispensables à opérer tant au niveau institutionnel que politique, pour répondre aux intérêts des quinze pays de la Zone F CFA dont onze sont classés parmi les pays moins avancés (PMA) par les Nations-Unies.
    Un défi panafricain
    Penser une Afrique nouvelle, c’est penser l’émergence d’un continent libéré du joug impérialiste, qui prend en main son économie et gère, directement, l’exploitation de ses propres ressources naturelles. La monnaie est un attribut de souveraineté. Or, le F CFA, cheval de Troie du néocolonialisme, empêche, évidemment, cette impulsion. 
    C’est pourquoi cette action coordonnée du 7 janvier 2017 contre l’ordre économique du système F CFA est une mobilisation inédite et historique. Elle met en lumière la capacité des Africains et afro-descendants à comprendre l’urgence de prendre part à ces discussions afin de s’impliquer, réellement, dans l’avenir du continent.
    Les pays où va s’organiser cette conférence : Paris (France), Bamako (Mali), Ouagadougou (Burkina Faso), Abidjan (Côte d’Ivoire), Bruxelles (Belgique), Londres (Royaume-Uni), Bologne (Italie), Ouidah (Bénin), Dakar (Sénégal), Haïti (Port au Prince) et Kinshasa (République démocratique du Congo)
  • Cinq choses à savoir à propos du Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres

    Biographie
    António Guterres, le neuvième Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, a pris ses fonctions le 1er janvier 2017. 
    Ayant vu souffrir les êtres humains les plus vulnérables de la planète, dans des camps de réfugiés et dans des zones de conflit, le Secrétaire général est résolu à mettre la dignité humaine au cœur de son action, à se faire l’agent de la paix, à bâtir des passerelles et à promouvoir la réforme et l’innovation.
    Avant sa nomination, M. Guterres a été Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés de juin 2005 à décembre 2015. Son mandat à la tête de l’un des principaux organismes humanitaires du monde a été marqué par les vagues de déplacement sans précédent de ces dernières décennies. Les conflits en Syrie et en Iraq et les crises qui secouent le Soudan du Sud, la République centrafricaine et le Yémen ont obligé le HCR à multiplier ses activités alors que le nombre de déplacés ayant fui les conflits ou les persécutions passait de 38 millions en 2005 à plus de 60 millions en 2015. 
    Avant de travailler au HCR, M. Guterres a passé plus d’une vingtaine d’années au service de l’État et dans la fonction publique. Il a été Premier Ministre du Portugal de 1995 à 2002, période au cours de laquelle il a joué un rôle de premier plan dans l’action internationale engagée pour mettre fin à la crise du Timor Leste. 
    Au début de l’année 2000, en sa qualité de Président du Conseil européen, il a dirigé la procédure d’adoption de la Stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi et coprésidé le premier sommet Union européenne-Afrique. De 1991 à 2002, il a été membre du Conseil d’État portugais.
    En 1976, M. Guterres a été élu au Parlement portugais, où il a siégé pendant 17 ans. Au cours de cette période, il a présidé la Commission parlementaire de l’économie, des finances et de la planification, puis la Commission parlementaire de l’administration territoriale, des municipalités et de l’environnement. Il a également été chef du groupe parlementaire de son parti.
    De 1981 à 1983, M. Guterres a été membre de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, où il a présidé la Commission des migrations, des réfugiés et de la démographie.
    Pendant de nombreuses années, M. Guterres a été un membre actif de l’Internationale socialiste, une alliance mondiale de partis politiques sociodémocrates. Il en a été le vice-président de 1992 à 1999, période à laquelle il a coprésidé le Comité Afrique et, plus tard, le Comité Développement. De 1999 à mi-2005, il a présidé l’Internationale socialiste. Il a en outre fondé le Conseil portugais pour les réfugiés et l’Association de défense des consommateurs portugais DECO et présidé, au début des années 70, le Centro de Acção Social Universitário, une association mettant en place des projets de développement social dans les quartiers pauvres de Lisbonne.
    M. Guterres est membre du Club de Madrid, une alliance démocratique réunissant d’anciens chefs d’État et de gouvernement du monde entier.
    M. Guterres est né à Lisbonne en 1949. Il est titulaire d’un diplôme d’ingénieur de l’Instituto Superior Técnico. Il parle couramment le portugais, l’anglais, le français et l’espagnol. Il est marié à Catarina de Almeida Vaz Pinto, Maire adjointe de Lisbonne chargée de la culture, et a deux enfants, un beau-fils et trois petits-enfants.
  • Comment le roi du Maroc a voulu manipuler le président mauritanien Ould Abdelaziz

    La crise qui a opposé le Maroc à la Mauritanie ces derniers jours, suite aux déclarations scandaleuses du parti marocain Istiqlal qui a réitéré ses inepties traditionnelles au sujet de la «marocanité du territoire mauritanien», n’est finalement qu’une comédie médiatique organisée par le Makhzen à des fins politiciennes. D’après une source très au fait du dossier, qui a bien voulu se confier à Algeriepatriotique, le stratagème mis sur pied par le palais et ses conseillers français, saoudiens et israéliens a eu pour objectif de créer une situation de tension provoquée par un parti politique marocain qui a pignon sur rue et de réserver le deus ex machina au Makhzen qui devait en récolter les dividendes. Se fâcher pour se refaire «copains» puis aborder des sujets plus neutres qui ne toucheraient pas aux relations bilatérales, la stratégie très simpliste n’est pas en contradiction avec les préjugés du chef d’Etat marocain à l’endroit de ses pairs africains qu’il considère plus émotifs que réfléchis, si l’on se fie aux confidences de hauts responsables de la Cédéao qui ont eu à le rencontrer.
    La première étape a prévu de froisser le président Mohamed Ould Abdelaziz, et c’est le secrétaire général de l’Istiqlal, vieil appareil aux ordres, qui a été chargé d’exécuter la phase initiale. Hamid Chabat n’a pas eu besoin de répétition pour sa tirade au contenu expansionniste, credo de sa formation politique habituée à délirer en revendiquant tantôt une large partie du territoire algérien, tantôt la Mauritanie toute entière. Jamais, par contre, les enclaves de Ceuta et de Melila…
    «La Mauritanie est une terre marocaine», a-t-il réitéré bruyamment le 24 décembre dernier lors d’un meeting prétexte à l’opération supervisée par les services marocains de la DGED. Il n’a pas fallu trop attendre pour que le voisin mauritanien proteste. Quelques heures de malaise simulé du côté de Rabat, et tous les acteurs, échauffés d’avance pour les courbettes, se confondent en excuses. Le MAE marocain condamne les «propos irresponsables et dangereux de Chabat». «Mohammed VI passe un appel téléphonique mielleux pour s’excuser auprès du Président», laisse fuiter un membre abusé du protocole présidentiel mauritanien content de la réparation morale. Le président Ould Abdelaziz lui-même serait-il aussi tombé dans le panneau ?
    Pour s’en assurer, le monarque chérifien dépêche son Premier ministre, Abdellilah Benkirane, à Nouakchott afin de présenter, lui aussi, des excuses à l’occasion d’une performance théâtrale grotesque. Le leader de l’Istiqlal fait part, à son tour, de ses regrets, en revenant sur ses affirmations à travers un éditorial publié le 29 décembre à la une d’El-Alam, l’organe d’information du parti. Entre temps, des réseaux de propagande marocains font savoir que Benkirane aurait promis au président mauritanien que «le fauteur de troubles Chabat ne ferait pas partie de son exécutif», tandis que sa majorité du PJD voudrait faire alliance avec l’Istiqlal pour gouverner.
    Excuses plates, concessions sur la composante du futur gouvernement – qui relève pourtant de la souveraineté absolue du royaume –, déclarations emphatiques d’amitié, désaveu public rabaissant le chef d’un parti politique important et populaire, promesses de gestes de solidarité (enveloppe financière ?), le Makhzen n’économise aucun artifice pour flatter la Mauritanie offensée volontairement quelques jours auparavant. Les fourberies de Mohammed VI s’additionnent.
    Usages diplomatiques obligent, les officiels mauritaniens et la classe politique en général accusent le coup avec philosophie en se félicitant que l’incident ait pu finalement rapprocher les deux pays en froid depuis plusieurs années. Il faut préciser que les relations sont très tendues entre Nouakchott et Rabat, particulièrement depuis l’année 2012 quand l’ambassadeur mauritanien Mohamed Ould Mouaouia a quitté subitement le Maroc. Il n’a pas été, à ce jour, remplacé.
    Or, les principaux contentieux entre les deux voisins demeurent la question des frontières et la reconnaissance de la RASD que reproche Rabat à Nouakchott. Pas de doute, le rapprochement forcé au lendemain d’une provocation tactique vise à rediscuter la position de la Mauritanie par rapport à l’autodétermination du peuple sahraoui.
    Afin d’y parvenir, Nasser Bourita, ministre marocain délégué auprès des Affaires étrangères du Makhzen, aurait transmis à Nouakchott des dossiers fabriqués contre l’Algérie et le Polisario. Une tentative de manipulation par de fausses révélations qui pourraient, au pire, être signalées par les frères mauritaniens aux autorités algériennes dans une note confidentielle propre aux pays amis. Malgré les diaboliques interférences marocaines.
    A vouloir berner de la sorte le président Mohamed Ould Abdelaziz, Mohammed VI risque d’apprendre à ses dépens un proverbe mauritanien qui enseigne que «si quatre yeux se confrontent, deux auront honte». Le retour de manivelle viendra bientôt, forcément.
    Maya Loucif

  • Maghreb : Quand Nouakchott rappelle ses atouts géopolitiques

    Écrit par MERIEM KACI ET LYES SAKHI
    La nouvelle année 2017 commence au Maghreb sous le signe de développements politiques et diplomatiques importants. Ce mouvement a commencé à la fin de l’année écoulée et a vu notamment un rapprochement remarqué entre Alger et Nouakchott.
    L’Algérie et la Mauritanie ont, en effet, annoncé leur volonté commune d’accroître leurs relations et de développer de nouveaux canaux de coopération et de partenariat économiques. C’est dans ce cadre que le Premier ministre mauritanien Yahya Ould Hademine s’est rendu à Alger pour la conclusion, avec son homologue algérien Abdelmalek Sellal, d’une série d’accords suivis de l’annonce de l’ouverture d’un poste frontalier algéro-mauritanien et d’une prochaine liaison aérienne par Tassili Airlines entre Alger et Nouakchott via Tindouf. Avant les institutionnels, des opérateurs et chefs d’entreprise algériens et mauritaniens s’étaient rencontrés au Forum africain d’investissement organisé par le FCE. Ce rendez-vous, clôturé par des accords et des promesses d’accords signale, selon les observateurs, le regain d’intérêt de l’Algérie pour la Mauritanie et réciproquement. Un réchauffement dont les conséquences sont à la fois de dynamiser les échanges intermaghrébins qui restent très modestes pour l’instant avec le voisin mauritanien et qu’on espère hisser à des niveaux plus importants, et de procurer surtout à Nouakchott un nouveau positionnement plutôt intéressant à observer au plan stratégique. Le rapprochement de la Mauritanie avec l’Algérie, pour ordinaire et souhaité qu’il soit, s’est tout de même effectué en même temps qu’une détérioration spectaculaire de sa relation avec le Maroc. Le point d’orgue de cette détérioration a été la déclaration, pour le moins surréaliste, de Hamid Chabat, chef du parti marocain El Istiqlal, le 24 décembre dernier, que la « Mauritanie est un territoire marocain ». Cette déclaration, qui transpire des idées du fondateur de l’Istiqlal Allal El Fassi et d’un expansionnisme nationalo-marocain, qu’on croyait jeté aux oubliettes de l’histoire, a provoqué en Mauritanie l’unanimité contre cette formation, en particulier, et le Maroc, en général. Hamid Chabat a été fortement critiqué par toutes les formations mauritaniennes dont le parti présidentiel, l’Union pour la République (UPR). Dans un communiqué virulent, l’UPR a mis en garde l’Istiqlal contre toute « atteinte à la souveraineté et à l’indépendance de la Mauritanie ». Il a imputé les propos de M. Chabat à « la médiocrité politique d’une élite marocaine en faillite et qui a, en outre, enfoncé le Maroc dans l’isolement et dans un état de tension avec tous ses voisins », selon la même source. Les relations entre la Mauritanie et le Maroc n’ont jamais été un fleuve tranquille depuis les années soixante mais cela faisait longtemps aussi qu’elles n’avaient pas connu un tel degré de crispation au point de faire réagir le Palais ! Le 28 décembre dernier, sur instruction du roi Mohamed VI, le Premier ministre Abdelilah Benkirane s’est rendu à Zouerate pour un entretien avec le président mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz et « dissiper tout malentendu » après des propos polémiques du secrétaire général du parti de l’Istiqlal. M. Benkirane, qui a remis au président mauritanien une lettre du roi, a assuré que le souverain « accorde une grande importance au développement des relations entre les deux pays. La Mauritanie, comme tout le monde le sait, est un pays frère et cher et a une place spéciale auprès du royaume du Maroc». 
    Les « déclarations de M. Chabat n’engagent que lui-même. Elles ne reflètent ni la position du roi Mohammed VI, ni celle du gouvernement, ni celle du peuple marocain », a affirmé le Premier ministre marocain. 
    Nouakchott, acteur-clé et courtisé
    Aucune déclaration attribuée au président Aziz n’a été rapportée. Une source officielle jointe par l’AFP a souligné que pour les besoins de la rencontre, le Président Aziz avait interrompu ses vacances dans la zone désertique du Tiris (extrême nord) pour se rendre à Zouerate. Il n’en demeure pas moins que de nombreuses indications attestent d’un froid persistant entre Nouakchott et Rabat, qui ne s’explique pas seulement par les propos du leader de l’Istiqlal qui a, par ailleurs, présenté ses excuses officielles à l’Etat mauritanien. En juin dernier, les autorités mauritaniennes, soupçonnant l’existence d’un réseau d’espionnage, ont prié des techniciens et des cadres marocains de quitter la compagnie nationale de télécommunications Mauritel, dans laquelle Maroc Télécom détient 51% des parts. Les postes sensibles doivent revenir aux Mauritaniens et non à des étrangers, a précisé Nouakchott. La décision du roi Mohamed VI de ne se pas se rendre au sommet de la Ligue arabe qui se tenait dans la capitale mauritanienne à la même époque, et de se faire remplacer par son ministre des Affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, a été d’ailleurs perçue par des observateurs comme un signe de la crispation entre les deux voisins maghrébins. Les soupçons d’espionnage qui ont pesé sur le Maroc étaient assez lourds pour qu’ils deviennent un facteur de détérioration de la relation entre Rabat et Nouakchott. Ce qui a incité le royaume à calmer le jeu et à faire amende honorable après les déclarations du chef de l’Istiqlal. C’est, cependant, la vieille obsession que tout rapprochement mauritano-algérien serait une menace pour ses intérêts. Par le terme intérêts, il faut surtout comprendre Sahara occidental. Et pour s’en convaincre, il faut rappeler que les propos malheureux du chef de l’Istiqlal, Hamid Chabat, ont été proférés dans le contexte où le président de la Rasd et le chef du Polisario, Brahim Ghali, s’étaient rendus à Guerguerat à la frontière mauritanienne et hors du « mur de défense » érigé par l’armée marocaine. Le magazine sahraoui Futurosahara a parlé de la construction de « postes de surveillance fixes construits dans la zone frontalière entre le Sahara occidental occupé et la Mauritanie » et de mesures pour consolider « la souveraineté de l’État sahraoui sur les zones libérées », notamment celles qui sont proches de l’océan Atlantique. Rabat n’a pas réagi officiellement à cette visite, le chef de l’Istiqlal si. « Notre territoire est toujours occupé, et nous allons continuer la résistance jusqu’à ce que nous libérons toute notre terre dont les frontières sont connues. Elles s’étalent de Ceuta au fleuve Sénégal (…) La Mauritanie est une terre appartenant au Maroc pendant que le Polisario se trouve sur ses côtes atlantiques », a déclaré Hamid Chabat, le 24 décembre dernier. Et d’ajouter : «Il y a un complot mené par l’Algérie et la Mauritanie pour créer une ligne de démarcation entre le Maroc et l’Afrique au moment où le Maroc mène une bataille diplomatique pour revenir à l’organisation continentale ». La réplique de l’UPR mauritanien a été que ce n’est en aucun cas « la meilleure façon pour traiter les questions et les dossiers épineux. Elle ne mènera pas à la résolution du conflit au Sahara occidental », à l’heure où ce dernier va connaître dans les semaines prochaines d’importants développements, notamment au sein de l’Union africaine où le débat sur le retour du Maroc dans le giron panafricain, prévu lors au sommet de l’Union africaine à Adis Abeba à la fin de ce mois, relancera les discussions sur la cause indépendantiste sahraouie. Sur un autre volet, il est attendu à nouveau l’examen prochain du dossier sahraoui à l’ONU avec l’arrivée du portugais, Antonio Gutierrez, au poste de secrétaire général, et celle, aux Etats-Unis, du Président élu Donald Trump à la Maison-Blanche, le 20 janvier courant. Une évolution, qu’on le veuille ou non, va faire de Nouakchott l’acteur-clé de la sous-région durant les prochains mois, notamment pour le rôle qu’elle joue déjà dans la stabilité et la sécurité au Sahel -la Mauritanie est membre du G5 Sahel- et la lutte antiterroriste, mais également de la valeur de son point de vue qu’auront à solliciter les services onusiens et américains sur les développements au Sahara occidental.
  • 2016, une année cauchemardesque pour le Makhzen marocain

    Au moment de faire le bilan de l’année 2016, les autorités marocaines ne trouveront pas grand chose à mettre dans la balance des succès diplomatique dans la question du Sahara Occidental.
    Ce que le Makhzen appelle « année de la fermeté » est, en réalité, une année cauchemardesque dans laquelle le roi Mohammed VI a déclaré la guerre à l’ensemble de la communauté internationale.
    Au niveau des Nations Unies, le Maroc a été contraint de confronter la détermination du Secrétaire Général de l’ONU, Ban Ki-moon, d’enregistrer des avances dans le processus de négociations décrétées par les résolutions du Conseil de Sécurité. Le chef de l’ONU a pris, alors, une décision historique: visiter le siège de la MINURSO dans la localité de Bir Lehlou, dans les territoires libérés du Sahara Occidental en provenance des camps des réfugiés sahraouis en Algérie où il a rappelé que la présence du Maroc sur le territoire sahraoui est une occupation. Ban Ki-moon a conclu sa visite avec un rapport destiné au Conseil de Sécurité rappelant que le conflit du Sahara Occidental est une question de décolonisation qui doit être résolue sur la base du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
    La confrontation du Maroc avec l’ONU est allée jusqu’à l’expulsion de la composante civile de la MINURSO. Rabat a été contraint d’accepter son retour sans conditions. Aujourd’hui, les autorités marocaines continuent de refuser d’octroyer le visa à une partie des fonctionnaires onusiens expulsés.
    Désespérées, les autorités marocaines ont décidé d’adopter la politique de la fuite en avant dans leur défi contre la légalité internationale. Ainsi, au mois de novembre, Raba décida d’envahir les territoires libérés dans la bande qui se trouve au sud du mur de la honte dans la région de Gargarate.
    La fermeté des autorités sahraouies a été un cinglant revers pour le Maroc qui a été obligé à arrêter les travaux de bitumage avortant ainsi son intention d’envahir la localité de La Guera.

    A Washington, la déception du Makhzen était on ne peut plus grande. Après avoir offert 28 millions de dollars à Hillary Clinton, l’espoir de voir celle-ci gagner les élections est tombé à l’eau. Pour celui qui sera le nouveau locataire de la Maison Blanche, le Maroc n’est qu’une machine à produire des terroristes.

    Au niveau de l’Europe, ses relations avec l’Union Européenne ont été secoués avec force par la décision de la Cour Européenne de Justice d’annuler l’accord agricole qui lie Maroc avec les pays l’Europe. La sentence de cette cour dans son appel a rappelé que le territoire du Sahara Occidental n’est pas concerné par l’accord parce que ce terrioire ne fait pas partie du Maroc, rappelant ainsi l’illégalité de la présence marocaine dans ce territoire.
    Au niveau du continent africain, les autorités du Maroc se sont heurtés à la fermeté de pays africains conscients des manœuvres de Rabat visant à semer la division dans l’organisation panafricaine. L’Union Africaine lui a signifié la nécessité d’embrasser les principes de l’organisation pour être admis en son sein, y compris le principe du respect des frontières héritées du colonialisme.

    Les périples du roi du Maroc en Afrique ont tourné au vinaigre. Dans presque toutes ces escales, Mohammed VI a été chahuté par la presse locale et ses visites n’ont pas reçu la chaleur escomptée.

    Au Sénégal, les révélations du hacker Chris Coleman ont dévoilé les méthodes de corruption marocaines qui justifient l’engagement de Dakar derrière le Maroc dans leurs rêves de voir la RASD expulsée de l’Union Africaine. L’ambassade du Maroc au Sénégal, le ministère marocain des affaires étrangères ainsi que le ministre des affaires étrangères sénégalais, Mankeur Ndiaye, ont été contraints de donner des explications à l’argent reçu par ce dernier « de la main à la main » de la part de l’ambassadeur du Maroc.
    Au niveau du Maghreb, Rabat a été mise à genoux par la décision de Mohammed Ould Abdelaziz de permettre l’ouverture d’une ambassade sahraouie à Nouakchott si le Maroc n’arrêtait pas son offensive médiatique et diplomatique contre la Mauritanie.
  • Ban Ki-moon quitte l’ONU sur un bilan décevant

    Lorsque Ban Ki-moon évoque, lors d’une visite officielle en mars, « l’occupation » par le Maroc du Sahara occidental, c’est Rabat, cette fois, qui réagit très vivement : en quelques jours, le royaume chérifien a démantelé la mission de l’ONU sur place, créant un précédent dangereux.

    Le secrétaire général des Nations unies sud-coréen, dont le successeur,Antonio Guterres, prendra ses fonctions le 1er janvier,est resté dix ans à la tête de l’organisation. Son bilan en sept points. 
    En dix ans et deux mandats à la tête des Nations unies, Ban Ki-moon n’a jamais su dépasser les blocages inhérents à l’organisation internationale et incarner son rôle de « pape diplomate ». Dans un monde plus divisé et incertain, il laisse à son successeur, Antonio Guterres, qui prend ses fonctions le 1er janvier 2017, une organisation discréditée par la guerre en Syrie .
    La Syrie, « trop peu et trop tard »
    « C’est mon plus grand regret », a reconnu Ban Ki-moon lors de sa dernière conférence de presse, le 13 décembre. M. Ban n’a jamais été en mesure d’imposer son leadership sur le conflit en Syrie face aux blocages du Conseil de sécurité, paralysé par l’opposition de Moscou, membre permanent qui dispose du droit de veto et allié de Damas. 
    Le secrétaire général de l’ONU a mis plus d’un an à prendre la mesure de la crise, en nommant un représentant spécial en Syrie (Kofi Annan puis Lakhdar Brahimi et enfin Staffan de Mistura). 
    Le siège « moyenâgeux » imposé durant cinq mois aux quartiers rebelles d’Alep-Est a obligé Ban Ki-moon à être plus véhément ces derniers mois. Il a plusieurs fois accusé publiquement le président syrien, Bachar Al-Assad, de « crimes contre l’humanité » et affirmé que la crise syrienne laisserait « un trou béant dans la conscience mondiale ». « Trop peu et trop tard », lui reprochent ses critiques, qui insistent sur le rôle de premier plan qu’aurait dû jouer le secrétaire général en tentant de rencontrer directement Bachar Al-Assad ou de se rendre en Syrie. 
    Paix et sécurité : des rétropédalages
    L’action du Conseil de sécurité de l’ONU est paralysée, selon un expert, par « le choc des grandes puissances » et des manipulations politiques, résultats d’un « manque de poigne » du secrétaire général. Face au risque de génocide au Soudan du Sud , le Conseil n’a pas été capable de s’entendre sur l’embargo sur les armes que Ban Ki-moon appelait de ses vœux. La Russie , la Chine et les membres africains du Conseil de sécurité s’y sont opposés. 
    Au Yémen , l’Arabie saoudite, qui dirige la coalition militaire contre les rebelles houthistes, a bombardé des écoles et des hôpitaux. Plus de 11 000 personnes, dont environ un millier d’enfants, ont trouvé la mort depuis le début du conflit en mars 2015. L’ONU a donc inscrit l’Arabie saoudite sur sa liste noire des pays violant le droit des enfants dans les conflits arm és. Riyad a immédiatement menacé l’ONU de geler ses financements. Face aux journalistes, Ban Ki-moon a finalement annoncé qu’il retirait le nom de l’Arabie saoudite . « J’ai dû tenir compte de la perspective très réelle de voir des millions d’autres enfants souffrir gravement si, comme cela m’a été suggéré, certains pays supprimaient des financements à plusieurs programmes de l’ONU », justifie-t-il. Un rétropédalage dramatique pour l’image de l’organisation. 
    Lorsque Ban Ki-moon évoque, lors d’une visite officielle en mars, « l’occupation » par le Maroc du Sahara occidental, c’est Rabat, cette fois, qui réagit très vivement : en quelques jours, le royaume chérifien a démantelé la mission de l’ONU sur place, créant un précédent dangereux. 
    Terrorisme : toujours pas de définition unique
    L’ONU n’a toujours pas de définition unique du terrorisme : la question est « trop politique » pour être acceptable par les 193 Etats membres. Le secrétaire général a fait adopter un vague plan pour « lutter contre l’extrémisme violent » qui encourage la mise en place de programmes nationaux contre la propagation du terrorisme et une collaboration internationale accrue. L’ONU n’a cependant pas été capable de s’entendre sur la création d’un poste de représentant du secrétaire général des Nations unies pour lutter contre le terrorisme. L’organisation est pourtant en première ligne face à cette menace. Sept des seize opérations de maintien de la paix déployées dans le monde le sont dans un contexte terroriste. 
    La crise des réfugiés : aucun accord trouvé
    Jamais le monde n’a compté autant de réfugiés : 65 millions de personnes ont dû fuir leur pays d’origine ou se déplacer à l’intérieur de leur frontière à cause des conflits. C’est la plus grave crise rencontrée par les Nations unies depuis sa création en 1945. Ban Ki-moon s’est rendu sur l’île de Lesbos, en Grèce , pour appeler l’Europe à « répondre de manière humaine et inspirée par les droits de l’homme » à la crise migratoire. « La détention n’est pas la solution », a-t-il poursuivi, dénonçant l’accord conclu entre l’UE et la Turquie pour le renvoi des migrants arrivés illégalement. 
    Le secrétaire général avait espéré mobiliser les dirigeants sur un pacte mondial pour les réfugiés. Le plan prévoyait l’accueil de 10 % des réfugiés dans le monde chaque année. Mais les Etats, qui se sont réunis lors d’un sommet spécial sur les réfugiés à l’ONU en septembre , ont préféré renvoyer la question à 2018, incapables de s’entendre sur cette proposition ambitieuse. 
    Droits humains, femmes, LGBT : une mobilisation inégale
    Ban Ki-moon avait commencé son premier mandat en 2007 par une gaffe en réagissant à l’exécution du dictateur irakien Saddam Hussein. Il avait affirmé que « la question de la peine capitale [restait] la décision de chacun des pays membres ». En 2009, son bilan concernant les droits de l’homme était à nouveau entaché par le conflit sri-lankais, où l’ONU est accusée d’avoir sciemment fermé les yeux et de ne pas avoir pu empêcher la mort d’environ 40 000 civils dans les derniers mois du conflit entre les Tigres tamouls et Colombo. 
    Préoccupé par sa réélection pour un deuxième mandat, M. Ban, pour s’assurer du vote de la Chine pour sa candidature, est aussi resté silencieux face à la vague de répression contre les intellectuels chinois. 
    Libéré de la pression d’une réélection, Ban Ki-moon a été moins réservé lors de son second mandat. Elevé dans la culture conservatrice sud-coréenne, M. Ban s’est révélé être un ardent défenseur du droit des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres. Il a encouragé la création du poste de rapporteur spécial pour le droit des personnes LGBT. En 2014, il avait reconnu le mariage pour tous , offrant aux employés de l’ONU homosexuels mariés les mêmes droits qu’aux hétérosexuels. Il a aussi créé l’agence ONU Femmes en 2010 pour la promotion des droits des femmes et l’égalité des genres. Ban Ki-moon a participé à la féminisation de l’ONU, même si l’organisation emploie toujours moins de 50 % de femmes, objectif qu’elle s’était fixé il y a déjà vingt ans. 
    Mais l’image de l’ONU a été fortement dégradée par la multiplication des affaires d’abus sexuels commis par des casques bleus, majoritairement en Centrafrique et en République démocratique du Congo . M. Ban a plusieurs fois répété « sa honte » de voir des soldats sous drapeau onusien censés protéger la population civile s’adonner à ces pratiques « indignes ». L’organisation pâtit toujours de l’impunité des soldats accusés d’abus sexuels. 
    Climat : des efforts couronnés par la signature de l’accord de Paris
    « C’est la priorité la plus importante pour l’humanité », avait convenu Ban Ki-moon en promettant que son second mandat à la tête de l’ONU verrait la conclusion d’un accord global sur le climat après les échecs des sommets de Copenhague en 2009 et de Cancun en 2010. Il a mobilisé sans relâche les dirigeants du monde entier, allant visiter la banquise au Groenland ou les îles Kiribati , menacées par la montée des eaux. Cette prise de conscience a abouti à la signature de l’accord de Paris et à son entrée en vigueur le 21 septembre. 
    Aux critiques qui lui prédisent que le climatosceptique Donald Trump pourrait se retirer de l’accord de Paris de la COP21 , présenté comme « historique », Ban Ki-moon a profité de sa dernière conférence de presse pour adresser une ultime mise au point au futur président : « Il n’y a pas de retour en arrière possible. » 
    Objectifs de développement durable : un plan ambitieux, mais non contraignant
    Sous les deux mandats de Ban Ki-moon, la pauvreté et la mortalité ont globalement reculé, même si les inégalités se sont encore creusées entre le continent africain et le reste du monde. Le secrétaire général a défendu la création des 17 objectifs de développement durable, une feuille de route ambitieuse, qui doit permettre « de changer le monde d’ici à 2030 » et qui remplace les objectifs du millénaire adoptés en l’an 2000 : « C’est le Programme des peuples, un plan d’action pour mettre fin à la pauvreté dans toutes ses dimensions, de manière irréversible, en tous lieux , et ne laissant personne en arrière. » 
    Mais ces objectifs ne sont pas contraignants. Chaque pays est libre de mener les politiques nécessaires pour les atteindre… ou pas. 
    Marie Bourreau (New York, Nations unies, correspondante)

    Le Monde

    http://apr-news.fr/fr/actualites/ban-ki-moon-quitte-lonu-sur-un-bilan-decevant