Mois : mars 2012

  • L’Envoyé Spécial Kofi Annan exhorte le président syrien à adopter des réformes

    New York, Mar 12 2012 10:50AM
    L’;Envoyé spécial conjoint des Nations Unies et de la Ligue des Etats arabes pour la crise syrienne, Kofi Annan, a exhorté dimanche le Président syrien, Bachar Al-Assad, à adopter des réformes servant de fondement à l’;instauration d’;une société démocratique dans son pays.
    « Il n’;est pas possible de résister longtemps au souffle du vent du changement », a dit M. Annan dans une déclaration publiée à l’;issue de deux jours de discussions avec M. Assad à Damas, la capitale syrienne. « J’;ai exhorté le Président à suivre le vieux proverbe africain : ‘;tu ne peux pas faire tourner le vent, donc tourne ta voile’;. La réponse réaliste est d’;adopter le changement et des réformes. »
    L’;Envoyé spécial a estimé que les réformes aideraient à construire « une société pacifique, stable, pluraliste et prospère, fondée sur l’;état de droit et le respect des droits de l’;homme ». Il a indiqué que les entretiens avaient porté sur l’;arrêt immédiat de la violence actuelle, l’;octroi d’;un accès aux agences humanitaires et le début d’;un dialogue politique.
    « J’;ai présenté une série de propositions concrètes qui pourraient avoir un impact réel sur la situation sur le terrain et aider à lancer un processus permettant de mettre fin à cette crise », a dit M. Annan. « J’;ai dit au Président que ma principale préoccupation était le bien-être des Syriens –; et que nous devrions placer les intérêts du peuple au centre de tous nos efforts. »
    Lors de sa visite de deux jours, M. Annan a également rencontré des représentants de l’;opposition, de la société civile, des leaders religieux et du monde des affaires, avant de partir pour Doha, au Qatar, dimanche après-midi.
    Plus tôt cette semaine, la Secrétaire générale adjointe des Nations Unies aux affaires humanitaires, Valerie Amos, a également effectué une visite à Damas, au cours de laquelle elle a rencontré le Ministre syrien des affaires étrangères, Walid al-Moallem, et d’;autres responsables gouvernementaux. Ceux-ci ont accepté une mission conjointe d’;évaluation préliminaire dans les zones où les gens ont besoin d’;assistance de toute urgence.
  • L’émirat des baïonnettes

    par Moncef Wafi
    Le Qatar, porteparole de la Maison-Blanche dans la région, persite et signe. Il faut envoyer des troupes arabes en Syrie pour chasser le lionceau en place. Oui, le ministre des Affaires étrangères qatari a encore menacé la Syrie du fils de son défunt père d’envoyer des troupes pour changer le système.
    Croyez-moi ou pas, en lisant une telle déclaration, un sentiment vague, confus et incrédule m’a submergé. Mais de quelles troupes parlait le Red-chef d’Al-Jazeera ? Celles de l’Arabie Saoudite incapables d’endiguer une incursion chiite à l’intérieur des Lieux saints dans les années quatre-vingt et obligée de sous-traiter avec les treillis français. Ou peut-être des forces armées arabes tout juste capables de parader en uniforme et de tirer sur leur propre peuple. Mais de quelles troupes peut donc parler Hamad bin Jassim al-Thani, un nom de futur patron d’une équipe pro de football ? 
    Les troupes arabes, parlons-en : celles qui avaient défait Israël en 48 ou en 67, je me rappelle plus. Ou celles qui ont anéanti Tsahal en 73 ou en 80 aux portes de Beyrouth. Rafraichissez-moi la mémoire, c’est tout ce que je demande. Mais dites-moi quelles sont ces troupes invincibles dont on menace Damas ? Peut-être que le porte-avions américain dans le Golfe parlait des troupes de l’Otan avec, à leur tête, le supplétif BHL, accessoirement caporal-chef d’un régiment de truffions commandés par Debbouz. 
    Moi, vraiment, j’en sais trop rien et toutes ces histoires de stratégies militaires me dépassent. Mais je sais une chose, par contre, c’est que les émirs enturbannés ne sont bons à chasser que les outardes du Sud algérien pour leur foie « viagresque » naturel. En parlant du Qatar, on ne peut pas décemment ne pas évoquer son directeur de la communication. Est-ce le Qatar qui a découvert Al-Jazeera ou c’est Al-Jazeera qui a créé le Qatar dans son générique ? Est-ce que c’est le rédacteur en chef d’Al-Jazeera qui trace la politique étrangère du Qatar ou ce sont les enturbannés du désert qui dressent le menu de la chaîne ? Al-Jazeera et le Qatar semblent liés par un même destin, celui de l’argent du pétrole, des alliances douteuses et des compromis suspects. 
    Le petit émirat, fort du parapluie américain, s’est autoproclamé leadership de pays arabes qui sont siphonnés les uns après les autres dans le tourbillon de la démocratie importée. Le Qatar, avec ses pétrodollars, veut s’acheter une histoire et se façonner un rang qui ne sera jamais le sien. Donneur de leçons au reste des Arabes, le Qatar, à travers une chaîne de télévision dont la conception originelle est sortie des tiroirs du Mossad, fait tomber les régimes qui peuvent lui faire de l’ombre comme dans un jeu de quilles. L’Egypte, la Libye et ses milliers de morts, et la Syrie sont ses jouets achetés à des milliards de dollars pour faire plaisir à leurs maîtres.
  • « Le potentiel pour une guerre civile existe »

    Entretien réalisé par Tarek Hafid

    En proclamant l’autonomie de la Cyrénaïque, les chefs des régions de l’est de la Libye ont provoqué un brusque changement de la donne politique dans ce pays. Cette initiative met à mal un Conseil national de transition déjà en manque de légitimité. Le retour à un système fédéral — tel qu’il existait avant 1963 — n’est actuellement pas possible du fait de l’absence d’un Etat libyen doté d’institutions représentatives et légitimes. 
    L’instauration de cet Etat passe avant tout par un démantèlement total des milices et l’acceptation d’un consensus politique entre les tribus du pays. A terme, si les représentants de la Cyrénaïque, du CNT et des autres tribus ne parviennent pas à un compromis, une guerre civile ne sera pas à écarter en Libye. Selon Yahia Zoubir, professeur de relations internationales et directeur de recherche en géopolitique à Euromed Management Marseille, les éléments pour l’éclatement d’un conflit interne existent. Libye, Nord-Mali, Algérie, Sahel… Yahia Zoubir décrypte les enjeux qui se profilent dans une région sous haute tension.
    Le Soir d’Algérie :Les chefs de tribus de l’est de la Libye ont proclamé, de façon unilatérale, l’autonomie de la Cyrénaïque. Estce le début de l’éclatement de la Libye ? 
    Pr Yahia Zoubir : Je ne pense pas que ce soit un début d’éclatement. La situation est encore très floue, car il est certain que le Conseil national de transition (CNT) ne contrôle rien. Mais à mon avis, cette déclaration est impromptue. Ce n’était pas du tout le moment de déclarer l’autonomie de la Cyrénaïque. Peut-être que les tribus de l’est ont agi de la sorte pour lancer un avertissement au CNT ? Ces tribus estiment, aujourd’hui encore, que leur région est lésée. Il ne faut pas oublier que la Libye a été, jusqu’en 1963, un Etat fédéral qui était composé de trois grandes entités : la Cyrénaïque, la Tripolitaine et le Fezzan. Si effectivement nous étions dans un contexte avec un Etat libyen doté d’institutions, un système fédéral ne serait pas nécessairement mauvais.
    Justement, Mustapha Abdeldjalil a menacé d’intervenir par tous les moyens pour instaurer l’autorité de l’Etat. En a-t-il les moyens ? 
    Je ne pense pas. Le CNT est faible. Je pense qu’il compte sur un soutien interne, peut-être des tribus de la Tripolitaine, pour pouvoir contrecarrer les visées des représentants de la Cyrénaïque. Sincèrement, je ne suis pas étonné que cette initiative soit menée par un cousin du roi Idriss Al-Senoussi. La Cyrénaïque a toujours été très particulière, car c’est un fief conservateur. La confrérie des Senoussi est très conservatrice et il y a toujours un fort sentiment de vengeance envers la Tripolitaine. Dès l’arrivée de Mouammar Kadhafi en 1969, cette région s’est considérée lésée sur tous les plans. La déclaration d’autonomie reflète également le manque de légitimité du CNT. Les milices continuent de jouer un rôle majeur.
    Finalement, le «génie» de Mouammar Kadhafi a été de mettre en place des mécanismes pour fédérer les trois grandes régions ?
    Bien entendu, mais je n’appellerai pas cela du génie. Kadhafi était issu d’une tribu minoritaire sur le plan du nombre. Il a joué un rôle de médiation entre les autres tribus. C’est ce mécanisme qui a disparu. Mais Kadhafi n’a pas mis en place les institutions nécessaires à la gestion d’un Etat fort. Actuellement, il n’y a plus d’Etat. Et le plus urgent consiste à trouver un consensus pour bâtir cet Etat. Ce n’est que par la suite que l’on pourra parler de fédéralisme ou de semi-fédéralisme. Actuellement, le CNT réagit comme s’il était face à une sécession. Mais le fédéralisme n’est pas une sécession. Mais dans le cas actuel, en l’absence d’Etat et d’institutions, cela peut être perçu comme une sécession… Effectivement. Et c’est pour cela que je dis qu’il est trop tôt pour envisager une telle perspective. Elle causerait plus de problèmes qu’elle n’en résoudrait. Actuellement, la construction de l’Etat est bloquée par les milices car la force militaire est entre leurs mains. Il faut avant tout désarmer les milices et intégrer leurs membres dans une armée nationale.
    Il s’avère que la Cyrénaïque dispose des plus importantes réserves énergétiques du pays. Ce potentiel pourrait-il être utilisé par ses représentants pour obtenir le soutien de la communauté internationale ? 
    C’est effectivement un grand avantage. On entend parler de plus en plus d’un plan élaboré par des puissances étrangères pour une sorte de partition de la Libye. C’est-à-dire que la Tripolitaine serait restée sous l’influence de «l’Est», donc de la Chine et de la Russie. Et la Cyrénaïque serait plutôt favorable aux Occidentaux. C’est pour cela que le CNT soupçonne le Qatar d’être derrière cette initiative. Les Qataris agiraient donc comme des sous-traitants pour l’Occident.
    Si la situation ne change pas, un scénario à la yougoslave est-il possible ? 
    C’est possible. La manière dont s’est déroulée cette soi-disant révolution, avec l’intervention étrangère, a créé des inimitiés entre les tribus. Les warfala sont divisés, les toubous et les zouwaya sont en conflit… donc le potentiel pour une guerre civile existe. Tout dépendra de la capacité du CNT à imposer sa légitimité. Car n’oublions pas que ce n’est qu’une instance de transition.
    La dégradation des relations entre toutes ces parties pourrait-elle se répercuter sur la région ? 
    Les répercutions sur la région sont difficiles à prévoir. A court terme, cela pourrait provoquer des flux migratoires et augmenter le trafic d’armes. Cela causerait un grand problème de représentativité avec les pays voisins de la Libye en cas de guerre civile. C’est le cas notamment pour l’Algérie qui est en voie de signer des accords avec ce pays. La situation est potentiellement dangereuse.
    La gestion du dossier libyen a-t-elle échappé aux Occidentaux ?
    Je pense que oui, malgré le retour des compagnies pétrolières. De ce point de vue-là, ce n’est pas un gros souci. Sous Kadhafi, les Européens avaient signé des accords avec la Libye pour contrôler les flux migratoires. Les Européens seraient confrontés à une problématique sévère si l’Etat libyen ne se constitue pas.
    Si l’on devait faire une projection sur les dix prochaines années, pensez-vous que le Sahel aura toujours la même configuration ? Va-t-on vers un morcellement des Etats ? C’est le cas actuellement au Soudan, et les conditions semblent réunies en Libye et au Mali… 
    La fragilité des pays de la région est incontestable. La présence des groupes terroristes, d’Al Qaïda au Maghreb islamique principalement, peut avoir des effets déstabilisateurs internes. Par ailleurs, nous assistons à une immixtion des pays occidentaux. Ces derniers estiment que si les Etats de la région ne peuvent pas assurer la sécurité, cela devient une menace pour eux et qu’ils sont dans l’obligation d’intervenir. Il est concevable qu’il y ait une plus grande intervention étrangère. L’Europe et les Etats-Unis sont très concernés par ce qui se passe dans le Sahel. Pour ce qui est du Mali, je pense que les Américains avaient confiance en les capacités de l’Algérie à contrôler la situation. Mais nous sommes actuellement face à l’échec des négociations engagées entre Bamako et les représentants de la rébellion touareg. Mais s’ils estiment que les pays du champ ne parviennent pas à imposer leur contrôle, les Etats-Unis ne se suffiront pas d’une simple coopération. Ils pourraient intervenir directement.
    Dans le cas du Mali, pensez-vous que les Occidentaux sont pour l’instauration d’un «Etat touareg». La volonté des uns et des autres est très floue actuellement ? 
    Franchement, je ne pense pas qu’une partition du Mali soit favorisée par les pays occidentaux, la France en particulier. Mais si la rébellion continue, la donne pourrait changer. On tend à oublier que cette rébellion dispose de la logistique militaire libyenne. Ce sont les troupes touaregs qui avaient combattu aux côtés de Mouammar Kadhafi qui sont revenues au Nord- Mali. Mais une partition du Mali n’est pas concevable actuellement, ni par les Occidentaux ni même par les pays voisins. Un pays comme l’Algérie n’est pas du tout intéressé par une telle partition. Cela remettrait en cause toute la notion d’intangibilité des frontières.
    Dans le cas du conflit au Nord-Mali, il semble que l’Algérie soit partagée entre le fait de préserver le pouvoir central malien et le soutien aux Touaregs qui sont seuls à lutter contre les terroristes d’Aqmi dans ce pays. C’est une position très complexe… 
    C’est pour cela que l’Algérie souhaite continuer à jouer le rôle de médiateur. Alger doit participer à trouver une solution intermédiaire. La question est la suivante : va-t-on réussir à offrir aux Touaregs autre chose que des promesses de développement et d’intégration au sein des forces armées ? Aujourd’hui, il y a un manque total de confiance entre les Touaregs et le pouvoir central. Ce dernier, durant des années, a totalement négligé la région du Nord. Les Touaregs ont des arguments conséquents. Peut-être vont-ils revoir leurs demandes et aller vers une forme d’autonomie dans le cadre de l’Etat malien. Les Algériens pourraient accepter cette option d’autonomie. Bien entendu, celle-ci n’aura absolument rien à voir avec celle que tente d’imposer le Maroc au Sahara occidental. Actuellement, le pouvoir central de Bamako est fragilisé à cause des problèmes de corruption, de terrorisme, de trafic de drogue et de manque de transparence. La situation est donc très complexe. 
  • Cyrénaïque et Azawad compliquent la situation

    Alors qu’on nous parle de printemps arabe, voilà que ce printemps semble virer à l’automne à l’horizon des terres syriennes. Le monde arabe va-t-il imploser ? La question est désormais posée. Plus près de nous, on nous parle de la réactivation de l’unité maghrébine, or cet ensemble est menacé à son tour de partition sur son flanc Est. La Libye officielle se réveille au fait qu’elle n’a pas d’armée et de police. Comment aurait-il été possible de bâtir un ensemble géopolitique digne de ce nom alors que les parties composant le tout, demandent elles-mêmes à être renforcées voire à être complètement refondues ? 
    Un autre ensemble géopolitique, celui formé par ce qu’on appelle les pays du champ (Algérie, Mali, Mauritanie et Niger), est actuellement le théâtre de convulsions qui ont dégénéré en conflit armé entre l’Etat malien et les rebelles autonomistes du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). De quelque côté qu’on se tourne, le spectre du fractionnement et de l’effritement guette les Etats. Ajouté aux agissements de l’AQMI qui sévit dans cette région en proie à une famine endémique, cela fait un véritable chaudron de tensions. 
    La Syrie est un pays pluriconfessionnel. Sa population est composée de minorités chrétiennes et musulmanes (entre 30 et 40%) Les musulmans comprennent les chiites, les alaouites, les druzes et les ismaéliens. Qu’arrivera-t-il si Bachar Al-Assad dont le pouvoir est assis sur le Baas (parti socialiste arabe), lui-même soutenu par la minorité alaouite dont est issu le chef de l’Etat syrien, venait à tomber sous les coups de boutoir des rebelles ? C’est le pays qui risque de se disloquer sous l’œil désarçonné des grandes puissances qui ne sont pas arrivées à s’entendre sur la voie à suivre pour arrêter l’escalade de la violence, chacune étant soucieuse de préserver ses intérêts respectifs. 
    En Libye, c’est de fédéralisme dont on parle. Le 6 mars dernier, les tribus de l’Est barricadées derrière leurs milices, ont proclamé à Benghazi lors d’un «congrès du peuple de Cyrénaïque» (CPC) l’autonomie de leur région. Cette décision unilatérale a ébranlé la légitimité du pouvoir d’Abdeldjalil, chef du CNT. 
    Les rumeurs de la partition de la Libye ont du reste circulé dès les premiers combats qui avaient mis aux prises les insurgés et les forces loyales de Khadafi. Si le CNT s’oppose à la solution fédérale et à l’autonomie de l’Est, il s’est montré par contre incapable de désarmer les milices. Le nouveau gouvernement de Tripoli redoute du reste de voir les autres régions du pays suivre l’exemple de Benghazi. Les tribus du Fezzan, au Sud et les tribus berbères de l’Ouest, pourraient à ses yeux, être tentées par l’autonomie. La Cyrénaïque d’après les observateurs abrite 4/5 des ressources pétrolières et gazières du pays. Voilà qui présage rien de bon…
    Par : LARBI GRAÏNE
    Le Midi Libre, 12/3/2012
  • Les frontières explosives

    La sécurité des frontières est le gros souci des autorités algériennes. 6427 kilomètres répartis entre sept pays voisins à savoir : Maroc, Mali, Libye, Tunisie, Niger, Mauritanie, et Sahara occidental. Pas évident de garder l’œil pour protéger l’Algérie, le plus grand pays du Maghreb. La révolution libyenne qui a amené la chute puis la mort du dictateur Mouammar Kadhafi est venue compliquer les choses en ce sens que les armes circulaient à tout va. Une occasion en or pour les éléments d’ Aqmi pour s’infiltrer. La menace était si forte que l’Algérie a dans un premier temps posté quelque 7.000 gendarmes avec cinq bataillons militaires, puis dans un deuxième temps, a dû se résigner à fermer les frontières avec ce pays d’autant que la chute de l’ancien régime n’a pas réussi à ramener la paix. 
    La réunion interministérielle à laquelle a été convié le ministre de l’Intérieur, Daho Ould Kablia, devra renforcer la coopération en matière de sécurisation des zones frontalières, une priorité aussi bien algérienne que libyenne. L’Algérie forte de son expérience va aider le pays voisin à constituer une armée ainsi qu’une police pour les besoins. La guerre civile en Libye, selon un rapport de l’Onu, aurait permis à des groupes africains armés de mettre la main sur de vastes caches d’armes revendues à des activistes d’Aqmi avec la «baraka» des rançons. La secte Boko Haram du Nigeria entretient elle aussi des liens avec Aqmi et le Niger s’en inquiète également. 
    Du côté du Mali, les autorités ont du fil à retordre avecles Touaregs qui réclament l’indépendance du Nord, certains parmi eux auraient combattu en Libye avec des armes comme butin. C’est dire que les frontières libyennes et des pays du Sahel sont une poudrière. 
    Le sous-secrétaire d’Etat américain à la Défense pour le renseignement est venu discrètement aux nouvelles concernant la coopération en matière de lutte contre le terrorisme et le crime organisé. Il serait un spécialiste de la collecte d’informations sur Al Qaida et son dada, c’est de vouloir « éliminer » tous ces gens-là. L’Algérie, le Maroc, le Tchad , le Niger, le Mali, la Mauritanie, aussi.
    Par : Soraya Hakim
    Le Midi Libre, 12/3/2012
  • Le Polisario accorde le bénéfice du doute au nouveau gouvernement marocain

    Par Hasna Yacoub 
    C’est hier qu’a débuté le 9e round des rencontres informelles sur le devenir du Sahara occidental. Le représentant du Front Polisario à l’ONU, M. Ahmed Boukhari, a indiqué, samedi dernier, la veille de la tenue de cette rencontre, à New York, que l’approche marocaine, qui veut à la fois la construction maghrébine et l’annexion du Sahara occidental, est d’une «lourde contradiction».«Vouloir à la fois le beurre et l’argent du beurre, c’est-à-dire l’annexion du Sahara occidental, par la force et l’oppression de son peuple, et la construction maghrébine, est une contradiction aussi évidente que lourde» dont fait preuve le Maroc, a déclaré M. Boukhari dans un entretien à l’APS. 
    Le représentant sahraoui a souligné que le Front Polisario «attend avec intérêt ce nouveau round de négociations avec le Maroc, ne serait-ce que pour savoir s’il y a du nouveau et s’il y a de la part de cette composante gouvernementale, issue des dernières élections législatives, une volonté politique différente de celle manifestée durant tous les rounds antérieurs». A ce propos, il observe que l’attitude marocaine affichée lors des précédentes réunions «est à l’origine du blocage qui a empêché le processus de négociations d’atteindre l’objectif qui lui a été établi par les Nations unies, celui de permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance». 
    Pour lui, le prochain round «constitue une occasion et une nouvelle opportunité pour le Maroc de se débarrasser du fardeau d’une guerre de conquête territoriale sans lendemain et contraire à la légalité internationale, dont la poursuite ne fait que mettre en doute la sincérité des engagements verbaux du Maroc sur la réactivation du processus de la construction maghrébine». 
    M. Boukhari estime qu’il existe une contradiction fondamentale entre la réalité sur le terrain et le discours des Marocains sur la construction maghrébine qui «fait planer des doutes profonds sur leur sincérité». En effet, explique-t-il, «vouloir à la fois le beurre et l’argent du beurre, c’est-à-dire l’annexion du Sahara occidental, par la force et l’oppression de son peuple, et la construction maghrébine est une contradiction aussi évidente que lourde». Considérant que «cette approche équivoque qui règne dans l’esprit des décideurs marocains ne peut pas aller très loin», M. Boukhari soutient que «l’alternative à ce jeu de courte portée existe et elle est à portée de main, pourvu que la partie marocaine fasse preuve d’un minimum de cohérence et de bonne foi». En outre, renchérit-il, «les défis que nous avons aujourd’hui et demain dans la région, sur les plans économique et sécuritaire, exigent de nous tous, sans exception, la coordination des efforts ainsi que la mise en valeur de nos ressources naturelles pour le bien des générations magrébines». 
    Précisons que le 9e round des rencontres non officielles sur la question du Sahara occidental se tiendra demain et après-demain dans la banlieue new-yorkaise en présence des délégations des deux parties et des représentants des deux pays observateurs, l’Algérie et la Mauritanie. Le Front Polisario a désigné M. Saâd Dine el Otmani pour le représenter à Manhasset, alors que le staff marocain, conduit par le ministre des Affaires étrangères, sera composé de Mohamed Yassine Mansouri, patron du contre-espionnage, et de Maouelanin Khalihanna Maouelainin, secrétaire général du Conseil Royal consultatif pour les affaires sahariennes. Les pourparlers informels seront menés sous l’égide du médiateur onusien, le diplomate américain et ex-ambassadeur US à Alger, Christopher Ross. 
    Rappelons que ces négociations, reportées plusieurs fois en raison du calendrier électoral marocain, intervient dans un contexte fortement imprégné de changements, d’abord marocains avec la transformation constitutionnelle et l’arrivée aux affaires d’un gouvernement islamiste, et puis maghrébins avec l’amorce de reprise des relations algéro-marocaines. Rappelons enfin que dans sa résolution adoptée à l’unanimité en avril dernier, le Conseil de sécurité de l’ONU avait réaffirmé son engagement à aider les deux parties en conflit à parvenir à une solution «juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental».
  • Pambazuka News n° 228, spécial Sénégal n° 3: Les limites des femmes dans l’espace politique

    PAMBAZUKA NEWS 228 : SPÉCIAL SÉNÉGAL N°3 : LES LIMITES DES FEMMES DANS L’ESPACE POLITIQUE

    1 Chroniques

    LES LIMITES DES FEMMES DANS L’ESPACE POLITIQUE


    Tidiane Kassé


    L’élection présidentielle sénégalaise a été marquée par les premières candidatures féminines dans l’histoire politique du Sénégal. Les scores cumulés des deux candidates que sont Amsatou Sow Sidibé et Diouma Dieng Diakhaté font moins d’un pour cent des suffrages exprimés. L’expérience est diversement appréciée, mais elle constitue une étape importante dans l’expression politique des femmes. Pour marquer la célébration de la Journée de la femme, le 8 mars, le CODESRIA a organisé une table-ronde sur «Les femmes dans l’espace politique africain». Pambazuka News a profité de cette occasion pour interpeller certaines femmes, leaders politiques et/ou actives dans les mobilisations au niveau de la société civile, pour s’interroger avec elles sur les limites qui freinent l’expression des femmes dans l’espace politique.



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    NDEYE SOKHNA GUEYE : «EN AFRIQUE, LA CITOYENNETÉ ET LA POLITIQUE RESTENT MASCULINES»


    Les perceptions sociales qu’on a de la femme en Afrique impactent sur leur expression et leur rôle dans l’espace politique. Malgré les acquis notés ici ou là, la citoyenne reste encore masculine tout comme l’est la politique. Cette vision continue de peser dans les sociétés africaines, empêchant ainsi de mesurer et de valoriser le potentiel des femmes dans l’espace socioéconomique. Ndèye Sokhna Guèye, chercheuse au laboratoire Archéologie de l’IFAN Cheikh Anta Diop, explique comment cette réalité a marqué l’élection présidentielle au Sénégal, en défaveur notamment des deux candidates qui étaient en lice.



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    KHADY FALL TALL : «LE MANQUE D’APPAREIL POLITIQUE EST UN HANDICAP, MAIS IL N’EXPLIQUE PAS TOUT»


    Les deux candidates qui se sont présentées à l’élection présidentielle sénégalaise l’ont fait sans s’appuyer sur le mouvement associatif féminin ou sur les organisations de femmes. Cet argument est avancé pour expliquer les faibles suffrages qu’elles ont enregistrés, mais Mme Khady Fall, présidente de l’Association des femmes de l’Afrique de l’Ouest (AFAO) appelle à nuancer cette position, expliquant que disposer d’un appareil ne suffit pas toujours pour assurer une large assise populaire. Pour elles, d’autres facteurs explicatifs du vote des Sénégalais sont à interroger.



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    FATOU SOW : «IL FAUT UNE STRUCTURE ET UNE BASE POUR S’ENGAGER DANS UNE PRÉSIDENTIELLE»


    Avoir deux candidates face à douze autres pour l’élection présidentielle est une avancée considérable au Sénégal. Mais s’engager dans une telle lutte politique exige une meilleure préparation en termes de structure et de base. Pour Fatou Sow, chercheure, directrice de l’IFAN Cheikh Anta Diop, porter son identité de femme pour rassembler autour de cette cause et bouleverser l’ordre établi dans une société patriarcale où les hommes s’arrogent le monopole de l’espace public.



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    PENDA MBOW : «LES FEMMES DOIVENT RETOURNER AUX LUTTES FÉMINISTES»


    Même avec une loi sur la parité qui a fait l’objet d’une forte campagne pour l’affirmation des femmes dans l’espace politique, l’élection présidentielle au Sénégal a confirmé l’exclusion de ces dernières. Pour Penda Mbow, historienne, maître-assistante à l’Université Cheikh Anta Diop, une transformation en profondeur de la société en leur faveur exige que les femmes renouent avec les luttes féministes.



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    AÏSSATA TALL SALL : «POUR PERCER EN POLITIQUE, IL FAUT INTÉGRER LES SCHÉMAS TRACÉS PAR LES HOMMES»


    Devant des règles politiques imaginées, conçues et appliquées par les hommes, l’implication et l’affirmation des femmes ne peuvent être que limitée. Pour Aïssata Tall Sall, porte-parole du Parti socialiste, ces dernières ne peuvent percer dans le combat politique que si elles l’intègrent en épousant les schémas tracés par les hommes.


  • L’incontournable droit des Sahraouis à l’autodétermination

    C’est aujourd’hui que l’Envoyé Personnel du Secrétaire Général des Nations Unies pour le Sahara Occidental, Christopher Ross, rencontre, à Manhasset, New York, dans une réunion informelle, les deux parties en conflit, le Front Polisario et le Maroc.
    La réunion informelle qui se tient à partir d’aujourd’hui et ce, durant deux jours, est la neuvième d’une série de rencontres entamées en 2007 sous les auspices onusiens. Depuis sa nomination au poste d’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU, en 2009, le diplomate américain Christopher Ross semble se confiner dans un rôle de gestion du statu quo. Une situation héritée de son prédécesseur, James Baker, qui a jeté l’éponge face au refus du Maroc de se conformer au droit international. Le Sahara Occidental, territoire inscrit sur la voie d’un processus de décolonisation depuis 1966 à l’ONU, voit son droit à l’autodétermination reporté au calendes grecques. Une situation qui perdure suite au non-parachèvement du processus de décolonisation du Sahara Occidental par l’ex-colonisateur, l’Espagne, lequel via les accords de Madrid a permis à la monarchie marocaine d’envahir le territoire en 1975.
    «Les deux parties prenantes (le Front polisario et le Maroc, ndlr) ont maintenu leurs positions qui sont mutuellement exclusives», a déclaré Christopher Ross dans un entretien accordé au Centre d’actualités de l’ONU, le 25 janvier dernier. Propos illustrant les difficultés qu’il a rencontrées pour parvenir à trouver une solution au conflit selon l’esprit et les textes de la charte de l’ONU.
    Le Maroc qui aspire à travers ses manœuvres (dont sa proposition d’octroyer l’autonomie) compte faire valoir la primauté de la realpolitik sur le droit international. Fuite en avant de la monarchie marocaine soutenue par la France. A partir de Rabat, quelques jours avant la réunion de Manhasset, le ministre français des Affaires étrangères a rappelé la position de son pays sur le Sahara Occidental. Pour Alain Juppé, «la France considère que la proposition marocaine est une base solide et réaliste pour identifier une solution au conflit».
    Les propos de Juppé dévoilent encore une fois le deux poids, deux mesures de Paris. Au moment où elle excelle dans son «soutien actif» aux soulèvements dans le Monde arabe pour le droit à la démocratie, la liberté et à la dignité, la France ne le voit pas ainsi pour les peuples sahraoui et palestinien. Par ailleurs, la feuille de route de Rabat tracée par l’ex-ministre marocain des Affaires étrangères sera portée par la délégation marocaine à la réunion de Manhasset, la première qui se tient intervient après l’avènement du parti de Benkirane à la tête du gouvernement marocain. Ce qui a été signifié par la nomination par Mohammed VI de l’ex-ministre des Affaires étrangères marocaines au poste de conseiller du roi au moment où le PJD a été porté à la tête du gouvernement.
    L’attitude du Maroc «est à l’origine du blocage qui a empêché le processus de négociations d’atteindre son objectif », a soutenu le représentant du Front Polisario à l’ONU. Un objectif «établi par les Nations unies pour permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance» a souligné M. Boukhari à la veille de la réunion informelle de Manhasset. Pour le responsable sahraoui, «l’annexion du Sahara Occidental par la force et l’oppression de son peuple et le discours de Rabat pour la construction maghrébine est une contradiction aussi évidente que lourde».
    La réunion informelle de Manhasset, qui s’achèvera demain, met de nouveau à l’épreuve la mission de l’envoyé personnel de Ban Ki-moon pour le Sahara Occidental.
    KARIMA BENNOUR
  • Coup de projecteur : Envoyé de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross

    Entretien avec Christopher Ross, Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental
    3 février 2012 – En janvier 2009, le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a nommé Christopher Ross comme Envoyé personnel au Sahara occidental, un territoire disputé depuis des décennies. Des combats y ont éclaté en 1976 entre les forces marocaines et le Front Polisario suite au retrait de l’administration coloniale espagnole. La violence a rapidement poussé des centaines de milliers de Sahraouis à fuir en Algérie voisine, où ils se trouvent encore à ce jour.
    Des décennies plus tard, il n’y a plus de violence mais les deux protagonistes sont toujours opposés malgré la poursuite de pourparlers sous l’égide de l’ONU. Alors que le Maroc soutien une autonomie pour les Sahraouis, le Front Polisario insiste sur le fait que le statut final du territoire doit être déterminé par un référendum sur la question de l’indépendance.
    M. Ross, qui est un ancien diplomate américain avec une longue carrière derrière lui, déclare dans l’entretien qu’il est grand temps de mettre un terme au conflit au Sahara occidental et à la tragédie humaine qu’il a engendré.
    Centre d’actualités de l’ONU : Pouvez-vous nous expliquer ce conflit au Sahara occidental?
    Christopher Ross : Le Sahara occidental est une ancienne colonie espagnole, qui a environ la même superficie que la Grande Bretagne mais avec une population de quelques centaines de milliers de personnes. Son statut juridique a fait l’objet de différends bien avant le retrait des Espagnols en 1975-76. Les parties prenantes à ce différend sont actuellement le Royaume du Maroc et le Front Polisario. Le Maroc, qui contrôle la plus grande partie du Sahara occidental depuis les années 1970, affirme que le Sahara occidental doit devenir une région autonome du Maroc sur la base de négociations avec le Front Polisario et un référendum oui/non.

    Cela ne suffit pas de poursuivre les pourparlers à partir de positions figées. La solution doit refléter une volonté politique et des actions concrètes pour avancer.

    Le Front Polisario, de son côté, affirme que le peuple sahraoui doit être libre de choisir librement son propre avenir grâce à un référendum qui inclut l’option de l’indépendance. De 1975 à 1991, il y a eu des affrontements entre les deux parties, mais en 1991 un cessez-le-feu a été mis en œuvre grâce aux efforts menés par l’ONU. Même s’il n’y a plus de combats ouverts, la situation demeure tendue et dangereuse. L’ONU continue d’œuvrer pour trouver une solution définitive et pour améliorer les conditions de vie des gens qui ont été affectés de façon tragique par le conflit.
    Centre d’actualités de l’ONU : Que fait l’ONU?
    Christopher Ross : Depuis le milieu des années 1980, l’ONU a adopté deux approches différentes concernant ce conflit, suivant l’orientation décidée par le Conseil de sécurité. La première approche, qui a duré jusqu’en 2004, était basée sur plusieurs plans de règlement du conflit qui ont été soumis aux parties prenantes. Aucun de ces plans n’a fonctionné. Ils appellent tous à un référendum mais les parties prenantes ne se sont jamais mises d’accord sur les personnes ayant le droit de prendre part au vote. En 2004, une seconde phase a commencé et elle continue à ce jour. Cette approche se base sur des négociations directes entre les parties prenantes. Chaque année, le Conseil de sécurité émet des résolutions appelant les parties prenantes à obtenir, je cite, « une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable pour l’autodétermination du peuple du Sahara occidental ». Pour aider les parties prenantes à réaliser des progrès, le Secrétaire général a nommé un Envoyé personnel qui sert de médiateur et de facilitateur.
    Donc, pour résumer, le Conseil de sécurité attend maintenant des parties prenantes qu’elles négocient une solution politique avec l’aide de l’ONU, des pays voisins et de la communauté internationale au lieu de simplement réagir à des propositions formulées par d’autres.
    Dans le contexte de cette nouvelle phase, les deux parties prenantes avaient présenté leurs propositions de résolution du conflit au Conseil de sécurité en avril 2007 et depuis lors, ces propositions ont servi de base pour les discussions. Je précise que ces efforts politiques pour arriver à une résolution ne sont pas les seuls exemples d’engagement de l’ONU. Le système des Nations Unies a été activement engagé sur plusieurs fronts. Il a apporté un soutien vital aux milliers de réfugiés qui se sont réfugiés en Algérie pour échapper aux combats entre le Maroc et le Front Polisario dans les années 1970.
    L’ONU a travaillé pour mettre en œuvre des mesures de renforcement de la confiance pour faciliter le retour des réfugiés une fois un accord conclu. L’ONU a également maintenu une petite force dans le Sahara occidental connu sous le nom de MINURSO, la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental. Enfin, l’ONU s’est intéressée de plus en plus aux droits de l’homme puisque les parties prenantes au conflit s’accusent mutuellement de ne pas respecter ces droits.
    Centre d’actualités de l’ONU : Quelle est la dimension humaine de ce conflit?
    Christopher Ross : Malheureusement, les crises urgentes à travers le monde et l’absence d’urgence au Sahara occidental font que ce conflit est privé de l’attention qu’il mérite de la communauté internationale. Un règlement du conflit se fait en effet attendre. Mon premier objectif est d’assurer le retour en toute sécurité des réfugiés sahraouis en Algérie dans leurs foyers. J’ai visité les camps de réfugiés pour la première fois dans les années 1970. J’y suis retourné en 2009 et j’ai découvert avec consternation que pas grand chose n’a changé.
    Il est à mon avis inacceptable que ces réfugiés vivent dans des conditions misérables depuis 37 ans à cause d’un différend politique pour lequel les protagonistes se sont livrés à des batailles sans fin sur le terrain, à la table des négociations et dans les forums internationaux. Je pense que nous ne devons jamais perdre de vue les gens qui se retrouvent coincés entre les parties prenantes à ce conflit.
    Centre d’actualités de l’ONU : Pourquoi le conflit est-il si difficile à résoudre? Pourquoi cela prend-il si longtemps?
    Christopher Ross : Essentiellement, les deux parties prenantes ont maintenu leurs positions qui sont mutuellement exclusives et aucune d’entre elles n’est disposée à céder. Le Front Polisario continue d’affirmer que le statut final du Sahara occidental doit être décidé par son peuple, le Maroc continue d’insister que la seule solution possible est une forme d’autonomie sous souveraineté marocaine.
    Le Conseil de sécurité a encouragé les protagonistes à négocier mais s’est abstenu de vouloir imposer une solution. Donc, chacun est libre de rejeter les propositions de l’autre. Les parties prenantes sont chacune convaincue du bien fondé de leur position autant d’un point de vue historique que juridique et chacun bénéficie d’un soutien important aux niveaux national et international. Ils maintiennent donc leurs positions sans chercher à engager un processus réel de négociations. 
    Centre d’actualités de l’ONU : Que pouvez-vous faire en tant que médiateur de l’ONU pour faire avancer le processus?
    Christopher Ross : Mon rôle d’Envoyé personnel du Secrétaire général est de promouvoir une solution en apportant un cadre pour le dialogue et ensuite en encourageant de réelles négociations sans prendre position sur la substance. Je ne peux pas imposer une solution, les parties prenantes doivent elles-mêmes y arriver avec mon aide et l’aide d’autres acteurs.
    Quand j’ai pris mes fonctions, nous avons mis fin aux négociations formelles qui se faisaient entre de grandes délégations. Nous avons préféré des pourparlers informels entre délégations plus restreintes. Nous avons fait ce choix car les négociations formelles n’avaient abouti à rien, à part des polémiques. Nous étions déterminés à créer une atmosphère respectueuse dans laquelle les négociations seraient plus fluides et plus propices au dialogue.
    Cet effort a abouti mais il a été insuffisant pour sortir de l’impasse et les deux parties prenantes étaient incapables de dépasser leurs propositions initiales. Donc, plus récemment nous avons tenté de diviser ces propositions en thèmes spécifiques que les protagonistes peuvent discuter sans inquiétude pour le statut final. Ils ont convenu de commencer par la question de la gestion ressources naturelles et du déminage avant de s’attaquer à d’autres questions. C’est encore trop tôt pour dire si cette tactique permettra d’avancer sur les questions centrales.
    Centre d’actualités de l’ONU : Quelles seraient les conséquences s’ils ne parviennent pas à trouver une solution politique ?
    Christopher Ross : L’absence de solution augmente les risques et le coût pour les parties prenantes, pour la région du Maghreb et pour la communauté internationale.
    Parmi les risques pour les parties prenantes se trouvent celui d’un regain des hostilités militaires, l’éclatement de soulèvements populaires, et le risque de recrutement de jeunes Sahraouis désabusés et au chômage dans les rangs de groupes terroristes ou criminels. L’absence de solution entraînera aussi des souffrances pour les réfugiés, entraînera des questions croissantes sur les droits de l’homme, imposera le maintien d’une importante présence militaire à grands frais et empêchera l’utilisation des ressources naturelles du Sahara occidental. Au niveau régional et pour la communauté internationale il y a le risque d’une escalade militaire et d’une recrudescence des activités terroristes et criminelles. Là aussi, il y aurait des coûts, dont l’incapacité à récolter les fruits d’une plus grande intégration économique et l’absence de coordination dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité, qui a grandi depuis la chute du régime Qadhafi en Libye et la dispersion des armes et des combattants dans l’ensemble de la région du Sahel. 
    Centre d’actualités de l’ONU : Pensez-vous qu’une solution puisse être trouvée ?
    Christopher Ross : Il y a ceux qui pensent que le conflit au Sahara occidental n’est pas mûr pour l’instant pour un règlement en des termes acceptables pour les parties prenantes et pour la communauté internationale. Il est cependant clair qu’une solution est nécessaire si la région du Maghreb doit se développer pour relever les défis du 21ème siècle. Il est possible que les évènements récents puissent encourager les parties prenantes à entamer des négociations plus sérieuses. Nous avons vécu le printemps arabe, nous avons vu des signes de désaffection grandissante parmi les jeunes et nous avons relevé un désir de raviver le mouvement pour l’unité du Maghreb. Nous avons aussi vu une prise de conscience plus forte concernant la menace terroriste. Ces éléments pourraient pousser les parties prenantes à un engagement plus solide et cela pourrait aussi pousser les acteurs régionaux et internationaux à s’engager davantage à la recherche d’une solution.
    Pour notre part, nous allons continuer nos efforts pour promouvoir un processus de négociation réel. La prochaine rencontre entre les parties prenantes est prévue pour février et elle aura lieu à Greentree, Long Island, près de New York.
    Centre d’actualités de l’ONU : La communauté internationale peut-elle aider ?
    Christopher Ross : Oui, je pense qu’il y a des choses qui doivent être dites non seulement aux parties prenantes, mais aussi aux pays voisins et à la communauté internationale. En ce qui concerne les protagonistes, nous espérons voir un engagement plus solide sur les sujets centraux concernant le statut futur du Sahara occidental dans l’année à venir. Il ne suffit pas de parler sur la base de positions figées. La solution doit refléter une volonté politique et des initiatives concrètes. Nous espérons également que les gens du Sahara occidental qui se trouvent sur le territoire ou dans des camps de réfugiés puissent bénéficier pleinement des droits de l’homme y compris la liberté d’expression sur leur avenir et que leur opinion soit prise en compte dans les négociations.
    Pour les Etats du Maghreb et pour la communauté internationale, nous espérons qu’ils verront avec plus de clarté qu’auparavant les bénéfices d’un soutien actif à la recherche d’une solution acceptable pour tous.
    Après 37 ans, il est grand temps de mettre un terme au conflit du Sahara occidental et à la tragédie humaine qu’il a engendré.
  • Sahara occidental : des pourparlers près de New York du 11 au 13 mars

    La session de pourparlers informels sur le Sahara occidental entre le Maroc et le Front Polisario a commencé aujourd’hui jusqu’au 13 mars 2012 à Greentree, près de New York, à l’invitation de l’Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross.
    Les pays voisins, l’Algérie et la Mauritanie, sont également invités à participer à ces pourparlers, a précisé vendredi le porte-parole adjoint du Secrétaire général adjoint de l’ONU, Martin Nesirsky, lors d’un point de presse au siège de l’ONU à New York.
    A la question de quelles sont les sujets à discuter par les parties, Nesirsky a répondu : 

    Comme je pense que vous êtes au courant,l’ambassadeur Ross devrait faire une déclaration à la presse à la fin de ce cycle de négociations. Je pense que c’est provisoirement fixé pour mardi après-midi vers 16 heures . Il s’agit de lapremière série de pourparlers informels depuis Juillet de l’an dernier. Et nous saluons évidemment le fait que les partiesse se rencontrent pour ce nouveau cycle, et les Nations Unies restent engagées à trouver une solution juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental. Tel que mandaté par le Conseil de sécurité.Le principal objectif des pourparlers – pour se rendre à l’essentiel de votre question – reste à discuter des propositions des parties sur un règlement. Et afin d’aider les parties à aller de l’avant dans le processus de négociation, l’Envoyé personnel encouragera également à une discussion plus approfondie des nouvelles idées mises en avant au paragraphe 120 du dernier rapport du Secrétaire général sur le Sahara occidental. Et en plus, les parties continueront leur discussion sur les approches novatrices et des sujets de discussion tels que les ressources naturelles et le déminage, sans préjuger du statut final du territoire. Les progrès accomplis sur les mesures de confiance seront également abordées.