Mois : novembre 2011

  • SYRIE: L’OTAN prépare une intervention limitée

    Les ministres arabes des Affaires étrangères pour arabe se retrouveront aujourd’hui au Caire, sous la présidence du Qatar, pour se prononcer sur les suites à donner à leur initiative de sortie de crise en Syrie. Notamment, leur proposition d’envoyer 500 observateurs pour superviser la protection des civils. Damas qui a accusé la Ligue arabe de créer un « prétexte » à une intervention militaire occidentale, reconsidéra t-elle sa position sous peine de sanctions économiques ?

    Une chose est sûre. Les chefs de la diplomatie arabes tireront leurs conclusions aujourd’hui des « réponses » que leur apporteront les autorités syriennes. M. Mourad Medelci qui sera dans la capitale égyptienne en tant que chef de la diplomatie algérienne et membre du comité de suivi de l’initiative arabe, reconnaît que la situation qui prévaut en Syrie, est « préoccupante ». Il presse les autorités syriennes de répondre « positivement » à l’initiative arabe qui « est bonne dans la mesure où sa mise en oeuvre diligente aura le mérite de sauver des vies humaines et de confirmer la validité du plan de sortie de crise » si elles veulent, primo, « préserver les chances d’une solution arabo-arabe » deusio, « prévenir une internationalisation de la crise » ou une guerre civile « vraiment possible ». Selon Mohamed Zaïdi, un conseiller de Nabil Al-Arabi, le secrétaire général de la Ligue, un rapport sur « le suivi de la mise en oeuvre des décisions prises dernièrement à Rabat » notamment celle portant sur l’envoi d’observateurs arabes en Syrie, sera présenté à cette réunion qui pourrait être « crucial » pour le président Bachar El-Assad dont certains arabes réclament le départ. La Ligue qui a rejeté dimanche les 18 amendements demandés par Damas sur l’envoi des 500 observateurs, reste déterminée à « résoudre » cette crise dans un cadre arabe. Comment ? Elle ne le précise pas. Les Occidentaux qui ont brandi la menace d’une intervention armée ne semblent plus savoir sur quel pied danser. Certains avancent mordicus qu’ils n’envisagent pas une action armée. « Les pays arabes ne nous l’ont pas demandé » affirme Alain Juppé, le ministre français des Affaires étrangères qui ne cache plus sa volonté de réintroduire devant le Conseil de sécurité une résolution visant le président el Assad. D’où peut être cette résolution condamnant la répression des manifestations adoptée mardi par la commission des Droits de l’homme de l’Assemblée générale des Nations unies par 122 votes pour, 13 contre et 41 abstentions et cette information rapportée hier matin par le Canard enchaîné. Le canard français qui cite une source du Quai d’Orsay, évoque « l’utilisation de la Turquie comme base arrière d’une intervention limitée, prudente et humanitaire de l’OTAN, sans action offensive » et l’envoi déjà au Nord du Liban et de la Turquie d’officiers français de la DGSE et britanniques du MI 6 pour « constituer les premiers contingents de l’Armée syrienne libre ».

    En attendant les « décisions » de la Ligue, la Syrie qui serait disposée à limiter les prérogatives du Baâth, le parti au pouvoir, compte sur l’Irak et le Liban pour éviter l’asphyxie économique annoncée (voyages, transferts bancaires, blocage des avoirs dans les pays arabes, arrêt des projets arabes ou arabo-syriens etc…). Selon le bureau syrien des statistiques, 52,5% des exportations syriennes et 16,4% des importations sont vers ou en provenance des pays arabes. Damas compte aussi sur la Russie et la Chine pour bloquer toute résolution contraignante au Conseil de sécurité. Selon certaines sources, Damas pourrait réactiver l’organisation palestinienne Al-Saika, en sommeil depuis plusieurs années au Liban;

     
    boukrine, 24/11/2011
  • HRW appelle Rabat à cesser de « harceler » les activistes pro-boycott

    Par Thami Afailal, demainonline,23/11/2011

    Rabat.- L’organisation américaine de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch (HRW), vient d’exiger des autorités marocaines qu’elles cessent de harceler les activistes qui appellent au boycott des élections législatives du 25 novembre prochain.

    HRW a comptabilisé depuis le 20 octobre plus de 100 c/itoyens marocains convoqués par la police « pour les /interroger » sur la distribution de dépliants appelant au boycott. L’ONG américaine donne une liste exhaustive du lieu de résidence de ces militants : Casablanca, Rabat, Tanger, Marrakech, Taza, Beni Mellal, Benguerir, Taounate, Larache, Benslimane, Guercif , Settat, Kelaât Sraghna, Khemisset, Meknès, Biougra, Midelt, Khénifra, et même dans des villages de ce royaume heureux.

    Des activistes pro-boycott ont déclaré à HRW qu’ils avaient été interrogés pendant plusieurs heures et certains ont affirmé avoir été photographiés, comme s’ils avaient commis un délit.

    «Le droit de choisir librement (…) inclut le droit de ne pas voter, et d’exhorter les autres à faire de même« , a déclaré Sarah Leah Whitson, responsable du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord au sein de Human Rights Watch. «Harceler les gens qui soutiennent un boycott est tout aussi mauvais que de harceler ceux qui soutiennent un parti ou un candidat, et jette une ombre sur le vote. »

    HRW dénonce la confiscation par la police de tracts prônant le boycott, ainsi que l’interdiction faite à une imprimerie d’imprimer des tracts du Parti de l’avant garde démocratique et socialiste (PADS).

    Bien entendu comme dans toute bonne dictature qui se respecte, les personnes convoquées l’ont été oralement. Cette fois-ci, pas de petits papiers de la police en couleur qui sont autant de preuves. « Le chef veut te parler« , lance le policier chargé de cueillir l’activiste pour l’amener au commissariat, selon l’organisation américaine. Comme si on était dans un film de gangsters des années 30.

    On ne comprend vraiment pas le pourquoi de ces harcèlements. Si comme l’a dit le souverain dans son dernier discours le Maroc est entré dans une nouvelle « ère constitutionnelle« , et si le peuple est vraiment d’accord avec ces réformes octroyées, comme l’affirme à longueur de journées la presse aux ordres, de quoi le Palais royal a-t-il peur ?

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  • Les « Foutouhat » qataries en Afrique du Nord

    Fatma Benmosbah
    La montée en puissance du Qatar sur la scène politique arabe n’est plus à démontrer. Le minuscule émirat dont la population ne dépasse pas celle d’un quartier du Caire ou de Bombay est sur tous les fronts. Après avoir pris part à la répression de la révolte bahreïnie, il a été le seul pays arabe à apporter un soutien militaire et matériel à l’insurrection contre Kadhafi. Après avoir proposé sa médiation au Yémen, donné sa bénédiction à la Tunisie de Ghannouchi, opéré un rapprochement avec les Frères musulmans d’Egypte, le voilà qui, aujourd’hui, conduit l’orchestre dans la partition syrienne et, selon certaines sources, préparerait un changement en Algérie ?
    … l’avenir arabe dépend-il du Qatar ? Qu’en est-il des relations du Qatar avec les pays d’Afrique du Nord?
    Tunisie – Soutien et bénédiction
    Le voyage au Qatar du Cheikh Rached Ghannouchi au lendemain des élections a apporté aux Tunisiens une réponse à l’énigme de la puissance financière déployée par le parti Ennahdha lors de la campagne électorale. Le but de cette visite aurait été de remercier ses bienfaiteurs pour leur soutien logistique et financier lors de cette campagne et d’obtenir l’absolution du très influent Cheikh Youssef al Qardhaoui, bien placé pour obtenir du Cheikh Hamad ben Jassem ben Jabr Al-Thani, à la fois premier ministre, ministre des Affaires étrangères et président du QIA (fonds souverain du Qatar) un appui au nouveau gouvernement par des investissements, des dons, des prêts sans intérêts et l’ouverture de débouchés aux jeunes diplômés tunisiens au chômage. Le Qatar n’est pas une association de bienfaisance. Si la requête du Cheikh de rencontrer une réponse positive, quel sera en retour le prix à payer par la Tunisie ?
    L’annonce de M. Ghannouchi, dès son retour de Doha, relative au fait qu’il serait prêt à renvoyer l’ambassadeur syrien de Tunisie et reconnaître le Conseil national de transition syrien fournit un début de réponse. Propos pour le moins étonnants mais dans la droite ligne de la suspension de l’adhésion de la Syrie à la Ligue arabe. La Tunisie que Hamadi Jebali décrit comme le VIe Califat a approuvé cette décision ; laquelle, prise de manière arbitraire et sans respect des procédures légales par les ministres des affaires étrangères arabes, a été sans aucun doute dictée par le Qatar.
    Médias et argent, les armes de velours du Qatar en Lybie
    Si à travers la chaîne Al Jazeerah, le Qatar a joué un rôle non négligeable dans le renversement du régime libyen, les Qataris sont arrivés bien avant la chute du colonel Kadhafi avec des valises remplies d’argent, de nombreux convois d’armes pour les combattants islamistes et 5000 membres de leurs forces spéciales.
    Le 26 octobre, lors d’une réunion de pays amis de la Libye, le chef d’état-major qatari a annoncé “la formation d’une nouvelle alliance internationale de treize pays, dont les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, sous la conduite du Qatar, pour la période qui suivra la fin de la mission de l’OTAN. Son rôle sera notamment de coordonner, d’entraîner et de refonder l’armée”. Mais l’engagement qatari un peu trop marqué aux côtés des islamistes a fini par susciter des critiques parmi certains dirigeants du CNT libyen. Mahmoud Jebril, ex-Président du Bureau exécutif du CNT et Mohamed Abdel Rahman Shalgham représentant de la Libye aux Nations Unies, s’accordent pour reconnaitre qu’« aujourd’hui les pétrodollars qataris, via le soutien de certains partis en allusion au mouvement islamique, alimentent les rivalités entre les rebelles et les divers courants qui gèrent la période post-Kadhafi, et ce, en répandant la sédition entre les frères libyens. En pactisant avec les factions, le Qatar qui continue à abriter Moussa Koussa, l’ancien chef des renseignements de Kadhafi, joue un rôle, dépassant ses capacités».
    Who’s next ? L’Algérie entre soupçons et menaces
    Comme la Libye, l’Algérie est un pays riche en pétrole et en gaz dont les revenus sont très mal répartis. Il n’est pas difficile dans ce cas de se servir du peuple comme levier de changement du régime en place et le rôle grandissant du Qatar auprès de certains opposants algériens en exil, notamment les réseaux de l’ex-FIS, suscite beaucoup d’inquiétude.
    Parmi les grandes figures de cette opposition, Abassi Madani qui vit au Qatar, qui fait partie du cercle des responsables islamistes maghrébins régulièrement reçus par l’émir Madani a tissé des relations très fortes avec le CNT libyen, d’où peut-être la persistance des tensions entre Alger et le CNT. Annoncée début octobre, la visite d’une délégation libyenne à Alger n’a toujours pas eu lieu.
    Autre hôte du Qatar, Saad Djebbar, opposant et avocat personnel de l’émir du Qatar, intervient régulièrement sur la chaîne Al Jazeerah pour commenter les événements au Maghreb et en Algérie.
    Les Algériens soupçonnent aussi le Qatar de vouloir financer une chaîne de télévision qui pourrait être lancée par des opposants à l’étranger. Même si Alger tente de calmer le jeu et évite toute confrontation avec Doha, le Qatar joue clairement la révolution en Algérie. Les menaces adressées par Jassem Ben Jabr Al Thani à son homologue algérien lors du vote pour la suspension de l’adhésion de la Syrie à la Ligue arabe : «Ne défendez pas trop la Syrie, car quand votre tour arrivera, vous aurez certainement besoin de nous», ne laissent planer aucun doute à ce propos.
    « Pour l’émir, le changement en Algérie, comme dans les autres pays du Maghreb, passe par les islamistes modérés », explique un connaisseur de la politique arabe. C’est peut-être le message que Ghannouchi —qui occupe le poste de vice-président de la Ligue mondiale des ulémas musulmans et dont l’influence sur les partis islamistes dans le monde arabo-musulman est considérable— est allé passer à ses amis d’Alger. On ignore pour le moment le rôle de l’émirat qatari dans cette nouvelle initiative diplomatique, mais le leader d’Ennahdha a été reçu à Alger avec les honneurs d’un Chef d’Etat.
    Le Maroc, dans le giron des grandes sœurs du Golfe
    De tous les pays d’Afrique du Nord, le Maroc a été le seul à recevoir des dirigeants israéliens tels Shimon Peres ou Tzipi Livni. Plus, le Maroc est le seul qui, comme le Qatar, ne se cache pas d’avoir un bureau de liaison avec Israël. Le Roi Hassan II était allé jusqu’à proposer l’intégration d’Israël à la Ligue arabe. Il n’est donc pas étonnant aujourd’hui que le Maroc ait été invité à adhérer au Conseil de coopération des pays du Golfe qui regroupe les pays les plus riches et les plus engagés dans la mise en place des politiques américaines dans le monde arabe. En acceptant l’offre des maîtres du jeu politique dans la région, le Maroc pense pouvoir ainsi se mettre à l’abri de l’effet domino des soulèvements populaires arabes. En lui proposant leur soutien pour maîtriser la montée des protestations du mouvement du 20 février et trouver une issue au problème du Sahara occidental, les pays du Golfe offrent au Maroc une porte de sortie qu’il ne peut refuser.
    Sous la supervision du Qatar, désormais nouvel « Emir des Croyants » arabe, le train des démocraties islamiques semble désormais en marche. Reste que pour arriver à destination sans problèmes, les conducteurs doivent suivre le chemin tracé par les passagers. Est-ce réellement le cas ?
    L’information sur l’éventuelle présence de l’Emir du Qatar à l’ouverture de l’Assemblée constituante a provoqué la colère des Tunisiens qui multiplient les commentaires hostiles à son encontre, le décrivant comme un roitelet du Moyen Age, qui n‘a aucune leçon à leur donner tant en démocratie qu’en nationalisme arabe.
    Parlant au nom du peuple libyen, Mahmoud Jibril met en garde l’émirat : «… Qu’il s’agisse du Qatar ou d’un autre pays, tous les politologues s’accordent pour dire qu’à partir du moment où un pays cherche à élargir encore plus sa sphère d’influence, il risque de se briser du milieu…».
    Le Qatar courre- t-il ce risque ? Le soutien des États-Unis et de la France suffira-t- il à le préserver d’un éventuel retournement de situation ? A ceux qui, constatant l’impuissance de la toute puissante Arabie saoudite face aux ambitions du petit émirat rival, se demandent que peuvent faire les peuples d’Afrique du Nord pour préserver leur indépendance, on pourrait répondre que, ces peuples qui savent mieux que quiconque que sans indépendance il n’est point de liberté, n’ont peut-être pas encore dit leur dernier mot.
    Le 10 du mois de ramadan 2011, l’Emir de Qatar n’avait-il pas invité hommes politiques et religieux du monde arabe à venir prier avec lui le jour de l’Aid dans la mosquée des Omeyyades de Damas, et ce, en l’absence de Bashar el Assad. Nous attendons toujours…
    Fatma Benmosbah
    Nawaat, 23/11/2011
  • Région sahélo-saharienne : Alger déjoue les plans de Paris et de Tel-Aviv

    En un peu plus d’un mois, l’Algérie s’est redéployée sur tous les fronts, avec en prime, une meilleure gestion des conflits régionaux et la mise en échec des tentatives de l’isoler au plan arabe, maghrébin et international. Le président de la République a fait travailler sa diplomatie en continu, avec «un plan de charge et des obligations de résultats». Les projets qui la visaient étaient par trop dangereux pour les ignorer : Israël, en premier, avait clairement souhaité voir l’Algérie isolée au Maghreb et coupée de ses voisins. Le conflit libyen est venu à point nommé pour raffermir les plans de Tel-Aviv, et les rebelles, tout comme le CNT, n’avaient pas encore les visions assez claires, ni les articulations nécessaires pour évaluer le danger, et tombaient chaque jour dans le jeu qui se faisait ailleurs, et dont ils n’étaient que les instruments. 
     
    Début octobre 2011. À cette date-là, Alger paraissait coupée de son environnement géopolitique immédiat. Les querelles avec le Maroc continuaient, quand elles n’augmentaient pas en volume, les islamistes tunisiens s’apprêtaient à prendre le pouvoir et menaçaient l’Algérie de contagion, Tripoli tombait entre les mains de Abdelhakim Belhaj, l’ancien émir du Groupe islamique combattant libyen, proche du GIA, et les armes volées dans les casernes des loyalistes de Kadhafi et acheminées vers le Sud, pour terminer entre les mains d’Aqmi, créaient de nouvelles menaces dans tout le Sahara et le Sahel. 
     
    Dès lors, Alger commence à faire jouer sa diplomatie, ses coulisses, son pétrole, ses marchés et ses cartes pour, d’abord, déjouer les plans sournois qui tentaient de l’isoler, pour, ensuite, reprendre son rôle de leadership dans la triple région maghrébo-saharo-sahélienne, et pour, enfin, faire en sorte d’évoluer à l’aise dans son environnement naturel et immédiat, en compagnie de voisins avec lesquels il fallait trouver le compromis. Les rencontres Mourad Medelci- Mahmoud Jibril, puis Abdelaziz Bouteflika-Mustafa Abdeljalil ont lissé un tant soit peu les aspérités. Les humeurs de certains chefs rebelles se dissiperont avec le temps. Les ultras de ces chefs seront confrontés d’abord à un peuple libyen qui n’a pas vocation à devenir une base de radicaux. 
     
    Les contacts soutenus avec Bamako et Niamey ont définitivement amarré le Niger et le Mali à l’Algérie dans des projets politiques, sécuritaires et de développement qui s’inscrivent dans la durée. La Mauritanie aussi, est revenue à son environnement immédiat, composé principalement de l’Algérie, et entretient avec Alger des relations privilégiées. La main tendue entre Bouteflika et le souverain chérifien semble apaiser les tensions, et fait entrer les relations entre les deux pays dans sa « phase favorable ». 
     
    Bien que les relations entre Alger et Tunis ont toujours été excellentes, la récente visite du président du mouvement tunisien Ennahda, Rached Ghannouchi, et l’accueil qui lui a été réservé en Algérie promet aussi de dépasser le «noeud islamiste». Il y a moins de deux mois, en pleine liesse de « sa » victoire en Libye, le président français Nicolas Sarkozy chuchotait dans l’oreille de Mahmoud Jibril que l’Algérie « allait suivre ». L’axe Paris-Tel-Aviv-CNT fonctionnait alors à plein régime. Mais, le monde va vite, et les choses ont changé depuis lors, et les zones de turbulence ont largement changé de camp…

    Fayçal Oukaci 

     
    Le Courrier d’Algérie, 23/11/2011
  • Le peuple algérien, fidel allié du peuple sahraoui

    Méprise révélatrice

    Dans son exemplaire d’hier, le Jeune Indépendant publiait une carte plutôt fantaisiste de l’UMA mais conforme au rêve expansionniste du trône voisin. Une carte où la Séguia El-Hamra wa Wadi Eddhahab n’apparaît pas, comme celle que publiait dans le temps la chaîne Al Jazeera avant de se corriger et de revenir à une carte fidèle aux frontières internationalement reconnues des six pays qui composent le Grand Maghreb. Le Jeune Indépendant aurait-il décidé de tourner le dos à la cause sahraouie et de rejoindre l’équipe des Juda et de bouffer au tajine du sultan, à l’image des nobles panses du Corcas ? Serait-il tenté, à l’instar de la clientèle tricolore, par les charmes de la Mamounia ou ceux de Marrakech la secrète? En un mot, le journal aurait-il monnayé un acte surprenant, contraire à sa ligne et surtout injuste. Rien de tout cela ! En vérité, il ne s’agit que d’une malheureuse erreur… d’optique. Faut-il y voir la main des djinns de Chamharouch, l’autre sultan au Maroc ? 

     
    Cependant, l’erreur a été plus révélatrice qu’un sondage makhzénien. Une erreur quand même réjouissante quelque part puisqu’elle s’est finalement avérée très instructive au vu des nombreuses réactions suscitées dans les diverses couches de la société algérienne. Du simple citoyen au haut responsable en passant par le cadre moyen, les Algériens s’inquiétaient auprès du journal. Parfois orageusement, faut-il admettre. Bien qu’on reconnaisse au Jeune Indépendant une position immuable sur la question du Sahara occidental, ses lecteurs tenaient à obtenir par eux-mêmes les réponses à leurs questionnements. Ils tenaient surtout à s’assurer que le journal ne s’était pas renié et qu’il n’avait pas opéré là un virage à la marocaine. 
     
    Pas une seule voix algérienne n’est venue approuver, encourager ou feliciter le journal pour la publication d’une carte, somme toute non reconnue à l’ONU, parce que faussée justement par les fausses frontières auxquelles prétend encore le trône, alors que pas un seul Etat ne les reconnaît. Quoi qu’il en soit, la méprise sur cette méprisable carte vient nous conforter dans notre conviction que les Algériens ne sont pas du tout prêts à retirer leur soutien aux Sahraouis. Du moins tant qu’on leur reniera leur droit inaliénable à l’autodétermination. M. Z.
    mohamed_zaaf@yahoo.fr
    Le Jeune Indépendant, 23/11/2011
  • Front Polisario: «  » Le Maroc bafoue le droit international «  »

    Le gouvernement sahraoui et le Front Polisario ont condamné la décision prise par le Maroc d’inclure le Sahara occidental dans les élections législatives, qu’ils jugent d’ « une grave violation du droit international » dans les territoires non-autonomes attendant la décolonisation.

    Dans une lettre adressée lundi au secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, le président Abdelaziz, a considéré que cette inclusion est une violation « grave » du droit international. « L’inclusion du Sahara occidental dans les élections législatives marocaines est une violation grave du droit international en ce qui concerne les territoires non-autonomes contenus dans l’ordre du jour du Comité spécial des 24 et de la Quatrième Commission de l’Assemblée générale », a-t-il rappelé.

    « Le gouvernement sahraoui qui est membre au sein de l’Union africaine (UA), tout comme le Front Polisario qui est une partie dans le processus de paix sous l’égide des Nations unies ne peuvent dénoncer une nouvelle forme de politique de fuite en avant du Maroc dans les territoires non-autonomes », est-il écrit à cet égard.

    « La violation des droits de l’Homme par le Maroc laisse ce pays loin des médias et des observateurs internationaux », a déclaré Mohamed Abdelaziz.

    S’ajoute à cela, les opérations de pillage par le Maroc des richesses naturelles du Sahara occidental.

  • ESPAGNE : Mariano Rajoy face à de grands defis

    Après sa victoire électorale historique et à une écrasante majorité : 186 sièges sur 350. Le Parti populaire espagnol est en mesure de gouverner, seul, le pays. Son leader, Mariano Rajoy, 56 ans, tombeur du socialiste Zapatero qui avait jeté l’éponge bien avant les élections en avançant le scrutin sera investi Premier ministre, le 20 décembre. Mariano Rajoy hérite d’une Espagne exsangue, laminée par trois années d’une grave crise économique. Le pays, qui était sorti début 2010 d’une récession de plus de 18 mois, menace d’y replonger. Le PIB devrait croître d’à peine 0,7% cette année et en 2012, selon la Commission européenne. 
     
    L’Espagne détient aussi le triste record du taux de chômage le plus élevé de la zone euro : il touche désormais 21,52% de la population active et 45,8% des jeunes. Près de 5 millions d’Espagnols sont sans emploi, et près d’un quart (22%) des familles vit sous le seuil de pauvreté. Le secteur immobilier est toujours aussi sinistré et les banques espagnoles présentent d’importants risques systémiques. Le nouveau Premier ministre va devoir agir très vite : l’Espagne est dans l’oe il du cyclone des marchés – ses taux d’emprunt à dix ans ont atteint le niveau record de 7% la semaine dernière. 
     
    Pour les rassurer, Mariano Rajoy a promis de redresser coûte que coûte les finances publiques du pays. Il s’est engagé à ramener le déficit à 4,4% du PIB, l’an prochain, et 3% en 2013, alors que l’objectif de 6% pour cette année semble déjà compromis par le dérapage des comptes publics des 17 régions semi-autonomes d’Espagne. Le déficit atteindra 6,6% du PIB cette année. L’effort que l’Espagne va devoir fournir l’an prochain s’élève ainsi à plus de deux points de PIB, soit 21 milliards d’euros d’économies supplémentaires. La rigueur s’annonce donc encore plus dure pour les Espagnols, a d’ores et déjà annoncé Mariano Rajoy. 
     
    Le leader du PP a soigneusement évité de détailler son programme et les mesures d’austérité qui y sont inscrites pendant la campagne, les coupes sociales recueillant rarement un large soutien populaire. Il a assuré que son parti n’augmentera pas les impôts, ne réduira pas les pensions de retraites et ne touchera pas à la santé ou à l’éducation. Il entend faire subir une «cure d’amaigrissement» à l’administration, et notamment aux régions semiautonomes. Fort de sa majorité – le PP dirige 11 régions sur 17 et devrait ravir l’Andalousie aux socialistes en mars 2012 -, devrait faire voter une loi interdisant aux collectivités d’être en déséquilibre budgétaire. Ce qui annonce, quoi qu’en dise Rajoy, des coupes claires dans le social, la santé et l’éducation qui représentent 60% du budget des régions. «Ces coupes franches, à travers les régions et cette obligation de déficit nul, sont une hérésie économique, estime Ludovic Subran, chef économiste. Les régions sont au coeur de la relance de la croissance en Espagne. L’Espagne a beaucoup à jouer sur sa régionalité pour raffermir la reprise et leur imposer des cures d’austérité sans discernement menace la reprise qui est déjà très fragile.» L’autre chantier annoncé par le PP est l’assainissement du secteur bancaire, en particulier des caisses d’épargne régionales, source récurrente d’inquiétudes pour les marchés. Durant le boom de l’immobilier, les banques espagnoles ont prêté à tout-va aux promoteurs immobiliers comme aux ménages. Elles détiennent quelque 176 milliards d’euros de créances douteuses. L’Autorité bancaire européenne (EBA) a chiffré récemment à 26 milliards d’euros les besoins en recapitalisation des cinq plus grandes banques espagnoles, un des montants les plus élevés en Europe. Mariano Rajoy entend obliger les banques à augmenter leur ratio de fonds propres et à se recapitaliser à la hauteur de leurs besoins. Ce qui n’est pas clair, c’est comment, vu que l’État n’a plus de marge de manoeuvre budgétaire. L’appel au FESF, ainsi que la création d’une «bad bank» regroupant ces mauvais actifs ont été évoqués. Ces mesures de redressement des finances publiques et d’assainissement du secteur bancaire rassureront certainement les marchés à court terme. Selon plusieurs économistes espagnols, il va falloir en faire bien plus pour résorber le chômage et relancer l’activité. «Il faut mettre en place des mesures de soutien en faveur des PME exportatrices, car le commerce extérieur est le seul moteur actuellement de la croissance, détaille-t-il. Ensuite, il faudrait créer des emplois publics aidés, ciblés sur les jeunes. 
     
    Sur le plan extérieur, le gouvernement Rajoy devrait réorienter la diplomatie espagnole et assurer un meilleur équilibre de ses relations avec l’Algérie, Zapatero s’étant complètement aligné sur le Maroc pour ce qui est de la question du Sahara occidental, oubliant la responsabilité historique de l’Espagne vis-a-vis du peuple sahraoui et de son indépendance. Dans son message de félicitations à Mariano Rajoy, le président sahraoui, Mohamed Abdelaziz, estime que «le futur gouvernement en Espagne sera en mesure d’assumer sa responsabilité historique conformément au droit international, dans la recherche d’une solution juste et durable au conflit du Sahara occidental». Le président sahraoui de la République a assuré le chef du PP, Mariano Rajoy, de trouver en la direction politique sahraouie «un interlocuteur attentif et disponible pour mener à bien cette mission. 
    Mokhtar Bendib
    Le Courrier d’Algérie, 23/11/2011
  • Bruxelles dégradée, brûlera-t-elle ?

    De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari
    Bruxelles, fleuron de la construction européenne, le nec plus ultra de l’UE, dégradée par les marchés, tombera- t-elle entre les mains des technocrates banquiers ?
    Sans gouvernement depuis un an et demi — record du monde ! —, le sort du pays est, encore une fois, depuis hier incertain. Le formateur, le socialiste francophone Elio Dirupo, pressenti pour former l’exécutif a rendu le tablier. Il s’est rendu dans les Ardennes pour remettre sa démission au roi. Albert II, en convalescence, tient pour le moment la missive d’Elio en suspens. Combien de temps tiendra le souverain, le roi des Belges, l’ultime rempart avant l’évaporation du royaume. Pour autant, les marchés, sans états d’âme, attaquent la proie et peuvent dégrader la note du pays qui abrite l’essentiel des institutions européennes, celles de l’Otan et dont Bruxelles la capitale est le fleuron, le nec plus ultra de la construction européenne, de l’UE… 
     
    Les négociateurs au nombre de six (socialistes, libéraux et démocrates-chrétiens du Nord, néerlandophone, du Sud, francophone) ont échoué à trouver un accord sur le budget. Le VLD et le MR, droites de Flandre, de Wallonie et de Bruxelles veulent détricoter la sécurité sociale, le système de santé et grignoter sur les allocations de chômage pour, selon eux, «relancer la machine économique et encourager l’emploi». Les socialistes et les centristes-chrétiens ne veulent pas que le remboursement de la dette et le poids de la crise soient supportés par les déjà défavorisés. Ils préconisent de lever plus d’impôts là où l’argent se trouve (grosses fortunes et couches supérieures), faire des économies d’énergie, taxer le nucléaire, les transactions financières… 
     
    Autour du formateur, un classique gauche-droite a donc tourné au vinaigre son fond de crise économique, de montée de l’extrême-droite, notamment en Flandre, et de repli identitaire. Les libéraux sentent, sans doute, le vent tourner en Europe en faveur du démantèlement de l’Etat providence, des privatisations, de la remise en cause des services publics et de l’allongement de la période active mettant la pression pour obtenir un maximum et réduire presque à néant le système de protection belge. 
     
    Le socialiste francophone Di Rupo, fils d’immigrés siciliens, à la fibre sociale avérée et à l’écoute des chômeurs, des indignés, de la rue, n’a pas voulu aller au-delà du compromis belge raisonnable. Il a remis le sort de la nation entre les mains du roi. Pour la troisième fois en une année. Hier, à Bruxelles, l’inquiétude était grande de voir Bruxelles, après Athènes, après Rome, tomber entre les mains des banquiers, déguisés sous le vocable de technocrates. 
     
    Le soir d’Algérie, 23/11/2011 
  • Bongo a financé la campagne Sarkozy

    Un proche d’Omar Bongo affirme que le défunt président gabonais a «contribué au financement de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy», dans un ouvrage sur Le scandale des biens mal acquis des chefs d’Etat africains en France, à paraître jeudi. Interrogée hier par l’AFP, la présidence française se refuse pour le moment à tout commentaire.
    L’accusation émane de Mike Jocktane, conseiller personnel d’Omar Bongo depuis 2005 promu directeur adjoint de son cabinet en janvier 2009, avant de rejoindre l’opposition à Ali Bongo, qui succède à son père en août de la même année. «Omar Bongo a contribué au financement de la campagne présidentielle de 2007 du candidat Nicolas Sarkozy», affirme-t-il aux journalistes Xavier Harel et Thomas Hofnung, auteurs du livre Le scandale des biens mal acquis (Editions La Découverte) dans un entretien réalisé en septembre. Il confirme les révélations de l’avocat franco-libanais et conseiller de l’ombre de présidents français pour l’Afrique Robert Bourgi, qui a affirmé en septembre avoir remis «20 millions de dollars» à l’ex-président Jacques Chirac (1995-2007) et à son Premier ministre Dominique de Villepin. Mais il va plus loin que l’avocat selon lequel «ni Omar Bongo ni aucun autre chef d’Etat africain» n’ont remis d’argent à Nicolas Sarkozy par son «intermédiaire». «Contrairement à ce que prétend Robert Bourgi (…), les mallettes ont continué de circuler avant et après l’élection de Nicolas Sarkozy», assure Mike Jocktane. Michel de Bonnecorse, ancien conseiller pour l’Afrique de Jacques Chirac, avait déjà accusé Robert Bourgi d’avoir remis des fonds occultes à Dominique de Villepin ainsi qu’à Nicolas Sarkozy, rivaux à droite pour la présidentielle de 2007. 
     
    Quand Bourgi choisit au printemps 2006 de rejoindre Nicolas Sarkozy, il n’apporte «plus qu’une (mallette), plus grosse, qu’il dépose aux pieds» du futur président, affirme M. de Bonnecorse dans le livre de Pierre Péan La République des mallettes. Toutes ces déclarations justifient l’ouverture d’une enquête «et la désignation d’un juge d’instruction sans délais», a réagi hier Me William Bourdon, avocat de l’association anticorruption Transparency International. L’enquête lancée après les accusations de Robert Bourgi vient d’être classée sans suite, faute d’éléments pour prouver des faits par ailleurs prescrits. Ses déclarations avaient rompu le silence traditionnel entourant la Françafrique, réseau opaque d’influences hérité de l’époque coloniale, avec laquelle Nicolas Sarkozy avait promis de rompre. Mike Jocktane, comme avant lui plusieurs hommes politiques africains et experts de la région, décrit un système bien rodé. «Le président défunt Omar Bongo était très généreux avec les dirigeants français. (…) Une part importante de ces dons a fini dans les poches des bénéficiaires.» «Les remises de mallettes effectuées dans le bureau du président étaient filmées par des caméras cachées. Tout était enregistré sur vidéo», ce qui, affirme-t-il, constitue «l’un des moyens de pression de Libreville sur Paris». C’est cette relation complexe d’interdépendance qui aurait conduit la France à saluer hâtivement l’élection d’Ali Bongo alors même que la Cour constitutionnelle du pays n’avait pas encore rejeté un recours de l’opposition sur des fraudes massives, selon des opposants gabonais et des experts. 
     
    Dans un documentaire diffusé en décembre 2010 sur France 2, Michel de Bonnecorse déclarait que les premiers résultats donnaient Ali Bongo battu par son adversaire André Mba Obame à 42% contre 37%. Robert Bourgi aurait aussi initialement reconnu la défaite du fils Bongo. «Le petit a perdu, le petit a perdu!», aurait-il lancé pris de panique à des proches de Nicolas Sarkozy au soir du vote, selon un témoin de la scène à Paris, cité dans Le scandale des biens mal acquis. Pour Mike Jocktane, «l’empressement avec lequel la France a reconnu l’élection frauduleuse d’Omar Bongo en 2009 s’explique par les mallettes distribuées».
  • Danielle Mitterrand, 87 ans de convictions et d’engagements

    De notre bureau de Paris, Khadidja Baba-Ahmed
    Ses combats pour la liberté des peuples, la justice et les droits de l’Homme l’ont menée partout où ces principes étaient bafoués. Sur le Sahara occidental, où elle s’est souvent rendue pour apporter son soutien à la lutte du peuple sahraoui contre l’occupant marocain, ses positions ont évolué d’une solidarité sans réserve à la dénonciation «de crimes de guerres du Front Polisario». Ce paradoxe n’a pas toujours été compris.
    Une femme de convictions vient de s’éteindre à l’âge de 87ans. Durant toute sa vie, Danielle Mitterrand, l’épouse de l’ancien président socialiste, s’est distinguée des premières dames de France qui l’ont précédées et succédé, en ce sens qu’elle n’a jamais joué le rôle de potiche que font jouer habituellement à leurs épouses de nombreux chefs d’Etat. Par sa liberté de ton et son engagement qui ont parfois été à contresens de la diplomatie officielle, y compris celle de son président de mari, elle a mené son combat dans la fondation «France Libertés» qu’elle a créée en 1986. «La vie a voulu que je parcoure un long chemin dans le temps. Le destin m’a donné l’occasion de fouler de nombreux tapis rouges et de rencontrer les grands de ce monde. Mais il m’a surtout permis de côtoyer des populations de tous les continents, d’entendre les témoignages d’hommes et de femmes oubliés du bonheur de vivre et accablés par la misère. Les tapis rouges des voyages présidentiels ne m’ont pas égarée, pas plus que les lustres ne m’ont éblouie. J’ai vu s’effondrer des dictatures, d’autres se constituer avec la protection et parfois l’encouragement des puissants de ce monde», c’est ainsi qu’elle parlait de son inlassable combat. Dans son parcours de lutte pour les droits de l’Homme, elle dénoncera avec force l’esclavagisme et toutes ses formes nouvelles à travers le monde et soutiendra le peuple kurde, les tibétains, les Indiens du Chiapas… Elle suscite la polémique en se rendant à Cuba et en embrassant Fidel Castro sur le perron de l’Elysée lors de sa visite en France en 1995. Elle n’avait cure de ces réactions et poursuivait son chemin, pas toujours facile et pas toujours partagé. Il en est ainsi de son soutien à l’association SOS disparus. Son engagement et celui de sa fondation auprès de cette association avaient fait réagir Farouk Ksentini, président de la Commission ad hoc en charge des disparus. SOS disparus, qui, selon lui, ne représente qu’elle-même, serait financée par la fondation France Libertés et qui plus est serait manipulée par l’Internationale socialiste. Ce soutien a été perçu par les officiels algériens comme une ingérence dans les affaires internes de l’Etat algérien. Danielle Mitterrand a toutefois été longtemps appréciée de ces mêmes autorités.
    Ses positions sur le Polisario et le Sahara occidental
    C’était lorsqu’elle s’engagea résolument et fermement aux côtés du peuple sahraoui. Elle apporta à ce peuple un soutien sans faille : «Vingt-cinq ans après la proclamation de la République arabe sahraouie démocratique, un peuple continue à vivre sous occupation ou en exil», écrivait-elle dans une tribune ( l’Humanité du 2 mars 2001) et poursuivait plus loin : «Nous nous devions de rappeler que le peuple sahraoui s’est vu confisquer l’exercice de son droit par la volonté hégémonique de puissances régionales, dont au premier chef l’Espagne et le Maroc, avec l’assentiment tacite de leurs alliés. Il n’est qu’à rappeler que le Maroc est un Etat associé à l’Union européenne par des accords économiques, notamment de pêche.» Sa tribune se termine par ce cri : «Quand le peuple sahraoui exercera-t-il son droit à l’autodétermination ? La réponse est déterminante pour tout l’avenir de la région. Et tant que cette question sera posée, un véritable échange entre les deux rives de la Méditerranée sera illusoire.» Danielle Mitterrand a défendu cette position jusqu’à l’été 2003. A cette date et à la suite d’une mission de sa fondation en avril à Tindouf et du rapport qui s’en est suivi, France Libertés a décidé de suspendre son aide aux réfugiés sahraouis, et ce, à cause du «travail forcé» auquel seraient soumis les prisonniers marocains détenus par le Polisario. Ce dernier avait alors rétorqué en indiquant qu’il était faux de parler de travail forcé et que le Comité international de la Croix-Rouge, par exemple, «a toujours recommandé de faire travailler les prisonniers pour les maintenir en forme et les aider à supporter leur détention». Est-ce à dire que Danielle Mitterrand et sa fondation ont abandonné le soutien à l’autodétermination du peuple sahraoui ? Assurément non, même si l’aide financière aux réfugiés n’était plus assurée. Pour preuve, cette intervention de la fondation, à la 10e session du Conseil des droits de l’Homme (Genève mars 2009) et dans laquelle il a été déclaré à propos du Sahara occidental : «Du référendum que l’Espagne aurait dû organiser avant son retrait unilatéral du territoire, à l’avis consultatif négligé et oublié de la Cour internationale de justice de La Haye en passant par la non-application du plan de règlement de 1991, tout a conjuré pour mener ce pays à une situation d’occupation de facto, cause de violations graves des droits du peuple sahraoui.» Il est vrai qu’en même temps qu’elle arrêtait son financement au Polisario, la fondation de Danielle Mitterrand précisait qu’elle «ne remettait pas en question son engagement en faveur de l’autodétermination du peuple sahraoui». Dans les nombreux hommages qui lui sont faits depuis l’annonce de son décès, deux sont à relever : celui de Nicolas Sarkozy qui a salué «le parcours exemplaire d’une femme qui n’abdiqua jamais ses valeurs et poursuivi jusqu’au bout de ses forces les combats qu’elle jugeait justes» et ce témoignage de Roland Dumas qui racontait que lors d’un voyage au Maroc qu’il faisait en tant que ministre des Affaires étrangères, Danielle Mitterrand, qui était du voyage, a failli créer un grand couac diplomatique en refusant de s’asseoir à la même table que Hassan II, le roi de l’époque.
    K. B.-A.