Mois : juillet 2010

  • Paris paie le prix de sa gaffe

    L’OTAGE FRANÇAIS EXÉCUTÉ PAR AL QAÎDA : Paris paie le prix de sa gaffe
    Par Ahmed Mesbah
    Sarkozy et Kouchner sont dans de beaux draps. L’opinion publique ne manquera pas de leur imputer la responsabilité de la mort de Germaneau.
    Germaneau est mort et c’est la crédibilité de Sarkozy qui est entamée. Du moins, le peu qui en reste. Il n’est déjà plus qu’à moins de 30% d’opinions favorables selon des sondages. Il a souhaité pendant un temps réussir la libération, quasi-hollywoodienne, de l’otage français Michel Germaneau pour redorer son blason. C’est un échec sanglant. En dehors de ces considérations de politique intérieure, les enjeux stratégiques n’ont pas manqué dans les calculs des autorités françaises.
    L’un d’entre eux est de tenter d’amoindrir le rôle de l’Algérie dans la région du Sahel. L’un des indices allant dans ce sens est le calendrier de la visite de Bernard Kouchner dans la région. Il ira au Mali, au Niger et en Mauritanie, mais pas en Algérie. Pourtant, sans la collaboration de ce pays, aucune solution n’est à entrevoir dans cette région. Les spécialistes algériens sont de bons connaisseurs de la situation au Sahel. L’Algérie a une longue expérience dans la lutte antiterroriste et elle dispose d’informations sur les groupes encore en activité. La plupart des membres de l’Aqmi sont aussi algériens, y compris leur chef, Abdelmalek Droukdel, alias Abou Moussab Abdelwadoud, celui-là même qui a annoncé, dans un enregistrement sonore, l’exécution de l’otage français. Il aurait certainement préféré obtenir une rançon en échange de sa libération.
    Les demandes des terroristes portaient aussi sur la fin de l’incarcération des membres de leurs groupes détenus dans divers pays. En somme, les ravisseurs voulaient rééditer le coup du monnayage de l’ex-otage français, Pierre Camatte. Des terroristes détenus au Mali dont un Algérien ont été élargis par le président malien. Il a avoué avoir subi des pressions de la part de la France dont le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner avait effectué des voyages éclair dans ce pays pour porter ces messages de pression. En contrepartie, les forces armées maliennes sont entraînées par des Français. C’est déjà un pas non négligeable vers le maintien de la Françafrique, version Sarkozy. Les actions terroristes sont un alibi de choix pour la France qui tente de s’installer durablement dans la région d’où elle risque d’être évincée par d’autres acteurs de la scène internationale comme la Chine et les Etats- Unis d’Amérique.
    Toutes ces considérations n’empêchent pas la France de sombrer dans le gouffre du continent noir. Avec l’assassinat de l’otage, elle est en train de payer ses écarts de comportement commis dans l’affaire Camatte.
    La France est passée outre les recommandations de l’Algérie de ne point payer de rançons aux terroristes. Et de ne point faire de pression pour la libération de terroristes recherchés par leurs pays. Outrepasser ces principes équivaut à céder devant les terroristes et renforcer leur pouvoir de chantage et leur arsenal militaire puisque avec l’argent des rançons, ils ont toute latitude pour s’acheter de nouvelles armes. Au lieu de s’aventurer dans des politiques paternalistes et arrogantes avec les pays africains, la France aurait très bien pu emprunter une autre voie. Celle de la coopération avec des acteurs essentiels de la région.
    En renforçant par exemple, les moyens de lutte contre ce phénomène. Mais les politiques d’ingérence dans les affaires intérieures des pays de la région ne sauraient être tolérées. C’est le sens à donner aux protestations de l’Algérie et de la Mauritanie après l’épisode malheureux de l’affaire Camatte.
    D’ailleurs, il n’y a pas que l’Algérie qui désapprouve la politique du couple Sarkozy-Kouchner. Même l’Espagne n’a pas apprécié le coup de force de jeudi dernier contre un camp d’Al Qaîda, car cela aurait pu mettre en danger la vie des otages espagnols encore en détention.
    Les pays du Sahel et les nations occidentales sont conscients que sans l’Algérie, rien de sérieux ne pourra se faire pour éradiquer le terrorisme. Mais certaines vérités ne sont pas faites pour plaire à tout le monde. L’entêtement du gouvernement français ne lui a valu qu’un échec cuisant de sa politique consistant à considérer l’Afrique comme sa chasse gardée.
    A présent, la France va s’employer à justifier ses bourdes. L’un des stratagèmes consiste à faire croire à l’opinion que l’exécution de l’otage est intervenue avant l’assaut des forces françaises. Mais l’opinion publique ne manquera pas d’imputer au président français et à son french doctor la responsabilité de la mort de Germaneau.
    Nicolas Sarkozy a fait une déclaration pour condamner ce qu’il a qualifié d’acte barbare. «Nous demandons instamment à nos compatriotes de renoncer absolument à voyager dans la zone sahélienne», dit-il. «Plus que jamais nous sommes décidés à lutter contre le terrorisme et à soutenir les pays qui ont le courage de combattre ce terrorisme barbare», a-t-il ajouté. Avant de promettre que «le crime commis contre Michel Germaneau ne restera pas impuni». Sans faire plus de révélations sur ses projets.
    L’Expression Online, 27/7/2010

  • L’Alliance populaire progressiste dénonce « les politiques aveugles et initiatives improvisées aux quelles se livre le pouvoir en Mauritanie »

    L’Alliance populaire progressiste en Mauritanie, parti de l’opposition, a dénoncé, ce qu’elle a qualifié  « de politiques aveugles et d’initiatives improvisées aux quelles se livre le pouvoir en Mauritanie ». Dans un communiqué dont Sahara media a reçu une copie, l’alliance a condamné «ce qui s’est passé comme renoncement à la souveraineté nationale dans l’opération militaire contre Al-Qaïda, et l’absence de concertation de la Mauritanie avec ses partenaires dans la lutte contre le terrorisme à savoir le Mali et l’Algérie. » 
    Le parti a ajouté que l’appel aux forces armées et aux  troupes mauritaniennes devrait se faire  « dans le cadre sacré de leur mission de défense de l’intégrité territoriale et de la sécurité des citoyens. » La coalition a appelé à  la nécessité de «soutenir l’armée nationale par les moyens  matériels et techniques dans sa noble mission» et a exhorté « tous les citoyens à faire preuve de vigilance et de prudence en cette circonstance grave et dangereuse ». Elle a fait appel à « toutes les forces politiques nationales et à la société civile de s’unir contre ce pouvoir et à continuer la lutte commune pour imposer une véritable démocratie ».
    Sahara Media, 25/7/2010
  • La France tentée par un engagement militaire au Sahel

    L’otage français tué par l’Aqmi: La France tentée par un engagement militaire au Sahel 
    par Salem Ferdi
    La mort de l’otage français a été officialisée par le gouvernement français qui justifie l’intervention menée contre un camp de l’Aqmi. Sarkozy promet des représailles. Une intervention plus musclée, «à l’américaine», dans la région du Sahel, semble se profiler.
     Michel Germaneau, l’otage français, a été tué. La nouvelle «sonore» avait été annoncée dimanche soir par Droudkel, l’émir de l’Aqmi, dans un enregistrement diffusé par la chaîne Al Jazeera. «Sarkozy n’a pas seulement échoué à libérer son compatriote dans cette opération manquée, mais il a sans aucun doute ouvert l’une des portes de l’enfer pour lui, son peuple et sa nation. Nous annonçons avoir exécuté l’otage français dénommé Michel Germaneau samedi 24 juillet pour venger nos six frères tués dans la lâche opération de la France». La mort de Germaneau a été officialisée hier, après authentification de la voix de Droudkel, par le président français Nicolas Sarkozy qui a dénoncé un «acte barbare et odieux» accompli par des «gens qui n’ont aucun respect de la vie humaine». Le président français, pour nier le lien de causalité établi par Droudkel entre l’opération franco-mauritanienne au nord du Mali contre un camp de l’Aqmi qui a fait sept morts, a noté que «depuis le 12 juillet, Michel Germaneau était sous le coup d’un ultimatum qui n’était en fait que l’annonce d’un assassinat programmé. Aujourd’hui, comme cela avait été annoncé par l’ultimatum du 12 juillet, il est mort».  
    «Mort programmée»
    L’opération menée jeudi au Mali rendait le sort de Michel Germaneau très délicat. Le président français et le reste des autorités françaises refusent d’établir un lien entre cette opération et la mise à mort de Germaneau. Pour Paris, la preuve que la mort de Germaneau était «programmée» tient au fait que l’Aqmi a fixé un ultimatum sans même avoir amorcé une négociation. Le président français a justifié le raid mené contre un camp de l’Aqmi. «Le camp de base qui a été détruit était susceptible d’être le lieu de détention de Michel Germaneau. Malheureusement Michel Germaneau ne s’y trouvait pas. Aujourd’hui il est mort», a annoncé le président français en demandant «instamment» aux ressortissants français de renoncer à se rendre au Sahel.
    La question de l’incidence de l’opération franco-mauritanienne sur le sort de l’otage français restera sans doute sans réponse probante. Il est évident que s’il était en vie, l’opération de jeudi dernier a scellé son sort. D’où la question : les autorités françaises considéraient-elles que Germaneau était déjà mort ? Des médias français laissent entendre, en invoquant l’état de santé de l’otage et son âge, qu’il était sans doute déjà mort depuis des semaines. On affirme, sans en comprendre vraiment les raisons, que le cas de Germaneau se présentait «d’emblée» comme différent de celui de Pierre Camatte, qui a été retenu par le même groupe et qui a pu être libéré contre la libération de prisonniers par le Mali et le versement d’une rançon.
    Il restera une grande part de doute et ce n’est pas l’Aqmi qui va contribuer à les lever, bien au contraire. M. Olivier Thomas, le maire socialiste de Marcoussis (Essonne), où résidait Michel Germaneau, n’a apparemment pas été satisfait des explications du président français. «Malgré ce qu’a dit le président de la République sur le devoir d’intervenir, il y a quand même des zones d’ombre dans cette affaire que je n’arrive pas à élucider… Est-ce un changement d’attitude de la France vis-à-vis de ses ressortissants lorsqu’ils sont pris en otage ? Moi, je n’ai pas le souvenir qu’il y ait un otage français qui ait été exécuté depuis extrêmement longtemps». Le maire de Marcoussis a égrené des questions pertinentes : «Je souhaite qu’on me dise comment, pourquoi, dans quelles conditions et qui a décidé ces interventions militaires, avec quelle part de risque pour l’otage, avec quelles conséquences».
    Madrid confortée dans le choix d’une solution non militaire
    Le président français a annoncé que «le crime commis contre Michel Germaneau ne restera pas impuni». Une déclaration de guerre à l’Aqmi accompagnée d’une forte insistance à demander aux Français de quitter la région du Sahel. Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a été dépêché dans la région du Sahel, afin, a dit le président français, «d’examiner avec les autorités locales et nos ambassadeurs les mesures de sécurité à prendre pour nos ressortissants». Entre annonce de représailles et rapatriement des citoyens français, on peut supposer que Paris est tenté par une intrusion plus musclée dans la région du Sahel. Au risque d’ailleurs de compliquer la situation. Ce n’est pas un secret de dire que l’Algérie est hostile à une intervention extérieure et estime que le traitement du terrorisme relève des Etats de la région. En tout cas, l’Espagne dont deux citoyens sont détenus par l’Aqmi estime que la mort de l’otage français la conforte dans son approche «non militaire» pour les libérer.
    Le Quotidien d’Oran, 27/7/2010
  • Sahel : Les dommages collatéraux d’une ingérence

    Al Qaîda exécute l’otage français après trois mois de captivité : Les dommages collatéraux d’une ingérence
    Détenu depuis plus de trois mois, l’otage français Michel Germaneau a été exécuté, dimanche dernier, par ses ravisseurs. L’annonce a été faite 48 heures après l’assaut franco-mauritanien contre un groupe d’Al Qaîda au nord du Mali.

    Pour la deuxième fois, la France entre par effraction dans la région et cause de lourds dommages collatéraux. L’otage français, Michel Germaneau, a été exécuté dimanche dernier par les terroristes d’Al Qaîda au nord du Mali, où il était détenu depuis le 19 avril dernier. L’annonce a été faite le jour même dans un enregistrement audio diffusé, tard dans la soirée, par la chaîne qatarie Al Jazeera.
    Agé de 78 ans, Michel Germaneau avait été décapité à la suite de l’offensive militaire franco-mauritanienne contre un refuge de terroristes sur le territoire malien, à proximité de la frontière avec la Mauritanie. Officiellement, le raid avait pour but de « libérer l’otage censé être sur les lieux et mettre en échec une attaque éventuelle contre l’armée mauritanienne ». Mais l’opération a échoué. Les terroristes, certainement bien informés, avaient déplacé l’otage et n’ont laissé qu’un petit groupe que le commando franco-mauritanien a accroché, tuant six d’entre eux et blessant quatre autres. La réaction d’Abou Zeid, émir de la phalange du Sahara, ne s’est pas fait attendre. Avant même que l’ultimatum donné à la Mauritanie pour libérer les terroristes impliqués dans l’enlèvement des Espagnols (prévu hier à minuit) n’expire, Abou Zeid a décapité l’otage et revendiqué publiquement son exécution, affirmant qu’il s’agit d’une réponse à l’attaque de jeudi matin menée par la France et la Mauritanie. Une réponse qui ressemble à celle donnée par la même organisation au gouvernement britannique après le refus de ce dernier de négocier la libération d’Edwin Meyer. En effet, celui-ci avait été assassiné après plusieurs mois de détention au nord du Mali.
    Est-ce l’intransigeance de la Mauritanie à ne pas libérer des terroristes d’Al Qaîda qui a été à l’origine de l’option militaire sur le territoire malien ? Ou est-ce le statut de l’otage, un humanitaire sans attache ni liens professionnels avec son pays ? On n’en sait rien. Ce qui est certain, c’est que la France n’a pas géré de la même manière le dossier de Pierre Camatt, pour lequel elle a mobilisé tous ses services dans le but de le libérer vivant, et celui de Germaneau, dont la vie a été compromise par une intervention militaire mal préparée et dont les risques ont été sous-évalués. « L’ultimatum n’était que l’annonce d’un assassinat programmé » « Depuis le 12 juillet, Michel Germaneau était sous le coup d’un ultimatum qui n’était en fait que l’annonce d’un assassinat programmé. Cet ultimatum, en effet, émanait d’un groupe qui avait assassiné, le 31 mai dernier, un malheureux otage britannique enlevé dans les mêmes conditions et qui n’a jamais été précédé du moindre début de dialogue avec des autorités françaises ou locales, à l’inverse de ce qui s’était produit pour Pierre Camatt pour lequel les preneurs d’otage avaient accepté d’entrer dans des discussions », a expliqué le président français, Nicolas Sarkozy, lors d’une conférence de presse animée après l’exécution de l’otage.
    La sentence subie par Germaneau rappelle douloureusement la grave situation dans laquelle se trouve la région du Sahel, depuis que le GSPC a décidé d’en faire son quartier général. Quelque 250 éléments puissamment armés, connaissant parfaitement le désert, ont réussi à transformer ce no man’s land en une véritable poudrière où trafiquants d’armes, de drogue et contrebandiers se rendent service mutuellement pour partager les gains de leurs activités criminelles. En face, les Etats de la région n’arrivent pas à s’entendre pour balayer devant leurs portes. Les nombreuses initiatives allant dans le sens de la conjugaison des efforts pour venir à bout de cette situation se sont avérées vaines. Pourtant, il y a quelques mois seulement, les ministres des Affaires étrangères de six pays du Sahel, à savoir le Niger, le Mali, le Tchad, la Mauritanie, l’Algérie, le Burkina Faso se sont engagés, lors une conférence à Alger, à renforcer la coopération et l’échange d’informations en matière de lutte contre le terrorisme pour éradiquer ce fléau qui mine l’avenir de la région.
    Cette réunion a été suivie par celle des patrons des services de renseignement, puis par une autre, qui a regroupé les responsables de la lutte antiterroriste avant d’aboutir à une conférence, à Alger, des chefs d’état-major des armées de chacun des pays concernés. Un comité des chefs des états-majors du Mali, du Niger, de Mauritanie et d’Algérie a même été mis en place à Tamanrasset, pour concrétiser sur le terrain les décisions prises et engager une stratégie commune de lutte contre le terrorisme. Censé être un outil de concertation et de coopération, ce comité n’arrive malheureusement toujours pas à rendre effectives les actions décidées sur le terrain. Un terrain, faut-il le préciser, que se disputent des puissances extra-régionales, comme les Etats-Unis et la France, beaucoup plus attirés par les richesses du sol (uranium et pétrole) mais aussi l’Espagne qui, depuis peu, s’inquiète de l’état de ses deux ressortissants détenus par Al Qaîda depuis des mois et dont le sort n’est toujours pas connu.

    La sortie ratée de la France

    L’entrée par effraction de la France dans les négociations avec les terroristes et dans les opérations militaires contre Al Qaîda au Sahel n’aurait peut-être pas eu lieu si les pays de la région s’étaient entendus pour chasser les semeurs de mort de leur territoire. Dans l’affaire de Pierre Camatt, le Mali, qui s’était engagé officiellement à ne pas libérer les terroristes (réclamés par leurs pays d’origine) en contrepartie de la vie de l’otage, a fini par céder sous la pression de la France. Pierre Camatt est rentré chez lui, comme les quatre terroristes libérés, laissant le Mali en pleine crise diplomatique avec la Mauritanie et l’Algérie. Quelques mois plus tard, cette même France réédite le scénario en poussant l’ingérence bien loin. Pour libérer Germaneau, elle envoie un commando en terre malienne avec le soutien des Mauritaniens. Les dommages collatéraux de l’échec de cette opération seront lourds à assumer aussi bien par l’Hexagone qui a mis en péril la vie de l’otage, mais également par la Mauritanie qui se retrouve ainsi dans le collimateur de ses voisins mais aussi sous le coup d’une menace terroriste de plus en plus pesante.
    Toutes ses forces armées sont d’ailleurs en alerte maximum par crainte d’éventuelles représailles. La Mauritanie est plus que jamais interpellée et se trouve dans l’obligation d’expliquer sa décision de faire appel à des forces extra-régionales pour mener une opération militaire sur le sol de son voisin. Elle qui s’est pourtant engagée, dans une déclaration officielle signée par son ministre des Affaires étrangères, lors de la conférence d’Alger, à éviter les ingérences des uns et des autres. Encore une fois, les pays de la région ont raté l’occasion de faire sortir leur population de la terreur semée par Al Qaîda. Les intérêts des dirigeants ont primé sur la sécurité et l’avenir de leurs populations. Ce qui laisse, hélas, de beaux jours aux terroristes et leurs alliés, les contrebandiers, les trafiquants de drogue et d’armes dans le Sahel. S. T.

    El Watan, 27/7/2010
  • Abdelaziz Bouteflika : «La situation en Somalie nous préoccupe profondément»

    Le président de la République appelle le Conseil de sécurité à prendre ses responsabilités

    Abdelaziz Bouteflika : «La situation en Somalie nous préoccupe profondément»

    De notre envoyé spécial en Ouganda, Abderrahmane Semmar
    L’Afrique doit continuer à progresser dans sa lutte contre l’insécurité et l’instabilité. C’est l’appel qu’a lancé hier Abdelaziz Bouteflika dans son intervention sur la paix et la sécurité dans le continent. En effet, lors de l’examen du rapport du conseil de paix et de sécurité de l’UA hier à Kampala, le président de la République est revenu sur la situation qui prévaut dans plusieurs zones de conflit en Afrique. Ainsi, Abdelaziz Bouteflika n’a pas hésité à exprimer sa vive inquiétude concernant la crise actuelle qui engouffre la Somalie dans un cercle de violences irréversibles. «La situation en Somalie nous préoccupe profondément», a souligné d’emblée le chef  de l’Etat qui appelle l’ensemble de la communauté internationale à se mobiliser pour trouver une rapide issue à cette énième tragédie africaine. «Il est temps que le Conseil de sécurité assume pleinement ses responsabilités afin de donner une  impulsion décisive aux efforts de l’Afrique, notamment à travers le déploiement de l’Amisom», a-t-il relevé dans son intervention au cours de laquelle il n’a pas manqué de saluer les efforts de l’Afrique, notamment à travers les activités du Conseil de sécurité et de paix et du Groupe des sages présidé par Ahmed Ben Bella,  dans la résolution de ce conflit. Ceci dit, Abdelaziz Bouteflika ne cesse pas de constater que la consolidation des institutions de la Somalie nécessite davantage d’efforts de la part de la communauté internationale qui doit absolument appuyer les efforts de l’Union africaine dans la reconstruction et la restauration de l’Etat en Somalie. Dans ce sillage, le Premier magistrat du pays  a exprimé son appui aux autorités de transition somaliennes et à ses efforts à conclure des accords de paix avec les groupes dissidents. «L’Algérie continuera à être partie prenante aux efforts de l’Afrique pour concrétiser les objectifs de paix et de reconstruction dans ce pays», a-t-il déclaré encore. Concernant la situation au Soudan, Abdelaziz Bouteflika a fait part de son attachement à l’unité de ce pays ami. «Face aux incertitudes, notre souhait est de voir toutes les parties soudanaises rechercher et exploiter les opportunités dans le sens de l’Unité attractive de ce pays, pour le bien de l’ensemble du peuple soudanais», affirme-t-il en faisant allusion au scrutin qui sera proposé aux populations du Sud Soudan en janvier prochain concernant l’avenir de leurs relations avec le Nord. Dans ce contexte, le chef de l’Etat s’est montré rassurant sur l’évolution de la question soudanaise puisque «la situation au Darfour a connu des développements encourageants avec les accords signés récemment à Doha», déclare-t-il en exhortant les Soudanais «à poursuivre les efforts de persuasion à l’endroit des acteurs de la crise qui n’adhèrent pas encore au processus de paix». Enfin, Abdelaziz Bouteflika est revenu sur les accords de paix noués récemment en Burundi, Côte d’Ivoire et République Centrafricaine. En se félicitant de la réussite de ces accords à mettre fin à la spirale de violence dont sont victimes les civils, le président de la République a regretté dans son intervention «les prises de pouvoir par des moyens anticonstitutionnels». L’Afrique a besoin pour sa stabilité et son développement de «promouvoir des solutions en tout moment et en tout lieu sur le continent». 

    La Tribune Online, 27/7/2010

  • La bombe sahélienne amorcée

    Alors que le GSPC a officiellement éliminé son otage français : La bombe sahélienne amorcée
    Par Mohamed Abdoun
    Finalement, et comme il fallait s’y attendre, le GSPC, dans un enregistrement sonore de son émir national, Abou Moussab AbdelWadoud, a tué son otage français. « Nous annonçons avoir exécuté l’otage français dénommé Michel Germaneau samedi 24 juillet pour venger nos six frères tués dans la lâche opération de la France », aux côtés des forces mauritaniennes. L’enregistrement a été diffusé durant la nuit de dimanche à lundi par la chaîne Al Jazeera. Alors que Paris tentait de gagner du temps en prétendant ne pas avoir de confirmation sur la question, un notable local très impliqué dans toutes les négociations qui avaient précédé chacune des libérations des otages occidentaux se contentait, lui, de confirmer la véracité des dires de Droudkal. Ce n’est qu’hier matin que le président Sarkozy a fini par admettre le fait, à son tour, convoquant au passage une réunion urgente de son conseil restreint de défense et de sécurité.
    Le chef d’Etat français refusera très certainement d’admettre sa responsabilité directe dans ce qui vient de se passer. L’intervention armée directe de troupes françaises au Mali avait de quoi mettre le feu aux poudres. Elle dote, en outre, le GSPC d’une relative  » légitimité « , en le rendant  » sympathique  » aux yeux des tribus locales. Des experts qui suivent de très près ce genre de questions, et qui avaient annoncé sur ces mêmes colonnes depuis le mois de janvier passé que le Sahel était sur une poudrière, craignent fortement une réédition des catastrophiques scénarios irakien et afghan.
    Les scénarios afghan et irakien au Sahel !
    De fait, la présence de troupes françaises sur les lieux, une présence tenue secrète jusqu’à cette scandaleuse et scabreuse intervention musclée, pose avec acuité la problématique de la souveraineté des Etats concernés. Or, c’est cette question qui pousse les  » djihadistes  » du monde entier à embrasser telle ou telle cause. Le mouvement taliban, ou bien Al Qaïda fi Bilad Errafideyne, se sont grandement renforcés à cause de la présence de troupes occidentales, notamment américaines, en Afghanistan et en Irak. Rien ne pourrait empêcher ce scénario de se répéter au Sahel. Pis, rien ne nous dit, dans l’état actuel des choses, que l’intervention ratée de la France n’était pas préméditée, et qu’elle visait avant tout à mettre le feu aux poudres afin de justifier une invasion massive de tous les pays concernés, dans le cadre de l’activation du complot américain dénommé  » Africom « . La vie de l’otage Michel Germaneau ne pèserait pas lourd face à des enjeux stratégiques de cette taille, même si nous en sommes encore au simple stade des supputations. Des supputations qui demeurent quand même très sérieuses et très argumentées, car il est inconcevable que des troupes spéciales françaises, appuyées par des moyens technologiques ultra-sophistiqués, dont des détections satellites agissant aux centimètre près, aient pu faire montre d’autant d’amateurisme. Cela est d’autant plus vrai que le GSPC, qui tente de tirer partie au maximum de cette affaire, indique que les six hommes abattus feraient partie de ses rangs.
    Quand les contrebandiers s’improvisent… terroristes
    Sur ce point précis, nos sources se montrent inflexibles :  » Il s’agit bel et bien de contrebandiers. Ces derniers activaient sous la direction d’un certain Mohamed Iblaghe. Celui-ci, versé dans le trafic en tous genres, dispose de relais arrivant jusqu’à la périphérie algéroise, via Tamanrasset et El Goléa « . Ce sont les hommes de ce sinistre personnage qui se trouvent derrière l’enlèvement, en Mauritanie, des trois humanistes espagnols, avant leur revente, ou rétrocession, aux terroristes d’Abou Ammar, de son vrai nom Yahia Djouadi. Deux d’entre eux se trouvent toujours aux mains des terroristes. C’est la preuve formelle, s’il en fallait d’autres, qu’il n’existe plus de terrorisme (dans le sens propre du terme) depuis la capture par des rebelles tchadiens d’Abderrezak El Para, de son vrai nom Amari Saïfi, et la reddition de l’ancien  » afghan  » Mokhtar Belmokhtar, alias Belaâouar. La jonction entre les quelque dizaines de rescapés des redoutables katibate el moulathamoune et les contrebandiers et trafiquants d’armes a donné naissance à ce que notre journal qualifie de  » gangsterrorisme « . Aujourd’hui, à cause du dramatique faux-pas français, très certainement prémédité, il n’est pas exclu que le GSPC renaisse de ses cendres au Sahel, et même qu’il mue un jour en  » Al Qaïda « , comme le souhaitent et le soutiennent tous les alliés directs et indirects des Américains. Pour revenir à la thèse selon laquelle le fiasco français a pu être prémédité, signalons que le président Sarkozy n’a pas mis longtemps pour annoncer des  » représailles  » contre les auteurs de ce crime.
    Tout pour favoriser la naissance d’Al Qaïda et justifier l’Africom
    Or, qui dit  » représailles  » dit nouveaux raids français au Sahel, et donc regain de sympathie pour le GSPC de la part des tribus locales, jusqu’à ce que sa force nouvelle justifie l’activation du fameux Africom de Bush. En attendant, Kouchner confirme déjà la toute nouvelle, mais très inquiétante, influence française dans la région. Il annonce en effet une tournée dans trois pays du Sahel, la Mauritanie, le Mali et le Niger. Ce ne sera sans doute pas pour y échanger des amabilités, mais bel et bien pour y dicter des  » instructions  » strictes, et éventuellement envisager un accroissement des troupes spéciales françaises déjà présentes sur les lieux. Le fait même que l’Algérie ait été  » zappée  » de cette tournée dénote le bras de fer discret qui se déroule en ce moment entre Alger et Paris à propos des meilleurs choix à faire pour lutter efficacement contre le terrorisme et le grand banditisme dans la zone sahélo-saharienne.
    En agissant de la sorte, après avoir mis le feu à la poudrière du Sahel lorsque des pressions avaient été exercées sur Bamako pour l’élargissement de 4 dangereux criminels en contrepartie de la libération de Pierre Camatte, espion français détenu par le GSPC, Paris ne fait rien d’autre qu’enclencher une formidable bombe à retardement dont l’explosion risque de tout emporter et de tout dévaster sur son passage.
    Et si Paris avait volontairement sacrifié son otage

    Du côté algérien, pays qui a toujours été hostile à toute forme d’ingérence étrangère dans la vaste bande sahélo-saharienne pour les raisons largement explicitées plus haut, ce simple silence peut constituer une réprobation suffisante de tous les faux-pas commis par la France, avec la complicité du Mali et de la Mauritanie. Seul le Niger, pour le moment, semble vouloir continuer à privilégier les thèses algériennes en matière de lutte contre le terrorisme et le grand banditisme. Toujours est-il que le fameux commandement unifié, basé à Tamanrasset, de cinq pays régionaux, à savoir l’Algérie, est mis  » hors-service  » de facto en attendant la suite des évènements. Celui-ci, outre l’Algérie, regroupe également le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Burkina Faso. Le mieux à faire pour l’Algérie, pour le moment, expliquent nos sources, serait de verrouiller très sévèrement nos frontières sud afin qu’aucune fuite possible des terroristes vers notre territoire ne puisse être possible. Parallèlement, il faudrait mettre en demeure les pays influencés par la France de se ressaisir sous peine de perdre l’amitié de ce puissant allié qu’est l’Algérie. Tous les experts réellement au fait des questions et problématiques sahélo-sahariennes soulignent que rien ne peut se faire, et aucune solution viable, ne saurait être envisagée, sans l’Algérie et les tribus touaregs. 
    La Tribune des Lecteurs, 27/7/2010
  • L’Afrique veut se doter d’une vraie force d’interposition

    Il s’agit sans doute de la plus importante décision prise par les dirigeants africains lors du sommet de l’UA qui se déroule à Kampala. Inspiré par l’évolution de la situation en Somalie, le renforcement des troupes de maintien de la paix de l’UA semble être le bon prétexte pour conférer à cette mission un rôle plus important.. Car la multiplication des foyers de tension dans le continent est vécue comme une hantise, handicapant gravement les efforts de développement consentis par les Etats africains. Que ce soit au Soudan, où l’UA tente toujours de s’imposer face aux immixtions occidentales notamment, ou encore au Tchad, où l’instabilité chronique menace toute la région de désintégration, la situation politique dans beaucoup de pays africains interpelle les conscience et exige des dirigeants de l’Union africain une réelle volonté d’agir. Cette prise de conscience se trouve justifiée par l’actualité brûlante dans la région du Sahel, avec la récente intervention des forces armées française pour tenter de libérer le ressortissant français pris en otage par un groupes affilié à la branche maghrébine d’Al Qaïda dans le nord du Mali. A cet égard, le renforcement du rôle des troupes de maintien de la paix de l’UA est susceptible d’aménager aux pays africains souverains cet excès  » d’ingérence  » que les puissances occidentales se croient toujours en droit d’exercer dans leurs anciennes colonies. Il reste à savoir quelles si cette force d’interposition africaine va être dotée de larges prérogatives –et de vrais moyens logistiques et humains- pour bien mener sa mission, à l’apparence complexe. Parce que le véritable enjeu est d’assurer à cette force la capacité d’intervenir systématiquement partout où il y a conflit, pas seulement donc en Somalie, sans attendre l’appui ou l’aval préalable des Nations unies ou de quelle que force internationale que ce soit. Il s’agit en fait d’un autre défi d’affranchissement que les Africains sont appelés aujourd’hui à relever. 
    M. A.
  • L’otage français Michel Germaneau exécuté

    L’exécution par les factions terroristes de l’otage français, Michel Germaneau n’est pas la seule conséquence grave de la gestion française de cette crise. En effet, l’entrée sur le terrain des opérations de la France avec ses hommes sur le territoire malien complique davantage la donne et pourrait, à terme, occasionner des actions terroristes dont les visées seraient trans-régionales. Coïncidant avec l’appel de l’UA à une expulsion des terroristes et du terrorisme du continent africain, l’exécution de l’otage français livre des lectures diverses, mais elle demeure, à tout le moins, un échec évident de l’action française dans cette affaire. L’affaire Germaneau n’a pas encore livré tous ses dessous, mais la mort de l’otage français et l’implication directe de la France dans une zone multifrontalière dont les pays en partage ont toujours géré efficacement la lutte antiterroriste, en disent long sur une réalité de géostratégie sécuritaire qui dépasse des enjeux régionaux. Car au moment où cette affaire naît et semble mal finir, les pays de la région sahélo-saharienne sont entrés dans un processus de lutte antiterroriste qui a mûri et acquis, d’ores et déjà, les fondements qui permettent à ces pays de structurer une véritable stratégie commune en vue d’affronter et de vaincre en commun le terrorisme avec sa manifestation la plus redoutée, Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). L’arme la plus efficace contre le terrorisme est justement celle-là même dont disposent les pays de la région sahélo-saharienne et qui fait si cruellement défaut aux Occidentaux. Il s’agit de la capacité de résister politiquement et médiatiquement à la pression de l’opinion publique dans la gestion d’une crise telle que celle regardant une prise d’otage. La France et l’Allemagne, à titre d’exemple, se sont toujours montrées très vulnérables en matière de gestion des prises d’otage, car la crise politique qui en est induite devient bien plus importante que la vie de l’otage et souvent hélas aussi, plus importante que les implications que pourraient avoir des négociations directes avec les terroristes ou pire encore le paiement de rançon dont on a vu un exemple lamentable avec les Allemands (et les Français ?). Les prises d’otages occidentaux sont pour les terroristes un moyen de pousser le pays d’où sont originaires les otages à faire des pressions sur le pays où sévissent les ravisseurs afin de lui arracher des concessions ou encore en vue de la libération de terroristes prisonniers, quand il ne s’agit pas simplement d’une occasion inespérée pour des puissances étrangères de pratiquer un droit opportun d’ingérence dans un territoire souverain. Les Américains, qui ont constaté et reconnu l’efficacité avec laquelle l’Algérie, en collaboration avec ses voisins du Sud, luttait contre le terrorisme et qui ont proposé leurs services, ont parfaitement compris les motivations algériennes et africaines en général, quant à la volonté commune de gérer «africainement» la question du terrorisme, surtout qu’ils ont eu l’occasion d’apprécier l’expertise algérienne en la matière. La vision sahélo-saharienne de la lutte contre le terrorisme dans les zones frontalières du sud qui est solidaire d’une lutte contre la contrebande et le trafic de drogue, procède d’une stratégie de lutte qui ne transforme pas, par cet effet, la zone concernée, en territoire de guerre. C’est en cela que la vision africaine contraste avec celle occidentale, qui ne prend pas en compte les particularités culturelles, les sensibilités ethniques, et la nécessaire vitalité d’un mode de vie millénaire dans cette région, qui ne peut s’accommoder d’une militarisation forcenée et encore moins d’une guerre structurée dans la région. Après une approche et des négociations qui ont pris du temps, l’Algérie a réussi à regrouper, autour de l’idée d’une action antiterroriste commune, le Mali, le Niger et la Mauritanie, un commandement militaire installé à Tamanrasset constituant la force de frappe conjuguée pour ces quatre pays contre le terrorisme que représente désormais dans la région ce qui porte le nom très évocateur de l’AQMI. Un coup de théâtre pour un pays comme la France qui a l’habitude de servir de pivot pour des concertations interafricaines en matière de sécurité, et qui voit l’Algérie fédérer une action d’où la France est naturellement écartée en tant que pays non africain. Quoi qu’il en soit, l’efficacité de l’action afro-africaine ne fait plus un doute ; elle n’est battue en brèche que lorsque les groupes terroristes, acculés, prennent des otages étrangers pour exporter la question en dehors des frontières africaines. 
    Farès N.

  • «Le raid français était une erreur»

    Serge Daniel, écrivain et journaliste : «Le raid français était une erreur» 
    L’écrivain et journaliste, Serge Daniel revient dans cet entretien sur Europe 1 sur la mort de l’otage français Michel Germaneau.
    Que signifie la mort de Michel Germaneau ?
    Les Français ont décidé de libérer Michel Germaneau lors d’un raid. Cela a été une erreur.
    Pourquoi ?
    Parce que les Français voyaient arriver la fin de l’ultimatum et voulaient faire vite. Depuis 2002 que je travaille sur ces bandes-là, l’une des choses que j’ai retenue, c’est que le premier ultimatum est toujours repoussé, notamment pour faire monter les enchères. Ensuite, les ravisseurs repoussent l’ultimatum, en fixent un autre. Michel Germaneau a été tué après ce raid, en représailles. Là-dessus, je suis formel.
    Qu’est-ce que l’Aqmi ?

    Au départ, la base de ce groupe était en Algérie, essentiellement. Ils ont été traqués et pour ne pas étouffer, les futurs membres d’Aqmi sont descendus dans cette zone sahélo-saharienne qui va de la Mauritanie au Soudan. Après le 11 septembre, ils ont prêté serment à Al Qaïda. Ils n’ont pas de point fixe et sont très mobiles.
    Comment sont-ils organisés ?

    Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il n’y a pas qu’un seul chef dans cette zone. Il y a plusieurs leaders chez Aqmi. Ils sont essentiellement quatre. Le plus radical de tous est Abou Zeïd. Il hait résolument tout ce qui vient de l’Occident. C’est un pur et dur. Le second, Mokhtar Benmokhtar, dit le borgne, est lui un islamiste businessman.
    Il trempe notamment dans le trafic de voitures. C’est lui qui détient aujourd’hui le couple d’Espagnols. Enfin, il y a le chef des opérations militaires d’Abou Zeïd et un ancien prêcheur, Taleb Abdoulkrim, suspecté d’avoir enlevé Michel Germaneau en premier lieu, avant de le remettre à Abou Zeïd. Le point commun entre eux est Abdel Wadoud, qui a annoncé la mort de l’otage français et qui semble chapoter tout Aqmi. 
  • Interrogations à Paris angoisse à Madrid

    Nicolas Sarkozy a commis une double erreur dans le traitement de la question des otages français aux mains de l’organisation terroriste Al Qaïda pour le Maghreb islamique (Aqmi). Une première fois à la fin de l’année dernière en obtenant du gouvernement malien –

    sur lequel Paris a sans doute exercé des pressions – pour satisfaire les conditions posées par cette organisation terroriste à la remise en liberté des deux otages qu’elle détenait alors contre celle de quatre dangereux terroristes emprisonnés à Bamako.
    Le marché comportait même une certaine dose de supercherie à travers un simulacre de procès expéditif pour juger les quatre terroristes dont deux étaient recherchés en Algérie.
    Le gouvernement algérien a, bien entendu, mal apprécié l’arrangement planifié entre Paris et Bamako et l’a fait savoir de vive voix aux deux capitales. Surtout à un pays comme la France qui a, de tout temps, clamé haut et fort son refus de négocier avec le terrorisme.
    Dans cette affaire, l’Elysée n’a pas respecté les engagements pris de ne jamais céder aux exigences du terrorisme. Il faut se rappeler que déjà dans l’affaire des sept moines assassinés à Tibhirine, un dossier réouvert par la justice française, un émissaire du GIA avait été reçu secrètement au siège même de la chancellerie française puis raccompagné en lieu sûr.
    La méthode employée par Paris à Bamako n’était donc pas inédite et laisse penser que les engagements de la France en matière de lutte contre le terrorisme s’inspirent des vertus des républiques bananières. Pour Paris, les principes, la morale politique et les engagements internationaux s’arrêtent là où commencent les intérêts des ressortissants français. 
    L’Elysée a fait dans le bricolage
    Une seconde fois, c’était mercredi dernier, avec le lancement d’une opération militaire menée par une unité d’élite de l’armée française au Sahel pour tenter de libérer l’otage français Michel Germaneau, enlevé dans le nord du Niger par un groupe terroriste de l’Aqmi.
    L’opération a été un fiasco puisqu’elle n’a pas atteint son objectif, même si une demi-douzaine de terroristes y avaient laissé leur vie.
    Sarkozy avait pris là un risque élevé dont il devra assumer les conséquences au plan politique dans son pays où sa cote dans les sondages est au plus bas. Hier matin, il a confirmé sur un ton solennel que Al Qaïda pour le Maghreb islamique a bien exécuté le ressortissant français en représailles à l’opération de l’armée française.
    On le sentait déjà à la lecture des déclarations des officiels français au lendemain de la dite opération de l’armée française que l’Elysée avait fait dans le bricolage. En risquant un coup spectaculaire destiné à soigner l’image du président de la république dans les sondages.
    Puis en présentant la téméraire action de son armée au Sahel comme une opération d’appui logistique aux unités de l’armée mauritaniennes dans leur lutte contre les bases arrières de l’Aqmi.
    Une telle explication des faits n’est ni sérieuse, ni convaincante. La France semble avoir pris une décision à haut risque dans la précipitation parce qu’elle a  paniqué à la suite de l’ultimatum de deux semaines que lui a adressé l’organisation terroriste pour qu’elle fasse pression sur la Mauritanie afin d’obtenir la libération d’un certain nombre de ses membres emprisonnés à Nouakchott.
    Quel soutien logistique !
    Le président mauritanien a-t-il résisté aux pressions en ce sens de la France ? Dans tous les cas, la France ne s’est jamais souciée jusque-là d’apporter son appui logistique dans une guerre qui a commencé depuis longtemps au Sahel. Elle sait pourtant mieux en tant que puissance coloniale de la région ce que sont les moyens militaires du Niger, du Mali ou de la Mauritanie face à ceux de l’Aqmi.
    L’argument de «soutien logistique» à une opération de l’armée mauritanienne ne tient donc pas la route.
    Paris n’a pas écouté les conseils du ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, de ne rien entreprendre qui puisse mettre en péril la vie de l’otage français et même celle des deux ressortissants espagnols enlevés le 29 novembre dernier.
    Aujourd’hui dans la capitale française on attend dans l’angoisse la confirmation matérielle de l’exécution du ressortissant français.

    L’Espagne s’inquiète
    En Espagne on vit aussi dans l’angoisse la menace de mort qui plane désormais sur ses deux ressortissants, à cause, dit-on en privé, de l’inconséquence de l’initiative française. La première vice-présidente du gouvernement, Mme Maria Teresa de la Vega, s’est voulue, certes, rassurante vendredi dernier en soutenant, sans trop se faire d’illusions  elle-même, que les deux détenus espagnols n’étaient pas aux mains du même groupe terroriste qui avait été ciblé par l’opération militaire française.

    Ces propos n’ont pas pour autant rassuré les familles et les organisations civiles qui considèrent que l’intervention militaire française dans le Sahel a torpillé les efforts du gouvernement espagnol pour obtenir par la voie de la médiation la libération des deux Espagnols.
    Dès l’enlèvement des otages espagnols, Moratinos avait multiplié les démarches auprès des pays de la région du Sahel pour ne rien tenter qui puisse mettre leur vie en péril. Le ministre espagnol des Affaires étrangères était loin de s’imaginer que c’est de Paris et non de Bamako ou de Nouakchott que serait commis l’irréparable.