Année : 2020

  • هاتان الصورتان مركّبتان ولا تظهران توقيع ترامب على اعتراف بلاده بسيادة المغرب على الصحراء الغربية

    بعد إعلان الرئيس الأميركي المنتهية ولايته دونالد ترامب اعتراف بلاده بسيادة المغرب على الصحراء الغربية، انتشرت على مواقع التواصل الاجتماعي صورتان على أنّهما تظهران توقيعه على الخريطة الجديدة. لكنّ الصورتين مركّبتان، فالأولى تعود للتوقيع على قانون ضريبيّ والثانية لاعتراف واشنطن بالقدس عاصمة لإسرائيل.
    يظهر في الصورة الأولى ترامب يرفع ملفاً يحمل توقيعه إلى جانب خريطة المغرب. وجاء في النصّ المرافق له « الرئيس ترامب يوقّع بخط يده على أن الصحراء مغربية… يقدّم قرار الولايات المتحدة الواضح والبَيِّن أمام العالم والذي يحمل توقيعه أن الصحراء مغربية.. ».

    صورة ملتقطة من الشاشة بتاريخ 17 كانون الأول / ديسمبر 2020 عن موقع فيسبوك

    حظي المنشور بمئات المشاركات على موقع فيسبوك، غداة اعتراف الولايات المتحدة بالسيادة المغربيّة على الصحراء الغربيّة.

    كما انتشرت صورة ثانية لترامب في السياق المضلّل نفسه تبدو فيها خريطة المغرب على ملفٍ آخر.

    صورة ملتقطة من الشاشة بتاريخ 17 كانون الأول / ديسمبر 2020 عن موقع فيسبوك
    النزاع حول الصحراء الغربيّة

    يعتبر المغرب الصحراء الغربية جزءا لا يتجزأ من ترابه الوطني ويسيطر على 80 بالمئة من أراضيها.

    وفي منتصف تشرين الثاني/نوفمبر، نفّذ الجيش المغربي عملية عسكرية في منطقة الكركرات العازلة بهدف إعادة حركة المرور الى معبر حدودي مع موريتانيا قطعه، وفق السلطات المغربية، عناصر من جبهة البوليساريو.

    وردت البوليساريو التي تطالب باستفتاء لتقرير المصير في الصحراء الغربية، بأن العملية المغربية أسقطت وقف إطلاق النار المعمول به منذ 1991 بينها وبين المغرب الذي يرفض استقلال الصحراء ويعرض حكماً ذاتياً تحت سيادته.

    وبعد نحو أربعة أسابيع هذه العملية، أعلن الرئيس الأميركي دونالد ترامب في العاشر من الشهر الجاري بشكل مفاجئ اعتراف الولايات المتحدة بالسيادة المغربية على الصحراء في مقابل تطبيع العلاقات مع إسرائيل. وقد وقّع سفير الولايات المتّحدة لدى المغرب على الخريطة الجديدة، ونشرت وكالة فرانس برس صوراً له.

    السفير الأميركي في الرباط ديفيد فيشر يقف إلى جانب الخارطة الجديدة للمغرب المعترف بها في الولايات المتحدة بعد التوقيع عليها في 12 كانون الأول/ ديسمبر 2020 (AFP )
    صورتان مركّبتان

    لكنّ صورتي ترامب المتداولتين لا علاقة لهما بالصحراء الغربيّة، والنسختان الأصليتان منهما لا تحتويان على خريطة المغرب، بل هي ركّبت عليهما للإيحاء بأنّ ترامب وقّع على الخريطة الجديدة.

    فالصورة الأولى وزّعتها وكالة رويترز في 22 كانون الأول/ديسمبر عام 2017 لتوقيع ترامب على قانون ضريبيّ.

    صورة ملتقطة من الشاشة بتاريخ 17 كانون الأول / ديسمبر 2020 عن موقع رويترز
    أمّا الصورة الثاني فتعود لتوقيعه على اعتراف الولايات المتحدة بالقدس عاصمة لإسرائيل، وقد وزّعتها وكالة رويترز في السادس من ديسمبر عام 2017.

  • La recomposition géo-politique programmée du Moyen Orient

    par Pierre Hillard

    Les tensions et les violences qui secouent le Moyen-Orient depuis l’intervention israélienne au Liban, le 12 juillet 2006, ne sont que la partie visible d’un immense enjeu politique, économique, religieux et philosophique opposant l’Occident aux Etats islamiques de la région. L’occupation américaine de l’Irak en mars 2003 a permis le lancement d’un projet révolutionnaire en vue de remodeler une vaste zone géographique allant du Maroc au Pakistan: le Grand Moyen-Orient. Derrière cette appellation, c’est une recomposition profonde qui attend ces pays musulmans. Beaucoup de théories et de supputations courent sur les ambitions des Etats-Unis et d’Israël au sujet de la politique poursuivie par leurs dirigeants. Cependant, des signes avant-coureurs apparaissent et permettent d’apercevoir concrètement les plans en cours. C’est tout l’enjeu des cartes ci-jointes appelant à recomposer le Moyen-Orient.

    Ces cartes (« before » : situation en 2006 (ci-dessus) et « after » : situation après recomposition (ci-dessous)) sont parues dans une revue militaire américaine, AFJ (Armed Forces Journal), en juin 2006 sous la plume d’un lieutenant-colonel américain à la retraite, Ralph Peters. Ce dernier s’est illustré dans une division d’infanterie mécanisée à partir de 1976 pour, ensuite, poursuivre ses activités dans le renseignement militaire en 1980. Auteur de nombreux ouvrages traitant de la stratégie et des relations internationales, Ralph Peters s’est retiré officiellement de l’armée en 1999. Cependant, ses contacts restent étroits avec ce milieu puisqu’il fait partie de l’équipe dirigeante d’AFJ. Cette revue n’est qu’une partie d’un véritable empire de la presse militaire américaine. Fondé en 1863, ce mensuel s’adresse aux officiers des Etats-Unis traitant de sujets aussi variés comme : la technologie militaire, la logistique, la stratégie, la doctrine ou encore la tactique. En fait, AFJ est coiffé par une maison mère, Army Times Publishing Company, dont les publications s’articulent autour de trois axes :

    The Military Times Media Group qui publie: Army Times, Navy Times, Air Force Times et Marine Corps Times.
    The Defense News Media Group, groupe mondial des revues de défense et qui publie: Defense News, Armed Forces Journal (AFJ), Training § Simulation Journal et C4ISR Journal (renseignement, surveillance et reconnaissance).

    The Federal Times, hebdomadaire d’informations traitant des nouvelles technologies et des sujets financiers.

    Depuis le 1er août 1997, Army Times Publishing Company est une filiale d’un groupe encore plus puissant, la société Gannett. Fondé en 1906 par Frank Gannett, cet empire de presse et des médias publie aux Etats-Unis près de 90 quotidiens dont les plus connus sont USA Today et USA Weekend et contrôle 22 stations de télévision. Ses activités débordent aussi au Royaume-Uni puisque 17 quotidiens sont sous son influence. L’ensemble génère des revenus financiers colossaux estimés à 7,6 milliards de dollars pour 2005.

    Cette présentation permet de mieux saisir dans quel milieu la revue AFJ évolue et la signification des travaux de Ralph Peters. En effet, les propositions de ce dernier et les appels lancés à un changement radical des frontières du Moyen-Orient ne sont évidemment pas le résultat des réflexions d’un seul homme soucieux d’occuper son temps. De nombreuses études ont été lancées au sein des instances militaires américaines comme dans de nombreux think tanks appelant à revoir les limites frontalières de ces Etats. Comme le montre la carte (« after »), les modifications apportées aux frontières sont le fruit d’une lente mais sûre réflexion intellectuelle dont la publication dans une revue militaire américaine de haut rang n’est pas l’effet du hasard. Le but recherché est aussi de tester les réactions en particulier celles des musulmans de la région. Cela dit, il ne faut pas voir ce document comme définitif. En fait, c’est un prototype susceptible de connaître des changements que certains appelleraient des variables d’ajustement. En réalité, l’intérêt majeur de ces travaux est de révéler que les instances militaires et politiques des Etats-Unis se sont résolument engagées dans un domaine en n’hésitant plus à l’officialiser. En même temps, cette entreprise doit se faire en adéquation avec Israël concerné au premier chef par ces bouleversements. A l’égard de ce pays, Ralph Peters se définit comme un ami « de longue date » (New York Post, 22 juillet 2006).

    L’article de ce militaire américain, intitulé « Frontières ethniques, que faire pour améliorer le Moyen-Orient », part du principe qu’il faut lever le tabou de la sacro-sainte frontière inamovible. Pour l’auteur, les nouvelles frontières doivent se modeler en fonction du critère ethnique et confessionnel. Même s’il n’est pas possible de tracer des frontières respectant la totalité des particularismes en tout genre nombreux et numériquement très variables, il faut pour Ralph Peters se rapprocher au maximum de ce concept.

    Comme il le souligne : « Nous parlons de difformités énormes faites par les hommes qui n’arrêteront pas de générer la haine et la violence tant qu’elles n’auront pas été corrigées ». Dans son esprit, il s’agit de remettre radicalement en cause les frontières nées des Accords Sykes-Picot de 1916 préparant le démantèlement de l’Empire ottoman.

    En observant l’ensemble de cette zone en partant de la Péninsule arabique, on constate immédiatement le démantèlement du royaume d’Arabie Saoudite. Les propos de l’auteur sont très clairs à l’égard d’un pays qui a bénéficié de la protection américaine suite aux discussions entre le président Roosevelt et le roi Ibn Saoud, le 14 février 1945, à bord du croiseur USS Quincy. Désormais, le royaume d’Arabie Saoudite passe à la trappe. Deux grandes entités territoriales échappent à l’autorité de Riyad. Sur la côte Ouest, il s’agit de créer un « Etat sacré islamique ». Comme le précise Ralph Peters dans des propos lourds de conséquences : « La cause principale de la large stagnation du monde musulman réside dans le traitement réservé à la Mecque et à Médine considérés comme leur fief par la famille royale saoudienne. Les lieux saints de l’Islam soumis au contrôle de la police d’Etat de la part d’un des plus bigots et oppressifs régimes au monde ont permis au Saoud (ndlr : la famille régnante d’Arabie Saoudite) de projeter leur croyance wahhabite à la fois intolérante et disciplinée au-delà de leurs frontières. (…) Imaginez comme le monde musulman se sentirait mieux si la Mecque et Médine étaient dirigés par un Conseil représentatif tournant issu des principales écoles et mouvements de l’Islam dans le monde au sein d’un Etat sacré islamique – une sorte de super Vatican musulman – où l’avenir de la foi serait débattu au lieu d’être arbitrairement fixé ».

    Ce point est capital puisqu’il révèle la volonté de réformer l’Islam afin de l’adapter aux principes occidentaux. Une sorte « d’Islam des Lumières » élaboré au cœur de cet Etat sacré islamique permettrait de rayonner sur l’ensemble du monde musulman et de remodeler les esprits afin qu’ils épousent pleinement la philosophie mondialiste. Il est vrai que contrôler les esprits a toujours permis de contrôler les hommes. C’est d’ailleurs dans le même ordre d’idée que l’on retrouve ces mesures préconisées par la Fondation Bertelsmann, think tank allemand qui, dans ses travaux débattus dans le cadre des « Discussions de Kronberg » en 2002 et 2003 (Europe, the mediterranean and the Middle East, strengthening responsibility for stability and development et Die Zukunft der europäischen Politik im Nahen Osten nach dem Irak Krieg), relève l’inadéquation de l’Islam à l’évolution du monde moderne et prône une refonte des mentalités et la remise en cause des frontières. Ces recommandations allemandes soulignent aussi la convergence des buts à atteindre de part et d’autre de l’Atlantique pour refondre entièrement le Moyen-Orient. Il est vrai aussi que les concepts ethno-confessionnels développés par Ralph Peters cadrent parfaitement avec la vision ethniciste germanique.

    Sur la côte du Golfe persique, c’est la province de Hassa dont la population est majoritairement chiite qui est détachée de l’Arabie Saoudite et intégrée à un « Etat chiite arabe », vestige d’un Irak littéralement explosé. L’application de cette mesure entraînerait la mort économique du royaume car c’est à cet endroit que se concentre l’essentiel de l’extraction des hydrocarbures autour de la triade Dammam-Dharhan-Al-Khobar. L’Etat chiite arabe verrait ses réserves pétrolières et gazières monter en flèche et deviendrait incontournable car, outre les vastes ressources de Hassa et de la production off-shore, il faudrait ajouter celles de la région de Bassora (ex-Irak) et des provinces arabes iraniennes, détachées de Téhéran, riches en hydrocarbures jouxtant le Chatt el-Arab (Arabes chiites du Khouzistan et Arabes sunnites du Bouchir). De plus, Riyad perdrait ses provinces du Sud (Jizrane, Najran et l’Assir) au profit du Yémen, territoires acquis en 1934 lors du Traité de Taëf, et qui ont conservé leur identité yéménite. Enfin, la curée sera complète avec l’octroi d’une façade maritime à la Jordanie, Etat pro-occidental, en arrachant à l’Arabie Saoudite les provinces de Tabouk et une partie du Jouf.

    La destruction du royaume des Al Saoud affichée par la carte (« after ») de Ralph Peters n’est que la confirmation de projets élaborés au sein de certaines instances américaines. David Rigoulet-Roze, spécialiste du Moyen-Orient, dans son ouvrage « Géopolitique de l’Arabie Saoudite » (Editions Armand Colin) le souligne clairement :

    « Il y eut notamment la publication le 6 août 2002, par le Washington Post, d’un briefing qui a eu lieu le 10 juillet 2002 au Defense Policy Board (DPB, ndlr : organisme de planification stratégique créé en 1985 par Donald Rumsfeld), alors dirigé par le très influent Richard Perle, surnommé le Prince des ténèbres lorsqu’il officiait au Pentagone entre 1981 et 1987 sous l’administration Reagan. Au cours de ce briefing, l’Arabie Saoudite avait été qualifiée par Laurent Murawiec, un analyste du prestigieux centre de recherches stratégiques de la Rand Corporation, de pays ennemi. (…) Pire en core, Murawiec avait évoqué la légitimité de sanctions, dont le gel des avoirs saoudiens, voire… la scission de la province orientale du royaume renfermant ces gisements et ces réserves pétrolières qui font de l’Arabie le maître du quart des réserves d’or noir.

    (…) Quelques temps seulement après l’affaire Murawiec, c’était au tour d’un think tank proche des néo-conservateurs, le Hudson Institute – dont Perle est membre, et où officie désormais Murawiec – de reprendre et de développer les idées avancées par le DPB. Etait alors ouvertement évoqué un plan de démantèlement de l’Arabie Saoudite qui, en réalité, existe depuis la fin des années 70, à l’initiative d’Henry Kissinger, alors Secrétaire d’Etat de l’Administration Nixon. (…) C’est également dans le même ordre d’idées que semble s’inscrire un rapport remontant à la fin de l’année 2002, circulant au plus haut niveau dans les milieux officiels de Washington. Il envisagerait rien moins que le démembrement pur et simple de l’Arabie Saoudite selon le scénario suivant : les Lieux saints de la Mecque et de Médine se verraient confiés aux Hachémites qui, en tant que descendants du Prophète, bénéficient d’une légitimité qui fait largement défaut à la dynastie des Al Saoud et la province du Hassa serait poussée à faire sécession dans le but de se constituer en Emirat pétrolier. »

    Les révélations de ce spécialiste français continuent sur la même lancée puisqu’il affirme la volonté des Etats-Unis de favoriser une « recomposition politique radicale du Moyen-Orient qui passerait notamment en Irak même par une dévolution du pouvoir à la majorité chiite par les grâces d’une démocratie arithmétique ». C’est justement ce que révèle la carte (« after ») de Ralph Peters où l’Etat irakien a disparu au profit d’un Etat chiite arabe et d’un résidu appelé « Irak sunnite » que le militaire américain propose même d’unifier à la Syrie qui, entre-temps, a perdu sa façade maritime au profit d’un Grand Liban. Il est même évoqué sous sa plume la renaissance de l’antique Phénicie (Phoenecia reborn) tandis que l’Etat d’Israël est conservé dans ses frontières d’avant 1967. Il est étonnant de constater, en raison du véritable chambardement des frontières au Moyen-Orient, que Ralph Peters conserve le territoire de la Cisjordanie (West Bank) au rang de statut indéterminé. Peut-être que le statut définitif de Jérusalem, siège de trois grandes religions, nécessite de ne pas révéler tout de suite l’avenir d’une zone éminemment convoitée.

    En tout cas, la partition de l’Irak sur la carte (« after ») commence à prendre forme sur le terrain. L’ambassadeur britannique à Bagdad, William Patey, et le général américain John Abizaid ont clairement affiché leurs craintes d’une guerre civile suivie d’une division du pays comme l’a révélé un document confidentiel publié par la BBC (Spiegelonline, 3 août 2006). Leurs affirmations ne font que confirmer les propos du journal d’Istanbul, Vatan, qui évoquait les propos tenus à des représentants turques par des responsables américains, début 2006, au sein des think tanks de Washington : « Arrêtez de vous soucier de l’intégrité territoriale de l’Irak. En réalité, ce pays est déjà divisé ! Vous [les Turcs] feriez mieux de vous préoccuper maintenant de votre Sud-Est [région à majorité kurde]. Essayez d’imaginer quelles seront les répercussions de l’autonomie du Kurdistan irakien dans votre pays » (Courrier International n°805).

    C’est d’ailleurs le même son de cloche de la part des dirigeants européistes de Bruxelles qui susurrent à Ankara que « Si la Turquie se séparait de son Sud-Est, elle entrerait plus facilement dans l’Union européenne » (Courrier International n°805). L’ethno-régionalisme prôné par les instances bruxelloises ne ferait qu’accélérer le phénomène de décomposition de l’Etat turc. Finalement, les propos de Ralph Peters ne font que confirmer ces prises de position puisqu’il ajoute qu’un cinquième de la partie Est de la Turquie est un « territoire occupé » et qu’un « Kurdistan libre, s’étendant de Diyarbakir jusqu’à Tabriz deviendrait l’Etat le plus occidental entre la Bulgarie et le Japon ».

    La création d’un Etat kurde (Free Kurdistan) construit à partir des territoires Sud-Est de la Turquie, du Nord de la Syrie et de l’Irak, et de l’Ouest de l’Iran aboutirait à l’émergence d’un bloc estimé à environ 30 millions d’habitants. Fort des installations pétrolières de Kirkouk, cet Etat kurde pro-américain serait avec l’Etat chiite arabe les deux grands pôles de la production d’hydrocarbures et de gaz du Moyen-Orient. L’importance de cet Etat kurde serait d’autant plus grande que l’oléoduc BTC évacue le pétrole de la Mer Caspienne à partir de Bakou (Azerbaïdjan), passe par Tbilissi (Géorgie) pour, ensuite, traverser tout le Sud-Est de la Turquie et aboutir à Ceyhan en Méditerranée. Les Kurdes seraient donc les grands maîtres de ce corridor énergétique voulu par les Américains en 1994. En plus du pétrole, il faut ajouter l’autre grande richesse, l’eau. Le « Grand projet anatolien » (GAP) poursuit l’objectif, grâce à 22 barrages, de dompter le Tigre et l’Euphrate qui prennent leurs sources dans les montagnes kurdes. L’achèvement de ce projet qui doit avoir lieu vers 2013, permettant l’irrigation de 1,7 million d’hectares et la production d’électricité, sera une arme redoutable aux mains de l’Etat kurde et pèsera lourdement sur la vie des habitants de tout le Moyen-Orient.

    A l’Est des Etats kurdes et chiites, l’Iran est remodelé en fonction des critères ethniques. Après avoir cédé sa partie kurde, la zone turcophone du Nord est octroyée à l’Azerbaïdjan. En revanche, la province iranienne du Khorasân s’agrandit vers l’Est en acquérant le territoire Ouest de l’Afghanistan, la région de Hérat, en conformité avec la volonté de Ralph Peters de reconfigurer la région selon les critères ethno-linguistiques. Comme le confirme Bernard Hourcade, directeur au CNRS (équipe de recherche : monde iranien), dans son ouvrage « Iran, nouvelles identités d’une République » (Editions Belin) : « L’immense province de Khorasân, (…) les limites anciennes incluaient les régions de Hérat dans l’actuel Afghanistan et celles de Samarcande et Boukhara en Ouzbékistan ». Enfin, un « Baloutchistan libre » (Free Baluchistan) est créé à partir des deux entités iraniennes et pakistanaises tandis que l’Afghanistan se voit agrandi au dépens du Pakistan jusqu’au fleuve Indus afin d’y rattacher les populations pachtounes. L’Etat pakistanais réduit de près de la moitié de sa superficie verrait sa puissance économique fortement amoindrie au point d’être incapable de servir d’allié de revers au profit de la Chine face à l’Inde. Sur ce point, les Etats-Unis seraient gagnants. Seuls des Etats comme Oman, le Qatar, les Emirats arabes unis et le Koweït échappent à ces modifications. Cependant, cette carte (« after ») étant un prototype, rien n’interdit à leurs concepteurs de se rattraper. En tout cas, la finalité américaine est de contrôler tout ce Moyen-Orient par la parcellisation ethnique et religieuse selon le bon vieux principe « diviser pour régner ». Les Etats-Unis, cherchant à s’assurer la production d’hydrocarbures à leur profit, seraient en mesure de priver la Chine, puissance montante et rivale, de l’arme énergétique si nécessaire à son accession à la cour des grands.

    L’impression générale qui se dégage du remodelage annoncé par cet auteur comme de la part de nombreux think tanks américains et allemands est celle d’un bouleversement mettant à feu et à sang ces pays du Moyen-Orient. En effet, on ne voit pas ces Etats se laisser charcuter, voire disparaître, sans se laisser faire. Comment réagira, par exemple, le Pakistan qui possède l’arme nucléaire ? En réalité, l’objectif est d’intégrer ces immenses territoires à la sphère d’influence occidentale. Le discours de Joschka Fischer à la 40è Conférence de Munich sur la politique de sécurité dans le cadre de l’OTAN, le 7 février 2004, annonçait la volonté du monde occidental de mettre ces pays du Moyen-Orient aux normes euro-atlantistes. Ces mesures furent confirmées par « l’alliance germano-américaine pour le XXIè siècle » signée, le 27 février 2004, entre le président Bush et le chancelier Schröder à Washington, annonçant la couleur : « Nous devons construire un véritable partenariat qui relie l’Europe et l’Amérique aux Etats du Proche et Moyen-Orient (…) ». Cette immense construction politique et métaphysique doit obligatoirement obéir à des règles communes qui sont politiques, économiques et civilisationnelles.

    Une logique, mais une logique folle, anime les concepteurs de ce projet. C’est le think tank German Marshall Fund (GMF) qui, indirectement, a révélé l’engagement profond des instances atlantistes. En effet, il s’est engagé sous l’égide du très influent Bruce Jackson à développer une nouvelle politique en Mer Noire intitulée « A new euro-atlantic strategy for the Black Sea region ». Il s’agit en liaison avec l’Union européenne de créer une eurorégion de la Mer Noire qui doit voir le jour pour 2007 selon les affirmations de Giovanni di Stasi, président du Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux d’Europe (CPLRE). Or une « petite » phrase résume tout. Paru en 2004, le rapport du GMF dans sa préface précise que « La Mer Noire est la nouvelle interface entre la communauté euro-atlantique et le Grand Moyen-Orient ». Une « interface » géographique obéit aux lois de la physique. Pour fonctionner et jouer pleinement sa mission de charnière, cette interface doit s’articuler entre deux mondes, le bloc euro-atlantiste d’une part, et le bloc moyen-oriental d’autre part, régis par les mêmes lois et les mêmes concepts édictés par la philosophie mondialiste. Cela suppose nécessairement une refonte généralisée de cet espace arabo/perse musulman pour qu’il y ait adéquation. Pour réussir cette entreprise, les moyens mis en œuvre risquent d’aboutir à un chaos inimaginable dans cette région et, par ricochet, à l’échelle planétaire. Tout compte fait, les adeptes de cette politique ne font qu’appliquer les fameux vers du poème de Goethe, « l’apprenti sorcier », qui rappelaient : « Les esprits que j’ai réveillés ne veulent plus m’écouter ».

    Pierre Hillard

    Pierre Hillard est docteur en sciences politiques, B.I n°113 (*) est professeur d’histoire-géographie. Il a publié différents articles dans Le Figaro, Géostratégiques, Conflits Actuels, Intelligence et Sécurité, Balkans-Infos.

    Emission « Le Dessous Des Cartes »

    Source : Knowledge-TV

    Tags : Moyen Orient, Proche Orient, Palestine, Syrie, Irak, Arabie Saoudite, Liban, Emirats Arabes Unis,

  • Guerre des plumes entre le Maroc et l’Algérie (Le Monde diplomatique)

    Par Ali Chibani

    Quand la presse algérienne défend « la Gandhi du Sahara Occidental », les titres marocains décèlent un « piège algérien (1) ». La grève de la faim observée depuis le 15 novembre par la militante sahraouie Aminatou Haïdar à l’aéroport de Lanzarote, aux Canaries, après qu’elle a été refoulée par les autorités marocaines, a ravivé les querelles entre journalistes des deux pays. Une vieille guerre que chaque camp justifie.

    Nourdine Jouhari, directeur de la rédaction de Maroc Hebdo International, estime que la défense du territoire, le maintien du Sahara Occidental sous l’autorité de la monarchie, fait l’unanimité dans son pays. Pour lui, seule l’autonomie du « Sahara marocain » est acceptable, car « il y va de la survie de la marocanité et de l’intégrité territoriale du pays ». Son hebdomadaire n’a de cesse d’évoquer un possible conflit armé avec le voisin algérien. Ces dernières années ont en effet été marquées par un renforcement de l’arsenal militaire algérien, et la presse marocaine suit de près ce dossier. C’est le cas de Maroc Hebdo International, qui énumère dans le détail les nouvelles acquisitions algériennes et conclut : « “Qui veut la paix prépare la guerre”, conseille le dicton. Alger, surtout, et, dans une moindre mesure, Rabat, ne dérogent pas à la règle (1) . »

    « Notre position [pour l’indépendance des territoires sahraouis] est déterminée par notre histoire, rétorque Mohammed Touati journaliste au quotidien algérien L’Expression. Nous avons vécu cent trente ans d’un colonialisme brutal, nous ne pouvons donc pas accepter que d’autres peuples vivent la même expérience. » Merzak Tigrine, journaliste à Liberté, partage cet avis : « Nous condamnons l’occupation du territoire sahraoui comme nous condamnons la barbarie israélienne contre les Palestiniens. Nous sommes passés par là ! »

    Tout porte à polémique. Le 18 septembre 2009, la presse marocaine rapporte que des « violations des droits de l’homme [dans les camps des réfugiés] à Tindouf ont été dénoncées vigoureusement à Genève par une délégation de Sahraouis unionistes ». L’Expression réplique par une diatribe sans concession contre la « délégation sahraouie fantoche (2) » dont les membres sont traités de « harkis ». Néanmoins, le journal algérien appelle les Marocains à se prononcer en faveur de l’autodétermination du Sahara occidental. Et il leur rappelle leur engagement passé en faveur de l’indépendance de l’Algérie : « Le peuple marocain, dont la longue tradition de lutte contre la torture et le respect des droits de l’homme est devenue un symbole, trouve en la cause sahraouie le plus bel exemple de fraternité entre les peuples… »

    Karim Boukhari, directeur de rédaction à l’hebdomadaire indépendant marocain TelQuel, se méfie des surenchères : « Nous nous efforçons de garder la tête froide au sujet du Sahara. On tente d’éviter des termes comme “séparatistes” – on parle plutôt d’“indépendantistes” – pour qualifier les membres du Front Polisario. On évite des expressions comme “la cause de tous les Marocains”, et tout ce qui ressemble de près ou de loin à la propagande, tant marocaine que non marocaine. Ce n’est pas toujours évident, puisque cela peut nous valoir des incompréhensions, même chez certains de nos lecteurs. »

    Certains d’entre eux sont, en effet, habitués à une condamnation sans nuance de l’Algérie, censée être la seule à entraver le processus de paix au Sahara Occidental à cause des « appétits de la junte militaire […], qui avance sans ambages la solution du partage d’un territoire séculairement rattaché au Royaume (3). »

    « L’Algérie crée tous les problèmes possibles pour éviter la fin du conflit avec le Sahara Occidental », affirme Nourdine Jouhari. A quoi les médias algériens ripostent que la monarchie n’offre aux Sahraouis que le statut de province autonome et refuse l’organisation d’un référendum sur leur indépendance. Mohammed Touati insiste : « Nous défendons, certes, la cause sahraouie, mais ce n’est pas pour autant que nous voulons être partie prenante du conflit. Nous souhaitons la tenue d’un référendum pour permettre aux Sahraouis de faire leur choix. Et s’ils optent pour leur rattachement à la monarchie marocaine, nous respecterons leur décision. »

    Une chose est sûre : les journalistes algériens se sentent confortés par l’Organisation des Nations unies (ONU), qui considère le Sahara Occidental comme l’un des seize derniers « territoires non autonomes » entrant dans ses efforts de « décolonisation ». Le directeur d’Aujourd’hui le Maroc minimise ces résolutions et tranche : « La solution réaliste ne peut tourner qu’autour du projet d’autonomie proposé par le Maroc. Un point c’est tout (4). »

    Aussi, Nourdine Jouhari peut expliquer : « La proposition d’organiser un référendum sur l’“autonomie des provinces sahariennes” a été acceptée par la communauté internationale. Mais Alger veut empêcher sa réalisation. »

    Dans cette lutte au couteau, le journaliste tente souvent de ternir l’image du camp adverse. Côté algérien, la presse opère un parallèle entre les peuples sahraoui et palestinien, et utilise une même terminologie pour les deux conflits, parlant de « territoires occupés » et d’« Intifada » ; La Tribune dénonce les « forces d’occupation marocaines ».

    El Moudjahid se fait la voix du Front Polisario en couvrant les voyages de M. Mohamed Abdelaziz, « président de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) », et en reprenant les informations de l’agence de presse sahraouie SPS. Quant à Mohammed Touati, il égratigne ses confrères marocains : « Nous reprenons les articles pour rectifier le tir. Nous nous sentons agressés par tous ceux qui refusent l’indépendance des populations colonisées. »

    Les journalistes marocains, eux, exploitent les mouvements sociaux chez leurs voisins, notamment ceux du « pays kabyle (5) », que Maroc Hebdo International décrit aussi comme une « Intifada ». Rappelant la naissance d’un mouvement autonomiste kabyle, l’hebdomadaire ironise sur le soutien aux Sahraouis et fait mine de s’interroger : « Et si le Maroc, sans autre forme de cynisme à l’algérienne, revendiquait devant les instances internationales le droit du peuple kabyle à disposer de lui-même, quitte à se constituer en Etat souverain… (6) ? » « Cette extrapolation me fait rire ! Que je sache, en Algérie, il n’y a pas de peuple en danger », réplique Mohammed Touati. « Nous n’avons pas inventé de revendications pour le peuple algérien, se défend le rédacteur en chef de Maroc Hebdo International. Nous ne sommes pas pour le démembrement de l’Algérie. »

    Des deux côtés, les journalistes s’alignent le plus souvent sur les positions des autorités politiques. Les accusations réciproques fusent. Ainsi, le quotidien arabophone algérien Al Khabar désigne les hôpitaux marocains comme destinataires d’un trafic d’organes d’enfants qui se fournit en Algérie. Maroc Hebdo International riposte en dénonçant les « nombreuses dérives de la presse algérienne (7) ».

    Les journalistes sont-ils manipulés par le pouvoir ? « Je ne subis aucune pression et personne ne me force à écrire mes articles, se défend Mohammed Touati. Pour moi, c’est la presse marocaine qui n’est pas libre… ». Nourdine Jouhari soutient que le Palais n’exerce aucune pression sur sa profession. « Il n’y a pas non plus d’autocensure, mais de la responsabilité. Quand nous écrivons sur le Sahara marocain, nous avons en tête le conflit avec l’Algérie et avons conscience de la nécessité de défendre l’intégrité de notre territoire. » Karim Boukhari, lui, rappelle que TelQuel est allé enquêter sur les camps de Tindouf en Algérie et que « les conclusions de [ses] reporters allaient à l’encont re de la propagande marocaine ». Un reportage mal perçu par des internautes marocains, qui ont accusé l’hebdomadaire de « manque de professionnalisme ».

    Cette guerre des plumes contribue à l’enracinement du conflit dans les consciences. Toute nuance devient suspecte. Quand le souverain marocain fait part de sa volonté d’ouvrir ses frontières, El Watan y voit un signe de « l’aggravation de la situation socioéconomique au Maroc (8) » et Le Soir d’Algérie une volonté d’envoyer en Algérie les Marocains pauvres.

    Pour Jamal Berraoui, de La Gazette du Maroc, « le véritable conflit est entre le Maroc et l’Algérie. Le Sahara marocain sert de prétexte à deux nationalismes qui s’affrontent ! » Karim Boukhari ajoute : « Le conflit du Sahara est essentiellement une guerre de diplomatie officielle et parallèle, une guerre de “lobbies”, de propagande, etc. Je crois que toutes les parties l’acceptent et s’en accommodent. C’est même devenu un cache-misère et un bon moyen de désinformation. »

    « La presse des deux pays devrait agir pour une solution humaine du problème, estime Jamal Berraoui, qui voit « la société sahraouie en pleine transformation alors que les journalistes ne suivent pas ». Et d’ajouter : « Les deux presses se sont dévalorisées parce qu’elles ne font pas leur travail d’information. Elles relaient seulement la position officielle », avant de conclure : « S’il n’y a pas de dialogue entre Alger et Rabat, ce problème durera encore trente ans. »

    Notes

    (1) Maroc Hebdo International, Casablanca, 9 au 15 décembre 2009.

    (1) Maroc Hebdo International, 25 septembre au 1er octobre 2009.

    (2) L’Expression, Alger, 20 septembre 2008.

    (3) La Gazette du Maroc, Casablanca, 4 mars 2002.

    (4) Aujourd’hui le Maroc, Casablanca, 1er septembre 2008.

    (5) Maroc Hebdo International, 30 octobre au 5 novembre 2009.

    (6) Maroc Hebdo International, 23 au 29 mai 2008.

    (7) Maroc Hebdo International, 23 au 29 mai 2008.

    (8) El Watan, Alger, 22 mars 2008.

    Source : Le monde diplomatique, 30 déc 2009

    Tags : Sahara Occidental, Maroc, Front Polisario, Algérie,

  • Affaire Ben Barka : un blocage inexplicable

    Les interrogations qui entourent l’affaire Ben Barka atteignent leur paroxysme suite à un nouveau rebondissement. Le général Hosni Benslimane semble être au dessus des lois internationales.
    par Hicham Bennani

    Un nouvel épisode de l’affaire Ben Barka a éclaté au grand jour le jeudi 1er octobre. Dans la soirée, un représentant du ministère de la Justice informe les médias que les mandats d’arrêts internationaux émis par Interpol contre quatre ressortissants marocains impliqués dans l’affaire vont enfin être diffusés. Le lendemain, à 19h30 sur France 3, Maurice Buttin, avocat de la famille Ben Barka, se félicite de la décision du ministère. Une source proche du ministère de la Justice marocain, interrogée par l’AFP, se dit alors «surprise de cette annonce, car c’est une ancienne histoire qui revient à la surface chaque fois qu’une “partie occulte” veut salir les relations excellentes entre le Maroc et la France». Le gouvernement marocain, quant à lui, reste muet. Mais, coup de théâtre, deux heures après, le même ministère revient sur sa décision. «Le parquet de Paris demande la suspension de la diffusion de ces mandats, dans l’attente des précisions demandées au juge d’instruction», indique un communiqué de l’AFP, qui précise : «Interpol (organisation internationale de police criminelle) a demandé des précisions afin de les rendre exécutables. Sans ces précisions, ces mandats sont inexécutables».

    L’après Rachida Dati

    L’origine de cet énième rebondissement remonte en fait au mois de juillet 2009. A ce moment là, Maurice Buttin écrit à Michèle Alliot-Marie pour la féliciter d’avoir été nommée à la tête du ministère de la Justice. Il en profite pour lui rappeler que lorsqu’elle était ministre de la Défense, elle avait eu le courage de libérer les dernières pièces du dossier du SDECE (ancêtre de la DGSE) sous scellés au Tribunal de Grande Instance de Paris, alors que les ministres de la gauche ne l’avaient pas fait. Il lui signale également d’une part que la justice marocaine n’exécute pas les Commissions rogatoires internationales (CRI) qui lui ont été adressées par le juge Patrick Ramaël depuis cinq ans, en dépit de la convention judiciaire franco-marocaine, alors que toutes les CRI, dans n’importe quelle autre affaire, sont parfaitement exécutées par la justice marocaine. Et d’autre part, que depuis deux ans les mandats d’arrêt lancés à l’encontre de personnalités visées par ces CRI (en raison de leur non exécution) ne sont pas diffusés par Interpol. La ministre répond à l’avocat le 28 août suivant, en le remerciant et en lui précisant qu’elle prenait attache avec le Directeur des affaires criminelles pour lui soumettre les problèmes soulevés. Tout ceci explique donc l’annonce du 1er octobre. Sur cinq mandats d’arrêt, quatre sont décrétés valables. La ministre les transfère alors au ministère de l’Intérieur français. Le cinquième, qui concerne Boubker Hassouni, ex-agent du Cab 1 (unité secrète des services marocains), a fait l’objet d’une demande de complément d’information qui a été exaucée, à savoir la date de naissance et les origines de l’accusé.

    Les quatre mandats d’arrêt qui marquent l’actualité concernent le général Hosni Benslimane, chef de la gendarmerie royale marocaine, le général Abdelhak Kadiri, ancien patron des renseignements militaires, Miloud Tounsi, alias Larbi Chtouki, l’homme qui aurait organisé tout le volet opérationnel en France et Abdelhak Achaachi, agent du Cab 1, qui aurait accompagné Chtouki dans des chambres d’hôtel avant l’assassinat. «Benslimane était au Cab 1, plusieurs témoins attestent qu’il répercutait tous les appels et coups de fil. Il est cité dans des PV d’audition d’ONG», précise Joseph Tual, journaliste à France 3, spécialiste de ce dossier.

    Ce qui est étrange, c’est que ces mandats d’arrêt ont été signés il y a deux ans (le 18 octobre 2007) par le juge Patrick Ramaël, chargé du dossier. «C’est à cause du blocage de la justice marocaine que les mandats d’arrêt ont été lancés. Si la justice marocaine avait décidé d’appliquer la commission rogatoire du juge Ramaël en présentant des personnes par des juges marocains il y a deux ans, on n’en serait pas arrivés là !», clame Bachir Ben Barka, fils de Mehdi Ben Barka, joint par téléphone. Le lancement des mandats d’arrêt avait été rendu public par les médias le 22 octobre 2007, le jour même où le président Nicolas Sarkozy et Rachida Dati étaient à Marrakech pour une visite d’Etat officielle. Une annonce qui a eu l’effet d’une bombe. Mais force est de constater que ces mandats d’arrêt n’ont pas été officialisés par Interpol dans le monde entier. En effet, le général Benslimane est allé aux JO de Pékin (24 août 2008), en tant que président marocain du CIO, sans avoir été inquiété. «Le constatant, j’ai demandé au juge pourquoi le général n’avait pas eu d’ennuis», nous déclare Maurice Buttin. Après s’être informé, le juge lui explique que les mandats n’étaient effectivement pas délivrés hors de France… «On comprend mal comment ce qui est vrai en France, n’est plus vrai en dehors de la France», s’indigne Bachir Barka.

    Décision politique

    «Interpol pointe des insuffisances dans ces mandats d’arrêt et demande que ces insuffisances soient complétées», a déclaré à l’AFP Guillaume Didier, porte-parole du ministère de la Justice. Bachir Ben Barka, qui s’était félicité de la première annonce, se dit profondément indigné : «On constate qu’un ministre s’est déjugé en 24h. Ma famille et moi-même sommes abasourdis. On ne pouvait pas imaginer que la raison d’Etat puisse prendre des formes aussi cyniques. On était habitués à des formes sournoises, mais là c’est le cynisme de la réforme d’Etat à l’état brut». Selon lui, l’argument du ministère «ne tient pas la route, c’est une décision politique». Même son de cloche du côté de Maurice Butin : «Officiellement, le dossier a été de nouveau bloqué pour des raisons « techniques » en quelque sorte. Ce n’est pas très sérieux, car ces mêmes raisons existaient forcément il y a deux ans. C’est donc sans conteste une raison politique». On pourrait en déduire que l’Elysée est très vraisemblablement derrière cette décision. «Je note que ce ne serait pas la première fois, depuis son arrivée au pouvoir suprême, que le président Sarkozy revient sur une décision d’un de ses ministres, voire du Premier ministre lui-même», précise l’avocat. Aujourd’hui, Interpol se refuse à communiquer. «Interpol doit être en train d’avoir des rendez-vous au plus haut niveau en France, car ils sont visiblement instrumentalisés. Pour Interpool il n’y a aucun problème pour diffuser les mandats d’arrêt à travers le monde entier», indique Joseph Tual. «Interpol va sans doute exécuter les « conseils » qui lui sont prodigués en haut-lieu…», confirme pour sa part Maurice Buttin.

    La 76è Assemblée générale d’Interpol s’était ouverte lundi 5 novembre 2007 à Marrakech. Ce que l’histoire ne dit pas, c’est que Hosni Benslimane en personne avait ouvert ce colloque. Ceci expliquerait en partie le mutisme d’Interpol après ces événements récents. A l’heure où nous mettons sous presse, une source proche du dossier assure que les mandats ont bien été diffusés depuis 2007. Des pays comme l’Espagne, où Benslimane s’est pourtant rendu, n’auraient donc pas appliqué les demandes d’Interpol. En n’exécutant pas les commissions rogatoires internationales, le gouvernement marocain semble encore refuser de mettre enfin la lumière sur la disparition de Ben Barka. Pour Maurice Buttin, «cette vérité est à Rabat, je l’ai toujours dit. Ce gouvernement contresigne ainsi toute la responsabilité du pouvoir d’alors, en la personne du roi Hassan II».
    Quarante-quatre ans après la disparition de l’opposant Mehdi Ben Barka devant la brasserie Lipp à Paris, l’affaire qui est probablement la plus emblématique des années de plomb, demeure toujours une énigme. Des deux cotés de la Méditerranée, la vérité fait toujours peur.

    Le Journal Hebdomadaire, octobre 2009

    Source : Hicham Bennani

    Tags : Maroc, Mehdi Ben Barka, France, Hassan II,

  • Sous le sceau de l’«Algérie nouvelle»

    Le référendum sur la révision de la Constitution s’est tenu dans des conditions particulières. Outre la crise sanitaire causée par la pandémie du coronavirus, le président de la République a été le grand absent de ce rendez-vous. Initiateur de la révision de la Constitution, qui devrait être «le socle de l’édification de l’Algérie nouvelle», Abdelmadjid Tebboune a voté par procuration.

    La veille, le président de la République a affirmé, dans un message lu par Abdelmadjid Chikhi, conseiller auprès du président de la République chargé des Archives et de la Mémoire nationales, que « le peuple algérien sera, une fois encore, au rendez-vous avec l’histoire pour opérer le changement escompté à travers le référendum sur l’amendement constitutionnel ».

    Ce référendum serait le point de départ de l’«Algérie nouvelle». C’est d’ailleurs ce qui a été souligné du côté de l’Exécutif et du Parlement. Le Premier ministre Abdelaziz Djerrad a en effet affirmé hier : « Ce jour est un jour pour l’avenir de l’Algérie nouvelle que nous souhaitons tous pour nos enfants et petits-enfants.

    La voix aujourd’hui est au peuple et au citoyen, et chacun est libre de choisir le chemin qu’il souhaite pour son pays.» Il a ajouté que ce jour, qui coïncide avec la date du déclenchement de la guerre de libération nationale, «représente, pour le peuple algérien, l’Histoire glorieuse, celle des martyrs et des moudjahidine, qui a permis à nos ancêtres de libérer le pays ».

    Pour le président du Conseil de la nation, ce référendum constitutionnel est « un rendezvous fondateur de l’Algérie nouvelle ». Salah Goudjil estime que « l’Algérie mène aujourd’hui une bataille » et que «Novembre est de retour en vue d’édifier une nouvelle République». Selon lui, le projet d’amendement constitutionnel est d’une grande importance, le qualifiant «d’important dans l’histoire de l’Algérie».

    De son côté, le président de l’Assemblée populaire nationale, Slimane Chenine, a affirmé que «le référendum sur l’amendement constitutionnel permet au peuple de choisir et de décider de l’acte fondateur pour la gestion de ses affaires», rappelant que «redonner la parole au peuple est l’une des revendications du Hirak populaire béni».

    Même son de cloche du côté du Conseil constitutionnel. Son président, Kamel Fenniche, a affirmé que «le référendum sur l’amendement constitutionnel constituait un départ pour l’édification d’une nouvelle République enracinée dans les valeurs du 1er-Novembre».

    « Cette nouvelle République, qui sera basée sur la démocratie, les droits fondamentaux et les libertés, consacrera l’Etat de droit», a-t-il ajouté. Il a par ailleurs affirmé que son instance «suit, instant par instant, l’opération électorale», d’autant que le Conseil constitutionnel est l’instance qui veille à la régularité des élections nationales et des référendums.

    Lilia Aït Akli

    Le Jeune Indépendant, 2 nov 2020

    Tags : Algérie, Constitution, Référendum, vote, algérie nouvelle, Abdelmajid Tebboune,

  • Ce que ferait Joe Biden au Moyen Orient et en Afrique du Nord (Hicham Alaoui)

    Hicham Alaoui

    Associé, Weatherhead Center for International Affairs. DPhil, études orientales, St Antony’s College, Oxford.

    Si Joe Biden remportait les élections de novembre 2020, sa nouvelle administration serait immédiatement confrontée à quatre défis au Moyen-Orient: l’Iran, l’axe saoudo-émirati, le printemps arabe et Israël / Palestine.

    La politique de l’administration Trump au Moyen-Orient est celle d’un repli chaotique. En revanche, la stratégie de l’administration Biden serait une stratégie de réengagement prudent. Il serait fondé sur un sens du réalisme critique, un peu comme l’approche de l’administration Obama. Elle verrait la région comme un terrain géopolitique cohérent, dans lequel la réalisation des objectifs à long terme exigerait moins d’action unilatérale et plus de coordination multilatérale. En même temps, il affronterait l’importance décroissante du Moyen-Orient pour les intérêts américains à l’étranger.

    Premièrement, en ce qui concerne l’Iran, l’administration Biden essaierait de restaurer le principe de négociation incarné par le cadre de l’accord nucléaire de 2015. Au cours des quatre dernières années, les États-Unis sont revenus à une position d’intimidation unilatérale et de rhétorique militarisée, de sanctions et de frappes militaires dans l’espoir de contraindre l’Iran à se soumettre. Pourtant, si les États-Unis peuvent lentement étouffer les ressources nucléaires de l’Iran, ils ne peuvent pas le faire avec leur programme de missiles balistiques existant, qui est le principal fer de lance de l’Iran pour ses ambitions d’expansion régionale.

    En tentant de revoir le cadre de l’accord sur le nucléaire pour ouvrir un nouveau dialogue, les États-Unis essaieraient de freiner le programme de missiles balistiques de l’Iran en donnant à son régime une place à la table des négociations. Les dirigeants iraniens résisteront sans aucun doute à l’invitation, car l’arsenal reste un atout vital pour sa capacité militaire. Cependant, ce processus pourrait ouvrir la porte à un grand marché régional à long terme. Un tel accord aborderait de manière globale l’implication de l’Iran dans des pays comme la Syrie, le Yémen et l’Irak sans aggraver les tensions dans le Golfe.

    Deuxièmement, en ce qui concerne l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis (EAU), les États-Unis reconsidéreraient soigneusement leur attitude libre. Au cours de la dernière décennie, et en grande partie sous une nouvelle direction politique, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont agi en tant qu’avant-garde contre-révolutionnaire du Moyen-Orient, s’efforçant d’inverser les acquis démocratiques. Ils ont cherché à renforcer les régimes autoritaires et les alliés dans toute la région – et ils ont réussi grâce à un mandat virtuel de l’administration Trump.

    L’administration Biden serait plus stricte, consciente des conséquences désastreuses de ce que l’aventurisme saoudo-émirati a produit au Yémen, en Libye et au Qatar. Les actions menées au sein de ces pays ont créé des perturbations tumultueuses avec peu de retours positifs. Bien sûr, les États-Unis resteraient en dehors de la politique intérieure saoudo-émiratie. Pourtant, il reconnaîtrait également que les deux sont différents. Alors que les dirigeants des Émirats arabes unis feraient face à des conséquences moins graves de ce recalibrage, les dirigeants saoudiens subiraient des coûts plus élevés en raison de leur domination sur un pays beaucoup plus grand avec des courants populaires plus diversifiés et un défi économique plus difficile. En outre, les dirigeants saoudiens auraient lésé de nombreux acteurs politiques internes, et ils pourraient essayer de réaffirmer leur pouvoir dans le système politique.

    Troisièmement, les États-Unis réorienteraient leur vision du printemps arabe – qui est un processus historique en cours plutôt qu’un résultat singulier. Ce processus est un processus de changement politique, et l’administration Biden reconnaîtrait que les luttes impliquées ont des racines structurelles. L’ancien contrat social qui a troqué l’obéissance politique contre la subsistance économique est révolu. Les sociétés jeunes exigent voix et dignité, et les régimes autoritaires ne peuvent pas le faire.

    Le rétablissement de la démocratie américaine dans le pays peut enhardir les mouvements démocratiques dans la région et même dans le monde. Le déclin de la démocratie dans le monde et son affaiblissement du dynamisme du printemps arabe sont souvent négligés. De plus, si de nouvelles révolutions éclatent, une administration Biden ne supposerait pas que les alliés autocratiques, comme le régime de Sissi en Égypte, resteront stables. Les attentes populaires en matière de réforme exigeraient une réponse plus raisonnée de la part des États-Unis.

    Dans le même ordre d’idées, des pays fracturés comme la Libye et la Syrie exigeraient le multilatéralisme plutôt que des interventions ponctuelles. Cela nécessiterait à terme de reconstruire les modes de coopération avec les alliés occidentaux et de réengager la Russie et la Chine à travers un cadre d’interactions positives et bien réglementées. Une administration Biden adopterait plus volontiers une telle approche.

    Enfin, l’administration Biden s’occuperait de la tragédie palestinienne. Ici, en raison de leur partialité passée, les États-Unis ont peu d’espace de manœuvre, et cela ne changera probablement pas. Il reviendrait sur «l’accord du siècle» et tenterait de ressusciter la solution à deux États. La possibilité d’une solution à deux États est effectivement morte, mais aucune des parties impliquées ne souhaite en reconnaître l’implication douloureuse. Ainsi, les États-Unis tenteraient de ramener Israël aux négociations. Cependant, il y aurait des gains limités: même si le gouvernement israélien arrête l’annexion de jure du territoire palestinien, il y aura toujours une annexion de facto par des activités de colonisation illégales. Beaucoup dépendrait également de la manière dont les Palestiniens se réorganiseraient, car l’Autorité palestinienne est bloquée dans un déclin moribond depuis des décennies.

    Pourtant, se retirer de l’accord du siècle aurait des implications régionales à considérer. Par exemple, les États arabes seraient moins incités à se précipiter dans des normalisations avec Israël sans que ce dernier ne traite des droits des Palestiniens. En ce sens, la politique étrangère de l’administration Biden au Moyen-Orient aurait des conséquences considérables, mais il faudrait un certain temps pour réparer les dommages causés par les politiques américaines actuelles.

    Dans le cas où Trump gagnerait, nous verrions plus de la même chose en termes de politique étrangère employée au cours des quatre dernières années. Les États-Unis poursuivraient leur approche militante vis-à-vis de l’Iran, et continueraient à donner aux dirigeants saoudiens et émiratis leur mandat pour la contre-révolution. Il resterait inactif alors que la région entre dans un nouveau cycle de répression autoritaire et de répression populaire. Ce refoulement consommerait la rue et serait plus fracturé que jamais, car il y aurait encore moins de répit au sein de la société civile. Les conflits régionaux en Libye, au Yémen et ailleurs s’aggraveraient en l’absence de coopération transatlantique et d’engagement multilatéral. Ces pays sombreraient plus profondément dans le conflit.

    Enfin, les États-Unis continueraient à négliger la dynamique israélo-palestinienne et à ne pas dépenser ne serait-ce qu’un minimum d’efforts pour relancer le processus de négociation. En conséquence, cela accélérerait la dissolution éventuelle de l’Autorité palestinienne et accélérerait également la reconnaissance formelle du fait que la solution à deux États est définitivement morte.

    Source : EPICENTER, 27 oct 2020

    Tags : Proche Orient, Moyen Orient, Noe Biden, Donald Trump, Hicham Alaoui, Palesine, Israel,

  • Le roi du Maroc boude la France depuis près de deux ans

    Depuis près de deux ans, la ville de Betz attend de renouer avec la « générosité » du roi du Maroc. En effet, c’est la première fois que les habitants de cette ville constatent une si longue absence de Mohammed VI. A cela s’ajoute que leurs enfants n’ont pas pu profiter des habituelles vacances au Maroc au frais du souverain chérifien. La population de cette localité de la banlieue parisienne se pose des questions sur cette absence remarquée de celui qui s’est fait remarquer par ses gestes d’amitié et affection envers elle.

    Pour ceux qui connaissent le Maroc, il n’y a qu’une seule explication à cela : Les relations entre Rabat et Paris ne sont pas au beau fixe. Les signes révélateurs de la tension traversée par les relations bilatérales entre les deux pays:

    -Au mois de septembre 2019, le roi du Maroc n’a pas daigné assister aux obsèques funéraires du président Jacques Chirac.

    -A deux reprises, Paris annule une visite annoncée du président Emmanuel Macron au Maroc.

    -La médiatisation par la France du procès du policiers français recruté par les services secrets marocains auxquels il transmettait une copie des fiches « S ».

    -Le refus de Rabat de rapatrier les dénommés MENA (mineurs non accompagnés) dont le sujet a fait beaucoup de bruit en France.

    -En plein confinement, le royaume n’a pas répondu à l’appel du président Emmanuel Macron visant à faciliter le rapatriement de ressortissants français coincés dans le royaume à cause de l’état d’urgence sanitaire.

    -L’empressement des autorités marocaines à condamner la publication des caricatures du prophète Mouhammad

    -La ligne éditoriale très critiques de certains médias proches du palais

    Selon des connaisseurs du dossier, Paris ne voit pas d’un bon oeil que le nom du Maroc soit mêlé aux attentats terroristes commis en Europe depuis 2004 et le rapport très critiques des experts de l’ONU sur le Sahel qui dénonce la collision des autorités marocaines avec les réseaux de trafic de drogues au Mali, et dans la région du Sahel en général. Non sans raison, le président français a cité le Maroc parmi les pays qui font le lit de l’islamisme radical et le conseil municipal de la ville d’Angers s’est opposée à la cession au Maroc d’une grande mosquée en construction.

    Tags : Maroc, France, Macron, Mohammed VI, Angers, Betz, Islam, caricatures,

  • Algérie : Les urnes ont tranché

    Affluence faible, sérénité et interrogations sur le sort du scrutin ; le référendum sur la révision constitutionnelle qui s’est déroulé hier en Algérie n’a pas été à la hauteur des attentes des autorités. Elles qui tablaient sur une participation massive, ont dû se contenter de 23,7% des votants sur un projet de révision constitutionnelle qui doit être la matrice de l’Algérie nouvelle.

    Selon les chifres publiés ce matin par les autorités algériennes, le oui l’a emporté à 66,8% lors du référendum sur la révision constitutionnelle proposée par le pouvoir en Algérie, mais le scrutin de dimanche a été marqué par une abstention record historique

    D’après l’Est Républicain, à Ain-Naadja, quartier populaire situé au Sud de la capitale qui comporte plus de 100 000 habitants, les bureaux de vote ont ouvert normalement. Mais les électeurs n’étaient pas au rendez-vous. Ceux qui sont venus l’ont fait par « conviction ». C’est le cas de cette dame rencontrée au centre de vote Djebar-Messaoud. « Nous votons sur l’amendement constitutionnel pour assurer la stabilité et une vie décente mais aussi en vue de mettre en échec les plans malveillants ciblant l’Algérie », dira-t-elle. L’affirmation a été entendue de la bouche de nombreux citoyens, souvent des personnes âgées, rencontrées autour des bureaux de vote.

    Selon ce média algérien, dans d’autres régions du pays, le taux de participation diffère d’une wilaya à l’autre. Mais les chiffres fournis durant toute la journée par le président de l’autorité nationale indépendante des élections, ANIE, Mohamed Charfi, indiquent carrément une tendance baissière par rapport à la dernière élection présidentielle. A 14 heures, le responsable annonçait un taux de participation national de 13,03%, en baisse sensible par rapport aux présidentielles de décembre (20%). Sans aucune explication. Comme pour le scrutin présidentiel, les wilayas de Kabylie ont largement boycotté le scrutin référendaire.

    La même source rapporte qu’à Béjaïa, l’opération électorale s’est clôturée à 11h15 après la fermeture des 4 seuls bureaux ouverts dans la wilaya. Le taux de participation était de 0,28% dans cette wilaya, tandis que les quelques rares bureaux ouverts à Tizi-Ouzou n’ont permis d’enregistrer qu’un taux de 0,06% de voix exprimées. La situation n’est guère meilleure à Bouira, Sétif, Bordj-Bou Arreridj et Boumerdès. Malgré cela, en dehors des rares escarmouches enregistrées dans certaines communes de Bouira, la situation était globalement calme même dans ces régions où les autorités auraient apparemment préféré annuler le scrutin que de provoquer des troubles.

    Malgré ce taux d’abstention record, l’issue du scrutin n’est pas remise en cause légalement. La conjoncture sanitaire y est sans doute pour quelque chosem conclue-t-il.

    Tags : Algérie, Constitution, référendum, vote, résultats, abstention, taux e participation,

  • Jeune Afrique vole au secours du Maroc

    Jeune Arique a été appelé à la rescousse par sun de ses principaux sponsors dans le but de détourner la vérité sur la fermeture de la brèche illégale d’El Guergarate.

    Selon le journal de la françafrique, l’ouverture des prétendus consulats africains serait la principale raison qui aurait poussé le Front Polisario à cette décision. Jeune Afrique tente d’accorder de l’importance à un fait qui n’en a pas puisqu’il s’agit d’un non événement dont le geste est dirigé vers une opinion publique marocaine de plus en plus critique envers la gestion du dossier du Sahara Occidental par les autorités maocaines.

    Selon Jeune Afrique, l’ouverture de ces consulats est une reconnaissance de fait de la souveraineté marocaine. Pourquoi alors le Maroc n’a pas réussi à convaincre son principal allié dans le conflit du Sahara Occidental, la France, à faire de même? Pour la simple raison qu’elle ne reconnaît pas cette prétendue souveraineté, malgré qu’elle porte le Maroc à bout des bras au Conseil de Sécurité des Nations Unies. D’ailleurs, il y a lieu de se demander si l’ouverture de ces consulats apportera un changement quelconque à la situation au Sahara Occidental puisqu’elle est limitée à sa nature de produit destiné à la consommation locale.

    Le magazine des dictateurs africains prétend que « les autorités marocaines ont réagi avec fermeté à cette nouvelle provocation du Front Polisario ». Où est cette fermeté? Le passage est toujours fermé. Malgré le soutien de la France, le Conseil de Sécurité n’en a pipé mot. Incapable de réagir, le Maroc a supplié l’intervention du chef de l’ONU, Antonio Guterres et de la MINURSO. En vain! Dans le même but, son ambassadeur à Nouakchott a sollicité une audience avec le ministre mauritanien des affaires étrangères.

    Le desespoir du Makhzen l’a poussé à faire appel aussi à l’ambassadeur des Etats-Unis à Rabat pour lui venir en aide. Voilà la réalité des faits que Jeune Afrique tente de dissimuler au public marocain.

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, ONU, MINURSO, El Guergarate,



  • Algérie : Un choix fondateur

    Les Algériens ont voté hier dimanche pour le projet d’amendement qui leur a été soumis. Un vote qui a cette particularité de se dérouler un 1er novembre, une date marquante dans l’histoire du pays, puisqu’elle fut le début d’un long processus révolutionnaire qui allait être couronné sept ans et demi plus tard par l’indépendance de l’Algérie arrachée par les armes face à un colonisateur barbare qui a pillé les richesses du pays, tué des millions d’Algériens et instauré la torture comme un mode de gouvernance d’Etat.

    Hier, c’était un autre rendez- vous avec l’histoire pour bâtir une nouvelle Algérie, juste, tolérante et démocratique. Un vote qui n’est que le premier pas vers un autre processus historique qui doit mener l’Algérie et les Algériens vers un nouveau mode de gestion à tous les niveaux : politique, économique et social.

    Les Algériens qui se sont déplacés aux bureaux de vote et qui ont exprimé leur voix n’ont fait qu’exercer leur droit électoral et surtout exprimer leur volonté de continuer le changement qu’ils ont entrepris depuis le 22 février 2019. Un changement qui ne pouvait rester sans concrétisation au risque de se voir tomber dans toutes sortes de manipulations et d’errement et d’errance politiques aux lendemains incertains et surtout dangereux pour la stabilité du pays.

    Il faut dire que les défis qui attendent le pays sont immenses et multiples. L’Algérie doit reprendre sa marche en avant en ces temps de crises multiples et graves que ce soit sur le plan économique ou sanitaire. Et même si cette nouvelle constitution n’est pas une fin en soi, elle est déjà le début de quelque chose de nouveau, d’une ère fondatrice d’un tout autre modèle politique qui signe la rupture totale avec le culte de la personnalité et la présidence à vie. Désormais, l’alternance au pouvoir sera au centre du changement tant réclamé par le peuple. Et ce sera au peuple de trancher dans toutes les grandes décisions qui concernent l’avenir du pays.

    Ce référendum populaire est déjà un premier pas dans ce sens. Un sens qui remet le peuple au centre du jeu politique et qui en fait le seul décideur dans cette nouvelle Algérie qui se dessine et qui voudrait prendre cette fois le bon départ, celui où toutes les forces vives du pays convergent vers le même objectif, servir et se sacrifier pour que vive et prospère l’Algérie.
    Par Abdelmadjid Blidi

    Ouest Tribune, 2 nov 2020

    Tags : Algérie, constitution, référendum,