Mois : janvier 2012
-
El Othmani : « Ma visite à Alger est le début d’une série de consultations et d’un processus de coopération »
Alger (APS) – Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération du royaume du Maroc, Saâd-Eddine El Othmani, a indiqué que la visite qu’il a entamée lundi à Alger constitue le début d’une série de consultations et d’un processus de coopération entre les deux pays.Dans une déclaration à la presse à son arrivée à l’aéroport international « Houari Boumediene », M. El Othmani a souligné la nécessité de redynamiser cette coopération bilatérale par des programmes de travail sur le terrain ».Le Chef de la diplomatie marocaine a également indiqué que sa visite s’inscrivait dans le cadre d’ »une volonté commune » des deux pays de tirer avantage de la conjoncture régionale et internationale pour « insuffler une nouvelle dynamique aux relations bilatérales et les approfondir davantage ».Il a également plaidé en faveur d’un élargissement des relations algéro-marocaines à « de nouveaux secteurs » soulignant l’importance de la concertation dans la relance de l’Union du Maghreb arabe (UMA) et de ses institutions. « Nous sommes aujourd’hui conscients que des mutations sont survenues dans certains pays de l’UMA, des changements à même de nous offrir une meilleure opportunité d’aplanir les entraves à la complémentarité et à l’intégration maghrébine ».Cette visite de deux jours de M. El Othmani intervient à l’invitation de son homologue algérien Mourad Medelci dans le cadre du raffermissement des relations de fraternité et de coopération entre les deux peuples frères. -
C’est en réalité la question de la réouverture des frontières entre les deux pays qui fait courir beaucoup de monde.
Algérie-Maroc, le match continuepar Y. Allilat
La visite de 48 heures qu’effectue à Alger, à partir de ce lundi, le tout nouveau chef de la diplomatie marocaine, Saad Eddine El-Othmani, est de celle qui présage beaucoup de choses. A commencer par la poursuite de la dynamique de réchauffement politique entre les deux pays. Car il faut préciser que, sur le plan sportif et des affaires, tout va bien. Et, sur ce chapitre, M. El-Othmani, l’ex-Secrétaire général du PJD, le parti islamiste qui avait remporté les législatives anticipées au Maroc au mois de novembre dernier, devrait sur ce chapitre remettre les pieds sur le sillon déjà tracé par le précédent gouvernement, alors dirigé par l’Istiqlalien Abbas El Fassi. En fait, tout le monde va suivre avec une pointe de curiosité cette première sortie officielle du ministre des Affaires étrangères du Maroc à l’étranger. Où? En Algérie, une destination longtemps boudée par un chef de la diplomatie marocaine. Mais pas par les autres ministres, puisque l’année 2011 a été riche en événements de rapprochement entre les deux pays, avec des visites alternées de ministres marocains et algériens dans l’un des deux pays. Des visites qui, pour le commun des Algériens ou des Marocains, sont loin de leurs préoccupations quotidiennes. Car si au plan politique, c’est-à-dire au sommet des deux Etats, on veut rester sobre et discuter des problèmes à mettre à plat pour relancer la machine des relations bilatérales, au plan social, il s’agit pour les millions d’Algériens et de Marocains de savoir si cette visite scellera les retrouvailles entre les deux pays frères. Ou si elle ne constitue qu’une tentative parmi tant d’autres pour renouer le fil entre les deux Etats qui, au demeurant, se connaissent sur le bout des doigts.Loin, très loin des sentiers de la politique et de la diplomatie, il y a le monde du bizness qui attend que quelque chose de positif se dégage de ces ’conciliabules » politiques. Du côté d’Oujda ou de Berkane, on espère certes que les clignotants passent au vert, ne serait-ce que pour aller voir la famille de l’autre côté sans payer le ’taxi clandestin » à travers les collines de Bab El Assa ni un prix élevé du billet d’avion. Est-ce possible ? C’est en réalité la question de la réouverture des frontières entre les deux pays qui fait courir beaucoup de monde. Pour autant, les divergences politiques entre les deux pays, même si elles ne sont pas insurmontables, restent entières et ont rapport avec un seul principal élément, que tout le monde connaît, même le gardien du stade du dernier club de la division amateur du championnat de football marocain. Mais, loin de ces tracas qui hantent les nuits des politiciens, les Beznassas des deux côtés ont depuis longtemps érigé des règles de conduite pour fructifier leurs affaires et autres trafics en tous genres. Ce sont ces milieux d’affaires particuliers qui, aux dernières nouvelles, militent pour le statu quo dans les relations entre les deux pays. La réouverture des frontières signera, pour eux, la fin de la contrebande et de l’état de grâce de leurs affaires.
Le Quotidien d’Oran, 23/1/2012
-
EL Othmani à Alger : Rachida Dati s’enflamme, la presse prudente
Le chef de la diplomatie marocaine à Alger: Rachida Dati s’enflamme, la presse prudentepar Salem Ferdi
Le tour cycliste du Maroc ne passera pas par Maghnia. Ce n’est pas vraiment une surprise et cela ne va pas créer une tension lors de la visite, à partir d’aujourd’hui, du ministre marocain des Affaires étrangères. Rachida Dati est enthousiaste, la presse marocaine attend de voir En raison du caractère spécial et compliqué des relations bilatérales, la visite d’un ministre marocain des Affaires étrangères à Alger est toujours un évènement. Celle qu’effectue le nouveau chef de la diplomatie marocaine, Saâd-Eddine El-Othmani, l’est encore davantage en raison d’un contexte politique où les dirigeants des différents pays de la région insistent sur l’impératif d’une relance de la construction maghrébine. Même Mme Rachida Dati, ex-ministre de la Justice française et eurodéputée issue d’une famille maroco-algérienne, a apporté sa contribution en affirmant que le déplacement de M. Saâd-Eddine El-Othmani en Algérie était «historique» et va contribuer à un «nouvel ordre maghrébin». Pour elle, «l’Algérie et le Maroc unis, c’est un Maghreb fort et dynamique». Pour elle, ce type de rencontre est une «nécessité, pour ne pas dire une urgence, afin d’apaiser, de donner un exemple et un espoir dans un contexte de mutations des pays arabes». Même si à Alger, on a également émis des signaux d’une volonté d’aller de l’avant, la part «marocaine» de Mme Dati l’emporte très largement sur sa partie algérienne. Et on peut ajouter, sans intention de froisser, que sa part française va dans le même sens que sa partie marocaine. Vue du Maroc, ou, pour être précis, à travers la presse marocaine, la visite d’El-Othmani est abondamment annoncée mais très peu commentée.
LES FRONTIERES OUVERTES SOUS LE GOUVERNEMENT BENKIRANE
Comme s’il s’agissait de ne préjuger de rien et d’attendre les signaux qui viendront d’Alger pour se risquer à des commentaires sur le fond. Ou alors, on le fait avec beaucoup de prudence. Le site marocain Yabiladi voit dans cette visite un «signal fort» d’une volonté des nouveaux dirigeants marocains de «normaliser» les relations avec l’Algérie. Il se demande si l’ouverture des frontières va se faire avec le gouvernement Benkirane ? Le gouvernement Benkirane va «réussir à faire bouger les lignes» sachant que le terrain a été défriché par la multiplication de rencontres ministérielles qui ont donné lieu à des accords dans les domaines de l’agriculture et l’énergie. Il relève aussi que Mohamed VI et Abdelaziz Bouteflika n’ont pas «cessé pour leur part de s’envoyer des signaux positifs». Il reste «l’inconnue de l’équation», la question du Sahara. «De quel génie El-Othmani pourra-t-il faire preuve pour obtenir des concessions de la part de ses voisins ?». Finalement, c’est dans la très officielle agence MAP que l’on découvre, en filigrane, des appréciations sur la visite. Un «geste positif donnant à penser qu’un nouveau climat commence à s’installer dans les relations entre le Maroc et l’Algérie ».
DES SUJETS QUI FACHENT
Le contexte régional, l’arrivée d’un nouveau gouvernement au Maroc, les déclarations de Medelci sur le fait que la fermeture de la frontière entre l’Algérie et le Maroc «n’a jamais été une décision irréversible» et que «la réconciliation avec le Maroc sera consolidée avec le nouveau gouvernement marocain» sont cités. Map affirme que la « disponibilité au dialogue et la normalisation complète des relations sont indubitablement des constantes dans la politique étrangère du Royaume envers l’Algérie, partant de son souci de créer les conditions nécessaires pour la relance de l’Union du Maghreb arabe, rêve tant caressé depuis des lustres par les cinq peuples maghrébins, et que la fermeture des frontières entre les deux pays, par décision unilatérale algérienne en 1994, n’a fait que contrarier». Bien sûr, on oublie de donner l’ensemble du contexte L’essentiel est que l’on sait que le gouvernement marocain de Benkirane veut renforcer «la dynamique positive qu’ont connue dernièrement les relations maroco-algériennes en vue de favoriser la normalisation totale des relations avec l’Algérie, y compris l’ouverture des frontières terrestres ». On évite les sujets qui fâchent ? Pas à l’USFP Son organe «Libération» donne une grande importance à une proposition de résolution déposée par une sénatrice belge d’origine marocaine au sujet de la «question des Marocains expulsés d’Algérie en 1975». Il se fait apostropher par un internaute algérien qui rappelle les Algériens expropriés par le Makhzen en 1973 .
Le Quotidien d’Oran, 23/1/2012
-
Le ministre marocain des Affaires étrangères à Alger pour resserrer les liens
ALGER, 23 jan 2012 (AFP) Le nouveau chef de la diplomatie marocaine Saad Eddine Othmani est arrivé lundi à Alger pour sa première visite à l’étranger afin de resserrer les liens des deux voisins et dynamiser l’Union du Maghreb arabe, plombée pendant des années par la tension entre Alger et Rabat.M. Othmani, un des principaux dirigeants du parti islamiste modéré Justice et Développement (PJD) vainqueur des législatives de l’an dernier, a été accueilli à sa descente d’avion à l’aéroport Houari Boumediene, en provenance du Caire, par son homologue Mourad Medelci.
Les deux hommes se trouvaient la veille dans la capitale égyptienne pour une réunion de la Ligue arabe sur la Syrie.
Il s’agit de la première visite d’un ministre marocain des Affaires étrangères en Algérie depuis celle, en juin 2003, de Mohamed Bénaïssa qui devait justement relancer le « processus d’édification » du Maghreb.
M. Othmani, qui sera reçu mardi matin par le président Abdelaziz Bouteflika, restera deux jours à Alger à l’invitation de M. Medelci.
Cette visite s’inscrit dans un contexte marqué par des changements dans le monde arabe et une « volonté partagée » de tous les pays de la région de « dynamiser » l’Union du Maghreb arabe (UMA), selon les propos dimanche du ministre délégué algérien aux Affaires maghrébines et Africaines Abdelkader Messahel.
L’UMA, actuellement présidée par la Libye, comprend cinq pays: outre l’Algérie, le Maroc et la Libye, y figurent la Tunisie et la Mauritanie.
Son inaction provient surtout de l’opposition de Rabat et d’Alger sur le Sahara Occidental, ex-colonie espagnole occupée en 1975 par Rabat comme partie intégrante de son territoire alors qu’Alger soutient le front indépendantiste sahraoui Polisario. L’Onu mène actuellement des négociations pour parvenir à une solution internationale.
Pour l’heure, les points de vue restent opposés: Rabat offre une large autonomie au Sahara Occidental sous sa souveraineté. Le Polisario veut un référendum international pour permettre aux Sahraouis de choisir la meilleure solution.
Abdelaziz Rahabi, ancien ministre algérien de la Communication et diplomate, rappelle toutefois lundi au quotidien El-Watan, que le problème du Sahara est antérieur à l’UMA, créée en 1989. Selon lui, les Marocains jugent aujourd’hui comme ils l’avaient fait initialement que de « bonnes relations » avec Alger « pourrraient servir de catalyseur au règlement de la question sahraouie ».
Le porte-parole algérien du ministère des Affaires étrangères Amar Belani a rappelé dimanche que cette visite devait « raffermir les liens de fraternité et de coopération » des deux pays, en écho aux propos identiques du ministère marocain des Affaires étrangères vendredi dernier annonçant cette visite.
Les dossiers en suspens portent notamment sur « l’indemnisation des Algériens chassés du Maroc » après la fermeture de la frontière terrestre en 1994 décidée par Alger en réponse à l’instauration par Rabat de visas pour les Algériens. Le Maroc avait mis en cause le renseignement militaire algérien dans un attentat meurtrier à Marrakech.
A l’appel marocain à une réouverture de cette frontière, M. Messahel a rétorqué dimanche qu’elle s’ouvrira « bien un jour ».
Il y a aussi, comme le relève lundi l’éditorial du journal francophone Liberté, « le trafic de drogue qui empoisonne aujourd’hui la société algérienne », avec plus de 300.000 consommateurs, en référence aux tonnes de cannabis marocain régulièrement saisies en Algérie.
Enfin, la dégradation de la sécurité dans le Sahel depuis le début le conflit libyen inquiète Alger qui veut d’ailleurs en parler à la prochaine réunion de l’UMA, « probablement » le 17 février à Rabat, selon M. Messahel.
Le roi Mohammed VI avait expressément appelé à un réchauffement des liens avec Alger et à une ouverture de la frontière dans son discours du trône du 30 juillet.
Le Temps (Suisse), 23/1/2012
-
Maroc-Algérie : Sans les frontières ni le Sahara
Le ministre marocain des Affaires étrangères à Alger: Sans les frontières ni le Saharapar Ghania Oukazi
Les deux ministres algérien et marocain des Affaires étrangères éviteront d’évoquer la question des frontières et le confit du Sahara Occidental pour certainement ne pas étouffer la volonté des deux pays de redynamiser leurs relations dans un contexte géopolitique profondément bouleversé. Le ministre des Affaires étrangères marocain effectue à partir d’aujourd’hui une visite officielle de deux jours sur «invitation de son homologue algérien Mourad Medelci» dit le communiqué du ministère des Affaires étrangères. Il semble que Medelci et Saâd-Eddine Othmani n’iront pas jusqu’à évoquer l’ouverture des frontières entre les deux pays. Il faut croire que le terrain de rencontres officielles de haut niveau entre l’Algérie et le Maroc a été balisé d’un commun accord depuis plus de deux ans de sorte à ce que les discussions ne dérapent pas sur les sujets qui non seulement fâchent mais sclérosent depuis de longues années leurs relations.Le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines en a d’ailleurs fait allusion en tenant à clarifier la contextualité de la visite du MAE marocain aujourd’hui à Alger. «Cette visite s’inscrit dans la logique des choses», a déclaré en effet Abdelkader Messahel lors d’une rencontre qu’il a organisée hier avec la presse au siège de son ministère expressément pour préciser l’ordre du jour de la réunion des pays du champ prévue les 23 et 24 de ce mois à Nouakchott et celui du sommet de l’Union africaine qui se tiendra les 30 et 31 janvier à Addis-Abeba.
«La logique des choses» est, selon le ministre délégué, «une série de visites officielles qui a été effectuée sur ces deux dernières années dans le cadre du renforcement des relations bilatérales entre l’Algérie et le Maroc». Messahel note à cet effet qu’ «il y a une volonté politique partagée pour redynamiser les relations bilatérales ainsi que l’Union du Maghreb arabe (UMA)». Volonté qui s’inscrit en toute évidence dans un contexte régional marqué par les violentes insurrections qui ont éclaté en Tunisie et en Libye, et qui placent les pays de la région face à leurs propres contradictions. Il est évident que la redynamisation de l’Union du Maghreb arabe (UMA) soudainement sortie des tiroirs de ses pays membres est loin d’être une coquetterie politique. Elle leur est imposée aujourd’hui comme une exigence géostratégique imparable.
«L’OUVERTURE DES FRONTIERES N’EST PAS A L’ORDRE DU JOUR»
C’est ce qui a poussé le ministre délégué à affirmer sans ambages que «l’ouverture des frontières ne figure pas à l’ordre du jour de nos réunions». Il est convaincu que «si on en reste aux frontières, on n’apportera aucune plus-value ni à l’Algérie ni au Maroc». La question du Sahara Occidental ne sera pas non plus abordée puisqu’elle revêt les mêmes aspects polémiques que celle de l’ouverture des frontières. «Le règlement du conflit sahraoui relève des Nations unies, d’ailleurs le Maroc et le Front Polisario poursuivront leurs négociations en février prochain aux Etats-Unis», tient-il à rappeler. Messahel est ainsi persuadé que «l’essentiel pour nos deux pays, est qu’on ne va pas poser les problèmes d’une manière brutale, nous avons convenu d’adopter une démarche pragmatique».
Le pragmatisme dont parle le responsable algérien a été exprimé à travers les visites sectorielles des ministres qui ont été effectuées de part et d’autre. Il indique ainsi qu’une dizaine de secteurs se voient régulièrement pour échanger leurs expériences respectives, coopérer ensemble et signer des contrats. Les deux pays ont eu à en faire une première évaluation lors du forum économique arabo-marocain qui a été organisé à Rabat le 16 novembre 2011. «Nous avons fait l’évaluation de cette coopération sectorielle et sommes convenus de l’élargir à d’autres secteurs comme la justice et l’environnement», dit-il.
1,2 MILLIARD DE DOLLARS D’ECHANGES AVEC DES FRONTIERES FERMEES
Les deux ministres discuteront sur «les vrais dossiers qui élargissent et renforcent les relations entre les deux pays», réaffirme-t-il. Il estime qu’on «est confronté aux mêmes problèmes comme la sécheresse, l’eau, la désertification, pas seulement avec le Maroc mais avec tous les pays de la région». C’est d’ailleurs au profit de cette démarche de coopération que les pays membres de l’UMA ont, sur proposition de l’Algérie, créé en 2003 le comité économique maghrébin (CEM). A cette époque, l’Algérie avait présenté une étude, une sorte de feuille de route, dans laquelle elle recommandait à ses partenaires de l’UMA de réfléchir sur une coopération de réalisation de grands projets structurants pour la région. Etude qui, pensent ses concepteurs, est toujours d’actualité.
Le Maroc est le premier partenaire commercial de l’Algérie dans le Maghreb pour des échanges «officiels» qui n’ont même pas atteint le milliard. En effet, les échanges algéro-marocains sont de l’ordre de 700 millions de dollars avec une balance commerciale marquée par les exportations du gaz algérien suivies bien loin par des produits industriels et agricoles de part et d’autre. Ceci pour ce qui est du commerce légal. Mais avec des frontières fermées, les deux pays se sont toujours échangé des quantités importantes de produits divers qui vont des tenues traditionnelles, aux matériaux de construction en passant surtout par les carburants et autres produits alimentaires de première nécessité. Ces échanges informels sont évalués à 1,2 milliard de dollars depuis que les frontières ont été fermées. Ceci en comptant avec les virées touristiques notamment d’Algériens vers le Maroc. L’on compte près de 45 000 travailleurs marocains en Algérie dont 500 détiennent un registre de commerce.
Le Quotidien d’Oran, 23/1/2012
-
Algérie-Maroc : Y aura-t-il une entente concernant le Sahara Occidental?
Le ministre des Affaires étrangères marocain aujourd’hui à Alger : UMA et coopération bilatérale à l’ordre du jourLe nouveau ministre marocain des Affaires étrangères et de la coopération, Saâd-Eddine El Othmani est attendu aujourd’hui à Alger pour une première visite officielle de deux jours en Algérie où il s’entretiendra dans un premier temps avec son homologue algérien Mourad Medelci, puis sera également reçu par le chef de l’Etat Abdelaziz Bouteflika.
Il s’agit de la première visite officielle à l’étranger du nouveau chef de la diplomatie marocaine qui témoigne du dégel des relations entre les deux pays, malgré la persistance de nombreux contentieux. Un dégel qui, rappelons-le, a été engagé depuis quelques mois avec l’ancien gouvernement marocain à travers un raffermissement des relations économiques.
A ce titre, dans un communiqué à l’APS, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Amar Belani, dira que cette visite s’inscrit dans le cadre de « la dynamique constructive engagée par les deux pays à travers l’échange de visites ministérielles et la concertation pour raffermir les liens de fraternité et de coopération qui unissent les deux peuples frères ».
De ce fait, à l’ordre du jour de cette visite, outre les relations bilatérales, les deux ministres devront essentiellement examiner d’une part, » les voies et moyens susceptibles de relancer l’Union du Maghreb arabe en réorganisant certaines de ses institutions et de ses mécanismes en vue d’une meilleure efficacité », d’autre part « les questions régionales et internationales d’intérêt commun », a ajouté le porte-parole de la diplomatie algérienne. Il y va sans dire que la question de l’ouverture des frontières figurera également dans les discussions algéro marocaines.
Ainsi, s’agissant de la reconstruction de l’UMA, en panne depuis plusieurs années, l’Algérie a d’ores et déjà, à plusieurs reprises, affiché son souhait pour cet objectif. Mourad Medelci avait récemment déclaré que « l’UMA est une construction qui passe par une nouvelle organisation de nos rapports, une modification de certaines de nos institutions et la création de nouveaux mécanismes (…) Les changements survenus en Tunisie, en Libye et dans d’autres pays arabes ne peuvent que nous encourager à accélérer la construction de l’UMA ». Pour sa part, l’ancien chef de la diplomatie marocaine, Taeib Fassi Fihri avait indiqué que cette reconstruction se ferait à travers un » nouvel ordre maghrébin qui tienne compte des changements intervenus en Libye et en Tunisie, mais aussi des aspirations des cinq peuples à un meilleur cadre de vie dans un Maghreb intégré « . Concernant le sujet épineux de la réouverture des frontières terrestres qui semble beaucoup plus préoccuper le Maroc, rappelons que, Mourad Medelci avait souligné que « la fermeture de la frontière entre l’Algérie et le Maroc n’a jamais été une décision définitive. Le rapprochement qui s’opère avec le Maroc va se consolider avec le nouveau gouvernement marocain. Toutes ces évolutions travaillent à une normalisation à terme des relations entre Alger et Rabat ». Doit-on s’attendre à ce que cette question soit résolue ?
Ce choix de l’Algérie comme première destination étrangère du ministre marocain, est-ce un prémice d’une embellie, une nouvelle page dans les relations entre les deux pays voisins ? Les échanges économiques mis en route que dernièrement, sont-ils un gage de bonne volonté pour de meilleures relations bilatérales ? Les frontières, seront-elles ouvertes à l’issue de cette visite ? Sachant que Rabat en fait sa fixation première, quelle sera la réponse d’Alger? Et la question du Sahara Occidental considérée l’un des dossiers majeurs figurant dans le contentieux entre Alger et Rabat, les deux parties, trouveront-elles un terrain d’entente sur la question de l’autodétermination du peuple sahraoui ? Arriveront-elles à surmonter cet obstacle politique ? Ce sont là tant de questions qui reviennent dans l’opinion publique surtout que tout le monde sait que les relations algéro- marocaines restent des plus complexes bien que les intérêts communs ne manquent point.
Par Maissa B.
Les Débats, 23/1/2012
-
Libye : Sous-traitance pour mater les milices?
SOUS-TRAITANCESpar M. Saadoune
Sans surprise, l’après-Kadhafi en Libye est marqué par une incapacité du nouveau pouvoir à reprendre les choses en main. Le système étatique a été détruit déconstruit brutalement et sa reconstruction est loin d’être une simple sinécure.
Au début de l’année, le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, désignait les milices comme étant la source du mal qui pourrait plonger le pays dans la guerre civile. Aujourd’hui, le même CNT, après que son siège eut été saccagé à Benghazi, désigne des éléments de l’ancien régime. Trop facile. D’autant que ceux qui manifestent contre le CNT demandent qu’il soit épuré des «opportunistes» de l’ancien régime. Quand on sait que hormis les islamistes, la plupart des dirigeants du CNT ont exercé des responsabilités sous le régime de Kadhafi, la revendication n’a rien d’anodin.
Le vice-président et porte-parole du CNT, Abdelhafidh Ghoga, qualifié «d’opportuniste» par les manifestants, a d’ailleurs annoncé hier sa démission dans «l’intérêt de la nation». «Nous ne savons pas vraiment ce qui se passe», a-t-il dit. A ce niveau de responsabilité, un tel propos renseigne clairement sur l’ampleur de la confusion qui règne en Libye. Qui n’a rien de surprenant. La destruction du régime ne pouvait en aucun cas faire émerger automatiquement un nouvel ordre. «L’unité» contre le régime de Kadhafi laisse désormais le champ libre à une course pour le pouvoir où chacun se prévaut d’une «légitimité révolutionnaire».
Le plus urgent pour chacune des multiples milices, en attendant la redistribution des cartes, est de ne pas désarmer. Pour eux, les armes sont un argument de négociation dans les tractations en cours. Face aux velléités, sans lendemain, de les désarmer, ces milices ont invoqué le besoin de «protéger» la révolution contre les partisans de Kadhafi. Discours pompeux et sans crédibilité. Mais le CNT n’a guère les moyens à moins de solliciter les Occidentaux de les mettre au pas.
La difficulté est que ces milices sont adossées à des intérêts locaux qui scrutent avec attention la manière dont le pouvoir nouveau s’installe et qui entendent ne pas se laisser distancer par d’autres. Les affrontements entre milices ne sont pas rares. Et le risque d’une guerre civile ne relève plus de la simple hypothèse, la faiblesse politique du CNT ne lui permettant pas de reprendre les choses en main et de rétablir le monopole des armes.
On a beaucoup parlé des armes et des arsenaux libyens qui seraient tombés entre de «mauvaises mains» au Sahel. On oublie que les Libyens se sont servis en premier. Au début de l’année, Moustapha Abdeldjalil estimait qu’il n’y avait pas beaucoup de choix : soit réagir avec «fermeté» contre l’action des milices, «soit c’est la sécession et la guerre civile». Il est évident que s’il avait le moyen de mater les milices, le président du CNT n’aurait pas fait des discours mais aurait agi.
Son message semblait s’adresser, une fois de plus, aux «forces amies» qui sont intervenues pour détruire le régime de Kadhafi. Des « experts» occidentaux sont déjà en place de manière informelle. Or, pour dissuader les milices et les contraindre à rentrer dans le rang, en intégrant l’armée ou la police, il faut une présence plus formelle. Un déploiement de forces. Les Occidentaux, qui essaient de ne pas paraître trop visibles, ne sont pas enclins à y aller. Des pays du Golfe pourraient, «au nom de la sauvegarde de la révolution !», s’occuper de la «sous-traitance» pour assurer le rétablissement de «l’ordre» nécessaire à une remise en exploitation des ressources énergétiques libyennes.
Le Quotidien d’Oran, 23/1/2012
-
La diplomatie des petits pas
C’est aujourd’hui qu’arrivera à Alger le ministre marocain des Affaires étrangères pour une visite de deux jours.Un délai suffisant pour procéder, avec les responsables algériens, à une véritable mise à plat d’une relation qui, constate-t-on des deux côtés de la frontière, n’est pas ce qu’elle aurait dû être.Dans un communiqué annonçant la visite de Saad Eddine El Othmani, les autorités algériennes indiquent que celle-ci s’inscrit dans le cadre de «la dynamique constructive engagée par les deux pays à travers l’échange de visites ministérielles et la concertation pour raffermir les liens de fraternité et de coopération qui unissent les deux peuples frères». La discussion, apprend-on de même source, sera étendue à l’UMA (Union du Maghreb arabe), à l’arrêt depuis 1994, date de son dernier sommet, et condamnée à l’inaction en raison de l’opposition du Maroc qui s’est manifestée en décembre 1995 à la suite d’un vote de l’ONU relatif à la question du Sahara occidental.
Rabat a, en effet, demandé la suspension du fonctionnement de l’UMA, reprochant à l’Algérie son soutien au peuple du Sahara occidental. On croyait pourtant que cet ensemble régional était suffisamment prémuni contre ce type d’action, puisque sa création, en 1988 à Alger, a été décidée au lendemain dès lors que cette question faisait l’objet de négociations entre les deux parties (Maroc et Front Polisario), et surtout depuis que le défunt souverain marocain Hassan II avait solennellement affirmé en 1987, que ce conflit n’a jamais opposé son pays à l’Algérie. C’est cette mise au point qui a permis un nouveau départ dans les relations bilatérales, élément essentiel dans la construction maghrébine.
De la même manière, l’Algérie a toujours fait en sorte que les relations bilatérales ne soient en aucun cas liées notamment au dossier sahraoui, Alger soulignant que celui-ci est pris en charge par les Nations unies.
A l’inverse, bien entendu, des autorités marocaines qui avaient accusé les services algériens d’avoir commis l’attentat de Marrakech en juillet 1994, et immédiatement imposé aux ressortissants algériens, le visa d’entrée sur son territoire. Alger a répliqué en appliquant la réciprocité et surtout fermé sa frontière terrestre avec le Maroc. Même les plus proches alliés des Marocains avaient détruit cette accusation.Dans le même temps, les Algériens avaient demandé un examen approfondi des relations bilatérales, ce qui n’a pas été rejeté par les Marocains qui avaient même accepté la mise sur pied de cinq commissions mixtes. Sauf que celles-ci n’ont jamais accompli leur mission, les Marocains refusant d’y siéger. Ces derniers ont même souligné qu’il n’y aura pas de normalisation des relations bilatérales tant que ne sera pas réglée la question du Sahara occidental. Et là, la précision s’impose puisque les Marocains ne voulaient rien d’autre que la reconnaissance de leur occupation du Sahara occidental, celle-ci se faisant, selon eux, dans le cadre de «leur souveraineté nationale».
Cette même question a été déplacée au sein de l’UMA, pressée elle aussi de reconnaître ce fait colonial. La réplique a été cinglante, puisque, faisait-on valoir, aucune menace ne pèse sur les frontières internationalement reconnues du Maroc, ce qui les distingue clairement de celles que lui-même veut s’octroyer. Encore, devrait-on dire, l’UMA a surtout subi le poids du choix de ses membres, l’Algérie en ce qui la concerne, en faisant un choix stratégique, quant au Maroc qui a décidé de rejoindre le CCG (Conseil de coopération du Golfe) a pendant longtemps privilégié sa relation avec l’Europe. Beaucoup a été dit sur cette frontière terrestre encore fermée, les Algériens refusant d’en faire une question à part. Qu’en sera-t-il alors d’une relation qui, sans être en aucun cas complexe, nécessite une approche globale ?
Mohammed Larbi
El Watan, 23/1/2012
-
Egypte : un clash entre l’armée et les islamistes en gestation
par Kharroubi HabibLa révolution de la place «Tahrir», qui a mis fin à la dictature de Moubarak et de son clan, ne doit rien aux islamistes. Pourtant, ce sont eux qui en sont les grands bénéficiaires au terme du scrutin des élections législatives organisées dans le pays après la démission de l’ex-raïs et la chute de son régime. Le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), issu des Frères musulmans, et celui d’El-Nour, des fondamentalistes salafistes, ont en effet trusté les deux tiers des 498 sièges de la nouvelle Assemblée populaire égyptienne.Le courant islamiste en Egypte a fait nettement plus fort électoralement que ceux de Tunisie ou du Maroc et va donc théoriquement être en posture d’imprimer sa marque dans la nouvelle constitution du pays, sans être dans l’obligation d’en négocier le contenu avec les partis laïcs ou démocrates représentés au Parlement mais sans capacité de le contraindre aux concessions.
Le seul obstacle qui se dresse désormais devant les islamistes, ce sont les militaires. Il a pu sembler que ces deux forces ont opéré leur rapprochement en ayant uni leurs influences et poids dans le pays pour désamorcer le potentiel révolutionnaire de l’insurrection populaire. Les militaires ont géré la transition de façon favorable aux islamistes en refusant de procéder aux changements tels que demandés par les insurgés de la place «Tahrir». Lesquels islamistes ont eu ainsi l’opportunité de détourner à leur profit la nouvelle donne politique égyptienne créée par la chute de Moubarak et de son clan. Ce fut leur récompense offerte par l’armée, dont ils ont approuvé et soutenu la prise en charge du pouvoir à ce moment-là, quand les véritables acteurs de la révolution égyptienne exigeaient sa dévolution aux civils.
L’entente entre militaires et islamistes a laissé entrevoir des fissures aussitôt que les seconds ont fait un pas spectaculaire dans la montée au pouvoir avec leur score électoral. Fissures créées par les déclarations du guide suprême des Frères musulmans, Mohamed Badie, dont est issu le PLJ, grand vainqueur des élections législatives, laissant entendre que la future assemblée populaire, dominée par ce PLJ, pourrait être ferme face à des demandes de l’armée de préserver les privilèges de l’institution militaire, dont celui d’être en dehors des lois ordinaires.
A moins que l’armée accepte sans broncher de se laisser dépouiller de ses privilèges, l’ont voit mal comment va perdurer le «deal» passé entre elle et les islamistes aux heures chaudes de la révolution de la place «Tahrir». D’autant que ces mêmes islamistes font souffler le chaud et le froid par des déclarations contradictoires sur des questions aussi cruciales que celle des privilèges de l’armée. Notamment celles ayant trait à l’économie, aux droits de la minorité chrétienne et surtout celle concernant le traité de paix en vigueur entre l’Egypte et Israël. Sur tous ces points, les islamistes entretiennent le flou qui risque de faire réagir l’armée, tenue par les assurances qu’elle a données aux Américains, dont les aides financières et autres sont vitales pour l’Egypte et pour elle.
Les Etats-Unis ont d’ailleurs émis en direction de cette armée égyptienne le signal qu’ils sont inquiets des ambiguïtés contenues dans les déclarations des principaux responsables islamistes. Ils ont multiplié les discussions secrètes avec l’état-major égyptien suite à la déclaration du même Mohamed Badie, guide suprême des Frères musulmans, faisant savoir que son mouvement est pour la tenue d’un référendum qui laissera le peuple décider s’il faut déchirer ou non le traité de paix avec Israël.
Ces contacts et les frictions qui vont en se durcissant entre l’armée et les islamistes font que les observateurs présagent une rude bataille entre ces forces et d’aucuns même s’aventurent à parler d’un coup d’Etat militaire qui se profile, encouragé en sous-main par Washington.
Le Quotidien d’Oran, 23/1/2012
-
« Les Marocains doivent prouver leur bonne volonté » (diplomate algérien)
-Le ministre marocain des Affaires étrangères arrive aujourd’hui en Algérie, avec pour ordre de mission de déblayer le terrain pour la normalisation des relations entre les deux pays…Je pense que cette visite traduit le souhait que le nouveau gouvernement marocain puisse normaliser les relations avec l’Algérie, là où ses prédécesseurs ont échoué à cause d’une attitude inamicale, parfois même belliqueuse. Le changement du gouvernement au Maroc offre, de mon point de vue, une opportunité pour aller de l’avant.
-Les islamistes marocains sont-ils, d’après vous, plus prédisposés à renouer le dialogue avec l’Algérie que le palais royal ?
Ils ont besoin d’écouter les Algériens, ils ont besoin aussi de connaître le dossier parce qu’ils n’ont pas l’expérience de l’exercice du pouvoir. Ils n’ont pas non plus d’expérience dans le traitement des dossiers diplomatiques. Je pense que la question de la réouverture de la frontière est importante pour eux en raison, notamment, des retombées économiques. Ils arrivent dans une conjoncture de crise économique où il y a moins de touristes occidentaux et moins d’investissements, notamment français et espagnols. Les besoins économiques, aussi bien des Marocains que des Tunisiens, déteignent, aujourd’hui, sur leur politique étrangère vis-à-vis de l’Algérie.
-Les motivations de cette volonté de réchauffer les relations sont donc essentiellement économiques du côté marocain…
Je pense que cette prise de contact est tout de même nécessaire pour un gouvernement qui n’a pas d’expérience dans la gestion des dossiers diplomatiques. Les islamistes ont donc besoin de comprendre.
-Comment cette visite du MAE marocain est-elle perçue à Alger, surtout qu’elle a été annoncée par la partie marocaine puis confirmée en Algérie ?
Cela est lié à la communication institutionnelle. On est toujours informé par les autres et pas seulement par les Marocains. Je pense, et c’est mon point de vue, que les Algériens vont encore adopter une attitude historiciste vis-à-vis du Maghreb. Ils sont encore dans l’esprit de la conférence de Tanger (1958). Ceci, alors que les Tunisiens et les Marocains ont une conduite plus pragmatique. Ils développent une démarche d’intégration avec l’Europe et l’Occident et une démarche commerciale avec l’Algérie. Ils savent que l’intégration doit se faire au nord, pas à l’est ni à l’ouest.
-Faudrait-il alors revoir le paradigme algérien de l’intégration maghrébine ?
Oui, elle est irréaliste et archaïque. C’est une approche liée à l’esprit de Tanger alors que celui-ci n’existe plus. Nous sommes dans un monde nouveau, où l’intégration se fait par l’économie.
-Mais les contentieux entre l’Algérie et le Maroc sont plus politiques qu’économiques…
Vous savez très bien que les Marocains sont à l’origine du blocage du processus d’intégration. Depuis 1994, le Maroc développe une approche contradictoire en faisant remarquer que le problème du Sahara occidental plombait ce processus. Or – et j’en suis témoin – l’UMA a été fondée en 1989 à Marrakech, donc elle est postérieure à la question sahraouie.
En 1989, les Marocains disaient que l’intégration maghrébine était un facteur supplémentaire et favorable pour le règlement de cette question. Aujourd’hui, en 2012, ils reviennent à l’esprit de Marrakech, à savoir que les bonnes relations entre l’Algérie et le Maroc pourraient servir de catalyseur au règlement de la question sahraouie.-Justement, au Maroc, on semble convaincu que le principal facteur intégrateur serait la réouverture de la frontière…
Vous savez, l’Algérie est vue avant tout comme un marché.
-Quels sont ces facteurs qui bloquent cette dynamique d’intégration algéro-marocaine ?
Les Marocains ne peuvent pas prétendre normaliser les relations avec l’Algérie et, en même temps, voire simultanément, faire exercer des pressions sur l’Algérie par la France et les Etats-Unis, essentiellement sur la question des frontières et sur la question sahraouie.
-Il y a aussi ces nombreux Algériens qui ont été spoliés de leurs biens au Maroc…
Oui, et cela fait globalement du contentieux. Il faut savoir qu’il y a une convention d’établissement entre le Maroc, l’Algérie et la Tunisie qui a été signée en 1963. Cette convention stipule que les citoyens algériens, tunisiens et marocains qui sont établis dans l’un des trois pays sont considérés comme des nationaux. Le roi Hassan II, quand il avait marocanisé les terres, a nationalisé celles des Algériens ; or, c’est en contradiction avec la convention d’établissement qui disposait qu’il fallait les traiter comme des Marocains et non pas comme des étrangers.
-Comment tout cela va-t-il être réglé alors qu’en face, les Marocains se montrent impatients de retrouver le chemin d’Alger ?
Ils sont impatients parce que l’éventuelle réouverture de la frontière va apporter un peu d’oxygène à l’économie marocaine. Cela représenterait, selon les experts, à peu près 1% dans la croissance du Maroc. Les Tunisiens ne sont pas aussi pressés parce qu’ils font l’essentiel de leur commerce avec les Libyens.
-En tant qu’ancien ministre et diplomate, quelle solution préconisez-vous pour des relations plus apaisées entre le Maroc et l’Algérie ? L’Algérie a-t-elle plus à gagner ou à perdre dans les retrouvailles avec le Maroc ?
Pour enclencher une dynamique sérieuse et porteuse, il faut que nos amis marocains fassent preuve de bonne volonté. D’abord, une volonté politique sérieuse de régler le problème sahraoui.
-Il y a aussi l’exigence d’un mea culpa par rapport aux accusations proférées contre les services algériens lors des attentats de 1994…
Non, non ! Pour les attentats de 1994, ils avaient mis en cause l’armée algérienne puis ils se sont rendu compte que les Algériens n’avaient rien à voir avec ces attentats de Marrakech. Il faut rappeler aussi que c’est Rabat qui avait imposé le visa aux Algériens. Et quand on impose un visa pour un pays en pleine crise sécuritaire, c’est qu’on veut accentuer cette crise.
-Que peut-on attendre de cette première visite du ministre marocain des Affaires étrangères ?
Je pense que ce sont plutôt les Marocains qui attendent beaucoup de cette visite. Ce sera tout de même l’occasion de voir si le nouveau gouvernement marocain a la volonté d’assouplir sa position par rapport à la question sahraouie. Même si, on le sait très bien, ce dossier est piloté directement par le palais royal. Ceci dit, il faut se féliciter de cette visite parce que, par principe, nous devons avoir de bonnes relations avec tout le monde, tout en restant attachés aux fondamentaux de notre politique étrangère.
Hassan MoaliEl Watan, 23/1/2012