Année : 2011

  • OTAN en emporte la loi

    Par Amine Echikr
    Dix années nous séparent de la lutte contre l’axe du mal et de son corollaire politique : «Le Grand Moyen-Orient». Dix années de lutte contre le terrorisme, contre les extrémismes. Une décade sans réels résultats sur le terrain si ce n’est la cohorte de morts qui n’en finissent pas. Dix ans après les attentats ignobles contre le World Trade Center à New York, la guerre continue et n’est pas gagnée. Oussama Ben Laden est mort et a vite été remplacé. La terreur continue mais maintenant elle est double. Nous connaissions nos ennemis et avions une idée sur nos éventuels amis.En cette seconde décade du XXIe siècle, les ennemis sont nos amis et les amis sont nos ennemis. En fait, rien n’est clair dans la politique menée par nos «alliés» de l’OTAN dans la guerre contre les extrémistes. Les fronts se multiplient et les objectifs des nouvelles guerres ne sont plus aussi clairs. L’OTAN bombarde les dictatures qui ne lui plaisent pas et s’allie avec des terroristes arrêtés par ses soins pour faire tomber des régimes illégitimes. L’OTAN reconnaît le Kossovo mais bombarde des Kurdes en Irak sans que personne ne trouve à redire. Les pays du Golfe envoient des troupes au Bahreïn pour mater des manifestations pacifiques mais envoient aussi des troupes pour détruire un régime libyen qui fait la même chose que ses amis du Golfe.Les Américains, Français, Turcs, Qataris, Anglais et d’autres sont heureux des démocraties saoudienne, émiratie, qatarie, russe, chinoise et israélienne, mais s’offusque du non-respect des droits de l’Homme en Cote d’Ivoire, Syrie, Libye et d’autres régimes qui se trouvent dans une liste qu’il est facile de deviner.L’OTAN n’intervient qu’en vertu d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, mais bien sûr ! Mais qui sont les membres de ce fameux Conseil ? Je fais la loi, je l’exécute, je peux même la transgresser en envoyant des troupes au sol comme dans le cas libyen et je ne me ferais aucun reproche. Une expression algérienne décrit très bien le système de gouvernance mondiale actuel : «Le joueur est H’mida et l’arbitre est H’mida.»L’opposition des membres de l’OTAN à la réforme des organes de directions de l’ONU trouve là toute son explication. La loi des bombes est la seule efficace face à des peuples inaptes à s’émanciper et à accepter les règles du marché. Un marché de dupes qui a vu des pays entrer à l’ONU et qui empêche la Palestine ou le Sahara occidental de faire entendre leurs voix.En attendant une éclaircie dans ces nuages de bombes démocratiques de l’OTAN, les Afghans continuent à mourir sous celles des talibans et des bavures des forces du «bien» et les Pakistanais aussi. Les Irakiens sous celles des Turcs et de terroristes qui n’acceptent pas le nouvel ordre établi. La palestiniens peuvent continuer à mourir sous les bombes des Israéliens et dans leur guerre fratricide.
    Dans ce nouveau monde soumis à la loi du plus fort, un peu plus de démocratie à l’ONU serait le bienvenu. Nous verrons alors les USA, la France et la Grande-Bretagne bombarder l’Arabie saoudite pour que les femmes puissent jouir de leurs droits ou la Turquie pour que les Kurdes voient les leurs enfin respectés. En attendant, l’OTAN est la plus forte alors «vive l’OTAN» !  
  • Origines, enjeux et perspectives de paix du conflit du sahara occidental

    Denise Sollo
    Le Sahara occidental est situé à l’ouest du Maghreb et présente comme voisins frontaliers : Le Maroc au nord ; au nord –est l’Algérie avec qui il partage une courte frontière; et enfin la Mauritanie à l’est, et dans tout le sud. Toute sa frontière ouest donne sur l’atlantique. Sa superficie est de 266000 km². A l’époque de son occupation par l’Espagne en 1884, le territoire du Sahara Occidental est essentiellement occupé de tribus guerrières, maraboutiques et tributaires, organisées et indépendantes entre-elles.
    Selon certains auteurs, les différentes expéditions marocaines sur ce territoire n’ont pas conduit à une soumission effective des populations autochtones aux sultans du Maroc. Néanmoins, durant toute la période qui a précédé la colonisation de ce territoire et même pendant celle-ci, il est arrivé que des chefs guerriers en provenance de cette région, reçoivent une aide matérielle massive de la part du sultan du Maroc, pour venir à bout de l’ennemi commun qu’était l’occupant européen. C’est le cas du chef de guerre et marabout Ma El Aïnin, finalement tué par les français au Maroc en 1910.
    Cette attitude de certains chefs et notables du Sahara vis-à-vis du sultan du Maroc, a conduit certains à conclure qu’il s’agissait là d’une forme de reconnaissance de la souveraineté du royaume marocain sur le territoire du Sahara Occidental. Pour d’autres, il s’agissait tout simplement d’une demande d’aide à un voisin plus puissant, afin de venir à bout d’un ennemi commun, puisque le Maroc lui-même était menacé par l’occupation française. Finalement, c’est plutôt la France et l’Espagne qui ont finiront par avoir raison des résistances marocaines d’une part, et des actes de rébellions des sahraouis d’autre part. Ceci s’est traduit par la colonisation Espagnole du Sahara en 1884, et la mise sous protectorat du Maroc par la France en 1912.
    Les acteurs au conflit, aux lendemains des indépendances :
    C’est aux lendemains des indépendances que ce territoire commence à être revendiqué par deux pays : le Maroc et la Mauritanie.
    Le Maroc, indépendant depuis 1956 estime que ce territoire faisait partie intégrante du sien bien longtemps avant la venue des européens au Maghreb. La thèse marocaine du “Grand Maroc” était une revendication des territoires considérés par les défendeurs de cette thèse comme étant sous souveraité marocaine avant la colonisation européenne. Ainsi, les territoires à restituer au Maroc étaient: le Sahara espagnol, la Mauritanie, le nord du Mali et une partie de l’ouest algérien ( région de Tindouf).
    La Mauritanie, ancienne colonie française, tout en réfutant l’idée de son intégration au grand Maroc, estimait que le territoire du Sahara espagnol devait être intégré au sien à cause des fortes similitudes linguistiques, culturels, et ethniques entre sahraouis et maures.
    L’Espagne, puissance colonisatrice, loin d’aller dans le sens d’une décolonisation du Sahara, décida plutôt d’en faire une de ses provinces.
    Le conflit qui opposait d’une part l’Espagne et le Maroc, et d’autre part l’Espagne et la Mauritanie, avait comme origine les exigeances marocaine et mauritanienne relatives à la décolonisation du Sahara espagnol, par conséquent au départ de l’Espagne. L’absence d’un front commun “maroco-mauritanien” face à la position espagnole provenait des revendications marocaines relevant de la thèse du grand Maroc. De plus, la guerre entre le Maroc et l’Algérie(qui était restée jusque-là à l’écart du conflit du Sahara Occidental) de 1962 au sujet de leur frontière commune, ne favorisait pas non plus la possibilité de constitution d’un front commun des trois voisins immédiats du Sahara Occidental. Ainsi, malgré les pressions en provenance des Nations Unies dès 1965 visant à pousser l’Espagne à décoloniser ce territoire par l’organisation d’un référendum d’autodétermination, celle-ci continuait de jouer les résistantes en acceptant le principe de l’autodétermination, mais sans véritablement s’activer dans le sens d’un retrait. Ainsi, l’Espagne n’hésitait pas à exploiter la faiblesse d’une absence d’organisation de ses adversaires, en entretenant des discussions bilatérales avec chacune d’elles, tout en essayant de montrer aux Nations Unies que finalement les autochtones préféraient le rattachement à l’Espagne.
    Le début du conflit armé
    Le début des années 1970 va voir des changements nets s’effectuer dans la région. Les voisins immédiats du Sahara occidental finissent par former un front commun, après le règlement par le Maroc de son litige frontalier avec l’Algérie, ainsi que sa reconnaissance de la souveraineté de la Mauritanie. Ce bloc décide donc de faire pression sur l’Espagne pendant que de l’autre côté, les Nations Unies somment de plus en plus celle-ci d’organiser un référendum d’autodétermination du peuple du Sahara Occidental. Sur le plan interne, on assiste à une naissance de partis nationalistes au Sahara occidental tels que le Parti de l’Union National Sahraoui (PUNS) soutenu par l’Espagne, Le Mouvement de Renaissance des Hommes Bleus (MOREHOB) soutenu par le Maroc et le Front de Libération de la Saguia el Hamra et du Rio de Oro (Front Polisario), né le 10 mai 1973 et qui sera soutenu par l’Algérie. Le 20 mai de la même année, le front polisario attaque le poste de police espagnol de el khanga et signifie par ce geste, l’ouverture des hostilités vis-à-vis de l’occupation et pour la fierté nationale. Deux ans plus tard, le Roi du Maroc dirige la grande Marche Verte.
    La Marche Verte du 16 octobre 1975 se veut une récupération symbolique et pacifique du territoire du Sahara « marocain » par le Maroc. Cette Marche a à sa tête la personne même du roi Hassan II du Maroc, suivi par une grande foule brandissant le coran et le drapeau marocain; le coran se voulait un symbole pacifique de l’action de récupération, alors que le drapeau traduisait un signe indicateur de l’appartenance de ce territoire au Maroc.
    Pour les membres du front polisario, la présence de l’armée marocaine sur le territoire (celle-ci y a précédé les marcheurs) représente une nouvelle occupation étrangère, alors même que l’Espagne n’y a pas encore achevé son retrait. Ses derniers soldats en partiront en janvier 1976, et elle mettra officiellement fin à sa présence sur ce territoire en février 1976. Ceci explique pourquoi les combattants du front polisario allaient prendre les armes une nouvelle fois pour se défaire de cette nouvelle occupation. Dans la même période, plus précisément le 24 novembre 1975, le Maroc, la Mauritanie et l’Espagne signent à Madrid (Espagne) les accords (tripartites) de Madrid. Ceux-ci voient l’Espagne octroyer à la Mauritanie et au Maroc, l’administration conjointe du territoire du Sahara occidental. Partant du territoire quelques mois après, l’Espagne devait signifier aux Nations Unies sa démission du titre de puissance administrante du Sahara occidental, titre que les Nations Unies n’ont pas eu à octroyer à un autre Etat.
    La République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) voit le jour au lendemain du départ espagnol du territoire : le 27 février 1976. Cette République constitue en réalité une riposte des tripartites de Madrid, et son avènement coïncide avec le déclenchement des hostilités. Dès cette période, des combats très violents opposent en effet les combattants du Front Polisario aux forces marocaines dans la partie nord du territoire d’une part, et aux forces mauritaniennes dans la partie sud du territoire d’autre part. Pour garantir l’efficacité de son offensive, le Front Polisario reçoit une aide massive de l’Algérie. Cette aide se résume par l’octroie d’un matériel militaire important, de la logistique, de la région de Tindouf comme base arrière et construction de camps de réfugiés, et même de colonnes de soldats algériens. Ainsi, les combattants du front polisario avec l’aide de l’Algérie vont tout d’abord chasser l’armée mauritanienne du Sahara occidental, pour aller ensuite les battre sur leur propre territoire, en s’emparant de certaines régions du nord de la Mauritanie. Cette situation va contraindre la Mauritanie à signer l’accord de paix d’Alger du 05 Août 1979, dans lequel elle renonce à sa revendication du territoire du Sahara Occidental, tout en obtenant du Front polisario, la promesse de ne procéder à aucune revendication sur territoire.
    De son côté, le Maroc trouve l’aide nécessaire lui permettant de se soustraire à une défaite devenue presque inéluctable, auprès de pays occidentaux. C’est le cas des Etats-Unis qui vont, dans les années 81-82, fortement accroître leur aide au Maroc. Cette aide se résumera entre autres à une importante livraison du matériel militaire, suite aux accords passés entre le Maroc et les Etats-unis dans le cadre du Consensus statégique occidental au Moyen Orient, et relatif aux déploiements des Forces Spéciales Américaines dans cette région. Entre-temps, l’Organisation des Nations Unies (ONU) et l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) essaient, par des moyens diplomatiques, de trouver une solution pacifique à ce conflit.
    Le plan de paix de l’ONU et les autres propositions.
    C’est en 1984 que le Maroc se retire de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) pour protester contre l’admission de la RASD à cette organisation. Entre temps( depuis 1983), l’OUA qui se déploie dans une quête de résolution pacifique de ce conflit, exhorte les parties au conflit à entreprendre des négociations à cet effet. C’est en cela que tient sa résolution AHG/RES. 104 (XIX) du 19ème sommet de l’OUA à Addis Abeba (en Ethiopie).
    De son côté, dès décembre 1985, l’assemblée générale des Nations Unies adopte la résolution 40/50 sur le Sahara, invitant le président en exercice de l’OUA et le secrétaire général de l’ONU à œuvrer en vue d’amener les parties à négocier dans les meilleurs délais et conformément à la résolution de l’ONU (citée plus haut) et à la présente résolution, les conditions d’un cessez-le-feu et les modalités d’organisation d’un référendum au Sahara Occidental. Dès lors, plusieurs missions sont constituées et oeuvrent en effet pour rendre effectives ces deux résolutions de l’OUA et de l’ONU.
    En août 1988, le secrétaire général des Nations Unies présente une proposition de paix prévoyant un cessez-le-feu et la tenue d’un référendum, aux représentants du Maroc et du Front polisario, en vertu du mandat conféré par l’assemblée générale dans sa résolution 40/50 de décembre 1985. Les parties donnent leur accord le même mois. En avril 1991, le Conseil de sécurité des Nations Unies adopte la résolution 690(1991) approuvant la constitution sous son autorité de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara Occidental (MINURSO). Celle-ci comprend trois composantes : Unité civile, Unité de Sécurité, et Unité militaire.
    Le cessez-le-feu prévu entre en vigueur en septembre 1991.
    Jusqu’à ce jour, seule cette partie du règlement de paix a connu une suite favorable. Le blocage de la deuxième partie étant ce qui a conduit les Nations unies à effectuer de nouvelles propositions : en 2001 et en 2002. A l’origine de ce blocage se situe la question des électeurs : les personnes habilitées à voter. En effet, la proposition de paix effectuée par l’ONU avait retenu comme habilitées à voter, les personnes retenues par le recensement de 1974 effectués par les Espagnols. Or après le dépôt de la liste des électeurs par les Sahraouis, le Maroc déposa une demande de 131000 recours de personnes qui selon lui, devraient également être admises sur la liste des électeurs.
    C’est cette situation qui a conduit au blocage du plan de règlement de paix de l’ONU à tel point qu’en 2001, les Nations Unies devaient proposer aux parties au conflit une « troisième voie » appelée accord-cadre, qui octroie une large autonomie au Sahara Occidental tout en le rattachant du Maroc pendant cinq à l’issue desquelles un référendum sera organisé dans le territoire.
    Cet accord est appelé troisième voie parce que le référendum comporte l’alternative : l’indépendance, ou le rattachement pur et simple au Maroc. La différence entre ce rattachement pur et simple au Maroc et la troisième voie (qui présente également le rattachement au Maroc) se situe dans la large autonomie octroyée au territoire. Contrairement au plan de règlement qui avait reçu l’accord des parties, cette troisième voie n’a jusqu’ici été entériné que par le Maroc. Il faudrait retenir que le plan de paix de l’OUA-ONU tient lieu de première proposition, alors que la troisième voie tient de deuxième proposition. Cette deuxième proposition n’ayant pas fait l’unanimité entre les parties, il a fallu aux Nations Unies de proposer une troisième solution : la partition du territoire entre les parties. Une partie revenant au Front polisario et conduisant même par-là à son indépendance, tandis que l’autre reviendrait au Maroc, qui pourra en faire sa province du sud. Malheureusement, cette proposition a connu un refus catégorique des principales parties au conflit.
    Pour le Maroc, il s’agit là d’une atteinte à son intégrité territoriale, lors que pour le Front polisario, l’indépendance du Sahara Occidental(dans son ensemble) ne saurait se passer d’un référendum d’autodétermination du peuple Sahraoui. Tenant compte de cet autre blocage, le secrétaire général des Nations Unies a proposé aux parties (tout en leur demandant de réfléchir sur ces différentes propositions), un retrait pur et simple de la MINURSO de ce territoire.
    Les enjeux du conflit
    Le conflit du Sahara Occidental présente de nombreux enjeux. Les plus frappants relèvent du politico-économique.
    Les enjeux d’ordre politique varient il est vrai selon le contexte géopolitique du moment. En analysant la fin de la guerre froide, on peut se demander si le conflit du Sahara Occidental tirait son origine de la tension Est-Ouest? Pour cela, nous allons nous servir du cas Namibien comme exemple.
    Pendant la guerre froide, la Namibie qui est un territoire à décoloniser continue d’être occupée par l’afrique du sud. La communauté internationale, et les Etats-Unis en tête, tout en appuyant le principe d’autodétermination en Namibie, accordaient leur soutien matériel à l’Afrique du sud. La raison d’une telle attitude: l’Afrique du sud était le garant du capitalisme dans la région, un allié important pour les Etats-Unis face à la montée du communisme dans cette région d’Afrique.
    De plus, la SWAPO, mouvement de libération nationale de la Namibie entretenait des relations particulières avec l’Angola marxiste qui la soutenait dans sa lutte. Dans le cas du conflit du Sahara Occidental, la situation qui prévaut dans la région à l’époque de la guerre froide n’est pas très différente de celle que nous venons de voir.
    Les Etats-Unis font du Maroc un allié important dans la région du Maghreb. L’Algérie qui soutien le Front polisario est celle du président Boumedienne où les idées révolutionnaires du Front de libération National algérien (FLN), très sensibles sur la question de décolonisation des territoires occupés sont encore très encrées. Il s’agit d’une Algérie fortement socialiste, dont le soutien au front polisario cause le même effet qu’en Namibie. La communauté internationale ( les Etats-Unis en tête), tout en acceptant le principe d’autodétermination continue quand même de soutenir le Maroc dans sa lutte Contrairement à la Namibie qui accède à l’indépendance à la fin de la guerre froide, le conflit du Sahara occidental reste en vigueur et conduit les parties au conflit, ainsi que les acteurs extérieurs au conflit à un repositionnement stratégique relatif aux nouvelles données internationales que sont la globalisation et la lutte contre l’intégrisme islamique. En effet, en plus de l’attrait que le marché maghrebin exerce sur les Etats-Unis et l’europe, cette région a redoublé d’importance, de par sa position stratégique depuis les évènements du onze septembre 2001. Ces évènements ont conduit le monde occidental dans une lutte difficile et longue contre le terrorisme et le fondamentalisme religieux. Un tel combat, exige des alliés sérieux ayant des entrées dans les milieux les plus hostiles et surtout très peu connu. C’est ici qu’on peut comprendre l’avantage qu’une telle situation présente pour le Maroc (vieil allié du monde occidental), dans sa stratégie de récupération du sahara occidental. La reconnaissance de ce territoire comme faisant partie du Maroc par les alliés occidentaux pourrait effectivement ce faire dans le cadre de politiques de compensations. Le Maroc a souvent jouer le rôle de gendarme des intérêts de la France en Afrique, ainsi que celui de temporisateur dans le proche Orient. Autant il est respesté dans le monde arabe, autant il est considéré comme un défenseur respectable des intérêts des palestiniens dans la guerre qui les oppose à Israël. On comprend donc pourquoi le Maroc se présente aujourd’hui pour les occidentaux, comme un allié important face aux doubles fléaux que sont le terrorisme et l’intégrisme. Le soutien apporté par les Etats-Unis, la France et la Grande Bretagne au projet d’accord cadre dit troisième voie, comme solution octroyée par les Nations Unies pour une résolution du conflit, pourrait bien être une des résultantes de cette alliance.
    Les enjeux d’ordre économique relèvent des richesses contenues dans le sous-sol du territoire, ainsi que celles contenues au large des côtes et dans les fonds marins. Le territoire est très riche en phosphates découverts en 1947 par l’Espagne, et regorge d’autres minerais tels que : le fer, le titane, le manganèse, et des pierres précieuses. Parmi celles-ci, on peut citer l’uranium, le titanium et le vanadium. Y sont probablement présents, l’antimoine et le cuivre, et bien d’autres. La façade atlantique de ce territoire se présente comme l’une des plus poissonneuses du monde. Concernant le fond marin, il est de plus en plus probable qu’il contient du pétrole. En effet, des compagnies pétrolières y effectuent actuellement de la prospection, sous l’autorisation de l’Etat marocain. Il s’agit des multinationales française et américaine TotalFinaELf et Keer Mc Geer. Ainsi, une intégration du Sahara occidental au Maroc, ferait un grand bien à l’économie Marocaine. Concernant l’Algérie, c’est plutôt l’accession à l’indépendance du Sahara occidental qui l’arrangerait dans la mesure où elle pourra enfin obtenir, en compensation à son soutien inconditionnel du Front Polisario durant le long et épuisant conflit, l’accès à l’océan atlantique tant convoité. Cet accès lui permettrait en effet une exploitaion importante de ses richesses de la région de Tindouf: le fer, le pétrole et le gaz. Côté américain, il est important de gagner le marché marocain par l’établissement d’une zone franche entre les deux pays. Cette attitude s’inscrit dans la politique américaine de conquête du marché africain. Pour l’union européenne, il s’agit surtout de garder les marchés déjà acquis. Le Maghreb, de par sa proximité et ses richesses représente pour l’europe un marché à préserver et à développer. Néanmoins, pour les Etats-Unis comme pour les européens, l’instabilité actuelle du Maghreb directement lié au conflit du Sahara occidental ne permet pas un bon déroulement du commerce. Raison pour laquelle ils sont tous pour un retour à la paix au Sahara.
    Finalement, le conflit du Sahara occidental qui, si on part de la perception première de l’ONU et du droit international se veut un conflit de décolonisation, connait aujourd’hui d’autres voies que celle du référendum d’autodétermination à savoir: l’accord cadre, qui prône la large autonomie du territoire; la partition du territoire, une partie revenant au Maroc et l’autre devenant une république sahraouie; et enfin le retrait total de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO).La véritable crainte aujourd’hui réside dans le fait que, les parties au conflit n’arrivant pas à se mettre d’accord sur une solution commune, la décision choisie par l’ONU soit rejetée par l’une ou l’autre partie. Crainte parce qu’une telle attitude ne met pas à l’abri d’une reprise des armes. La négociation demeure toutefois la démarche la plus réaliste pour espérer parvenir à une situation de paix dans cette partie de la région du Maghreb.
    Notes :
    Cf. l’ouvrage de monsieur Maurice barbier, le conflit du Sahara Occidental,
    Cf. Rapport du secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies comprenant le texte du projet d’accord-cadre : www.arso.org
    Paris, Novembre 2003. Source, www.irenees.net
    Source : Bring Us Together, 27 août 2011
  • Saisie de trois tonnes de drogue destinées à l’Europe

    Un plan de trafic de cannabis déjoué : Saisie de trois tonnes de drogue destinées à l’Europe

    Un grand plan d’évasion d’une importante quantité de drogue vers l’Europe a été déjoué avant-hier sur la route nationale Ouest, lorsqu’un véhicule de marque Renault Clio bourré de plus de trois tonnes de cannabis a été intercepté par les éléments de la brigade de recherches et d’intervention (GIR) de la Gendarmerie nationale de Saïda. La marchandise représente une somme dépassant les 30 milliards de centimes. Un trafiquant a été interpellé après une course-poursuite avec les gendarmes. 

     
    L’embuscade des gendarmes a permis la récupération de 3 tonnes et 20 kg de kif traité à l’intérieur de 160 sacs de 100 plaques de drogue chacun, soigneusement cachés dans de nourritures pour les cheptels. Les trafiquants avaient la forte certitude que leur marchandise arriverait en Europe, car tout a été bien organisé par ce réseau de trafic de cannabis y compris le choix du transfert de drogue vers l’Europe. En effet, suite aux informations très précieuses parvenues il y a quelques jours à la Gendarmerie nationale de la wilaya de Saïda, faisant état de la préparation d’une grande opération de transfert de plusieurs tonnes de drogue depuis la wilaya de Naâma vers l’Europe, par un important réseau activant dans plusieurs villes du pays. Les gendarmes ont vite déployé leurs brigades à plusieurs endroits, afin de mettre la main sur ce réseau et sur la quantité de drogue. 
     
    C’est ainsi que, le groupement de la Gendarmerie nationale de Saïda a fait appel à celui d’Oran pour coopérer sur cette affaire. Une coopération qui sera élargie, d’autant que le groupement de la GN de Saïda a demandé l’aide des gendarmes de Naâma, suite à une demande d’extension d’expertise présentée au procureur de la République du tribunal de Saïda. Cette collaboration des trois groupements de la Gendarmerie nationale a permis de localiser le réseau qui est derrière cette grosse évasion de plusieurs tonnes de drogue vers l’Europe, mais surtout d’identifier les personnes sa composante et leurs axes d’activité qui s’étendent sur plusieurs villes du pays. En effet, cet important réseau de trafic de drogue est très actif sur l’axe Naâma-El Bayadh-Oued Souf, les wilayas de l’Est du pays et en l’Europe. Cela dit, le champ d’activité de cette importante bande de trafic de cannabis s’étend jusqu’au Vieux Continent, et les quantités de drogue qui sont réceptionnées par le réseau proviennent du Maroc. 
     
    L’arrestation de ce trafiquant va dévoiler tous les secrets de ce réseau, notamment qui sont ses fournisseurs marocains et où ces importantes quantités de cannabis sont stockées. Cette affaire est l’une des plus importantes que les gendarmes aient eu à traiter depuis la découverte de cinq tonnes de cannabis, il y a deux ans, enfouis dans un conteneur à Rouiba, prêtes à être réceptionnées en France. Le trafic de drogue de l’Algérie vers l’Europe semble prendre une proportion alarmante.

    Sofiane Abi

     
  • Le CNT a cédé le pétrole libyen

    Un document authentifié le prouve 
    Un document authentique stipulant l’acceptation par le CNT du pillage des ressources pétrolières libyennes, à hauteur de 35 % au profit de la France, serait entre les mains des autorités algériennes.

    Une bombe à retardement tout aussi redoutable que les obus aveugles de l’OTAN mais, cette fois, au profit du peuple de Libye. En rendant publique cette transaction, l’Algérie saura-t-elle ramener le monde à la réalité comme elle le fit, seule pendant une décade, contre le terrorisme international ? 

    Les agressions récentes qui l’ont visée l’y auront obligée…

    Ce qui n’était qu’une rumeur ou une lecture anticipant sur l’après-Kadhafi devient réalité avec probablement plus de gravité que la polémique ne sait en produire. Les rebelles libyens ont bel et bien négocié l’aide militaro politique qui leur a été fournie pour tenter de renverser le colonel, aux commandes du pays depuis plus de quatre décennies. Une copie du document prouvant le marchandage du CNT avec la France serait donc en possession des autorités algériennes qui l’auraient authentifiée.
    Il s’agirait, selon notre source, d’une missive datant du mois de mars dernier et adressée aux dirigeants du Qatar, des Emirats arabes unis ainsi qu’à Amr Moussa, à l’époque secrétaire général de la Ligue arabe. Le texte explique, aux complices du Moyen-Orient, comment le CNT a monnayé l’appui français en s’engageant à céder 35 % du pétrole brut libyen à Paris en cas de réussite de «la révolution». Ce chiffre, consacrant aux Français un tiers des réserves en hydrocarbures de la Libye, rebondissait sur Internet sans qu’on ait pu vérifier sa pertinence inscrite dans ledit document. Pétrole contre fourniture d’armes dont la nature et les quantités ont été précisées par la rébellion, lit-on dans la correspondance. Les rebelles confirment ainsi la part généreuse promise à un pays étranger, à l’insu de compatriotes que les révolutionnaires ont déjà commencé à tromper en leur cachant la transaction honteuse.
    Cependant, notre source nous apprend que de graves dissensions sont apparues au sein des cercles influents du CNT à propos de cet engagement officiel et l’on peut imaginer que la fuite organisée d’une copie en direction de l’Algérie, clairement reconnue comme un rempart contre l’ingérence dans la région, s’expliquerait par la volonté chez certains rebelles de dénoncer fortement le deal compromettant qu’ils refusent de cautionner.
    Un joker fatal entre les mains d’Alger
    Or, si les autorités algériennes n’ont, pour l’instant, pas rendu compte publiquement de l’existence de ce marché de dupes, c’est forcément en respect du principe de non intervention dans les affaires internes aux frères libyens. Pourtant, après les incessantes attaques du CNT et de ses commanditaires qui ont visé notre pays, aggravées de violences contre notre représentation diplomatique à Tripoli, la divulgation du contrat de trahison pourrait mettre fin, par l’abattement d’un joker fatal, au feuilleton propagandiste narrant la gentille mobilisation subite de l’OTAN et de la France contre la dictature vieille de 40 ans.
    L’opinion publique internationale se demandera ensuite quelle quote-part ont réclamée l’Italie, les Etats-Unis et consorts, qui ont bien voulu bombarder le pays de leurs alliés rebelles, des semaines durant. Les Libyens, eux, pourront alors s’interroger sur ce qu’il leur restera comme ressources à gérer souverainement.
    En guise de réponse, le CNT et ses soutiens de l’Elysée auront-ils l’audace de démentir la forfaiture en prenant le risque d’en annuler conséquemment les clauses face à un peuple qui s’intéressera de plus près à la face cachée des amours entre Tripoli et Paris ? Ou réussiront-ils à déguiser le crime politico financier et le bradage de la sécurité alimentaire de plusieurs générations, en une simple promesse de coopération économique relative à la reconstruction de ce qui a été abusivement détruit ? D’aucuns susurrent qu’un retour de manivelle viendra frapper la tête des rebelles manipulateurs.
    Des opposants à la dictature aussi disposés à vendre sous cape les intérêts de l’Eldorado libyen qu’à dénigrer la vigilance algérienne devant la menace d’asservissement moderne du continent qui s’opère sous le prétexte d’une démocratisation aux forceps.
    Aujourd’hui, l’Algérie qui détient la preuve d’un acte de trahison menaçant la région a mille raison de ne pas s’emballer à reconnaître, par un vilain mimétisme, l’autorité des maquignons du CNT malgré le positionnement suspect de la Ligue arabe qui vient de reconnaître le CNT. A Alger, on préfèrera peut-être attendre un sursaut libyen qui rendra toute sa souveraineté à la Jamahiriya…
    Nordine Mzalla
    Le Jeune Indépendant, 27/08/2011
  • Le CNT, une légitimité en toc

    Aux yeux de l’Afrique, le Conseil national de transition (CNT) libyen n’a pas du tout la légitimité que les trois stooges et leur «communauté internationale» accordent … illégitimement à une organisation qui relève du putschisme compradore plus qu’autre chose. Le Conseil national de transition ne représente pas le pouvoir «légitime» en Libye car les combats se poursuivent dans le pays, estimait vendredi le président sud-africain Jacob Zuma, lors d’une conférence de presse de l’Union Africaine à Addis Abeba. 
     
    Dans son communiqué rendu public à l’issue de sa réunion consacré à la Libye, le Conseil de paix et de sécurité (CPS regroupant 15 états africains) a appelé à la formation en Libye d’un «gouvernement de transition incluant toutes les parties, qui serait le bienvenu pour occuper un siège à l’Union africaine». Le CNT peut se faire inviter à siéger au CCG, se faire délivrer un statut super-avancé par l’UE ou aller, si là est sa vocation, renforcer la constellation dans le fanion de l’oncle Sam mais il n’est pas question de venir siéger à l’UA, l’OTAN n’a pas d’Azizya à bombarder à Addis Abeba. 
     
    A Addis Abeba, Jibril et son gang jouissent du même amour qu’ils sont en droit de trouver chez les infirmières bulgares. Tant il est vrai que le CNT a contribué à «saper», selon le mot du président Zuma, les efforts africains pour une solution dans l’intérêt du peuple libyen et qui n’émanerait que de sa libre volonté. Et qu’aujourd’hui l’Afrique se montre pragmatique et se prononce pour une «transition inclusive et consensuelle» ne servira probablement à rien face à l’égarement de certaines puissances occidentales et à leur indécrottable cupidité. Des capitales qui ont choisi cyniquement, en toute connaissance de cause, d’installer dans la Libye sœur une guerre civile qui s’avère aussi longue et aussi meurtrière que la coûteuse «démocratie» qu’ils font subir à l’Irak depuis près de dix ans. Sauf que la confrontation qui s’entame en Libye se déroule à un jet de pierre de l’Europe. Le Vieux continent ne pourra espérer en sortir indemne et il devra, comme notre propre région, se préparer à en subir les conséquences peut-être même électorales si jamais le vent venait à tourner.

    M. Z mohamed_zaaf@yahoo.fr

    Le Jeune Indépendant, 27/08/2011

  • Eric Denécé, expert français en renseignement «La révolution libyenne : 90 % de fabrication étrangère»

    Eric Denécé occupe, entre autres, la fonction de directeur du Centre français de recherche sur le renseignement. Il a fait partie de la délégation qui s’est rendue il y a quelques semaines en Libye pour s’enquérir de la situation sur le terrain. Selon une biographie en ligne sur le Net, il est l’auteur de pas moins de «150 articles, une trentaine de travaux de recherche et quinze ouvrages consacrés au renseignement, à l’intelligence économique, au terrorisme et aux opérations spéciales. Ses travaux lui ont valu d’être lauréat du Prix 1996 de la Fondation pour les études de défense (FED) et du prix Akropolis 2009 (Institut des hautes études de sécurité intérieure)». Coauteur d’un rapport(*) qui fera date dans les annales car portant sur le conflit en Libye et les non-dits sur l’entreprise de renversement du régime de Kadhafi par la coalition, il nous a accordé cet entretien pour expliquer à l’opinion publique algérienne comment la révolution libyenne «est à 90 %» le film de l’ingérence étrangère.
    Le Jeune Indépendant : L’OTAN a-t-elle dépassé, dans son action en Libye, le contenu de la résolution onusienne 1973 ?
    Eric Dénécé : Dès les premières semaines, l’OTAN est totalement sortie de l’esprit de la résolution 1973. On a rapidement basculé vers une intervention visant à renverser Kadhafi de la part des pays des puissances occidentales et des pays du Golfe, le Qatar notamment. Empêcher la répression exercée par le régime libyen a été le prétexte car Mouammar Kadhafi, tout dictateur qu’il est, n’a jamais jusqu’alors, procédé à des massacres de masse contre son peuple.
    Qu’est ce qui explique l’engagement aussi acharné du Qatar dans cette crise ?
    Les monarchies du Moyen-Orient nourrissent quelques vieilles rancunes à l’égard du guide libyen. Il faut se rappeler les nombreuses railleries publiques du colonel qui a même insulté le roi d’Arabie saoudite avec son lot d’humiliation… En ce qui concerne le Qatar, c’est ce pays qui a payé la rançon pour la libération des infirmières bulgares dans sa diligence à soutenir le couple Sarkozy dans le règlement médiatique de cette affaire des infirmières condamnées à de lourdes peines par la justice libyenne. Le Qatar a voulu par la suite récupérer son argent en proposant à Tripoli de cartelliser l’exploitation du gaz de Libye dans un marché où il prendrait des parts. Kadhafi a refusé.
    Le Qatar prend aujourd’hui activement sa revanche. Par ailleurs, sur le plan sécuritaire, les pays du Golfe n’ignorent pas que les djihadistes de nationalité libyenne, formés en Afghanistan, ont démontré leur forte implication dans la nébuleuse El-Qaïda en Irak, en perpétrant nombre d’attentats contre les forces américaines, mais aussi dans différents pays arabes. Des islamistes chassés de Libye par Kadhafi en 1996 se sont répandus dans tout le Moyen-Orient comme le signifie le journal français Libération d’aujourd’hui (édition du vendredi 26 Août- NDLR). La déstabilisation de la Libye a permis de renvoyer ces terroristes se battre dans leur pays d’origine puisque des islamiste du GICL, le Groupe islamique de combat libyen, ont manifestement participé à l’assaut de Tripoli ces derniers jours.
    Y a-t-il une activité parallèle de troupes étrangères au sol en Libye ces derniers jours ? On parle de commandos de ressortissants franco-libyens entraînés en France depuis quelques mois…
    La prise de Tripoli n’aurait pas pu se faire sans l’intervention de troupes étrangères. Quelques dizaines d’hommes d’élite, relevant des armées de la coalition. Pas plus de Français que les autres nationalités, pas moins non plus. Mais cela m’étonnerait qu’il y ait des commandos de franco-libyens, je n’ai pas d’information précise sur cet aspect. Par contre, il est évident qu’on assiste à la victoire des pays belligérants qui mènent une guerre au nom de l’OTAN et qui n’est pas du tout celle du peuple libyen comme la propagande veut le faire croire. Le CNT représente à peine l’Est de la Libye, la Cyrénaïque, pendant que les tribus de l’Ouest sont restées sans soutenir Kadhafi mais sans prendre les armes contre le régime. Elles ont reçu de l’argent et demeurent dans l’expectative. Nous assistons à une révolution libyenne à 90 % de fabrication étrangère.
    L’absence de classe politique à proprement dit en Libye, après 40 ans d’un système monolithique, n’impose-t-elle pas une mise sous tutelle du pays pour une transition démocratique ?
    Oui, le passage autonome à la démocratie semble impossible. Aucune tradition politique moderne en Libye. Seules des structures tribales qui ont, certes, fonctionné mais qui ne promettent pas l’instauration d’une démocratie au sens actuel du terme. Il faudra forcément une mise sous tutelle, comme vous dites, de la Libye par l’ONU, et l’envoi de casques bleus pour tenter de ramener le pays vers des élections, sinon ce sera probablement l’implosion. Par contre, il faut reconnaître un élément favorable, c’est le niveau d’éducation relativement remarquable en Libye, dont celui de la femme qui dépasse globalement celui des femmes des autres pays de la région.
    Il existe donc des risques de partition et de guerre civile en Libye ? A ce propos, que pensez-vous de la position de l’Algérie par rapport à cette crise ? Qu’en est-il de la position de l’UA qui consistait à rendre au peuple libyen l’initiative… ?
    D’abord on peut craindre en effet la partition ou l’éclatement, c’est un risque qui persiste bien entendu compte tenu du chaos actuel. Mais il y a aussi un risque de pourrissement régional avec une recrudescence du terrorisme au profit d’AQMI qui était en perte de vitesse ces derniers mois mais qui peut profiter de la situation pour se doper et rebondir.
    Une aubaine que le terrorisme international saisira et profitera à tous ceux qui ambitionnent de déstabiliser les pays de la région dont l’Algérie. Je ne suis pas spécialisé dans la géopolitique concernant l’Afrique du Nord, je ne me suis jamais rendu en Algérie, cependant j’ai constaté, lors de mon voyage récent en Libye, que des attaques excessives par rapport à la réalité ont été menées par le CNT, par voie de déclarations hostiles, contre l’Algérie. Je n’en connais pas les motivations mais je sais que le CNT n’a pas apporté la preuve des griefs qu’il a retenus contre Alger.
    Après la Libye, doit-on s’attendre à un prochain ?
    Franchement, je ne le pense pas. L’intervention militaire coûte très cher et pour se faire rembourser cela prend un peu de temps quand-même ! L’Occident vit une crise économique sévère. Et puis, le cas de la Syrie est différent… la Russie et la Chine sont contre toute intervention en Syrie.
    Justement comment expliquez-vous la timide réaction de la Chine pourtant bien implantée en Afrique désormais ?
    C’est le propre de la position chinoise que de ne pas s’ingérer politiquement.
    Prudence sur un continent dont elle ne maîtrise pas encore toutes les données. La Chine veille à ses intérêts : énergie et terres arables.
    (*) Voir encadré 

    Un rapport contre la propagande

    Ce sont le Centre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme, le CIREV-AVT, et le Centre français sur le renseignement, CF2R, soutenus par le Forum pour la paix en Méditerranée, qui ont publié un rapport en mai dernier suite à une mission d’évaluation auprès des belligérants libyens effectuée par une délégation entre le 31 mars et le 25 avril 2011. Ledit rapport intitulé «Libye, un avenir incertain» signale dans son préambule : «La délégation, vu sa composition, a bénéficié d’une expertise approfondie dans l’analyse et le décryptage des situations de crise et de la désinformation. Tout au long de sa mission, dans un conflit plus médiatique que proprement militaire, elle est restée particulièrement vigilante aux risques de manipulation de la part de ses interlocuteurs. Elle a, bien entendu, décidé de se tenir à distance des contempteurs de la rébellion comme des thuriféraires du régime de Tripoli.» On y découvre une analyse immanente dans une écriture immédiate de l’histoire avec cet énoncé qui résume assez bien l’esprit des conclusions finales du rapport à la rigueur scientifique : «L’intervention occidentale
    est en train de créer plus de problèmes qu’elle n’en résout. Elle risque fort de déstabiliser toute l’Afrique du Nord, le Sahel et le Proche-Orient et de favoriser l’émergence d’un nouveau foyer d’islam radical, voire de terrorisme, en Cyrénaïque. La coalition parviendra peut-être à éliminer le guide libyen. Mais l’Occident doit prendre garde qu’il ne soit pas remplacé par un régime plus radical et tout aussi peu démocratique.» (lire le rapport intégral sur www.cf2r.org).
    Le Jeune Indépendant, 27/08/2011
  • Crise libyenne, La ruée vers le pétrole a commencé

    Le Conseil national de transition prend ses quartiers à Tripoli. Au-delà de la transition politique à préparer, ce conseil, qui fait office de gouvernement de transition,  se serait donné trois priorités : capturer l’insaisissable Mouammar Kadhafi avec l’aide «des renseignements et des équipements de reconnaissance» de l’Otan, reconquérir l’ensemble du territoire où des fronts de combats avec les pros Kadhafi subsistent et récupérer, dès la prochaine Assemblée générale des Nations unies, le siège de la Libye.
    .Mouammar Kadhafi qui est convaincu qu’il  retrouvera le pouvoir lorsque la campagne de bombardement de l’Otan cessera, appelle à la résistance. « Il faut résister contre ces rats d’ennemis, qui seront vaincus grâce à la lutte armée » dit-il dans un enregistrement diffusé par Arrai, une chaîne satellitaire syrienne. « Rue après rue, ruelle après ruelle, maison après maison, (…) les tribus qui sont en dehors de Tripoli doivent marcher sur la ville. Chaque tribu doit contrôler sa région et empêcher l’ennemi de poser le pied sur sa terre sacrée ». « L’ennemi se fait des illusions (…). Nous le vaincrons grâce ». «Sortez de chez vous, libérez Tripoli», lance-t-il à ses partisans.Le Conseil de sécurité qui a conclu que « l’ère Kadhafi touche à sa fin »  a accepté jeudi de débloquer 1,5 milliard de dollars d’avoirs libyens (500 millions iront au groupes humanitaires internationaux, 500 autres au CNT pour payer des salaires et le reste à un fonds international pour acheter du carburant).  Un montant loin des 5 milliards de dollars réclamés par le CNT en  « urgence ». L’Italie qui ne souhaite pas se laisser distancer par la France et la Grande Bretagne dans son « ancienne colonie », a donné l’ordre « pour le dégel d’une première tranche » de 350 millions d’euros. Ce montant fera t-il oublier la « position ambiguë »  au Silvio Berlusconi qui au début de l’insurrection à la mi-février, hésitait à critiquer Kadhafi ? La France compte rouvrir « rapidement » son ambassade à Tripoli. Moustapha Abdeljalil le chef du « bureau exécutif » CNT qui estime que le conflit a fait déjà « plus de 20.000 morts », promet de récompenser, lors de la reconstruction du pays, les Etats qui ont aidé la Libye « en fonction de leur soutien aux insurgés ». Redistribution du pétrole libyen sur fond d’une rivalité de type colonial ? Un aperçu pourrait être donné jeudi prochain à paris, lors de  la conférence des «amis de la Libye. Le CNT qui pourrait être déstabilisé s’il ne  répond pas besoins essentiels de la population, comme le paiement des salaires, tiendra t-il ses promesses ? Sur le terrain, les rebelles tentent de progresser vers Syrte, la ville natale du « guide ». Une ville qui a été soumise hier à un bombardement de   l’Otan. Notamment des Tornado  britanniques. Amnesty International appelle à l’arrêt des tortures et mauvais traitements, pratiqués selon les témoignages qu’elle a recueillis, et par les rebelles et par forces loyales à Kadhafi. « Les jours et semaines qui viennent s’annoncent critiques » prévient Hillary Clinton plus convaincue que jamais que « l’avenir de la Libye ne sera pacifique que si les responsables et le peuple de Libye se tendent les bras dans un esprit de paix ».
    Boukrine, 26/08/2011
  • Les clés pour comprendre la position algérienne

    Après six longs mois de guerre civile, 20 000 attaques aériennes de l’Otan, une destruction systématique des centres névralgiques de Tripoli (pour mieux accaparer les projets de reconstruction), des milliers de morts civils, l’exode de plus de 500 000 travailleurs subsahariens vers leurs pays d’origine -Niger, Tchad et Mali, notamment-, les forces occidentalo-atlantistes viennent de livrer Tripoli et le pays tout entier au CNT. Rien n’aurait été possible aux rebelles sans les officiers américains et français, très présents à Benghazi dans la chaîne de commandements et les centres opérationnel ainsi que les frappes aériennes ininterrompues de l’Alliance Atlantique. 
     
    Pour l’Algérie, il s’agira de reconnaître, de facto, le CNT. Les divergences conjoncturelles se dissiperont avec le temps. Reste la politique, qui est l’art de traiter aujourd’hui des questions de demain, en oubliant ce que fut hier, et les réalités du terrain contraindront les nouveaux dirigeants libyens à regarder vers les interlocuteurs de leur milieu géographique naturel, c’est-à-dire l’espace maghrébin, à qui ils sont rattachés viscéralement. La position algérienne, que d’aucuns ont jugé décalée par rapport aux enjeux stratégiques qui agitent le monde arabe et maghrébin, ou estimé « pas politiquement correct », ou carrément manquant de « realpolitik », a été justifiée dès le début par une série de paramètres. 
     
    En fait, l’Algérie a fait partie des 170 pays dans le monde qui n’ont pas encore reconnu le CNT une semaine avant la chute de Tripoli. Des pays majeurs dans l’espace arabomusulman comme l’Égypte, la Tunisie, le Maroc, l’Arabie Saoudite, la Syrie, la Malaisie n’avaient pas encore reconnu le CNT avant le 20 août. La position de l’Algérie a été adoptée par la quasi-totalité des pays africains, et des pays comme l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Tchad, le Mali, la Mauritanie, le Niger ou le Sénégal. 
     
    Donc, il ne s’agit pas d’un cas-type, mais la position algérienne a été sciemment interprétée et amplifiée par les capitales occidentales, et tout ce que le CNT allait dire comme accusations et allégations lui est soufflé à partir de Paris. Les attaques du CNT contre l’Algérie – passes d’armes, de carburant, soutien à Kadhafi, etc.- ont été dès le début injurieuses et carrément belliqueuses, poussant Alger à lorgner de haut ces nouveaux caïds du désert. 
     
    La présence de la France dans les centres décisionnels du CNT a fait naître des doutes légitimes sur la portée de cette révolution, ses objectifs et ses dessous. Le va-et-vient de Bernard- Henry Lévy entre Benghazi et Paris, puis entre Benghazi et Tel-Aviv mérite des éclaircissements aussi. Le transit d’un véritable arsenal de guerre vers le Sahel a soulevé des questions à longueur de lignes. La présence d’islamistes radicaux dans la chaîne de commandement des rebelles laissait penser qu’une jonction entre certains chefs rebelles et Aqmi était établie. Le « conquérant » de Tripoli, le nouveau chef militaire des rebelles, Abdelhakim Belhadj, est, pour ceux qui ne le connaissent pas, l’ancien émir du Groupe islamique combattant libyen – Gicl – l’équivalent du GIA algérien. Imaginez un instant un Antar Zouabri à la tête d’une révolution en Algérie, quel aura été la réaction des pays voisins… 
     
    Au début de l’été, un des chefs du CNT est parti au Maroc demander l’appui de Rabat aux rebelles, et par la même occasion, il a fait des déclarations carrément hostiles à l’Algérie, affirmant que le CNT n’est pas prêt à reconnaître le Front Polisario, et qu’il est un allié politique et stratégique de Rabat. Lancé dans un contexte de froideur glacial entre Alger et Rabat, cette déclaration a de quoi laisser perplexe… 
     
    Kadhafi est un allié de l’Algérie depuis quatre décennies. Il avait certes créé des problèmes à l’Algérie concernant des sujets aussi sensibles que les Touareg, le Censad, le Sahel, etc. Mais malgré ses frasques et ses retournements, il avait aussi donné de la stabilité à l’espace maghrébin et de l’agressivité au monde arabe face à Israël et à l’Occident. Et on ne dégomme pas aussi vite une alliance de 40 ans avec le premier souffle de tempête…

    O.M.
    Le Courrier d’Algérie, 25 août 2011
  • Pourquoi Alger n’aime pas le CNT ?

    Depuis le début du conflit libyen, on accuse Alger de soutenir Kadhafi au détriment du Conseil national de transition. Une pression diplomatique s’est installée et continue encore. Mais ne s’agit-il pas plutôt du refus de l’Algérie de cautionner la violation par l’Otan du mandat de l’ONU et son rejet de l’occupation étrangère de la Libye ?

    Depuis le début du conflit libyen, des accusations, sinon des reproches, ont été adressés à Alger pour son soi-disant soutien au régime de Kadhafi. Ces accusations ont porté sur un double plan, d’abord celui d’un soutien militaire et logistique, ensuite au niveau diplomatique. C’est ainsi que l’on a vu le CNT dire que des mercenaires algériens, sinon des mercenaires africains aéroportés, étaient envoyés combattre aux côtés de troupes de Kadhafi. Le même protagoniste avait évoqué des livraisons d’armes qui seraient acheminées par voie maritime en passant par un port algérien. Un porte-parole du Département d’Etat américain, sur la base d’un rapport fourni par le CNT, avait même parlé d’une enquête de ses services pour confirmer ou informer ces allégations.

    Ces accusations n’étaient pas sans gravité, tant elles menaçaient de mettre Alger sous le coup de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU, laquelle «déplore les flux continus de mercenaires qui arrivent en Jamahiriya arabe libyenne et appelle tous les États membres à respecter strictement les obligations mises à leur charge afin d’empêcher la fourniture de mercenaires armés à la Jamahiriya arabe libyenne».

    Or, ces accusations ont été abandonnées par le CNT, qui disait avoir des preuves irréfutables, une fois que le chef de la diplomatie italienne, Franco Frattini, en visite à Alger, devait affirmer que c’est plutôt l’Algérie qui est victime du conflit, avec les armes qui sont récupérées depuis le territoire libyen par l’Aqmi. Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, devait quant à lui mettre un point final aux attaques verbales du CNT, en affirmant de passage à Alger qu’il s’agissait là de «rumeurs sans fondements». Cet épisode devait suffire à calmer le CNT et, plus encore, à démontrer que ce dernier n’a véritablement aucune indépendance et qu’il fonctionne plutôt suivant les ordres de ses «sauveurs» à qui il doit sa propre survie.

    En revanche, ce qui continue d’agacer le CNT, c’est que l’Algérie refuse de sincèrement voir en lui un mouvement révolutionnaire et le représentant légitime du peuple libyen. Depuis le début, l’Algérie a œuvré plutôt pour un cessez-le-feu et l’entame de négociations entre les deux parties, tout en refusant de pencher pour l’une ou l’autre. La diplomatie algérienne a contribué au consensus régional pour la fin de la présence étrangère en Libye, connaissant les malheurs que cela a apportés en Irak et en Afghanistan qui ne sont appelés à connaître ni la démocratie, ni la stabilité de sitôt.

    L’Algérie a réussi au plan africain, avec l’entente africaine pour une solution politique, contre la présence de l’Otan et contre le mandat d’arrêt sur commande du CPI, mais elle a échoué au niveau de la Ligue arabe qui ne sait plus sur quel pied danser.

    Il n’est pas courant pour beaucoup de journalistes d’être d’accord avec Abdelaziz Belkhadem. Mais il a dit une chose juste et conforme à l’histoire du pays en affirmant, avril dernier, qu’il n’avait aucune envie de se porter candidat à la succession de Amr Moussa à la tête de la Ligue arabe, une organisation qui, selon lui, n’hésite pas à inviter l’intervention étrangère contre l’un de ses membres. M. Belkhadem semble avoir raison aussi dans sa réponse au chef du CNT, Mustapha Abdeldjalil, lorsqu’il lui dit que la différence entre les Algériens et ses troupes à lui, c’est que les premiers ont combattu l’Otan, alors que ses troupes se font utiliser par l’Otan contre leurs propres frères. Or, toute demande de départ de l’Otan est entrevue par le CNT comme son propre affaiblissement. C’est là une ligne de fracture irrémédiable entre l’Etat algérien et ceux qui déjà se proclament comme les nouveaux maître de la Libye.

    Aujourd’hui, que Tripoli est tombée entre leurs mains, des figures du CNT libyen continuent d’accabler l’Algérie d’avoir soutenu le régime de Kadhafi et, plus loin encore, commettent l’insolence de lui demander de s’en expliquer. Ce qui n’est, en réalité, qu’une manière d’honorer l’offre de service dont ile se sont rendus coupables.

    Les dirigeants du CNT ne sont-ils pas à l’origine une fracture du régime libyen ? Dès les premiers mouvements populaires de février 2011, certains ont choisi de rester fidèles au régime du dictateur Kadhafi et d’autres ont vu leur salut (et leur recyclage) dans la livraison du pays aux puissances étrangères. Le prétexte, car il en faut toujours un, ce sont les exactions de Kadhafi contre la population de Benghazi. La zone d’exclusion aérienne donc a rapidement été exploitée par l’Otan pour se mêler du conflit libyen et travailler, depuis, à la victoire d’une aile du régime libyen contre une autre.

    Quant aux images de liesses populaires à Tripoli (qu’on n’a pas vraiment vues comme telles), où les récits romantiques sur un peuple qui se libère, tout cela n’est avalé que par les naïfs ou les pro-impérialistes qui croient encore que l’Otan, avec tout ce qu’il a fait en Irak et en Afghanistan, et d’autres opérations antérieures, puisse se transformer en une charmante association de bienfaisance. Or, l’Otan n’a rien fait d’autre que de piétiner, comme toujours, les résolutions de l’ONU dont elle n’avait besoin que pour s’autoriser d’intervenir et cela uniquement pour disposer du soutien de leurs opinions internes.

    En fait, la résolution de l’ONU n’autorise absolument pas l’Otan, ni autre force étrangère, à faire plus que dans la protection des civils et l’aide humanitaire. L’article 4 de la résolution 1973, qu’il faut lire intégralement pour se mettre à l’abri de la désinformation ambiante, dit clairement que «les États membres qui (…) agissent à titre national ou dans le cadre d’organismes ou d’arrangements régionaux (…)» doivent «prendre toutes mesures nécessaires (…) pour protéger les populations et les zones civiles menacées d’attaque en Jamahiriya arabe libyenne, y compris Benghazi, tout en excluant le déploiement d’une force d’occupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur n’importe quelle partie du territoire libyen».

    Le même article indique aussi qu’ils (les États membres concernés, c’est-à-dire les membres de l’Otan dans ce cas, ndlr) doivent « informer immédiatement le secrétaire général (de l’ONU, ndlr) des mesures qu’ils auront prises en vertu des pouvoirs qu’ils tirent du présent paragraphe et qui seront immédiatement portées à l’attention du Conseil de sécurité». Or, bien avant ce qu’on a appelé la bataille de Tripoli, l’Otan n’a eu d’autre objectif que de renverser Kadhafi. Les bombardements intensifs qui ont dépassé les limites de la zone d’exclusion se sont transformés en couvertures aériennes pour l’avancée des rebelles. Des bombardements qui, au rythme d’une attaque toutes les 36 heures, sont passés à la fréquence de trois raids quotidiens. Sans compter les raids qui ont tué des civils et sur lesquels ce CNT si patriotique ne disait rien, ne demandant ni comptes, ni enquêtes pour situer la responsabilité de l’organisation atlantiste qui, pour sa part, préférait nier les faits plutôt que de s’excuser. Ne parlons pas de la complicité du secrétaire général de l’ONU qui reçoit pourtant des rapports détaillés et qui n’a jamais jugé utile de rappeler à l’ordre les forces de l’Otan.

    Le jour où elles sont arrivées à Tripoli, les troupes du CNT ont choisi de s’en prendre à l’ambassade d’un pays qui défend l’indépendance de la Libye, alors que la tradition pour les révolutionnaires est d’attaquer les ambassades des Etats impérialistes, les USA en tête. N’est-ce pas là un signe évident que le CNT n’est rien d’autre que le simple instrument de l’Otan, pire, sa cinquième colonne ?

    Par Nabil Benali

    Les Débats, 25/08/2011
  • L’heure des tunnels

     Par Nordine Mzalla

    Ceux qui veulent ruiner la position d’Alger pendant ce conflit fratricide en Libye, profitant de la débandade du régime de Kadhafi, se précipitent de se tromper pour falsifier d’ores et déjà l’histoire. Que le CNT prenne le pouvoir ou non à Tripoli, on ne pourra ni parler de victoire à son actif ni louer sa légitimité.

    Les faits sont toujours têtus et la conquête de la gestion du pays par les armes contre ses propres compatriotes ne pose jamais les jalons d’une démocratie irréprochable. Les grandes puissances le savent et le rappellent quand elles le veulent ou l’ignorent quand elles le désirent. En l’occurrence, ces derniers jours, on assiste à la vente concomitante de la chute du régime d’un dictateur avec le concept d’appui externe à la démocratisation du pays sous l’égide de l’ONU. Une vente qui ne trouvera pas beaucoup de clients chez les observateurs avertis. Surtout que ce président honni était encore courtisé par la France ou d’autres pays il y a quelques mois, malgré tous ses caprices étalés sous la kheïma.

    A Alger, on ne se contentera pas de se réjouir de la fin du clan Kadhafi parce que la situation s’avère beaucoup plus compliquée et que, comme l’a énoncé le président sud-africain Jacob Zuma, l’OTAN demeure responsable de l’échec d’une solution pacifique en Libye. Dès lors, le triomphe de l’ingérence ne conviendra qu’à ses partisans qui la revendiquent et risque de surprendre le rebelle ivre de joie qui remercie, devant les caméras de télévision, le président Obama pour son aide… en attendant de découvrir les motivations de leurs alliés étrangers.

    Quand les braves de Benghazi ou des autres patelins seront renvoyés dans leur campagne, que des tunnels auront été creusés de la nouvelle présidence vers quelques sièges d’ambassades pour une circulation discrète comme à Abidjan, on pourra alors évaluer la position de l’Algérie face au déchirement libyen. Pour l’heure l’euphorie peut masquer les enjeux.
    Le Jeune Indépendant, 25/08/2011