Mois : avril 2011

  • Sahara occidental : 36 ans de calvaire et ça continue…

    Cela fait 35 années que les Sahraouis vivent le calvaire de n’avoir pas, comme tout peuple, leur propre Etat. Ce ne sont pas les  » réunions- discussions-négociations  » qui ont manqué. C’est pratiquement la même aventure que connaissent les Palestiniens. Il y a seulement une grande différence, c’est l’identité des occupants. Les Sahraouis sont colonisés par des Arabes. Des Arabes colonisent donc d’autres Arabes, ce qui normalement apparaît comme plus grave. Aussi bien pour les Sahraouis que pour les Palestiniens, il n’apparaît aucune perspective prochaine de paix. Même lointaine. Faudrait-il alors les priver tous de rencontres supplémentaires sous couvert de la recherche de la paix, malgré qu’absolument rien de bon n’en sortait et malgré qu’à chaque rencontre, on annonçait des progrès même microscopiques? Des réunions de plus, mais peut être pas de trop dans la mesure où celles-ci vont remplir le vide politique qui existait auparavant. 
     
    Le vide politique laisse toujours la place à l’emploi des armes. Programmées par le SG de l’ONU, les réunions entre le Polisario et les autorités marocaines auront besoin de l’impulsion des Nations unies, car les distances politiques qui les séparent ne fournissent pas de motifs à croire que cette fois-ci c’est terminé, que cette fois-ci c’est la bonne. Les réunions entre les dirigeants israéliens et palestiniennes ne peuvent être impulsées que par les dirigeants américains, car les Etats-Unis constituent la seule puissance à pouvoir mettre la pression sur Israël. 
     
    A ce jour, il n’y a jamais eu de véritables négociations. Discuter n’est pas négocier. Cela est autant valable pour la question du Sahara occidental que pour celle de la Palestine. Les derniers colonisateurs au monde agissent de la même façon. C’est à croire qu’ils se sont consultés. Ils ont en commun de réprimer d’abord, sans chercher à dialoguer. Ils ont en commun d’entamer des discussions et non des négociations lorsque les Nations unies les acculent à rencontrer les représentants des peuples qu’ils colonisent. Ils ont surtout en commun d’ériger des murs. 
     
    Le SG de l’ONU programme chaque réunion. Une nouvelle rencontre. Une nouvelle photocopie. En principe, les représentants du Royaume vont à celle-ci, mais c’est pour chanter la même chanson, invariablement. C’est d’ailleurs la seule chanson que les interlocuteurs marocains ont pour mission de chanter. Les refrains ont fini par être connus par cœur.  » Référendum de confirmation de La Marocanité « .  » Autonomie sous souveraineté marocaine « .  » Ingérence de l’Algérie « . C’est la même chanson que les interlocuteurs israéliens ont pour mission de chanter quand ils rencontrent les Palestiniens.
    Nabil B.
    Le Maghreb, 21/04/2011
  • Maroc, ces jeunes qui font trembler le Makhzen

    Le 24 avril dernier, pour la troisième fois depuis les manifestations du 20 février et du 20 mars, des centaines de milliers de Marocains ont manifesté dans la plupart des villes du pays – Rabat, Casablanca, Tanger, Marrakech, Fès, Tétouan, Hoceïma, Agadir, Kuneïtra, Oujda… — pour réclamer une nouvelle Constitution limitant les pouvoirs du roi et exigeant la démocratie, la justice sociale, la fin de la corruption et la laïcité.
    L’appel avait été lancé par le «Mouvement des jeunes du 20 Février». Mais qui est ce mouvement soutenu par un Conseil national regroupant l’AMDH (Association marocaine des droits de l’Homme), les partis de la gauche radicale — Nahdj dimocrati et le PSU – ainsi que par des syndicats et des organisations de la société civile, et qui parvient à mobiliser des centaines de milliers de personnes et fait peur au Makhzen ? A l’origine, personne n’accordait un tant soit peu de crédit à un appel diffusé sur le réseau social Facebook signé «Mouvement des jeunes du 20 Février». Lors de la conférence de presse organisée par ses initiateurs dont le leader, Oussama El Khlifi, chômeur diplômé et à peine âgé de 23 ans, ces jeunes ne demandaient rien de moins qu’une «Constitution démocratique qui reflète la vraie volonté du peuple», la dissolution du gouvernement et du Parlement et la mise en place d’un gouvernement transitoire » … Bien évidemment, l’audace de ces impertinents a été raillée par les thuriféraires du Makhzen, qui les ont traités d’agents du… Polisario et de l’étranger ! Le 20 février, à la surprise générale, ils sont plus de 350 000 personnes manifestant dans plus d’une vingtaine de villes, dont Casablanca (20 000 manifestants) et Rabat (15 000). «Avant, on se cachait derrière le social pour exiger plus de démocratie, maintenant on le fait publiquement. Ça change tout», assurait Yousra Saher, une des animatrices du mouvement, étudiante en maths, rencontrée à Rabat. Le ton à leur égard change. Le regard aussi. Des partis tentent de prendre contact avec eux. Ils ne cèdent pas. La manifestation pacifique du 24 avril, qui a montré que le mouvement est loin de s’essouffler, les a confortés. Elle intervenait dans un contexte où la Commission consultative doit présenter un projet de révision constitutionnelle d’ici au mois de juin. Présidée par le juriste constitutionnaliste Abdelatif Menouni, elle a rencontré une trentaine de partis politiques et d’associations dont l’Istiqlal, l’USFP, le PPS (ex-communiste), le PJD (islamiste) et le PAM (Parti de l’administration, créé par des proches du souverain). Aucune de ces formations politiques ne s’est prononcée pour une monarchie parlementaire dans laquelle le roi régnerait et ne gouvernerait pas, ni pour la suppression de l’article 19 (le roi est commandeur des croyants) qui consacre la sacralité de la monarchie. Leurs propositions ne visent qu’à des aménagements à la marge. Seuls deux partis politiques – le PSU et Nahdj Democrati – ainsi que l’AMDH (droits de l’Homme), Attac-Maroc, mais aussi le Mouvement du 20 Février, ont décliné l’invitation de cette commission à faire part de leurs propositions. En phase avec les aspirations au changement des jeunes Marocains, le Mouvement du 20 Février exige, outre la mise en place d’une nouvelle Constitution laïque, et démocratique où «le roi règne et ne gouverne pas», la dissolution de la Commission de révision constitutionnelle mise en place par le monarque. «Elle est composée de conservateurs, de gens dociles et dévoués au Palais, qui n’ont jamais contesté le caractère despotique du régime, ni la Constitution actuelle» estime Abdelhamid Amine, vice-président de l’AMDH. Le Mouvement du 20 Février, fort de ses 30 000 membres, qui a provoqué un vaste débat sur la nature du régime marocain, a donné un sacré coup de vieux à ces partis siégeant au Parlement dont la politique s’est toujours inscrite dans le cadre fixé par le souverain.
    Par Hassane Zerrouky
    Le Soir d’Algérie, 28/04/2011
  • Maroc – Algérie : La politique des petits pas

    Alger et Rabat passent à la vitesse supérieure dans leurs relations économiques. Après une longue période de flottement, les deux pays semblent renouveler les contacts politiques à plusieurs niveaux. «Un nouveau climat positif», a déclaré dernièrement Mourad Medelci, ministre algérien des Affaires étrangères. Rachid Benaïssa, ministre de l’Agriculture, est au Maroc pour une visite de travail de cinq jours. Une visite particulièrement longue pour souligner une volonté de «passer à autre chose» dans les rapports, souvent tendus, entre l’Algérie et le Maroc.

    Selon l’agence Maghreb arabe presse (MAP), M. Benaïssa a indiqué que sa visite dans le royaume vise à promouvoir la coopération bilatérale dans le domaine agricole «pour assurer la sécurité alimentaire dans les deux pays à travers un partenariat basé sur l’échange d’expériences». Les deux pays viennent de signer un accord de coopération agricole dans les domaines de la vulgarisation scientifique, du développement de la production, de la lutte contre la désertification et d’échanges commerciaux.
    A Meknès, l’Algérie est présente, pour la deuxième fois consécutive, au 6e Salon international de l’agriculture au Maroc (SIAM). Selon l’agence APS, le roi Mohammed VI a visité le stand de l’Algérie où il a été reçu par Rachid Benaïssa. «Le roi du Maroc s’est notamment intéressé aux différents produits algériens de plusieurs filières exposés et de plus amples explications lui ont été fournies par les professionnels de diverses filières sur le label algérien», a rapporté l’APS. L’Algérie est représentée au SIAM par une quarantaine d’opérateurs publics et privés.

    Avant Rachid Benaïssa, Abdelmalek Sellal, ministre des Ressources en eau, et El Hachemi Djiar, ministre de la Jeunesse et des Sports, se sont rendus au Maroc en visite officielle. L’homologue marocain d’El Hachemi Djiar, Moncef Belkhayata, a fait un déplacement à Alger début mars 2011. Il avait été précédé par Amina Benkhadra, ministre marocaine de l’Energie et de l’Eau, reçue fin février dernier. Ses discussions ont, entre autres, porté sur le renforcement des relations de coopération entre l’Algérie et le Maroc dans les domaines de l’énergie, des mines, de l’électricité et des énergies renouvelables. Alger et Rabat ont signé un mémorandum de coopération dans le secteur des ressources en eau et convenu de créer, à terme, un marché maghrébin de l’électricité avec la perspective de sa connexion à l’Europe.

    Youcef Yousfi, ministre algérien de l’Energie et des Mines, a laissé entendre que l’Algérie pourrait approvisionner le Maroc en gaz naturel à partir des champs de Hassi R’mel. Il a évoqué l’élaboration future d’études techniques pour concrétiser le projet.
    «Nous devons remettre sur le tapis la coopération dans les secteurs les plus sensibles, les secteurs humains. C’est-à-dire l’éducation et l’agriculture. Dans le domaine agricole, nous avons traditionnellement une coopération importante avec le Maroc. Il y a aussi le secteur de l’énergie. Il faut faire évoluer les choses. Et cette évolution finira un jour, sans dire comment et quand, par donner à la qualité des relations entre nos deux pays le niveau que nous souhaitons en Algérie», a déclaré Mourad Medelci, lors d’un entretien accordé à la Chaîne III de la radio d’Etat. Une manière à lui de clarifier la démarche en cours marquée par une accélération des atomes. Il a indiqué que l’évolution de la coopération peut avoir une influence sur la décision d’ouverture des frontières. «Nous n’avons jamais exclu de rouvrir les frontières avec le Maroc. Cela sera dans la nature des choses», a-t-il soutenu. «Il faut ouvrir ces frontières, mais avant, il faut créer les conditions nécessaires. Lorsque la décision sera prise, elle sera appliquée d’une manière honnête et équilibrée, dans l’intérêt des deux parties», a précisé le chef de la diplomatie algérienne dans une autre interview accordée au quotidien Echourouk. Des investisseurs européens, notamment français, ont exprimé leur intérêt pour l’achat de terrains dans le Maroc oriental, non loin de la frontière avec l’Algérie. La perspective de l’ouverture avec l’intensification des échanges commerciaux et la reprise de l’activité touristique sont perçues comme une opportunité en or pour les hommes d’affaires. Idem pour l’achèvement de l’autoroute Est-Ouest qui relie la frontière du Maroc à celle de la Tunisie.

    En visite à Tlemcen, le 16 avril, le président Abdelaziz Bouteflika a déclaré : «Il n’y a pas de problème entre le Maroc et l’Algérie.» «Le problème du Sahara occidental est un problème onusien. Le Maroc est un pays voisin et frère», a-t-il déclaré. Bouteflika a, de la sorte, rompu un long silence sur les relations avec le Maroc. Le message a été vite reçu à Rabat. «Nous considérons que ce sont de bons propos», a déclaré Khaled Naciri, porte-parole du gouvernement marocain. «Cela mérite d’être traduit sur le terrain», a-t-il ajouté, suggérant que l’ouverture des frontières serait un pas concret.
    Les observateurs n’ont pas omis de remarquer que l’équipe marocaine de football, qui a joué face à son homologue algérienne un match qualificatif à la Coupe d’Afrique 2012 à Annaba le 27 mars dernier, a été chaleureusement accueillie par les autorités algériennes.
    Il est évident que la conjoncture internationale a changé avec l’effondrement des dictatures en Tunisie et en Egypte, et bientôt au Yémen et en Libye. Les révoltes arabes sont en train d’amener les diplomaties régionales à sortir de leur cercle fermé. Les Etats-Unis, qui suivent de très près l’évolution de la situation politique au Maghreb, ont encouragé Rabat et Alger à se rapprocher, peut-être même à revoir des principes qui étaient perçus jusque-là comme rigides.

    A Washington, où l’on considère que les réformes politiques engagées au Maroc sont plus rapides et plus concrètes que celles évoquées à Alger, on estime désormais que l’idée d’un Maghreb figé n’est plus recevable pour des raisons géostratégiques sous-entendant des impératifs sécuritaires. Et on relève que les lignes s’activent plus vite que les doctrines diplomatiques. A charge aux Etats de la région de comprendre la portée d’un tel repositionnement qui sera suivi par un plan d’action.
    Un plan qui ira au-delà de la simple «réactivation» de l’Union du Maghreb arabe (UMA), condamnée désormais à prendre en charge les aspirations démocratiques des peuples de la région ou… disparaître.
    Fayçal Métaoui

    El Watan, 28/04/2011
  • Pour les Sahraouis, la répression est «légalisée»

    Les Sahraouis, qui subissent une répression féroce des autorités marocaines, devront prendre encore leur mal en patience.

    Les décideurs du Conseil de sécurité se sont une nouvelle fois montrés insensibles à leurs cris de détresse face à la machine répressive de Sa Majesté le roi Mohammed VI. Pour une année encore, il n’y aura point de mécanisme de surveillance des droits de l’homme dans les territoires occupés, pas plus qu’un élargissement du mandat de la Minurso à la protection du peuple sahraouis. Le Conseil de sécurité, notamment ses cinq membres permanents, en a décidé ainsi. Il a, en effet, adopté hier une résolution qui s’est contentée de proroger pour un an le mandat de la mission de l’ONU au Sahara occidental (Minurso) jusqu’au 30 avril 2012. Comme chaque année, ce Conseil a appelé cyniquement le Maroc et le Polisario à «intensifier leurs négociations».

    Comme si le problème résidait à ce niveau, alors que les deux camps campent sur leurs positions quasiment irréconciliables. Une façon bien légère, voire irresponsable, d’entretenir le statu quo qui profite au Maroc. Quant aux Sahraouis, encerclés et massacrés dans leur territoire tout comme ceux qui croupissent, sans procès, dans les geôles marocaines, ils doivent encore attendre que soit appliquée, un jour peut-être, cette arlésienne «légalité internationale». La France et les Etats-Unis, qui n’ont pas hésité à bombarder la Libye sous l’étendard des droits de l’homme pour «protéger les civils», et qui s’apprêtent à avertir demain le régime de Bachar Al Assad au sein du Conseil des droits de l’homme du même «machin» de l’ONU, ferment les yeux sur le martyre du peuple sahraoui. Mais est-ce vraiment une surprise que ce Conseil injuste «ponde» une résolution aussi inique quand on connaît le rôle de Paris qui couvre de son parapluie diplomatique toute tentative de sanctionner le régime de son ami le roi ? Evidemment non. Alors, Gdeim Izik ou pas, Rabat est assuré que ses sous-traitants (la France et les Etats-Unis) à New York font le boulot pour lequel ils sont grassement payés. C’est-à-dire bloquer toute résolution à même de freiner la politique répressive du «commandeur des croyants».
     

    Pari gagné pour Rabat

    Et pour se faire, la France a poussé le ridicule cette fois jusqu’à présenter le Maroc comme étant un pays «modèle» en termes de respect des droits de l’homme et de réformes politiques. Il faut reconnaître que sur ce coup-là, la France s’est couverte de ridicule même si elle le fait pour ses intérêts (très) bien compris au Maroc où ses responsables ont tout acheté…
    Son ambassadeur à l’ONU, Gérard Araud, justifie le silence de la résolution sur les atteintes aux droits de l’homme par «un nouveau contexte politique» au Maroc, dont lui seul semble capter la révolution démocratique. Il fait référence aux mesures prises par le roi «dans le domaine des droits de l’homme non seulement par la création d’institutions marocaines mais aussi en ouvrant le Maroc à tous les rapporteurs des droits de l’homme, et le Conseil en a tenu compte».

    On aura compris, pour le diplomate Français le Maroc va désormais pouvoir régler ces « histoires» d’atteinte aux droits de l’homme par ces nouvelles institutions dès lors qu’il s’agit d’une affaire «interne» au royaume. Mais c’est justement à ce niveau que le problème se pose. Il est vrai cependant que cette «explication» est cohérente avec la position de la France qui défend bec et ongles le plan d’autonome marocain et combat autant le référendum sur l’autodétermination du peuple sahraoui. Seul «consolation» dans la résolution, le Conseil de sécurité admet que le conflit sahraoui est dans «l’impasse». Et pour cause !
    Hassan Moali

    El Watan, 28/04/2011
  • Une piste pour Tanger

    Le 53e anniversaire du congrès historique de Tanger (27-30 avril 1958), au cours duquel le FLN algérien, le Destour tunisien et l’Istiqlal marocain ont pris l’option de l’Union maghrébine, ne donne pas lieu à une commémoration particulière. Cela ne tient pas à un fâcheux oubli ou à un méprisant désintérêt. La raison est très prosaïque : il n’y a pas grand-chose à commémorer si l’on refuse de se saouler aux mots des diplomates qui vous jurent que l’Union du Maghreb avance…

    L’état de réalisation d’une idée qui a l’âge de nos indépendances est trop négligeable. En réalité, il n’y a que quelques structures bureaucratiques vides qui indiquent le niveau où sont parvenus les Etats. Et il reste l’idée du Maghreb, étonnamment vivace en dépit des années de bouderies d’Etat et d’interdiction de relations directes entre les sociétés.

    Si le Congrès de Tanger continue de faire «sens», cela tient à cette extraordinaire permanence de l’idée maghrébine qui reste jeune, même si ceux qui nous gouvernent l’ont gâchée. Comme on avait gâché l’opportunité du 50e anniversaire du congrès pour tenter de négocier un nouveau départ.

    Il y a dans l’absence de manifestations de commémoration pour ce 53e anniversaire un silence de sagesse. Et peut-être une espérance que cette jeunesse – le gros de la société dans tous nos pays – qui cherche à exister en se battant de manière multiforme, trouvera le moyen de faire céder les faux murs érigés par des systèmes faussement dissemblables. En bousculant les ordres établis, ces jeunesses, du moins l’espère-t-on, pourront ouvrir un raccourci dans une histoire qui a été anormalement allongée et entravée.

    En attendant, il faut prendre note des « signes » d’une tentative de dégeler les choses et de remettre en marche la relation entre l’Algérie et le Maroc, deux pays dont les inimitiés d’Etat, aussi tenaces que celles des vieux couples, ont très largement contribué au blocage du processus maghrébin. L’ébauche d’une reprise d’une coopération sectorielle dans des domaines importants – énergie, agriculture… – n’est pas à minimiser. C’est toujours mieux que rien.

    Mais il ne faut pas se leurrer. Ces relations restent marquées par le fait qu’il n’existe pas, sur la question du Sahara Occidental, de possibilité de compromis entre les positions. Cela fait des décennies que ce constat a été fait. Il restait toujours la voie réaliste qui consiste à convenir que, du moment que ce dossier est pris en charge par l’Onu, il peut être soustrait de la relation bilatérale et cesser de l’envenimer et de la rendre impossible.

    Cette approche réaliste reste, encore aujourd’hui, le seul moyen d’avancer sans attendre une hypothétique solution de la question du Sahara Occidental. La piste a été proposée, elle a été rejetée et personne n’y a gagné. Elle semble aujourd’hui – la prudence est de mise – être empruntée par Alger et Rabat pour essayer de faire avancer les choses là où cela est possible. Ce n’est pas enthousiasmant, mais il n’existe pas, à l’heure actuelle, de meilleure piste.
    Par K. Selim 

  • Alger-Rabat : Un rapprochement prudent se profile

    Dans les relations internationales, la règle à suivre est la préservation des intérêts. Il arrive qu’il y ait plus que ce lien d’intérêt, notamment le voisinage, la langue, l’héritage historique aux côtés des enjeux politiques, économiques et sécuritaires. Tous ces éléments sont à prendre en considération dans les relations algéro-marocaines.

    Les bases d’un éventuel rapprochement entre Alger et Rabat semblent être lancées et pourraient aller jusqu’a la réouverture des frontières terrestres fermées depuis 1994. L’on sait que Rabat et Alger sont en désaccord depuis de longues années à cause, notamment du conflit sahraoui qui bloque le processus de l’Union pour le Maghreb arabe depuis plus de vingt ans.

    Toutefois, le Maroc veut à tout prix ouvrir les frontières entre les deux pays afin de profiter des données économiques qui sont en sa faveur, mais l’Algérie n’a toujours pas répondu «positivement» à cette demande.

    Cependant, les données diplomatiques, politiques et économiques ont changé pour les deux Etats qui entament une nouvelle phase «d’un rapprochement prudent», sachant qu’une coopération économique et commerciale entre l’Algérie et le Maroc a toujours existé car le volume des échanges commerciaux était de 720 millions de dollars en 2009 et 570 millions de dollars en 2008.

    Dans ce cadre, Alger a montré sa volonté d’un «rapprochement» à travers une déclaration du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, faite lors de sa visite à Tlemcen le 17 avril dernier, affirmant qu’il n’existait pas de problème entre l’Algérie et le Maroc et appelant à renforcer la coopération avec ce pays.

    A ce titre, il dira que «le problème du Sahara occidental est un problème onusien. Le Maroc est un pays voisin et frère. Il faut coopérer et nous devons coopérer (avec lui)». Cette déclaration a été suivie par des déclarations officielles des ministres des Affaires étrangères, Mourad Medelci, de l’Agriculture, Rachid Benaïssa et de Abdelaziz Belkhadem, ministre d’Etat, représentant personnel du président de la République dans un entretien à TSA. Le chef de la diplomatie algérienne avait déclaré que «la frontière entre le Maroc et l’Algérie ne sera pas éternellement fermée». En visite à Rabat, Rachid Benaïssa a déclaré lundi dernier que la frontière algéro-marocaine sera rouverte «tôt ou tard». Dans une déclaration rapportée par l’AFP, M. Benaïssa dira : «Comme l’a dit il y a deux jours notre ministre des Affaires étrangères, cela arrivera tôt ou tard». «Nous sommes des voisins et des frères et nous œuvrons (…) pour le renforcement des relations bilatérales», a-t-il ajouté.

    Interrogé sur toutes ces déclarations, M. Belkhadem dira : «L’Algérie a formé des commissions pour étudier la possibilité de rouvrir cette frontière et travaille sur ce dossier depuis 2002, date de la visite au Maroc de l’ex-ministre d’État Yazid Zerhouni. La frontière sera rouverte après la résolution des problèmes liés aux différents trafics.

    Cette réouverture ne doit pas constituer un danger pour l’économie nationale ni pour l’économie marocaine. Elle ne doit pas constituer un problème quelconque pour les deux pays».

    Toutefois, la déclaration de Bouteflika suivie d’autres officiels algériens qui laissent croire qu’il y a du «nouveau» dans les relations algéro-marocaines intervient dans un contexte régional difficile avec la protestation qui envahit le monde arabe et les pays du Maghreb, dont la Libye, sachant que la situation dans ce pays a des effets sur la sécurité des frontières de l’Est algérien en plus de la guerre diplomatique déclenchée suite aux accusations voulant impliquer l’Algérie dans ce conflit.
    Par Nacera Chenafi 

  • Témara, le centre de torture du Maroc

    Le Maroc nie l’existence d’un centre de détention près de Rabat où la police secrète torture sans limite. Pourtant, témoignages et rapports d’enquête accablants se multiplient. 

    A l’époque de Hassan II, Témara, à quelques kilomètres au sud de Rabat, était plutôt synonyme de farniente et de douceur de vivre. Cette petite agglomération doublée d’une agréable station balnéaire a depuis radicalement changé de réputation. Au bout d’une longue et sinueuse route qui la borde, se cache, niché au fond des bois qui ceinturent la capitale, un centre de détention secret qui pourrait ravir la palme de l’horreur au tristement célèbre bagne de Tazmamart, symbole des années de plomb.
    Sous Mohammed VI, les services secrets marocains y perpétuent la pratique de la torture, les sévices les plus sadiques, dans des conditions de détention effroyables. Des centaines d’hommes et de femmes –aucun chiffre précis n’est connu– y sont passés, dans des cellules exiguës qui ne seraient guère plus que des culs de basse-fosse.

    Le bagne localisé via Google Earth

    Le bloggeur et juriste Ibn Kafka en a fait le sombre décryptage. Dans une vidéo utilisant la technologie satellitaire Google Earth, Mamfakinch, un Citizen media créé dans le contexte du «printemps arabe» et qui s’inspire dans sa démarche des Anonymous, en révèle la localisation exacte.
    Le complexe de Témara –officiellement siège de la Direction de la sécurité du territoire (DST, rebaptisée DGST depuis 2003)–, «n’est pas seulement un simple complexe de bureaux. Il est étalé sur plusieurs hectares où sont installées des antennes satellitaires. On peut remarquer également d’autres types d’antennes et même une sorte de route à deux voies qui peut permettre l’atterrissage de petits avions, genre Cessna», commente pour sa part le site d’information Demain.  

    «Ce que l’on ne voit pas, par contre, c’est la prison souterraine dont les cellules servent de salles de torture, comme ont pu témoigner plusieurs hôtes, marocains et étrangers, qui y ont été « invités »», ajoute Demain.

    La vidéo montre que le site de Témara n’est qu’à 2 km à vol d’oiseau de la résidence royale de Dar-Es-Salam.

    Un Abou Ghraib à la marocaine

    Depuis que la chasse aux islamistes s’est intensifiée après les terribles attentats de Casablanca en 2003, des milliers de personnes –y compris des femmes et des adolescents– ont été arrêtées lors de rafles effectuées par la police dans les principales villes du pays. Certaines d’entre elles ont été enlevées par les services secrets en violation totale des procédures légales, conduites à Témara, interrogées et torturées des jours durant avant d’être soit relâchées sans suite, soit présentées à la justice pour subir des procès d’abattage.
    Les islamistes ne sont pas les seuls à avoir subi les affres de ce lieu souvent comparé à la prison irakienne d’Abou Ghraib et dont l’Etat nie toujours l’existence malgré les innombrables témoignages (vidéo sous-titrée en français) et les rapports d’enquête menés à son sujet par les ONG internationales, comme Amnesty International (PDF), et locales. A cette occasion, Amnesty International avait accumulé plus de 45 témoignages, dont 20 très détaillés, de détenus, de leurs familles, de leurs avocats et d’autres ONG marocaines, qui ont enquêté sur leurs cas.

    «Des fonctionnaires conduisent la personne interpellée à bord d’une voiture banalisée (comme dans les années 70). Parfois même, les agents DST les brutalisent avant de leur bander les yeux et de les emmener vers un lieu inconnu (…). Outre les sévices que subissent les détenus, il y a surtout les menaces de viol auprès de leurs épouses et autres abus sexuels dont ils sont victimes sur place», avait rapporté l’ONG, qui exhortait le Maroc à «reconnaître les agissements de la DST et à enquêter sur les agissement des agents concernés».

    «Presqu’un an avant les événements du 16 mai 2003, l’opinion publique marocaine découvre que les méthodes d’interpellation et le phénomène de la détention arbitraire qu’elle croyait quasi révolues avaient fait leur réapparition. C’est dans ce contexte que se multiplient les témoignages sur l’existence d’un centre en particulier, dirigé par la DST et situé à la périphérie de Rabat, à Témara plus précisément. Alors même que des pèlerinages symboliques sont organisés sur les lieux qui avaient servi de prisons secrètes (Tazmamart, Kalaat M’gouna, etc.) dans les décennies précédentes, cette découverte constitue un véritable choc, d’autant plus fort qu’il semble attesté que ce lieu, où la torture est pratiquée, a été très utilisé après les attentats criminels de Casablanca», avait pour sa part rapporté en 2004 la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) dans un rapport de mission accablant (PDF).

    La torture «sous-traitée» au Maroc

    Les victimes de Témara se répartissent en gros en quatre catégories: les islamistes de la mouvance jihadiste accusés de fomenter des actions terroristes, les détenus sahraouis indépendantistes pour irrédentisme, des activistes de la gauche radicale et un petit nombre d’individus livrés par la Central Intelligence Agency (CIA) ou le MI5 britannique dans le cadre du fameux programme américain de sous-traitance de la torture à des alliés comme le Maroc, peu soucieux de respecter les droits des prisonniers durant leurs interrogatoires.
    Pour ces derniers, Témara a servi de «site noir» dans la «guerre contre la terreur» menée par les Etats-Unis sous l’administration Bush Jr et certains de ses alliés comme le Royaume-Uni. C’est-à-dire faire à Témara ce que les législations occidentales ne permettent pas en Europe ou sur le sol américain pour extirper des aveux à des «combattants d’al-Qaida» capturés en Irak, au Pakistan ou en Afghanistan.
    Selon un rapport parlementaire européen chargé d’enquêter sur les vols secrets de la CIA en Europe, quelque 40 escales d’avions de la Centrale de renseignement auraient été effectuées au Maroc de 2001 à 2005.
    Mohamed Binyam, un Britannique d’origine éthiopienne, suspecté de terrorisme, avait été arrêté au Pakistan en 2002 avant d’être emmené au Maroc à bord de l’un de ces avions et détenu illégalement à Témara durant dix-huit mois. Premier détenu de la prison américaine de Guantanamo à avoir été libéré par le président Barack Obama en 2009 –après quatre ans de calvaire, toutes les accusations de terrorisme à son encontre ont été abandonnées–, il raconte son «séjour» à Témara:

    «J’ai vécu une expérience que je n’aurais jamais pu imaginer dans mes pires cauchemars (…). Il est toujours difficile pour moi d’imaginer que j’ai été enlevé, transporté d’un pays à un autre, et torturé de façon médiévale, tout cela étant orchestré par les Etats-Unis, avait-il déclaré à son retour au Royaume-Uni. Pour moi, le pire moment a été celui où j’ai compris au Maroc que les gens qui me torturaient recevaient des questions et des documents des renseignements britanniques.» Binyam affirme que ses tortionnaires lui ont tailladé le sexe à l’aide d’un couteau affuté.

    Rabat nie, encore et toujours

    Les sévices sous supervision étrangère, le recours à des «kapos» marocains entraînés pour la torture tels que les a décrits Binyam à l’association Reprieve, qui a fourni une aide juridique à de nombreux détenus de Guantanamo, tendent à confirmer que les geôliers de Témara agissent bien dans le cadre d’un système carcéral hors-la-loi assumé en secret par l’Etat marocain, avec la bénédiction de ses chaperons américain et britannique.
    Malgré tout ce faisceau de preuves, Rabat, par la voix de son ministre de l’Intérieur, Taieb Cherakoui, continue de s’enferrer dans ses dénégations, alors que Mohammed VI vient de céder à la pression de la rue en accordant sa grâce à de nombreux prisonniers politiques. Des prisonniers qui ont pour la plupart goûté aux charmes de son mouroir de Témara.
    Ali Amar
    Slate Afrique, 28/04/2011
  • Le Maghreb économique à l’ordre du jour ?

    L’Algérie plaide pour la réunion des conditions pour une ouverture des frontières entre l’Algérie et le Maroc. Il paraîtrait qu’il y aurait plus de raisons de les ouvrir que de les laisser fermer. La fermeture des frontières bloque l’avancée des négociations de coopération économique, bloquant ainsi la construction du grand Maghreb. Ne serait-ce pas un projet trop grand pour les pays du Maghreb que de décider de faire cette union que l’on sait pourtant impossible? Les dirigeants s’étaient consultés et n’avaient pas pu. 
     
    Les peuples, quant à eux, n’ont jamais été consultés à ce sujet. Pourtant, les dirigeants parlent d’un Maghreb des peuples. En juin 1988, à Zéralda, au lendemain de la clôture du sommet de la Ligue arabe, les cinq dirigeants des pays du Maghreb, en présence du roi de l’Arabie Saoudite, avaient tous affirmé que la question du Sahara occidental ne pouvait nullement en constituer un obstacle. Et pourtant, cette vision n’avait pas été confirmée sur le terrain. 
     
    Le blocage politique des négociations entre le Polisario et le Maroc entrave le processus de construction du Maghreb à la fois sur le plan politique et sur celui de l’économie. Tous ceux qui avaient suivi avec admiration le rôle qu’avait joué la France au Conseil de sécurité de l’ONU pour promouvoir le droit international dans l’agression que s’apprêtait à commettre l’hyper puissance américaine contre l’Irak espéraient qu’enfin, la justice . Internationale serait une préoccupation qui influerait sur toutes les décisions onusiennes. Il aurait fallu que dans le cas du Sahara occidental, qu’une puissance comme la France s’en tienne à la résolution des Nations unies, elle qui avait travaillé au sein du conseil de sécurité de l’ONU à la promotion du droit international dans le cas de la guerre contre l’Irak. La France avait ouvert la voie à l’espoir mais l’a refermée avec sa position dans l’affaire sahraouie. 
     
    Les populations sahraouies souffrent à double raison. Pas de souveraineté politique sur leur Etat car encore colonisées au troisième millénaire bien amorcé, pas de souveraineté sur leur devenir économico-social pour cause de colonisation de leur pays. Pourra-t-on réellement dire, maintenant, après la position de la France sur la question du règlement du conflit Maroc- Polisario, qui a révélé un parti pris flagrant en faveur du Maroc, que le projet de l’Union méditerranéenne est sur la bonne voie ? Il est vrai qu’un tel projet nécessite que les conflits dans toute cette zone cessent et que s’installe la stabilité politique comme préalable à la stabilité économique et à la réunion des conditions d’une coopération qui pourrait être poussée jusqu’ à la possibilité de penser à une intégration économique. 
     
    Toutes les questions sont sensibles dans cette zone, aussi bien la question du conflit israélo-palestinien que celle du conflit dans le Sahara occidental. La France a tout fait rater. Pour elle-même également car c’est dans le respect du droit international qu’elle pourra retrouver son rôle moteur de la construction de l’Europe et de l’Union pour la Méditerranée. Mais, veut -elle continuer à jouer ce rôle ? 
    N.B. Le Maghreb, 28/04/2011
  • La petite île veut voir et vivre : Tigzirt sur mer et vogue l’avenir

    Tigzirt el lavhar, ou Tigzirt sur mer fait la différence. Dans cet îlot de la haute Kabylie, il fait bon vivre. En dehors bien sûr des vicissitudes de la vie courante, où on s’échine comme partout ailleurs à assurer sa subsistance quotidienne. En témoignent, d’ailleurs, ces tentatives d’interpellations populaires des autorités locales de cette dernière semaine de mars, à être plus regardant sur les manques à gagner dans cette ville côtière, qui ne vit en fait de ses atouts économiques qu’à la haute saison estivale. Trois mois pleins et encore ces dernières années, avec l’intervention du mois de Ramadhan, l’opportunité de remplir les caisses des infrastructures touristiques reste maigre. Mais qu’à cela ne tienne.
    Puisque déjà, la région se prépare à accueillir le rush entre juin et juillet. La saison qui s’ouvre pour les étrangers à Tigzirt avec l’ouverture de la période estivale, le 1er juin, s’annonce de bon augure. Car, à la faveur du festival  national du film amazigh qui vient de clôturer sa 11e édition dans la ville d’Azzefoun, ville limitrophe de Tigzirt, les regards sont déjà braqués vers cet été prématuré en ces journées bien chaudes de mars. De belles journées qui donnent un avant goût de ce qui attend les estivants en leur suggérant le rendez-vous des vacances. Les questions fusent de partout, les interrogations se bousculent, on s’inquiète de tout, des structures d’accueil, des tarifs des séjours, des possibilités de camping, de locations de maisons privées, de programmes hôteliers, des endroits intéressants à visiter et bien entendu des infrastructures existantes, aux fins de faire son choix, si choix il y a, de prendre option pour les formules qui sont pratiquées par les opérateurs touristiques.
    D’emblée, Tigzirt sans les grandes phrases descriptives des atouts de la ville que les autochtones mettent en avant en une belle fierté, veut le meilleur pour ses habitants. Et leurs portes-parole ont décidé de faire entendre leurs voix en bloquant les axes routiers qui mènent de Tigzirt à Azzefoun, sa voisine distante de près de 25 kilomètres. Pendant deux jours, dimanche et lundi, 20 et 21 mars, la circulation automobile a été coupée comme dernier recours à des revendications socioéconomiques, liées plutôt à l’édification de structures de jeunesse et de culture. Puisque ce sont ces mêmes jeunes qui ont dressé des barricades sur les routes, manifesté leur ras le bol en  tentant des attroupements dans les rues principales de la ville. Signes de solidarité ou contrainte de sécurité, plusieurs commerçants ont fermé boutique et ont ainsi perturbé l’approvisionnement quotidien des ménages et des établissements hôteliers des alentours.
    Un état de fait qui doit sa manifestation à ce qui a été édifié ces derniers jours à Azzefoun à la faveur de la tenue dans cette ville côtière du festival national du film amazigh qui  y a créé l’événement du 19 au 23 mars dernier. Puisque le tout Azzefoun a vécu au rythme de cette 11e édition qui a vu par la même ressusciter les grandes figures de l’art national dans toutes ses expressions, étant le giron de nombreux artistes qui en sont originaires, y sont nés ou qui y ont grandi. Près d’une centaine d’entre-eux, qui  ont été rappelés à la mémoire frappée de leur portrait, flanqué à hauteur des banderoles hissées au dessus du nouvel établissement culturel, la bibliothèque communale, contiguë à la maison de jeunes, au centre culturel baptisé Tahar Djaout, originaire d’une des village d’Azzefoun, Oulkhou, de la salle omnisport où se sont déroulées l’ouverture et la clôture du film amazigh. Infrastructures que le festival a impulsées auquel revient aussi le mérite d’en avoir accéléré la réalisation. Puisque déjà à la veille de cet événement, les festivaliers, organisateurs s’entend, ont été confrontés au non achèvement de cette opération. Ce qui a impulsé avec leur aide, les autorités à précipiter les finitions, comme le bitumage des lieux.
    DES INFRASTRUCTURES À POURVOIR
    Et c’est d’ailleurs dans des bâtiments neufs, à l’odeur de peinture fraîche  qu’a pu se tenir ce festival. Une belle opportunité qui dans son sillage a entraîné un autre projet pour Azzefoun,  celui qui verra dans un futur proche la réalisation d’une grande infrastructure cinématographique dont les autorités ont assuré  sa réalisation pour l’an prochain. Un vide à combler, vu que la ville ne possède pas de salle de cinéma ou une salle de spectacle. Structures dont il a été ressenti l’absence et l’urgence d’édifier à l’avenir. Car, tous les films visionnés à cette rencontre du cinéma amazigh, l’ont été sur un écran de fortune à la salle omnisports qui ne répond aucunement aux exigences d’une projection au sens propre du mot.
    Et c’est précisément ces nouvelles opérations de réaménagement qui sont venues palier un tant soit peu l’absence de structures d’accueil pour la jeunesse et la culture qui restent insuffisantes dans cette commune, l’élément déclencheur d’ailleurs de la manifestation coléreuse de leur homologue Tigzirt. Là où il n’y a pratiquement pas d’infrastructures qui puissent répondre à cette autre condition d’épanouissement vital à une communauté, source de création d’emploi, de formation, d’ouverture économique  et culturelle.
    Une pointe de jalousie somme toute légitime qui a mis le feu aux poudres et pousse à la réflexion. Même si dans les propos, l’excès va jusqu’à condamner l’organisation d’une telle manifestation d’envergure qui a selon les commentaires qui ont couru la ville, engendré beaucoup de dépenses, engloutissant un budget, il est répondu que la tenue de telles opérations sont au contraire aussi source de financement, puisque autour de pareils événements, il y a des rentrées d’argent opportunes pour la commune, à travers toute la logistique de l’organisation.
    Peut-être est-ce l’arrière pensée qui a secoué les réflexes de cette expression de la rue ?… A point nommé aussi peut-être ?
    Et Tigzirt gagnerait à prendre des leçons de cette revendication populaire. Ce qui serait à tout point de vue rentable pour cette ville côtière dont les montagnes viennent s’échouer dans la mer et qui font d’elle une région à vocation touristique d’abord. Et ce même si de ce côté-là aussi, elle n’en est pas plus lotie. Car, il faut dire que les paysages, l’environnement, les sites, la nature qui  font la beauté incontestable de Tigzirt et lui confèrent une place de choix dans le pays, à travers ce qui est appelé communément les atouts touristiques d’un lieu dit, ne peuvent à eux seuls suffire à la survie de  la région, à l’instauration d’une politique touristique et assurer l’équilibre budgétaire d’une commune qui, à priori, devrait en faire sa première ressource économique.
    Un détour au cœur de la ville renseigne sur le degré chétif des investissements. Côté hôtelier, la maigreur. Il y a certes le Mizrana qui doit son nom à celui du massif forestier qui recouvre la région et ses environs. Espace végétal luxuriant, vues imprenables, paysages naturels édifiants…
    LE TOURISME, OUI, MAIS…
    Cet édifice a été repris à l’Etat par le privé. A partir de la mi-juin, la cagnotte explose. L’infrastructure revue et corrigée fait le plein chaque été. Toutes formules de séjour confondues. Le service de qualité répond aux normes de la prise en charge des vacanciers. Ces derniers qui se bousculent la saison estivale, des régions limitrophes, d’Alger et de l’étranger à Tigzirt ont aussi ce loisir de louer des maisons individuelles, notamment au village de Sidi Khaled. Les annonces passent via Internet et le tour est joué. Le rush y est garanti.
    Et malgré la pauvreté de l’exploitation en infrastructures d’accueil, la ville tente de soigner sa mise, en offrant au visiteur cette occasion d’humer l’air marin en déambulant dans ses rues qui montent, animées par commerces divers et circulation qui se fait dense.
    La journée offre des haltes ensoleillées dans ses ruelles bordées de maisons aux restes d’une architecture coloniale. Ces bâtisses encore debouts ne concurrencent presque plus devant les nouvelles habitations édifiées avec cet effort de lui donner un cachet qui épouse le paysage. Partout de la toiture et sans trop de hauteur. Même si de toit, aujourd’hui, il en est de faux avec cette espèce de matériau qui recouvre les bâtisses. Mais les maisons non encore achevées, toujours en chantiers, l’emportent sur celles qui sont de livraisons récentes. Elle ne sont pas souvent de bon goût, trop présomptueuses, dans leur luxe sans harmonie. Elles en mettent plein la vue, sans cette recherche du beau sans l’esthétique grandeur nature. Les routes en véritables fer à cheval, font des virages de véritables casses-cou à ceux qui sont peu vigilants au code de la route, dont celui de la limitation de vitesse, surtout à la nuit tombée où l’éclairage manque le plus.
    En ville, on respire mieux. La descente vers le port amorce cette belle occasion à ne pas rater, de retrouver le passé romain de l’île kabyle. Il est là, présent dans ces surfaces dallées de ruines, qui datent du IIIe ou Ve siècle après JC, entre les restes d’un ancien port, du temple du Génie, la basilique… Une véritable cité antique où viennent s’abreuver d’amour et de sérénité les couples, les enfants gambader, les familles se prélasser  en quête d’un coin reposant. Un véritable havre de paix.
    Ici, face à la mer, surplombant le port remis à neuf, le parfum fort d’iode fait souffler un vent de liberté. Pour l’humer, il est à échanger à l’entrée de cette Place romaine, 20 DA aux adultes et 10 DA aux enfants. Un petit pécule qui ne démérite pas, à profiter d’un site  bien entretenu et propre. Ce qui lui confère une belle et régulière fréquentation. Immortalisée à chaque monceau de ruine, le portable venant à la rescousse quand l’appareil photos fait défaut.
    A LA PROMENADE DU PORT
    Beaucoup de monde partage toute la journée cette villégiature citadine entre coucher du soleil et promenade sur le port. Là où des sardiniers proposent une variété de poissons frais que les restaurateurs se précipitent à cuisiner. L’espadon règne en maître suivi de la crevette, de la raie, du rouget et de la sépia. Un bel chalandage d’une pêche qu’il est conseillé de prendre aux premières lueurs du jour, sinon, il vous fait revenir demain.
    Autour du port édifié en 1900 et réaménagé dans les années 1950, reflète un autre remuement, encore tout empreint d’une nouvelle reconstruction. Il est bordé de larges allées pour la promenade, égayé par la coquille toute blanche d’un grand coquillage qui vient apporter sa part au décor. Des bancs entourés d’espaces verts, tout autour, des aires de jeux pour les enfants, des abris huttes sous lesquelles on se laisse aller, au fouettage de l’air marin. L’heure est au farniente en ce début d’après-midi. Le cri des mouettes dispute  le bruit aux cris joyeux des enfants qui dévalent des toboggans et se lancent à corps éperdus sur les balançoires. Pourtant, c’est le calme qui dénote dans tout cet espace, voué à la brise marine. La mer l’emporte dans tout ce qu’elle apporte de paix. D’immensité ; de bleu. A la sortie de la ceinture portuaire, une longue échappée par le front de mer, frangé d’une longue balustrade. La déambulation dure toute la journée. La nuit appartient aux noctambules. Dans les secrets d’une vie que l’on veut  ailleurs, qui peut être pourtant trouvable sur place, là sur ce petit îlot, sur lequel les yeux se sont ouverts et dans lequel le corps a connu ses premiers débattements dans l‘eau qui n’a pour l’autochtone, nulle part ailleurs sa fraîcheur, ni sa saveur.
    Et quel bonheur d’y avoir goûté à ses pétillements, d’avoir bu la tasse, tout enfant encore… Les gens de la mer, ceux de Tigzirt en connaissent un plongeon, ou le plongeon. Comme tous ceux qui sont nés,  ont grandi et vécu avec pour tout horizon, le bleu de l’océan. Il n’y a pas mieux placés qu’eux pour comprendre sa colère et l’y laisser aller, les jours des vagues frondeuses ; et se prendre à son calme, les jours de résurrection. Entre les deux, il y a longtemps que les comptes ont été soldés. Surtout pour celui qui y vit et en vit. Point de regrets ; que de l’orgueil bien placé. Et combien même la montagne est haute. Elle finit toujours les pieds dans l’eau. Tigzirt el levhar est ainsi soit-il.
  • «La situation sécuritaire au Sahel est grave et préoccupante»

    Le ministre des Affaires étrangères du Mali, Soumeylou Boubeye Maiga, arrivé hier à Alger porteur d’un message du président Amadou Toumani au président Bouteflika, est venu dans un seul but : arracher des hauts responsables algériens une promesse de coopération militaire et sécuritaire accrue afin de mater AQMI qui est sur le point de prendre le contrôle absolu de Tombouctou.

    L’émissaire du président malien a été reçu en début d’après-midi par le président Bouteflika. L’audience s’est déroulée à Djenane El-Mufti en présence du ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, et du ministre délégué chargé des Affaires africaines et maghrébines, Abdelkader Messahel.
    Les Maliens sont venus solliciter auprès des Algériens un soutien ferme et un engagement franc pour soutenir l’armée malienne dans sa lutte contre le terrorisme et le narcotrafic dans le nord du Mali. Juste après sa rencontre avec le ministre des AE, Mourad Medelci, Maiga a donné le ton de sa visite. Il avait estimé, à cet égard, que la situation sécuritaire dans la région du Sahel «demeure grave et préoccupante et nécessite que nous conjuguions encore plus nos efforts pour pouvoir trouver les réponses les plus adéquates à cette situation».
    Le message du président malien, au président Bouteflika, contient, selon lui, une «analyse de la situation régionale (et comment nous voyons) l’évolution et le renforcement de nos relations bilatérales dans un contexte extrêmement perturbé où toutes les menaces auxquelles nous étions confrontés se retrouvent amplifiées».
    Maiga a souligné, dans ce contexte, que sa visite à Alger s’inscrivait dans l’objectif d’»instaurer une sécurité immédiate dans la région mais aussi une stabilité plus globale et plus durable».
    Le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, et l’envoyé spécial du président malien, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Soumeylou Maiga, ont coprésidé hier matin une réunion qui s’est déroulée à la résidence d’Etat de Djenane El-Mithak en présence du ministre délégué chargé des Affaires africaines et maghrébines, Abdelkader Messahel, et des membres des délégations des deux pays.
    L’Algérie n’est pas le seul pays à avoir sollicité son voisin sahélien depuis que le Mali a décidé de rompre définitivement avec l’ancienne puissance coloniale. Les Etats-Unis d’Amérique ont également été sollicités au même titre que l’Algérie. Bamako a reçu vendredi dernier la visite du général Carter William E. Ward, chef du commandement africain des forces armées américaines (Africacom). Ce dernier a déclaré que son pays s’engage à soutenir l’armée malienne dans la lutte contre le terrorisme et le narcotrafic dans le nord du Mali.
    Le général William E. Ward a affirmé cet engagement au cours d’une séance de travail avec le ministre malien de la Défense, Natié Pléa, et d’une réunion avec le chef d’état-major général des armées du Mali, et tous les chefs d’état-major et directeurs de services centraux des forces armées et de sécurité du Mali.
    Le Mali est confronté au terrorisme et au trafic de drogue dans sa partie saharienne, principalement à Tombouctou où des éléments d’Al-Qaïda au Maghreb (AQMI) trouvent refuge après des prises d’otages en territoire malien ou dans les pays voisins (Mauritanie, Niger). Un trafic important de drogue à destination de l’Europe se déroule également dans le septentrion malien. Ainsi, AQMI, qui est par ailleurs de connivence avec des réseaux de narcotrafiquants, deviendrait le premier pourvoyeur d’emplois et renforcerait son ancrage au sein des populations locales.
    La meilleure réponse à cette stratégie d’AQMI, c’est d’occuper le terrain. Le ministre Maiga a expliqué la nécessité pour le Mali et les autres pays partageant la bande sahélo-saharienne d’être non seulement présents sur le terrain, mais aussi de coopérer dans le cadre d’une lutte commune.
    Mahmoud Tadjer
    Le Jeune Indépendant, 28/04/2011