Année : 2010

  • L’accord de pêche UE-Maroc pourrait être revu

    L’Union européenne compte réviser ses accords de pêche avec le Maroc. La commissaire européenne pour la Pêche et les Affaires maritimes, Maria Damanaki, a commencé ses consultations avec d’autres membres de l’instance pour relancer probablement les négociations avec la partie marocaine s’agissant de l’accord de pêche qui lie les deux parties. Ces informations communiquées par l’agence espagnole Efe précisent qu’une probable renégociation de l’accord va irrémédiablement écarter les eaux du Sahara occidental de tout accord. 

    Ces mouvements initiés par Maria Damanaki s’expliquent par le fait que l’accord signé en 2007 expirera au mois de février prochain. D’après Efe, la partie marocaine n’a pas encore adressé les documents demandés par la commissaire européenne qui prouvent qu’une partie des revenus de l’accord est destinée aux populations sahraouies.

    Mme Maria Damanaki aura donc à proposer à ses collègues un nouveau protocole avec le Maroc et ce, sans inclure les eaux sahraouies.

    La direction au sein du commissariat européen pourrait aussi proposer un accord «sélectif» qui sera conditionné par une résolution sur le respect des droits de l’homme, ainsi que de faire des opérations de pêche «responsables» en respectant l’environnement. Et dans le cas où les instances de la commission avaliseraient les termes de l’accord, celle-ci adressera alors une résolution officielle en direction du Conseil des ministres européens lui demandant de négocier sur la base du protocole défini.

    Depuis mars 2007, un accord de pêche lie le Maroc et l’Union européenne. Cet accord controversé prévu pour quatre ans est condamné par les organisations humanitaires et d’autres cercles qui l’ont jugé contraire à toute déontologie, puisqu’il ouvre à la pêche européenne les eaux au large du Sahara occidental occupé. L’UE n’a pas suivi les Etats-Unis dans la perspective d’un tel accord. Les Américains qui ont signé un accord de libre-échange avec le Maroc en 2004 ont exclu de facto le territoire du Sahara occidental jusqu’à ce que son statut soit clarifié.
    Y .M.
    Le Jeune Indépendant, 18/12/2010
  • M. Anouar Malek se désavoue : Le complot c’est toute une histoire

    Le journaliste algérien Anouar Malek, résident en France, a annoncé hier, selon une dépêche APS, avoir retiré, pour la dignité de son pays, sa plainte déposée en 2009 auprès du comité contre la torture des Nations unies à Genève.
    Il a toutefois expliqué avoir également retiré la plainte contre Aboudjerra Soltani l’accusant de torture en 2005, pour «barrer la route à ceux qui complotent contre l’Algérie à l’intérieur, ceux-là même, a-t-il dit, qui m’ont poussé à recourir à une juridiction internationale dans le but de réaliser, à travers ma juste cause, leur dessein consistant à porter atteinte à l’Algérie».
    Le retrait de sa plainte a pour objectif, selon l’ex-plaignant, de «dévoiler les intentions de ceux qui à l’étranger, pour des motivations bassement matérielles, se mettent au service et aux ordres d’officines revanchardes dont le seul objectif est de ternir l’image de l’Algérie».

    Il y lieu, à la lecture de cette dépêche, de rebondir sur quelques points essentiels. 

    Le premier consiste à voir en la personne du journaliste plaignant, aujourd’hui repenti, la vulnérabilité de quelques intellectuels algériens sujets propices à une dénationalisation gratuite. L’Algérie de la réconciliation et de la concorde civile en compte des Anouar Malek. Des personnages, voués au fatalisme, au suicide, domestiqués, ici et là, pour diverses raisons dont l’argent et, quand il s’agit d’argent, disait Voltaire, tout le monde est de la même religion. 

    Le deuxième point est cet aspect des comploteurs qui veulent ternir l’image de l’Algérie.
    Anouar Malek est justement ce journaliste qui dans un journal de nos «frères voisins» a déclaré au sujet de la lutte d’indépendance des Sahraouis (Sahara Ocidental envahi par le Maroc en 1975, ndds), pour contrecarrer le principe fondateur de notre indépendance : «La création d’une nouvelle entité dans la région maghrébine l’exposerait à la naissance d’innombrables autres entités.» Avant de conclure : «Les dirigeants du Polisario sont de simples agents algériens et ne disposent d’aucune indépendance dans la prise de décisions.» A ce propos, A. Malek a lui-même interviewé le déserteur militaire marocain Abdelilahou Issou qui accuse publiquement le Maroc de vouloir empoisonner l’Algérie avec les stupéfiants et de la transformer en un centre de transit du haschisch et de la cocaïne. «Je vous dis en toute franchise que le makhzen est prêt à s’allier avec le diable pour se venger de l’Algérie», a déclaré le haut gradé marocain. 

    Les comploteurs ? Les sacs sont pleins : Les Karim Moulay, Hicham Aboud, Tigha, la détention des deux patriotes de la famille Mohamed (Abdelkader et Hocine) mis en examen par le tribunal de Nîmes depuis 6 ans, l’affaire Hasseni… tant de dossiers qui revêtent le sens même de la manipulation et le complot contre notre pays. 

    Quant au comité contre la torture des Nations unies à Genève, et au-delà de ses nobles missions, ses priorités devraient s’orienter ailleurs. 

    Le Guantanamo américain, les interrogatoires qui durent 20 heures d’affilée, positions douloureuses, isolement, privation sensorielle, aveuglement au moyen d’une cagoule, exposition à la chaleur et au froid, privations de nourriture et de sommeil, utilisation de chiens pour susciter la peur, déshabillage, rasage forcé, recours à des femmes pour conduire les interrogatoires, recours à des pratiques à caractère sexuel en tant que méthodes d’interrogatoire, contacts physiques… 

    Une question se pose cependant : les comploteurs de l’intérieur qui ont poussé A. Malek à recourir à la justice sont-ils ceux-là même que l’armée algérienne combat dans les maquis ?
    S. M.
    Le Jeune Indépendant, 18/12/2010
  • Tant qu’il y aura le «veto»…

    L’Union européenne a exprimé lundi dernier, à l’issue de la 9e session du Conseil d’association Maroc-UE à Bruxelles, son attachement à l’amélioration de la situation des droits de l’homme au Sahara occidental. Lors de la réunion de Grenade, qui consacrait le statut avancé accordé au Maroc, l’UE avait déjà invité Rabat à s’ »améliorer » sur les droits humains dans les territoires occupés du Sahara occidental. Il est vrai que le royaume, qu’on veut à tout prix présenter comme le grand défenseur de la veuve et de l’orphelin, réprimait allégrement, particulièrement depuis l’Intifada que les populations autochtones lui éclatèrent à la figure en mai 2005. Donc, dans le domaine des droits de l’homme, Rabat s’améliore à sa façon, comme viennent de le démontrer ses troupes à Gdeim Izik et à El-Ayoun, la capitale du Sahara occidental. Rabat avait bouclé ces lieux en interdisant l’accès à tout témoin étranger, jusqu’aux eurodéputés, pour mater de manière sanguinaire et à huis clos une population désarmée. 
    Dans son communiqué, l’UE n’a pas condamné la brutalité meurtrière du 9 novembre, elle s’est contentée d’émettre un avis : « Les parties doivent faire preuve de retenue et mettre tout en œuvre pour que de tels événements ne se reproduisent plus. »Un communiqué qu’on ne peut qualifier de juste puisqu’il n’ose pas la vérité et renvoie dos à dos la victime et son bourreau. Ce qui n’est guère encourageant pour la suite des événements concernant le Sahara occidental dont la décolonisation se trouve durablement contrariée depuis l’inqualifiable trahison madrilène. D’autant que les dernières nouvelles font désormais apparaître au grand jour l’inclinaison et la fidélité du gouvernement Zapatero à cette historique trahison. Le comble c’est que Madrid fait partie du groupe des pays amis du Sahara occidental. Un groupe où paradoxalement il n’existe aucun pays africain ni même un pays d’Amérique latine ou d’Asie. Mais un groupe où l’on retrouve la France, ancienne puissance coloniale qui a du plaisir à user de son droit de veto en faveur de son ancien protectorat devenu à son tour colonisateur. Un veto qui assure l’impunité au Maroc mais qui empêche aussi le Maghreb de se faire. En sorte, un veto aussi criminel que celui qui protège Israël. Des vetos qui doivent disparaître.
    M. Z. mohamed_zaaf@yahoo.fr
    Le Jeune Indépendant, 18/12/2010
  • Campements de réfugiés sahraouis : camps de prisonniers ?

    Je ne suis pas de taille et je n’ai pas l’envie ni le temps de me dresser contre les discours officiels et partisans. Mais je ne peux rester insensible à certains propos écrits ou dits.
    « Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose » disait Voltaire. Certains l’ont aujourd’hui bien compris.
    Je ne peux parler que de ce que je connais, les camps sahraouis. Pour y vivre régulièrement depuis 3 ans. Les propos rapportés sont donc tous des témoignages directs.

    Le fait d’avoir des prisonniers donne une légitimité d’humanité à celui qui les réclame. Certains ne se privent donc pas de les réclamer, à cor et à cri.
    Les réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf ne sont pas prisonniers du régime algérien et d’une « horde de séparatistes », comme le scande l’organe de presse royal marocain MAP (Maghreb Arab Press). Il n’est que d’aller sur place pour se rendre compte que les « fidèles sujets séquestrés » sont des hommes et des femmes ayant fuit devant deux armées d’occupation (Marocaine et Mauritanienne) et se réclamant librement d’une République en exil depuis 35 ans.

    Que l’on accède enfin à la requête marocaine. Les réfugiés sahraouis ne demandent pas autre chose que d’être visités, inspectés. Exigeons qu’ils le soient, dans les camps et de l’autre côté de ce mur miné, le plus long au monde. Qui en vérité refuse aujourd’hui la transparence des visites de commissions d’enquête et des médias ? Et en ce qui me concerne, je ne me suis jamais senti aussi libre et en sécurité qu’au milieu des réfugiés du camp d’El Ayoun.

    S’il existe des prisonniers dans les camps, c’étaient des prisonniers militaires marocains, dont les derniers furent libérés en 2005. Quelques uns sont d’ailleurs revenus vivre dans les camps à la suite de l’accueil dont ils furent l’objet lors de leur retour au Maroc. J’ai parlé avec l’un d’entre eux, ancien de l’aviation marocaine, qui m’a fait comprendre qu’il avait été plus utile au Maroc prisonnier que libre et qu’on lui avait fait comprendre.

    Autre polémique : Ces derniers mois, un sahraoui passé côté marocain et ayant choisi de revenir convaincre, naïvement ou d’une façon plus subtilement calculée ?, ses frères des camps du bien fondé de la proposition unilatérale marocaine a été arrêté lors de son retour vers les camps. Le Polisario avait rapidement consenti à sa libération à la demande d’une commission humanitaire. L’émissaire du Hcr, en charge de son raccompagnement par avion au Maroc, s’est vu notifier au tout dernier moment l’arrêt de cette mission et l’interdiction de cette remise en liberté par… les autorités marocaines. Là encore, l’homme était plus utile prisonnier que libre !

    Les vrais prisonniers sahraouis sont au Sahara Occidental ou dans les prisons marocaines. Ceux des camps sont les otages de ceux qui souhaitent par intérêt que la situation perdure.

    A la liste des quelques 500 disparitions forcées sous le règne de HassanII sont venus s’ajouter ceux de ces dernières années et de ces dernières semaines suite à la destruction du camp de Gdeim Izik.

    Je vis dans ce monde surprenant où j’ai vu des femmes soulagées dans un premier temps d’apprendre que leurs maris allaient comparaitre devant des tribunaux d’exception parce qu’elles les croyaient blessés ou disparus, puis dans un second temps désespérées de les avoir vus méconnaissables. Un monde où j’ai entendu des déclarations d’ enfants réclamant qu’on libère leurs pères, emprisonnés depuis plus d’un an sans jugement, d’une mère en grève de la faim trouvant plus indispensable de se battre pour la justice et l’avenir de son peuple plutôt que de rester en vie pour ses propres enfants.

    J’entends encore une jeune femme sahraouie, enseignant le français au camp d’El Ayoun, me dire sa joie d’avoir vue sa famille dans les territoires occupés pour la première fois de sa vie (dans le cadre des programmes d’échange entre camps et territoires occupés), me conter la surprise d’avoir vu une ville et l’océan également pour la toute première fois. Mais je ne pourrai oublier ses larmes lorsqu’elle conclu : Malgré les conditions de vie dans les camps, ici au moins nous sommes en sécurité, nous n’avons pas à souffrir des brutalités que j’ai vu là bas !

    J’ai rencontré dans les camps un peuple exilé, souffrant et espérant contre tout, curieusement libre de pouvoir exprimer ce mélange d’humanité.

    J’ai rencontré le Mandela d’Afrique du Nord, Mohamed Daddach, 26 ans de prison, Daffa, Dahane, Naciri, Tamek, Asfari , reconnus et récompensés comme défenseurs des Droits de l’Homme et non violents, et combien d’autres, tous emprisonnés et torturés qui de leurs seules voix d’hommes, bien mieux que Voltaire disaient :
    « Témoignez, témoignez de la vérité. Pour qu’il ne reste ni silence, ni mensonges ! »

    Le 16 décembre 2010, Jean-François Debargue

    APSO, 17/12/2010
  • Entre les événements du camp Igdem Izik à Laâyoune et les inondations de Casa : Traits d’un État en faillite *

    Voilà un excellent article cosigné par  JAWAD .M et salah .l sur les deux actualités (le camp d’Igdime izik et les inondations de casa) qui ont secoués le Maroc et les marocains ces dernières semaines. un travail de synthèse et d’analyse interpellant:
    M.HAIRANE
    Le Maroc a été marqué ces dernières semaines par une actualité mouvementée. D’une part, le démantèlement par la force du camp de Igdem Izik à Laâyoune  (au Sahara Occidental, ndds) le 8 novembre dernier et les émeutes qui l’ont suivi (13 morts) et d’autre part les inondations qu’a connu l’ensemble du territoire marocain et spécialement la région du grand Casablanca le mardi 30 du même mois (40 morts). Des événements qui ont révélé encore une fois l’échec des responsables dans la gestion des affaires publiques. A l’origine de cet échec une incompétence manifeste, une absence de démocratie et l’adoption de politiques économiques libérales. Cette politique de libéralisation des secteurs publics de base au profit de grandes multinationales de l’eau et d’environnement. Des mastodontes dont le seul objectif est la maximisation du profit même si c’est au détriment de la sécurité des citoyens voire de leur vie.
    Les caches misères
    Les autorités marocaines ont focalisé leur lecture des événements douloureux d’Igdem Izik sur la couverture «biaisée et partielle» faite par les médias espagnols, ainsi qu’aux décisions du parlement européen et certains partis politiques en Espagne. Ces responsables ne se sont pas donnés la peine de fournir des réponses aux questions embarrassantes que se posaient les citoyens au sujet de ces événements. Ils se sont contentés de répéter sans cesse une version officielle pleine de contradictions :
    1. Est-il possible qu’une dizaines de « criminelle » comme le prétend la version officielle tienne en otage 20 000 citoyens contre leur gré?
    2. Les membres du comité de dialogue, dont certains sont accusés aujourd’hui par les autorités comme des pions du Polisario, sont eux même qui ont conduit des négociations avec des responsables de l’état y compris le ministre de l’Intérieur lui-même, pourquoi cette volte-face ?
    3. Si les autorités prétendent la véracité de leur version officielle pourquoi ils ont empêché les journalistes de différents médias d’entrer dans la ville pour s’en rendre compte surplace ?
    (…)
    Devant des revendications sociales, les communiqués émanant du comité d’organisation du camp d’Igdem Izik le montrent clairement[1], après une phase de dialogue, l’Etat décide de «casser» le camp. Par la suite et au lieu de chercher les vraies raisons derrière ce désastre et punir les responsables impliqués dans ce choix, l’Etat a fuit ses responsabilités. Signe de cette fuite en avant, l’organisation d’une «marche populaire». D’une manière irresponsable des milliers de citoyens seront «conduits» à la ville de Casablanca en utilisant toutes les ressources de l’État ; médias officiels et agents de l’autorité inclus. Ce dimanche 28 novembre nous étions devant une ultime tentative de tromperie des citoyens, au devant de cette marche (très) officielle l’ensemble de la classe politique marocaine. Une marche aux allures de cache misère.
    Cette action militante étatique payée de l’argent public illustre parfaitement le deux poids, deux mesures entre cette marche et les nombreux sit-in et marches (vraiment) populaires contre la cherté de la vie, pour exiger des services publics de qualité ou un logement décent, pour protester contre la privatisation de l’eau, etc…Ces mouvements sociaux se retrouvent à chaque fois criminalisés et les citoyens poursuivis[2]. Vive la démocratie à la marocaine !
    Suite à cette marche, les médias de l’Etat célèbrent cette victoire historique contre «les ennemis de la patrie» et salue le renouveau du consensus national. Dans un passé récent, ce vent d’unanimité a valu aux Marocains des années de répression. À partir de 1975, année de la Marche verte, une chape plomb s’est abattue sur toutes les voix qui protestaient contre l’ordre établie sous prétexte de patriotisme. La Marche de Casablanca renoue avec ce chauvinisme, selon les politiciens marocains le Maroc est «victime d’un complot et seul un consensus national peut nous sauver». Au diable la démocratie et la liberté d’expression. L’aire du temps veut étouffer tout regard critique sur ce qui se passe sous nos yeux. C’est le meilleur moyen pour camoufler l’échec patent dans la gestion du dossier du Sahara. Les inondations du mois de novembre dévoilent un autre échec…
    La Lydec (Suez) : Des profits mirobolants et un état des infrastructures désolant
    Le 28 novembre le pouvoir instrumentalise les masses populaires pour crier leur amour (sincère) à leur pays et leur haine «supposée» à leurs voisins algériens et espagnols. Deux jours après, le pays prend l’eau ou plutôt les Marocains des classes populaires prennent l’eau. À contrario avec la marche, les responsables ne sauront pas aux côtés des simples citoyens. Ces derniers ont du batailler seuls pour leur survie. Les inondations ont montré la fragilité des infrastructures du pays. Pourtant, elles ont coûté beaucoup de sacrifices, de dettes colossales qui continuent d’absorber un tiers du budget de l’Etat. Même le plus pessimistes des opposants aux politiques de l’Etat dans le domaine de l’équipement ne pensaient pas que les villes marocaines allaient tomber comme un château de cartes. 24h de pluie ont été suffisantes pour créer un état d’urgence sur tout le territoire. Casablanca qui concentre 60% des activités économiques du Maroc a été la plus durement touchée par les eaux. 40 morts, arrêt total du transport ferroviaire pour une journée, fermeture des écoles, une bonne partie des ouvriers et des employés de la ville n’ont pas pu se rendre à leur lieu de travail et annulation de quelques vols à cause de l’inaccessibilité des aéroports. Les plus importantes administrations et institutions économiques du pays n’ont pas été épargnées, à leur tête le siège social de l’Office chérifien des phosphates (OCP). Le plus grand opérateur économique public (jusqu’à maintenant). Pire, les salles des réanimations des hôpitaux publics n’avaient plus d’électricité durant une journée ! La ville de Casa est tombée dans le noir toute une soirée et ce à cause de l’arrêt de 800, des 4000 postes de distribution d’électricité. Au même moment à Marrakech se tenait les Assisses du tourisme, « le Maroc d’en haut » discuter dans le plus grand confort des palaces marrakchies sur la nouvelle stratégie touristique à l’horizon de 2020 qui ambitionne attirer 20 millions de touristes. Le comble du cynisme !
    24h ont été suffisantes pour se rendre compte de nouveau de l’échec de la gestion libérale de nos villes. Le bilan des privatisations, de la gestion déléguée, des partenariats public-privé et de la bonne gouvernance à Casa est une ville, où la vie s’arrête après une grosse intempérie. La Lydec (filiale de Suez) gestionnaire de la distribution de l’eau et de l’électricité et chargée de l’assainissement liquide et l’éclairage public est le symbole de cet échec.
    Cette entreprise cotée en bourse ainsi les responsables politiques délégataire de ces services n’ont pas assumé leur responsabilité dans cette catastrophe. La Lydec s’est contentée d’un communiqué, où elle accuse «des précipitations exceptionnelles qui représente 50% des quantités de toute une année», un prétexte fallacieux, car le réseau casablancais est supposé supporter plus que les 178 ml annoncés pour ces 24h. le réseau d’assainissement est dimensionné pour une crue décennale c’est d’ailleurs ce que demande Lydec elle-même à ses sous-traitants dans les cahiers de charge[3] qu’elle élabore dans ces appels d’offre.
    À son arrivée en 1997, La Lydec a été présentée comme le sauveur de Casablanca. Son accord de 30 ans, allait lui permettre d’effacer «un passif désastreux de la Région automne de l’eau et de l’électricité», disait ceux qu’ils l’ont amenée. Les inondations de 1996 qu’a connu des quartiers de Derb sultane à Casa allait donner un coup de massue pour la régie publique. Depuis 13 ans, l’entreprise française a fait des profits mirobolants (le résultat net est de 19.8 millions d’euros en 2009[4]) sur le dos des citoyens les plus pauvres. Les hausses de tarifs ont une cadence nettement plus grande que le rythme des investissements de l’entreprise. Ces supposés investissements n’ont même atteint le seuil minimum établi dans le cahier de charges dans l’accord de gestion de l’assainissement. L’audit effectué en 2007 des cinq premières années de gestion montre que le gap d’investissement est de 255 millions d’euros. Cet audit prouve que La Lydec se permettait déjà de distribuer des dividendes, alors que son contrat stipule que cela ne peut se faire avant les dix premières années[5].
    Pour rompre avec les raisons de ces échecs de la gestion de la chose publique sur le plan national ou local, il faut poser toutes les questions même celles qui fâchent et qui vont contre l’air du temps. Il n’y pas que le chauvinisme et la doxa libérale, nous méritons mieux. Il est nécessaire aujourd’hui d’ouvrir le débat contradictoire entre tous les avis et s’éloigner du consensus. Taire des voix discordantes n’a pour but qu’assurer le statu-quo qui profite aux opportunistes de tout bord. Un vrai débat sur la nature et les causes de nos échecs pourra éviter à des citoyens de succomber à la moindre catastrophe naturelle ou dans un conflit politique qui a trop duré et qui coûtent aux Marocains comme aux Sahraouis énormément.
    ********
    Casa le 2 décembre 2010
    Jawad M. & Salah L.
    Militants d’ATTAC Maroc, membre du réseau CADTM
    *****
    [1]Pour plus de détails sur le camp lire ce reportage : http://www.telquel-online.com/446/couverture_446.shtml
    [2] Tous les mouvements de protestations de grande ampleur ont connu ce sort comme les 850 mineurs à Khouribga qui exigeaient leur titularisation ou les habitants du village de Ben Smim qui refusait la privatisation de leur source d’eau.
    [3] Voir les détails du cahier de charges sur www.lydec.ma
    [4] Voir le rapport financier de 2009 sur http://www.lydec.ma/html/down/rapports/RP2009_VF.pdf
    [5] Les journaux marocains ont consacré plusieurs enquêtes sur ce sujet
  • La France et le Gouvernement Zapatero n’ont plus de place dans le groupe des d’amis du SG pour le Sahara Occidental (MAE)

    Bir Lehlu, 17/12/2010 (SPS) Le ministre des Affaires étrangères sahraoui, M. Mohamed Salem Ould Salek a appelé à exclure la France et le Gouvernement Zapatero du groupe des d’amis du SG pour le Sahara Occidental pour leur alignement inconditionnel sur les thèses coloniales marocaines et leur rôle dans le blocage du processus de décolonisation du territoire sahraoui.

    « L’Espagne, sous la direction du gouvernement socialiste, dirigé par M. Zapatero, s’est alignée tout simplement, depuis 2004, sur la politique de Paris en s’activant pour légitimer le fait accompli colonial marocain », a averti le ministre dans une déclaration écrite parvenue à SPS.

    Pour M. Ould Salek, « la présence de ces deux pays au sein du groupe d’amis du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahara Occidental est devenue un obstacle à la contribution positive de ce groupe et affaiblit considérablement les chances de voir le Conseil de sécurité exiger l’accomplissement de la mission de la MINURSO et l’avènement de la paix, juste et durable tant souhaitée par tous les peuples des deux rives de la Méditerranée ».

    Le Gouvernement sahraoui estime en effet que la Minurso n’a pu s’acquitter de sa mission exclusive d’organisation du référendum prévu par le Plan de règlement de 1991, « non pas à cause de la volonté manifeste du gouvernement de Mohamed VI de renier les engagements souscrits officiellement et d’une manière solennelle par le Roi Hassan II , mais parce que les deux pays qui ont colonisé l’Afrique du Nord se sont opposés clairement à une décolonisation pacifique et paisible du Sahara Occidental », a ajouté la déclaration.

    Ces mêmes pays « entendent, contre toute logique, confisquer le droit inaliénable et imprescriptible du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance et faire obstacle à l’exercice de ce droit à travers le référendum d’autodétermination, pourtant accepté par les deux parties au conflit après 17 années de guerre dévastatrice, et endossé à l’unanimité par le Conseil de sécurité et l’Assemblée Générale des Nations Unies », selon le texte.

    Au nom de son gouvernement et du Front POLISARIO, le ministre a lancé un « appel pressant » au Conseil de sécurité pour « assumer ses responsabilités devant ce état de choses », en exigeant « l’accomplissement » du mandat de la MINURSO à travers « l’application du Plan de règlement qui constitue la seule solution que les deux parties au conflit ont solennellement signée sous les auspices et la garantie du Conseil ».

    Le ministre a enfin averti que la paix et la sécurité dans la région nord ouest du continent africain sont « tributaires de la satisfaction totale des droits légitimes et imprescriptibles du peuple sahraoui, le respect des accords signés par les deux parties au conflit en 1991 et 1997 et l’accomplissement par la MINURSO de son mandat au Sahara Occidental ».

    Le groupe des amis du Secrétaire général pour le Sahara occidental est constitué des Etats Unis, la France, l’Espagne, la Russie et la Grande Bretagne, rappelle-t-on. (SPS)

  • Algérie,Wikileaks, Peuple et Pouvoir.

    A la lecture des écrits Wikileaks  publiés par le Monde, il ressort que la position défendue par le Pouvoir Algérien reflète  l’opinion majoritaire du peuple  sur la politique étrangère telle que menée  et révélée par ces écrits. Clairement Wikileaks n’apprend rien aux Algériens des pensées de son pouvoir, soit vis à vis des Rois du Maroc ou des gouvernants de la France, le deux alliés ligués contre vents et marées contre les positions de l’Algérie.

    Ces hostilités politiques sont exécutées de concert sur le terrain contre l’Algerie par les gouvernants des deux États de cette  sainte alliance contre notre pays. A l’ONU et au Parlement Européen sont apparues, et rejetées, dernièrement au grand jour les manipulations des ennemis de l’autodétermination  du Sahara occidental, tel que préconisé par le plan Baker en organisant un référendum.
    Il n’apparaît pas de  charges   » Irrégulières  » de l’Algerie, tant sur ses voisins du Maghreb,  des pays Arabes, Africains, ou autres Israèl. Une  constante de fidèlité et de dignité  honorable  des positions, des engagements et des  principes de l’Algérie sur la scène internationale. Cette transparence et franchise nuisible aux intérêts du pays aux yeux de certains, n’en assoie pas moins la crédibilité de l’Algérie et sa confiance en l’avenir.

    .En mai 2007, la conseillère du président Bush, pour les affaires de sécurité, Frances Fragos Towsend, reçue en audience pendant trois heures trente par le président Bouteflika, a exprimée dans un compte rendu la position de l’Algerie clairement exprimée par le président algérien :

    « Si je pouvais résoudre le problème je le ferais, affirme le président algérien. Mais je ne peux pas parler à la place des Sahraouis . » Ce qu’il faut c’est que « le Maroc et le Polisario trouvent une solution, et ils peuvent le faire avec l’aide des Américains ».

    Les Français, confiera-t-il à une autre occasion, « du fait du poids de leur histoire coloniale au Maghreb, sont incapables de jouer un rôle constructif dans le conflit ». D’ailleurs, ajoute-t-il, « la France n’a jamais vraiment accepté l’indépendance algérienne ». Pour lui, elle tente de régler ses comptes avec l’Algérie « en appuyant le Maroc ».

    . En novembre 2009, devant le chef du commandement américain pour l’Afrique (Africom), le général William Ward, le chef de l’Etat algérien revient à la charge. Selon lui, le projet d’autonomie ( Sahara Occidental ) est à rejeter. « Vous ne pouvez pas défendre l’application d’un principe pour la Palestine et un autre principe pour le Sahara occidental », fait valoir le président algérien.

    Qui détient les rênes du pouvoir en Algerie,  s’interrogent avec scepticisme des étrangers prompts à critiquer  l’Algerie, et à propager les doutes sur tout ce qu’entreprend l’Algérie pour se démocratiser ? Nos traditionnels adversaires, et  certains États, telle l’Angleterre qui dit toujours l’Algerie va bien quand réellement cela n’est plus, ont trouvé la réponse.

    Pour le chef de l’Etat algérien, la réponse est évidente : l’armée algérienne respecte « absolument » l’autorité d’un président qui est un civil et non un militaire, assure t-il en novembre 2009.

    Lorsqu’il revendique devant son interlocuteur d’être au-dessus des militaires, le chef de l’Etat ne s’exprime pas en catimini. Trois généraux de l’Armée nationale populaire (ANP), parmi lesquels le chef d’état major de l’armée, assistent à l’entretien.
    « LA MAISON EST MAINTENANT EN ORDRE » , souligne-t-il. (…) La seule source de légitimité est la Constitution. Tout le monde peut être candidat à l’élection, conformément à la Constitution, même un général.
    Dans son commentaire, le diplomate américain note que les généraux présents à l’entretien n’ont pas bronché lorsque M. Bouteflika a affirmé : « Maintenant les militaires obéissent aux civils. »

    Sur la lutte anti-terroriste, les écrits révélés par Wikileaks ont démontré l’engagement de l’Algerie, malgré le manque d’équipement spécialisés dont elle a été privée durant les longues années 1990 où elle a mené seule le combat contre les hordes décidées à mettre le pays à genoux.
    Vaincu au nord, le terrorisme s’est porté au Sud des frontières Algériennes en se transformant en bandes de preneurs d’otages étrangers, dont certains ont ét froidement exécutés, pour amasser des fortunes et acheter leur allègence auprès de non moins criminel, Ben Laden terroriste international, protégé et utilisé par les USA.
    Ceux qui se consolent des difficultés de l’Algerie quant à venir à bout du terrorisme, et confessent que l’Algerie ne le combat, inondent notre pays de drogue et réclament l’ouverture des frontières à l’ouest, doivent ravaler les confidences faites aux Américains et Européens, alors que les télégrammes adressés par ces chancelleries à leur pays  prouvent le contraire. Les échanges et les rencontres entre les responsables Algériens et leurs homologues Américains sont denses et révélateurs.

    « Aucun pays n’est plus important que l’Algérie dans la lutte contre Al-Qaida (AQMI ) », insiste l’ambassadeur US à Alger,
    « AQMI se développe jusqu’au nord du Burkina Faso, recrute au Sénégal » et « trouvera des faiblesses dans le nord du Nigeria », selon le Monsieur Afrique du quai d’Orsay en février 2010.

    La lecture du reste des publications de Wikileaks affligeraient davantage ceux qui usent du double langage, de la fraternité,  du dépassement du passé, du bon voisinage en Méditerrannée.
    Nomadius, 17/12/2010
  • Entre les événements du camp Igdem Izik à Laâyoune et les inondations de Casa : Traits d’un État en faillite *

    Voilà un excellent article cosigné par  JAWAD .M et salah .l sur les deux actualités (le camp d’Igdime izik et les inondations de casa) qui ont secoués le Maroc et les marocains ces dernières semaines. un travail de synthèse et d’analyse interpellant:
    M.HAIRANE
    Le Maroc a été marqué ces dernières semaines par une actualité mouvementée. D’une part, le démantèlement par la force du camp de Igdem Izik à Laâyoune  (au Sahara Occidental, ndds) le 8 novembre dernier et les émeutes qui l’ont suivi (13 morts) et d’autre part les inondations qu’a connu l’ensemble du territoire marocain et spécialement la région du grand Casablanca le mardi 30 du même mois (40 morts). Des événements qui ont révélé encore une fois l’échec des responsables dans la gestion des affaires publiques. A l’origine de cet échec une incompétence manifeste, une absence de démocratie et l’adoption de politiques économiques libérales. Cette politique de libéralisation des secteurs publics de base au profit de grandes multinationales de l’eau et d’environnement. Des mastodontes dont le seul objectif est la maximisation du profit même si c’est au détriment de la sécurité des citoyens voire de leur vie.
    Les caches misères
    Les autorités marocaines ont focalisé leur lecture des événements douloureux d’Igdem Izik sur la couverture «biaisée et partielle» faite par les médias espagnols, ainsi qu’aux décisions du parlement européen et certains partis politiques en Espagne. Ces responsables ne se sont pas donnés la peine de fournir des réponses aux questions embarrassantes que se posaient les citoyens au sujet de ces événements. Ils se sont contentés de répéter sans cesse une version officielle pleine de contradictions :
    1. Est-il possible qu’une dizaines de « criminelle » comme le prétend la version officielle tienne en otage 20 000 citoyens contre leur gré?
    2. Les membres du comité de dialogue, dont certains sont accusés aujourd’hui par les autorités comme des pions du Polisario, sont eux même qui ont conduit des négociations avec des responsables de l’état y compris le ministre de l’Intérieur lui-même, pourquoi cette volte-face ?
    3. Si les autorités prétendent la véracité de leur version officielle pourquoi ils ont empêché les journalistes de différents médias d’entrer dans la ville pour s’en rendre compte surplace ?
    (…)
    Devant des revendications sociales, les communiqués émanant du comité d’organisation du camp d’Igdem Izik le montrent clairement[1], après une phase de dialogue, l’Etat décide de «casser» le camp. Par la suite et au lieu de chercher les vraies raisons derrière ce désastre et punir les responsables impliqués dans ce choix, l’Etat a fuit ses responsabilités. Signe de cette fuite en avant, l’organisation d’une «marche populaire». D’une manière irresponsable des milliers de citoyens seront «conduits» à la ville de Casablanca en utilisant toutes les ressources de l’État ; médias officiels et agents de l’autorité inclus. Ce dimanche 28 novembre nous étions devant une ultime tentative de tromperie des citoyens, au devant de cette marche (très) officielle l’ensemble de la classe politique marocaine. Une marche aux allures de cache misère.
    Cette action militante étatique payée de l’argent public illustre parfaitement le deux poids, deux mesures entre cette marche et les nombreux sit-in et marches (vraiment) populaires contre la cherté de la vie, pour exiger des services publics de qualité ou un logement décent, pour protester contre la privatisation de l’eau, etc…Ces mouvements sociaux se retrouvent à chaque fois criminalisés et les citoyens poursuivis[2]. Vive la démocratie à la marocaine !
    Suite à cette marche, les médias de l’Etat célèbrent cette victoire historique contre «les ennemis de la patrie» et salue le renouveau du consensus national. Dans un passé récent, ce vent d’unanimité a valu aux Marocains des années de répression. À partir de 1975, année de la Marche verte, une chape plomb s’est abattue sur toutes les voix qui protestaient contre l’ordre établie sous prétexte de patriotisme. La Marche de Casablanca renoue avec ce chauvinisme, selon les politiciens marocains le Maroc est «victime d’un complot et seul un consensus national peut nous sauver». Au diable la démocratie et la liberté d’expression. L’aire du temps veut étouffer tout regard critique sur ce qui se passe sous nos yeux. C’est le meilleur moyen pour camoufler l’échec patent dans la gestion du dossier du Sahara. Les inondations du mois de novembre dévoilent un autre échec…
    La Lydec (Suez) : Des profits mirobolants et un état des infrastructures désolant
    Le 28 novembre le pouvoir instrumentalise les masses populaires pour crier leur amour (sincère) à leur pays et leur haine «supposée» à leurs voisins algériens et espagnols. Deux jours après, le pays prend l’eau ou plutôt les Marocains des classes populaires prennent l’eau. À contrario avec la marche, les responsables ne sauront pas aux côtés des simples citoyens. Ces derniers ont du batailler seuls pour leur survie. Les inondations ont montré la fragilité des infrastructures du pays. Pourtant, elles ont coûté beaucoup de sacrifices, de dettes colossales qui continuent d’absorber un tiers du budget de l’Etat. Même le plus pessimistes des opposants aux politiques de l’Etat dans le domaine de l’équipement ne pensaient pas que les villes marocaines allaient tomber comme un château de cartes. 24h de pluie ont été suffisantes pour créer un état d’urgence sur tout le territoire. Casablanca qui concentre 60% des activités économiques du Maroc a été la plus durement touchée par les eaux. 40 morts, arrêt total du transport ferroviaire pour une journée, fermeture des écoles, une bonne partie des ouvriers et des employés de la ville n’ont pas pu se rendre à leur lieu de travail et annulation de quelques vols à cause de l’inaccessibilité des aéroports. Les plus importantes administrations et institutions économiques du pays n’ont pas été épargnées, à leur tête le siège social de l’Office chérifien des phosphates (OCP). Le plus grand opérateur économique public (jusqu’à maintenant). Pire, les salles des réanimations des hôpitaux publics n’avaient plus d’électricité durant une journée ! La ville de Casa est tombée dans le noir toute une soirée et ce à cause de l’arrêt de 800, des 4000 postes de distribution d’électricité. Au même moment à Marrakech se tenait les Assisses du tourisme, « le Maroc d’en haut » discuter dans le plus grand confort des palaces marrakchies sur la nouvelle stratégie touristique à l’horizon de 2020 qui ambitionne attirer 20 millions de touristes. Le comble du cynisme !
    24h ont été suffisantes pour se rendre compte de nouveau de l’échec de la gestion libérale de nos villes. Le bilan des privatisations, de la gestion déléguée, des partenariats public-privé et de la bonne gouvernance à Casa est une ville, où la vie s’arrête après une grosse intempérie. La Lydec (filiale de Suez) gestionnaire de la distribution de l’eau et de l’électricité et chargée de l’assainissement liquide et l’éclairage public est le symbole de cet échec.
    Cette entreprise cotée en bourse ainsi les responsables politiques délégataire de ces services n’ont pas assumé leur responsabilité dans cette catastrophe. La Lydec s’est contentée d’un communiqué, où elle accuse «des précipitations exceptionnelles qui représente 50% des quantités de toute une année», un prétexte fallacieux, car le réseau casablancais est supposé supporter plus que les 178 ml annoncés pour ces 24h. le réseau d’assainissement est dimensionné pour une crue décennale c’est d’ailleurs ce que demande Lydec elle-même à ses sous-traitants dans les cahiers de charge[3] qu’elle élabore dans ces appels d’offre.
    À son arrivée en 1997, La Lydec a été présentée comme le sauveur de Casablanca. Son accord de 30 ans, allait lui permettre d’effacer «un passif désastreux de la Région automne de l’eau et de l’électricité», disait ceux qu’ils l’ont amenée. Les inondations de 1996 qu’a connu des quartiers de Derb sultane à Casa allait donner un coup de massue pour la régie publique. Depuis 13 ans, l’entreprise française a fait des profits mirobolants (le résultat net est de 19.8 millions d’euros en 2009[4]) sur le dos des citoyens les plus pauvres. Les hausses de tarifs ont une cadence nettement plus grande que le rythme des investissements de l’entreprise. Ces supposés investissements n’ont même atteint le seuil minimum établi dans le cahier de charges dans l’accord de gestion de l’assainissement. L’audit effectué en 2007 des cinq premières années de gestion montre que le gap d’investissement est de 255 millions d’euros. Cet audit prouve que La Lydec se permettait déjà de distribuer des dividendes, alors que son contrat stipule que cela ne peut se faire avant les dix premières années[5].
    Pour rompre avec les raisons de ces échecs de la gestion de la chose publique sur le plan national ou local, il faut poser toutes les questions même celles qui fâchent et qui vont contre l’air du temps. Il n’y pas que le chauvinisme et la doxa libérale, nous méritons mieux. Il est nécessaire aujourd’hui d’ouvrir le débat contradictoire entre tous les avis et s’éloigner du consensus. Taire des voix discordantes n’a pour but qu’assurer le statu-quo qui profite aux opportunistes de tout bord. Un vrai débat sur la nature et les causes de nos échecs pourra éviter à des citoyens de succomber à la moindre catastrophe naturelle ou dans un conflit politique qui a trop duré et qui coûtent aux Marocains comme aux Sahraouis énormément.
    ********
    Casa le 2 décembre 2010
    Jawad M. & Salah L.
    Militants d’ATTAC Maroc, membre du réseau CADTM
    *****
    [1]Pour plus de détails sur le camp lire ce reportage : http://www.telquel-online.com/446/couverture_446.shtml
    [2] Tous les mouvements de protestations de grande ampleur ont connu ce sort comme les 850 mineurs à Khouribga qui exigeaient leur titularisation ou les habitants du village de Ben Smim qui refusait la privatisation de leur source d’eau.
    [3] Voir les détails du cahier de charges sur www.lydec.ma
    [4] Voir le rapport financier de 2009 sur http://www.lydec.ma/html/down/rapports/RP2009_VF.pdf
    [5] Les journaux marocains ont consacré plusieurs enquêtes sur ce sujet
  • Sur les mensonges de Jeune Afrique : Le roi du Maroc et ses courtisans dans l’impasse

    Le roi du Maroc et ses courtisans dans l’impasse
    Les Sahraouis et le mythe du « Sahara utile » : Le roi du Maroc et ses courtisans dans l’impasse 
    Que s’est-il vraiment passé entre le 11 septembre et le 10 octobre 1999, dans la capitale du Sahara occidental, balayée durant un mois par un violent vent de révolte ? Un témoin sahraoui confie à des journalistes occidentaux : « Des policiers casqués ont défoncé ma porte à la hache ; ils ont emporté deux tapis et la télévision et cassé le reste du mobilier à coups de matraque. J’ai essayé de me défendre, pendant ce temps, à l’extérieur, des civils jetaient des pierres contre les fenêtres en vociférant. Ils nous exhortaient à venir nous battre en nous traitant de sales Sahraouis. » 
    Onze ans, presque jour pour jour, séparent cette révolte réprimée dans le sang par la police marocaine, de l’Intifada née en octobre dernier, sous les tentes du camp de Gdeim Izik, installé à une dizaine de kilomètres de Laâyoune, par plus de 12 000 Sahraouis. Onze ans durant lesquelles les familles au pouvoir à Rabat ont tenté vainement d’extirper toute revendication à caractère indépendantiste du mouvement de contestation et de riposte déployé par une population refusant énergiquement les tutelles tribales ratifiées au palais du roi. Onze ans durant lesquelles le Makhzen a « déployé » tous les moyens répressifs en sa possession dans le but de dissoudre tout indice pouvant mener à une lecture politique d’une situation de non-droit présentée comme une révolte d’affamés réclamant de meilleures conditions de vie, en dépensant un argent fou dans des campagnes de presse au goût monarchiste très prononcé. 
    Kalaât M’gouna : l’enfer de Sa Majesté
     A propos des émeutes de 1999, Jeune Afrique affirme sur un ton royaliste que la principale revendication concerne l’amélioration de la situation de l’emploi, mais que les événements avaient vite dégénéré à la suite d’un « traquenard » fomenté par les exécuteurs de sales besognes à la solde de Driss Basri, ministre de l’Intérieur à l’époque. Selon cette publication qui considère que les émeutes de Laâyoune expriment manifestement les « jeux de l’ombre » avec lesquels le Maroc n’en a pas fini, il s’agirait d’une grossière provocation alimentée par des agents du ministère de l’Intérieur marocain ! Dans quel but ? Elle ne le dit pas, mais enfonce davantage le clou en affirmant ostentatoirement que « contrairement aux communiqués de presse outranciers du Polisario, repris par quelques journaux étrangers, ni la question de l’indépendance du territoire, ni même celle du référendum d’autodétermination n’ont été évoquées. » C’est dit avec zèle et euphorie à tel point que ça ne laisse aucun doute sur les véritables intentions des meneurs de cette propagande d’un autre temps ! Tous ceux qui ne pensent pas comme Béchir Ben Yahmed sont donc invités par cette revue dans le secret du roi à se « repentir » en évacuant toute idée d’autodétermination. « Pour la première fois, depuis 1975, est apparue au grand jour, à la lumière, sans doute, du climat de décrispation que connaît le Maroc depuis la disparition de Hassan II, la véritable fracture sociale et culturelle qui sépare les Sahraouis marocains du reste du royaume », écrit François Soudan, l’envoyé spécial de l’hebdomadaire parisien, sous le titre exhibitionniste « La vérité sur les émeutes de Laâyoune », sans donner trop de détails sur les lourdes peines, allant de dix à quinze ans, qui ont frappé plus de 27 émeutiers sahraouis. Le bagne clandestin de triste mémoire de Kalaât M’gouna où des dizaines de Sahraouis ont perdu la vie a-t-il été érigé afin de « corriger » des émeutiers révoltés par leurs misérables conditions sociales ou plutôt pour faire régner et maintenir un climat de terreur autour d’une population qui éprouve plus que de la sympathie à l’égard du Front Polisario ? Jeune Afrique refuse soigneusement de répondre à cette question en cherchant refuge derrière une déclaration du prince Moulay Hicham résumée ainsi : « La conjoncture présente ouvre la perspective d’un dialogue franc et honnête, qui peut aider à modeler notre avenir. Le règne de notre nouveau souverain va permettre d’aborder les problèmes difficiles auxquels nous faisons face et d’aucun ne relève d’une solution rapide et aisée. Le Maroc a besoin de la contribution de tous ces citoyens. » Et à Jeune Afrique de s’écrier triomphalement dans la foulée du prince : « Citoyen : le mot, tabou il y a peu, est lâché. C’est de son contenu dont les Sahraouis de Laâyoune avaient le plus besoin. » Une affirmation hallucinante ! 
    L’intervention brutale des forces de sécurité marocaines contre une population civile désarmée, le 8 novembre dernier, est venue rappeler à tout le monde une tragique réalité que les différentes opérations de lifting social annoncées à grands coups de pub et destinées théoriquement à la population sédentaire du Sahara occidental n’arrivent guère à dissimuler : l’exploitation systématique et intensive des ressources naturelles de ce pays a atteint un tel niveau d’exacerbation qu’il est devenu impossible aux « oligarchies » régnantes de freiner la tendance fasciste du pouvoir investie du rôle de veiller sur les gros intérêts, lorsque le peuple sahraoui hausse le ton. 
    La violence inouïe qui a accompagné le démantèlement du camp de Gdeim Izik par les militaires marocains discrédite totalement la thèse officielle brandie par Rabat et soutenue par des publications du genre Jeune Afrique, limitant toute forme de contestation sahraouie aux revendications sociales ou, comme c’est le cas aujourd’hui, présentant ces révoltes comme une manipulation du Polisario. Le directeur du quotidien Le Matin du Sahara et du Maghreb, une publication très proche du Palais, ne déroge nullement à la règle et accuse les indépendantistes d’avoir jeté de l’huile sur le feu. «L’objectif du Polisario était de bloquer le processus onusien en provoquant des événements tragiques savamment programmés et jouant sur les droits de l’Homme. Mais ce sont les fonctionnaires marocains qui comptent leurs morts. L’une des victimes a été égorgée par des hommes cagoulés », clame t-il, selon la feuille de route qui lui a été tracée, reflétant ainsi le désarroi d’une monarchie en désespoir de cause face à la montée en puissance d’une véritable Intifada sahraouie à l’intérieur des territoires occupés. Le délégué du Front Polisario en Espagne estime, quant à lui, que l’heure est vraiment grave, en appelant la communauté internationale à intervenir en toute urgence afin d’empêcher le Maroc de mener un nettoyage ethnique à Laâyoune. « La ville est occupée par l’armée et la police marocaines », a-t-il déclaré. « Ils vont de maison en maison ; il y a des centaines de détenus, surtout des jeunes. Des dizaines de soldats traversent en moto les rues que l’on ne peut pas traverser en voiture afin de poursuivre les gens », a-t-il rappelé avant d’ajouter : « On a parlé de 19 morts, mais nous ne connaissons pas le chiffre exact, il nous est interdit d’accéder aux hôpitaux et aux fosses communes. L’intervention du Maroc signifie une rupture du cessez-le-feu de 1991. Nous n’avons jamais été aussi proches de la guerre depuis cette date. » Le représentant du Front Polisario en France abonde dans le même sens. «L’envergure de la riposte des Marocains est à la hauteur de leur déception de voir leur politique de développement économique non couronnée de succès: ils ont perdu la bataille des cœurs», estime-t-il. 
    Une militante des droits de l’Homme sahraouie raconte ce qui s’est passé le 8 novembre, jour de l’ouverture sous l’égide des Nations unies, de la troisième réunion informelle entre le Polisario et le Maroc : « Les gens ont peur. Il y a eu beaucoup d’arrestations dans les maisons, et des colons marocains se sont livrés à des violences avec l’appui de la police», affirme-t-elle à des journalistes occidentaux. Le bilan toujours provisoire – dans la mesure où le harcèlement des Sahraouis se poursuit – fait état de 19 morts, d’environ 1000 blessés et de plus de 150 disparus dans un contexte caractérisé par la mise à l’écart de tous les témoins potentiels, journalistes, avocats, militants des droits de l’Homme et parlementaires. 
    Les Sahraouis, victimes d’une extermination à huis clos
     Le président sahraoui lance un appel pressant au Conseil de sécurité de l’ONU, l’exhortant à créer au sein de la Minurso une police pour protéger la population civile. Invité par le quotidien en langue arabe Echorouk, il a exprimé d’abord son grand regret de constater que la présence de la Minurso à Laâyoune n’a pas suffisamment protégé les Sahraouis. Mohamed Abdellaziz sait de quoi il parle lorsqu’il affirme que les Sahraouis sont « victimes d’une opération d’extermination à huis clos ». Tout en déclarant sans détour que l’avenir reste ouvert sur toutes les éventualités y compris la reprise de la lutte armée, il s’est longuement interrogé sur le silence des différentes parties en mesure d’influer sur le cours des évènements : «Où est la conscience arabe ? Où est la conscience maghrébine ? Où est la conscience du monde musulman ? Où est la conscience de la communauté internationale ?» La cause défendue par la majorité écrasante du peuple sahraoui bénéficie du soutien et de la solidarité de nombreux peuples de la planète, en Europe, en Asie, en Amérique du Nord, en Amérique Latine et en Afrique. 
    Des personnalités marquantes, des intellectuels de renommée mondiale, des artistes et des universitaires, des femmes et des hommes libres de tous les continents et de toutes les cultures n’ont pas hésité à se ranger du côté du droit des Sahraouis à décider de leur avenir, librement et sans aucune contrainte. Les propos de Mohamed Abdellaziz ne nient pas cette réalité, mais le cours grave pris par les évènements lui impose d’alerter particulièrement les puissances occidentales afin qu’elles pèsent de tout leur poids dans l’application du droit international. Un droit que les gros intérêts économiques et financiers ne devront plus désormais marginaliser, si l’on observe méticuleusement l’attitude américaine, par exemple. 
    Le 10 novembre dernier, alors que la réunion de Manhasset se terminait comme elle avait débuté, c’est-à-dire sans aucune avancée notable, Janet A. Sanderson, sous-secrétaire adjointe chargée des Affaires du Maghreb et du Golfe, recevait la délégation sahraouie et demandait à avoir tous les éléments sur la situation à Laâyoune, après la brutale intervention des soldats marocains. A ce niveau de la responsabilité, le pragmatisme est de rigueur et il est sûr que l’audience accordée aux Sahraouis par l’ancienne ambassadrice US à Alger va déboucher sur d’importantes décisions. 
    En France, les Verts demandent que leur pays use de toute son influence, y compris auprès du Conseil de sécurité des Nations unies pour que le Maroc mette fin d’urgence aux opérations militaires et policières qui tournent au massacre de la population civile sahraouie, que le mandat de la Minurso soit modifié pour lui permettre de faire respecter les droits humains. En Espagne, plusieurs partis politiques demandent à Zapatero d’informer le Congrès sur les agressions commises par la police marocaine contre des journalistes espagnols au Maroc et son refus d’interdire aux parlementaires et aux médias espagnols de se rendre dans les territoires sahraouis occupés. 
    Tout ce beau monde est-il manipulé par le Polisario et l’Algérie comme le prétendent ces associations fantoches financées par le régime marocain ? Dans un communiqué délirant, un collectif d’associations installées en Espagne ne craint pas le ridicule en demandant à la planète entière de détourner son regard du Sahara occidental et d’arrêter le « tapage médiatique » fait autour des évènements de Laâyoune. Selon ces sujets du roi, « l’instrumentalisation des derniers évènements de Laâyoune par le Polisario, l’Algérie et certains supports médiatiques espagnols a pour but de passer sous silence l’affaire du militant Mustapha Salma » ! Ce dernier a non seulement rallié la thèse de l’autonomie, le nouveau label produit par le roi du Maroc, mais tout porte à croire qu’il a fait aussi l’objet d’un retournement par les services marocains dans le but de semer le doute et l’anarchie au sein des populations de réfugiés sahraouies. Son cas constitue un problème interne au Polisario et ne concerne nullement un pays comme l’Algérie qui n’a aucunement besoin de s’abaisser à un tel niveau d’appréciation. 
    Les certitudes contrôlées de Jeune Afrique
     Si vis-à-vis de l’Algérie, l’attitude marocaine demeure figée par un chauvinisme d’une rare virulence et qu’en conséquence, la méfiance est de mise, pourquoi cette même attitude reste plombée lorsque des Occidentaux affichent leurs opinions ? Tout le monde, de Madrid à Rome, serait-il manipulé ? Ces personnalités indépendantes, dont la rigueur n’a jamais été prise en défaut et qui appellent le gouvernement espagnol « à ne pas se contenter, une fois de plus, d’une simple explication avancée par le Maroc concernant les récents évènements de Laâyoune », ne seraient-elles en fin de compte que de vulgaires marionnettes entre les mains du Polisario ? 
    A croire le directeur de Jeune Afrique, tous ceux qui partagent le point de vue du Polisario ou qui sont guidés tout simplement par des motivations humanitaires en direction d’un peuple refusant la soumission manquent de lucidité et de clairvoyance. « En 1976, j’ai jugé que la position de l’Algérie sur le Sahara occidental était une erreur stratégique, pour elle, pour le Sahara et pour la région. J’ai défendu, et j’ai obligé Jeune Afrique à en faire de même, le point de vue marocain qui me paraissait juste, dans le meilleur intérêt des Sahraouis eux-mêmes. Et je le crois aujourd’hui », affirme t-il dans une longue interview publiée à l’occasion de la célébration du cinquantième anniversaire de l’hebdomadaire parisien. Il avait jugé en 1976, c’est-à-dire une année seulement après l’annexion du Sahara occidental par le Maroc, et son jugement devait, selon lui, porter l’empreinte de l’absolu. Selon Béchir Ben Yahmed, « l’indépendance du Sahara occidental est une erreur stratégique. Les Sahraouis sont très peu nombreux et vivent sur un vaste désert sans ressources importantes. Je crois qu’ils s’épanouiront mieux dans le cadre du Maroc que dans un tout petit pays privé de richesses et sous l’influence de l’Algérie ou de pays tiers. Et je sais que la moitié des Sahraouis se sentent Marocains. La plupart des gens qui ont créé le Polisario étaient des Marocains opposés à Hassan II. En fait, c’était une opposition intérieure, et leurs griefs, même fondés, étaient conjoncturels ». En un mot, il n’est pas loin d’accuser l’Algérie d’ingérence dans les affaires intérieures marocaines. Même s’il n’ose pas le dire franchement, son journal se charge de le suggérer de différentes façons sournoises et vicieuses comme cette singulière manière d’interpréter les indices statistiques, toujours en faveur des Marocains. La méthode primaire consiste à extraire des chiffres de leur contexte et à en faire une lecture biaisée faussement objective de la réalité algérienne. A titre d’exemple, même sur le plan de la stabilisation démographique, l’Algérie accuse un retard de dix ans par rapport au Maroc ! Il est naturellement inutile de demander à Jeune Afrique, dans l’état actuel des choses, de ciseler les « ficelles » qui le retiennent ou de se débarrasser des lourdes « casseroles » qu’il traîne depuis toujours. Béchir Ben Yahmed n’a-t-il pas avoué ses erreurs d’appréciation concernant l’avenir politique de Hassan II, Kadhafi et Fidel Castro ? « J’ai pris mes désirs pour des réalités », a-t-il reconnu. 
    Aujourd’hui encore, et au vu des évènements gravissimes qui secouent le Sahara occidental, le patron de Jeune Afrique pourrait voir ses « croyances pro-marocaines » subir le même sort que ses désirs des années 1960 et 1970. Le roi Mohammed VI et sa famille, l’une des plus grosses fortunes mondiales, ne pourront pas résister éternellement devant la volonté d’un peuple déterminé à récupérer ses richesses spoliées. Cette loi implacable devant laquelle tous les occupants avaient été obligés de faire des concessions ne dépend ni des désirs des uns ni des talents d’astrologues des autres. Le directeur de Jeune Afrique aurait été mieux inspiré en méditant sagement la décision américaine d’exclure le Sahara occidental de l’accord de libre-échange signé avec le Maroc. Ses analyses auraient sûrement été plus pertinentes et ses points de vue auraient beaucoup gagné en crédibilité. Une chose est sûre, s’il avait consulté un bon astrologue, celui-ci lui aurait certainement répondu que le mythe du « Sahara utile » ne survivra pas plus qu’il n’a vécu !
    Par Mohamed Mebarki 
    El Djazair, n° 33 
  • Des balises vers une solution juste

    La fumée qui s’élève au-dessus de la ville de Laâyoune n’est pas celle d’un immense barbecue auquel a été conviée, avec les honneurs, une population sahraouie sollicitée dans les règles des droits de l’Homme, à adopter le plan d’autonomie proposé par le roi du Maroc. Un tel scénario nous aurait sans aucun doute réjouis. Hélas, ce n’est malheureusement pas le cas. Laâyoune brûle. Laâyoune est sinistrée. Laâyoune vit de tristes moments dominés par la peur et la haine, dans un climat de terreur sans précédent. En dépit du huis clos qui couvre cette tragédie, la gravité de la situation a fini par alerter l’opinion publique occidentale qui ne cesse de se mobiliser afin de contraindre les gouvernants à s’enquérir personnellement et en urgence des évènements. 
     
    Des milliers de personnes se sont rassemblées récemment à New York, à Paris, à Madrid et à Rome pour exprimer leur inquiétude grandissante vis-à-vis des violations flagrantes des droits de l’Homme commises par l’armée et la police marocaines, sans compter les nombreux « supplétifs », ces exécutants de l’ombre. Cette mobilisation représente la conscience du monde qui s’éveille, nous en sommes persuadés. Et le Maroc a grandement intérêt à regarder la réalité en face en arrêtant de voir la main de l’Algérie partout où le soleil se lève. L’armée nationale populaire, que nos voisins accusent à tort et à travers en fabriquant des histoires l’impliquant dans le conflit du Sahara occidental, s’est toujours élevée au-dessus de ce genre de débat destiné à faire diversion. 
     
    L’ANP n’a pas d’avis politique à donner sur ce thème. Ce n’est ni sa mission ni ses prérogatives. En réalité, et nos voisins le savent mieux que quiconque, l’armée algérienne est suffisamment imprégnée des hautes valeurs humaines plantées par la glorieuse ALN et les grands idéaux portés par une génération de moudjahidine guidés par la lumière de la première Etoile nord-africaine pour qu’elle s’engouffre dans des sentiers parallèles et des pratiques déloyales condamnées sur les plans humain, politique et réglementaire. Elle est née dans les entrailles de la nuit coloniale et a combattu pour les mêmes objectifs voulus par l’Emir Abdelkader, Abdelkrim El Khettabi et tous ceux qui sont venus après. Les Algériens sont très bien placés pour exprimer une révulsion sans limite vis-à-vis du colonialisme, et c’est partant de ce puissant et légitime sentiment qu’ils se sont engagés à faire du droit des peuples à l’autodétermination l’un des principaux fondements de leur politique étrangère. Cette position est aujourd’hui partagée par de nombreux pays qui ont reconnu la légitimité de la lutte du peuple sahraoui. Et les voix qui s’élèvent pour demander au Maroc de se conformer aux différentes résolutions de l’ONU se multiplient, au grand désarroi des partisans du statu quo. 
     
    Du point de vue du droit international, le cas sahraoui relève des problèmes de décolonisation. Il est donc tout à fait déraisonnable de croire ces affabulations autour d’un prétendu rôle obscur qu’aurait joué l’Algérie. Notre pays a une réputation en or massif dans ce domaine. Il a toujours soutenu en clair et avec force tous les peuples en lutte pour leur liberté. De Tlemcen à Tébessa et de Bejaia à Bordj Badji Mokhtar, la majorité écrasante des Algériens n’entretient ni haine ni rancœur à l’encontre des frères marocains. Les affinités entre les deux peuples sont tellement fortes que toutes les tentatives de les mettre dos à dos sont vouées à l’échec. Ici en Algérie, les noms d’El Khettabi, Mohamed V, Abraham Serfati, Mehdi Benbarka, Benbarka et Saïd Aouita, entre autres, trônent toujours en bonne position, indifférents aux aléas de la politique. Chez nos voisins, c’est pareil, en ce qui concerne nos héros et nos symboles, et cela n’a rien d’extraordinaire aux yeux des millions d’Algériens et de Marocains qui rêvent de construire un Maghreb serein et à l’abri des « tempêtes de sable » qui balayent aujourd’hui tout le territoire du Sahara occidental. 
     
    Le droit à l’autodétermination n’étant guère une « invention algérienne », combien de temps faudrait-il donc au Maroc pour qu’il se libère de ses contradictions internes qui l’empêchent de répondre favorablement à cette exigence historique posée par un peuple à l’appartenance bien ancrée ? Y a-t-il une voie plus salutaire que l’option référendaire ? Une bonne partie de la réponse à ces questions se trouve chez les Sahraouis. Aux Marocains de faire preuve d’une bonne écoute. Du prophète Mohamed (que le salut soit sur lui), aux dirigeants contemporains de toutes les races, tous les conflits ont été réglés de manière consensuelle. L’Histoire a toujours été une suite de concessions qui ne sont en fait que la juste réplique à notre propre orgueil
    Par Ammar Khelifa
    El Djazair, Décembre 2010