M. Z. mohamed_zaaf@yahoo.fr
Mois : décembre 2010
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Une «Jordanie» pour Sahraouis ?
Des diplomates américains en poste à Rabat ont trouvé la formule miracle qui mettra fin au conflit du Sahara occidental opposant Marocains et Sahraouis depuis déjà 35 ans. Il suffirait juste d’installer les populations sahraouies en face, dans les îles Canaries. Aussi simple que çà. Il fallait juste y penser. Les diplomates américains se seraient-ils inspirés de nos cousins qui rêvent d’envoyer les Palestiniens paître à Petra ? Les Israéliens venus de tous les coins du monde ne disent-ils pas que la Palestine c’est leur « promise » et que le pays des Palestiniens c’est… la Jordanie ? Pourquoi donc n’agirait-on pas de même avec les Sahraouis, et ne ferait-on pas profiter le Maroc du génie colonial d’Israël ? Cependant, l’idée américaine ne plaît pas du tout à la classe politique espagnole qui a vite fait de réagir, traitant ses auteurs de tous les noms d’oiseaux. C’est que ces derniers temps les Marocains prennent vite la mouche, face à Madrid, et se promettent des « marches de libération » pour récupérer tous les rochers et toutes les parcelles du Grand Maroc encore sous colonisation espagnole, y compris les îles Canaries. Quitte à réserver au MPAIAC le même sort que le Polisario si jamais il refaisait surface pour remettre sur le tapis ses revendications indépendantistes. Rabat ne badine pas avec la question du Grand Maroc, territoire aussi élastique, aussi chimérique que celui du Grand Israël.Au pays du commandeur des croyants, on déterre les histoires pour justifier que le peuple guanche est aussi sahraoui que les Sahraouis, que tous sont marocains et que le grand Chamharouch, commandeur des djinns, plus visité au Maroc que Mohammed VI lui-même, pourra en témoigner. Mais les hommes politiques espagnols n’ont pas à s’inquiéter, Trinidad Jimenez vient de leur expliquer que même s’il fait marcher les autres, le Maroc officiel, lui, ne marchera pas. Apparemment, les Sahraouis ne marcheront pas non plus. Comme les Palestiniens, ils veulent récupérer leurs terres. Ils luttent depuis 35 ans juste pour leurs terres et ne semblent pas prêts à se laisser contaminer par le virus expansionniste marocain.
M. Z. mohamed_zaaf@yahoo.frLe Jeune Indépendant, 9/12/2010 -
50e anniversaire de la résolution 1514 – Messahel : «Cette décision est plus que jamais à l’ordre du jour»
La célébration du 50e anniversaire de la résolution 1514 adoptée pour rappel, le 14 décembre 1960, sera marquée à Alger par la tenue d’une Conférence internationale, lundi et mardi prochains, à laquelle sont conviés des personnalité politiques, des intellectuelles, des cinéastes, des professionnels des médias, des figures historiques de mouvements de Libération de pays africains pour leur indépendance ainsi que des personnalités détentrices de prix Nobel de la paix.
La conférence de presse animée hier, par M. Messahel a été l’occasion d’apporter de plus amples informations quant à la portée et la signification de l’organisation à Alger, de la Conférence internationale célébrant les 50 années de l’adoption par l’ONU de la résolution 1514 (XV). «Au moment ou s’achève la 2e Décennie internationale sur l’élimination du colonialisme, il revient à la communauté internationale de poursuivre sa mobilisation pour parachever le processus de décolonisation» a soutenu M. Messahel. Tout en mettant en avant la lutte du peuple algérien contre le colonisateur français, notre interlocuteur a rappelé que l’adoption de la résolution 1514 est intervenue trois jours après «les manifestations historiques du 11 décembre 1960 à Alger».
S’agissant de la conjoncture marquant les mutations en cours vers un nouvel ordre mondial, pour lui, «les aspirations des peuples épris de justice, de liberté et de paix sont à même de peser pour faire valoir le droit international dont la résolution onusienne 1514». A propos de celle-ci, il relève qu’«aujourd’hui plus que jamais ce qui à été à l’origine de l’adoption de la 1514 demeure de mise et d’actualité», ajoutant que «le droit des peuples à disposer d’eux mêmes est plus significatif de nos jours». Par ailleurs, la mobilisation, l’implication de l’ensemble des acteurs au niveau international est à l’ordre du jour au vu des dangers portés par certaines approches politiques de pays membres permanents du Conseil de sécurité.
Ces derniers s’emploient via des tentatives à promouvoir la realpolitik, au détriment des résolutions onusiennes et du droit international, dans leur traitement des questions relevant de processus de décolonisation, à l’exemple de la Palestine ou du Sahara Occidental (envahi par le Maroc en 1975, ndds). La conférence d’Alger constituera l’opportunité pour les participants venus de divers horizons du monde, «pour rappeler les responsabilités et les devoirs de la communauté internationale quant au respect et à l’application de la charte des Nations unies». Les participants articuleront leurs travaux en plus des communications prévues via des ateliers, ceux liés au cinéma, aux médias, et au rôle de la femme dans l’émancipation des peuples… Par ailleurs, la conférence internationale marquant le 50e anniversaire de la résolution 1514 portera notamment sur des témoignages de figures historiques venues des quatre coins du monde, dont ceux d’Afrique. Témoignages visant en premier lieu l’entretien de la mémoire et de l’histoire collective des peuples en lutte pour leur indépendance.
La déclaration d’Alger sanctionnant les travaux de la conférence précitée portera sur «la validité toujours en vigueur de la 1514» et mettra aussi l’accent sur l’incontournable implication des pays du Sud à compter dans les décisions sur la scène internationale.
Karima BennourLa Nouvelle République, 9/12/2010 -
L’Algérie, «puissance militaire et économique dominante» au Maghreb
La célébrissime agence fédérale de recherche du Congrès américain, qui est le «Cercle de réflexion» (Think Tank), dont les travaux sont jugés par les spécialistes politiques et économiques de «haut niveau, pointus et objectifs», considère l’Algérie comme la «puissance militaire et économique dominante dans la région» du Maghreb et représente un «partenaire-clé des Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme». Le rapport, qui relève la «stabilité de la situation nationale en Algérie», se compose de six chapitres portant essentiellement sur le gouvernement et la politique en Algérie, l’économie, les relations extérieures et le terrorisme, ainsi que les indicateurs économiques.Dans le sommaire du document, dont une copie a été transmise à l’APS par le département d’Etat, le service de recherche souligne que «l’Algérie est un pays de plus en plus important dans les efforts américains pour lutter contre le terrorisme international et représente un partenaire-clé dans la lutte contre les groupes liés à El-Qaïda». «En tant que producteur d’énergie, l’Algérie est également une source importante de gaz naturel pour les Etats-Unis, mais n’est pas un des principaux bénéficiaires de l’aide (financière) américaine», ajoute la même source. Concernant encore les relations entre l’Algérie et les Etats-Unis, dont les liens, note-t-il, «datent depuis le traité de paix et d’amitié en 1775», le rapport précise qu’elles s’étaient «renforcées depuis les multiples rencontres qui ont eu lieu entre le président Bouteflika et l’ex-président américain George W. Bush». «En 2005, les Etats-Unis et l’Algérie ont lancé le dialogue militaire mixte pour favoriser les échanges, la formation et les exercices conjoints», souligne le rapport qui cite notamment la coopération entre les deux pays dans la lutte contre le terrorisme et les multiples visites effectuées par des responsables américains en Algérie, ainsi que celle du ministre des Affaires étrangères, M. Mourad Medelci, en décembre 2009 à Washington.En ce qui concerne les relations économiques, cette agence du Congrès souligne que «les liens se sont élargis au-delà du secteur de l’énergie tels le secteur bancaire, les produits pharmaceutiques et d’autres industries». L’agence fédérale de recherche rappelle la signature d’un accord de coopération en juin 2007 entre l’Algérie et les Etats-Unis dans l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, ainsi que l’aide en équipements fournie en juin dernier par Sonatrach à la société pétrolière BP pour lutter contre la pollution causée par la marée noire dans le golfe du Mexique.Dans le chapitre relatif au terrorisme, le rapport fait une rétrospective détaillée sur ce fléau en Algérie depuis 1992. Il souligne que la lutte menée contre le terrorisme par les forces de l’ordre algériennes et les deux dispositifs de la Concorde civile de 1999 et de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale de 2005, engagés par le président Bouteflika, ainsi que les recrutements massifs par les forces de police et de gendarmerie «pour renforcer les frontières, augmenter la sécurité dans les aéroports et accroître la présence des forces de sécurité dans les grandes villes», ont permis de réduire à grande échelle la force de frappe des groupes terroristes.Abordant la présence d’Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) dans la région du Sahel, le centre de recherche du Congrès note que le gouvernement algérien avait déployé des milliers de soldats au Sahara tout au long des frontières avec le Mali, le Niger et la Mauritanie pour combattre ce groupe. Il poursuit qu’«avec l’immensité du Sahara, l’Algérie considère que la coopération régionale est nécessaire pour lutter contre la présence de l’Aqmi». A ce propos, le rapport cite les différentes réunions des chefs d’état-major des armées de l’Algérie, de la Mauritanie, du Niger et du Mali pour examiner la situation qui prévaut dans la région du Sahel et de la décision de la création d’un poste de commandement opérationnel régional, tout en précisant que l’Algérie s’oppose fermement au paiement de rançons contre la libération des otages détenus par les terroristes. Abordant le volet économique, le rapport indique que les prix élevés du pétrole ont permis à l’Algérie d’augmenter ses réserves de changes à 157 milliards de dollars en septembre 2010 et de maintenir sa croissance économique, se traduisant par un «boom» dans les activités de construction, la baisse du chômage et le remboursement anticipé de la dette extérieure. Il souligne également que les deux plans quinquennaux 2005-2009, de 140 milliards de dollars, et de 2010-2014, de 286 milliards de dollars, sont destinés à générer la croissance et l’emploi. Dans le chapitre relatif aux affaires étrangères, le rapport indique qu’après l’indépendance en 1962, «l’Algérie était au premier plan de la politique du tiers-monde, en particulier dans le Mouvement des non-alignés, et avait une diplomatie très active dans le monde arabe et l’Afrique». «Cette activité diplomatique s’était, néanmoins, ralentie dans les années 1990 en raison du terrorisme», observe-t-il. «Avec l’avènement du président Bouteflika, l’Algérie a réapparu comme un acteur régional, en particulier en Afrique», souligne le centre de recherche du Parlement américain.Par Abdelkrim GhezaliLa Tribune d’Algérie, 9/12/20101 -
WikiLeaks- Sahara Occidental : La fausse neutralité de Ben Ali
Et un autre pavé dans la mare jeté par WikiLeaks !
Le président tunisien, Zine El Abidine Ben Ali, accuse les Algériens d’être «responsables de l’actuelle impasse» dans laquelle se trouve le dossier du Sahara occidental. Le président a fait ces confidences au sous-secrétaire d’Etat américain, David Welch, à l’aune d’une rencontre à Tunis entre les deux hommes, en date du 28 février 2008.Jugement amplement partagé par M. Welch, qui estime d’ailleurs que ce contentieux bloquait tout progrès dans la région du Maghreb. Le diplomate américain rétorque même que les Algériens «se doivent d’accepter l’idée qu’il n’y aura jamais d’Etat indépendant au Sahara occidental». M. Ben Ali finit par répondre que le problème est complexe et que sa résolution prendrait plusieurs années. «Le dossier ne pourra pas être réglé par le biais du Conseil de sécurité de l’ONU», a ajouté le président tunisien.
Pourtant, ce ne sont pas les propositions de médiation qui ont manqué. Le dirigeant affirme ainsi à son invité américain qu’il a tenté de convoquer une «réunion maghrébine» à Tunis, afin de mettre à plat les antagonismes. Tandis que le Maroc et la Libye avaient affiché leur volonté d’y participer, l’Algérie avait tout bonnement décliné l’invitation. «Ils ont dit qu’il n’y avait pas lieu d’en discuter», raconte-t-il.
Ghania Lassal
El Watan, 9/12/2010
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Le droit des peuples de disposer d’eux-mêmes en débat à Alger
L’Algérie a influencé, à travers sa lutte de libération nationale, à la rédaction de la résolution onusienne 1514 de 1960 et qui a elle-même exercé son droit à l’autodétermination et à l’indépendance. Les recommandations et la portée politique de la résolution 1514 des Nations unies de 1960 «demeurent toujours valides» au même titre que le nouvel ordre économique mondial, ainsi que le principe onusien des droits des peuples de disposer d’eux-mêmes, a indiqué le ministre délégué aux Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, hier, lors de la conférence de presse organisée à Alger.
Selon le ministre, ce que l’Algérie a toujours défendu à travers cette résolution reste d’actualité en 2010 : «le droit au développement et les droits humains sont toujours d’actualité. Aujourd’hui il nous faut un recadrage pour une application stricte dans l’esprit et la lettre de la résolution de 1960», a-t-il affirmé.
Le ministre a indiqué qu’un appel sera lancé à partir d’Alger par les participants en direction des Nations unies et de l’opinion internationale pour rappeler d’abord au Conseil de sécurité sa responsabilité pour la mise en œuvre des résolutions pertinentes afin qu’il n’y ait pas «deux poids et deux mesures concernant la charte des Nations unies. Les Nations unies doivent appliquer les résolutions émanant de ces instances». Le ministre délégué a indiqué, par ailleurs, que cette conférence n’est pas dédiée au Sahara occidental (envahi par le Maroc en 1975, ndds) mais qu’elle intervient dans un contexte où il est plus qu’urgent de «consolider cette résolution afin d’influer sur le processus de prise de décision au niveau de l’ONU pour la libération des territoires encore occupés, comme la Palestine ou le Sahara occidental».
Selon le conférencier, cette résolution est toujours d’actualité puisque aujourd’hui encore, des «indépendances sont menacées à l’image de ce qui se passe en Somalie, en Afghanistan, en Irak ou au Soudan». L’Algérie et les 80 pays issus de la résolution 1514 des Nations unies de 1960 appellent aujourd’hui à une refonte des statuts des Nations unies et par extension les statuts du Conseil de sécurité de l’ONU.
Cette rencontre internationale sera rehaussée par la présence du doyen des chefs d’Etat africains le Tanzanien Kenneth Kaunda, du Sud-Africain Thabo Mbeki, du Nigérien Alpha Konaré, du Ghanéen Rawlings, de l’ancien SG de l’ONU Kodjo, de deux prix Nobel de la paix, d’un représentant du SG de l’ONU, du président de la Commission de l’Union africaine, Jean Ping, du SG de la Ligue arabe, Amr Moussa, des pays de l’UMA, de Pierre Galant, représentant la société civile, en plus de deux cents personnalités du monde, des militants de la cause algérienne et des partis politiques africains tels que l’ANC, le FRELIMO, le MPLA, le SWAPO, du représentant du Front Polisario et du FLN, ainsi que d’autres partis algériens. Quatre-vingt journalistes étrangers couvriront cette manifestation qui coïncidera avec les manifestations du 11 décembre 1960 qui ont ébranlé les autorités coloniales françaises. Cette conférence sera sanctionnée par une déclaration d’Alger qui reprendra les principes fondateurs de la résolution onusienne, selon Abdelkader Messahel, et dans laquelle il a souligné le rôle et la place de l’Algérie dans les différents forums et organismes traitant de cette cause : «l’Algérie, a-t-il dit, apportera plus que jamais sa contribution à tous les forums. Elle est partie prenante pour porter la voix de l’Algérie et l’Afrique. L’Algérie a un rôle de leader à faire valoir au sein du continent africain». Quatre ateliers seront mis en place lors de cette rencontre, le premier sera consacré au «processus d’émancipation des peuples», le second au «rôle des médias et du cinéma dans l’expression des peuples de disposer d’eux-mêmes». L’ancien diplomate tanzanien Salim Ahmed Salim et le journaliste chilien Juan Pablo Cardenas seront les modérateurs des deux premiers ateliers. Un troisième atelier, consacré aux femmes, sera présidé par l’ex-épouse de Nelson Mandela, Willie Mandela. Le dernier atelier sera consacré aux jeunes et sera présidé par l’ancien SG du mouvement panafricain de la jeunesse Mushokolwa Léonidas. Mahmoud Tadjer -
L’UPM sans baratin
Nous le disions dans notre éditorial d’hier, l’Algérie n’attendra pas l’UPM pour concrétiser son partenariat avec les pays européens qui veulent vraiment d’un échange gagnant-gagnant basé sur le transfert de technologie. Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, l’a confirmé en donnant son aval à la chancelière Angela Merkel pour la mise en place d’une commission économique mixte lors de son voyage en Allemagne. On s’appliquera notamment à développer le projet d’installations éoliennes et solaires Desertec selon les termes d’une dépêche officielle. Il faut savoir que ce projet concurrence indirectement le même du genre contenu dans le programme de la moribonde Union pour la Méditerranée. Quand on sait que cet investissement dans le Sud algérien vise à fournir 15 % de l’énergie électrique européenne, on se félicite de prétendre enfin anticiper l’après-pétrole.L’exemple allemand inspirera les plus sceptiques de nos autres partenaires qui hésitent encore à renoncer aux faux calculs politiciens pour investir sans duperie en Algérie. L’Allemagne, comparable à la Chine, ne regrettera pas son principe de non-ingérence dans les affaires internes des pays dans sa coopération économique. D’ailleurs, Merkel et Bouteflika ont pu se concerter et échanger leurs points de vue sur la situation au Sahara occidental ou au Soudan en prévoyant même d’impliquer respectivement l’UE et l’UA pour éviter un éclatement au pays d’El-Bachir. Le tandem Alger-Berlin dont nous parlions n’est donc pas une vision de l’esprit, mais l’édification solide d’un pont politico-économique entre deux nations dont les relations ne souffrent d’aucune pollution refoulée du passé. Un pont qui profitera à deux vastes continents pris en otages par des leaders souvent généreux en paroles mais très avares en actes. Gageons que la discrète Allemagne secouera les wagons à la traîne qui se sont pris un temps pour des locomotives indispensables. L’avenir appartiendra à ceux qui réaliseront leurs projets pendant que d’autres se suffisent de manœuvres politiciennes sans lendemain. C’est un peu le message qu’ont envoyé de Berlin Angela Merkel et son invité algérien.
Par Nordine Mzalla
Le Jeune Indépendant, 9/12/2010 -
Une «Jordanie» pour Sahraouis ?
Des diplomates américains en poste à Rabat ont trouvé la formule miracle qui mettra fin au conflit du Sahara occidental opposant Marocains et Sahraouis depuis déjà 35 ans. Il suffirait juste d’installer les populations sahraouies en face, dans les îles Canaries. Aussi simple que çà. Il fallait juste y penser. Les diplomates américains se seraient-ils inspirés de nos cousins qui rêvent d’envoyer les Palestiniens paître à Petra ? Les Israéliens venus de tous les coins du monde ne disent-ils pas que la Palestine c’est leur « promise » et que le pays des Palestiniens c’est… la Jordanie ? Pourquoi donc n’agirait-on pas de même avec les Sahraouis, et ne ferait-on pas profiter le Maroc du génie colonial d’Israël ? Cependant, l’idée américaine ne plaît pas du tout à la classe politique espagnole qui a vite fait de réagir, traitant ses auteurs de tous les noms d’oiseaux. C’est que ces derniers temps les Marocains prennent vite la mouche, face à Madrid, et se promettent des « marches de libération » pour récupérer tous les rochers et toutes les parcelles du Grand Maroc encore sous colonisation espagnole, y compris les îles Canaries. Quitte à réserver au MPAIAC le même sort que le Polisario si jamais il refaisait surface pour remettre sur le tapis ses revendications indépendantistes. Rabat ne badine pas avec la question du Grand Maroc, territoire aussi élastique, aussi chimérique que celui du Grand Israël.Au pays du commandeur des croyants, on déterre les histoires pour justifier que le peuple guanche est aussi sahraoui que les Sahraouis, que tous sont marocains et que le grand Chamharouch, commandeur des djinns, plus visité au Maroc que Mohammed VI lui-même, pourra en témoigner. Mais les hommes politiques espagnols n’ont pas à s’inquiéter, Trinidad Jimenez vient de leur expliquer que même s’il fait marcher les autres, le Maroc officiel, lui, ne marchera pas. Apparemment, les Sahraouis ne marcheront pas non plus. Comme les Palestiniens, ils veulent récupérer leurs terres. Ils luttent depuis 35 ans juste pour leurs terres et ne semblent pas prêts à se laisser contaminer par le virus expansionniste marocain.
M. Z. mohamed_zaaf@yahoo.frLe Jeune Indépendant, 9/12/2010 -
50e anniversaire de la résolution 1514 – Messahel : «Cette décision est plus que jamais à l’ordre du jour»
La célébration du 50e anniversaire de la résolution 1514 adoptée pour rappel, le 14 décembre 1960, sera marquée à Alger par la tenue d’une Conférence internationale, lundi et mardi prochains, à laquelle sont conviés des personnalité politiques, des intellectuelles, des cinéastes, des professionnels des médias, des figures historiques de mouvements de Libération de pays africains pour leur indépendance ainsi que des personnalités détentrices de prix Nobel de la paix.
La conférence de presse animée hier, par M. Messahel a été l’occasion d’apporter de plus amples informations quant à la portée et la signification de l’organisation à Alger, de la Conférence internationale célébrant les 50 années de l’adoption par l’ONU de la résolution 1514 (XV). «Au moment ou s’achève la 2e Décennie internationale sur l’élimination du colonialisme, il revient à la communauté internationale de poursuivre sa mobilisation pour parachever le processus de décolonisation» a soutenu M. Messahel. Tout en mettant en avant la lutte du peuple algérien contre le colonisateur français, notre interlocuteur a rappelé que l’adoption de la résolution 1514 est intervenue trois jours après «les manifestations historiques du 11 décembre 1960 à Alger».
S’agissant de la conjoncture marquant les mutations en cours vers un nouvel ordre mondial, pour lui, «les aspirations des peuples épris de justice, de liberté et de paix sont à même de peser pour faire valoir le droit international dont la résolution onusienne 1514». A propos de celle-ci, il relève qu’«aujourd’hui plus que jamais ce qui à été à l’origine de l’adoption de la 1514 demeure de mise et d’actualité», ajoutant que «le droit des peuples à disposer d’eux mêmes est plus significatif de nos jours». Par ailleurs, la mobilisation, l’implication de l’ensemble des acteurs au niveau international est à l’ordre du jour au vu des dangers portés par certaines approches politiques de pays membres permanents du Conseil de sécurité.
Ces derniers s’emploient via des tentatives à promouvoir la realpolitik, au détriment des résolutions onusiennes et du droit international, dans leur traitement des questions relevant de processus de décolonisation, à l’exemple de la Palestine ou du Sahara Occidental (envahi par le Maroc en 1975, ndds). La conférence d’Alger constituera l’opportunité pour les participants venus de divers horizons du monde, «pour rappeler les responsabilités et les devoirs de la communauté internationale quant au respect et à l’application de la charte des Nations unies». Les participants articuleront leurs travaux en plus des communications prévues via des ateliers, ceux liés au cinéma, aux médias, et au rôle de la femme dans l’émancipation des peuples… Par ailleurs, la conférence internationale marquant le 50e anniversaire de la résolution 1514 portera notamment sur des témoignages de figures historiques venues des quatre coins du monde, dont ceux d’Afrique. Témoignages visant en premier lieu l’entretien de la mémoire et de l’histoire collective des peuples en lutte pour leur indépendance.
La déclaration d’Alger sanctionnant les travaux de la conférence précitée portera sur «la validité toujours en vigueur de la 1514» et mettra aussi l’accent sur l’incontournable implication des pays du Sud à compter dans les décisions sur la scène internationale.
Karima BennourLa Nouvelle République, 9/12/2010 -
L’axe Paris-Rabat
Le Maroc et sa monarchie restent une exception dans le jeu diplomatique français. La richesse de l’axe Paris-Rabat est protéiforme : économique, diplomatique, bien sûr, mais aussi humaine, culturelle et presque familiale.Quand il était le locataire de l’Élysée, Jacques Chirac, thuriféraire de l’amitié franco-marocaine, aimait souligner la « capillarité » des relations entre la République et le royaume chérifien. Son successeur, Nicolas Sarkozy, l’avait promis : sous son mandat, une « nouvelle ère » entre la France et l’Afrique allait commencer. Mais le Maroc et sa monarchie restent une exception dans le jeu diplomatique français. La richesse de l’axe Paris-Rabat est protéiforme : économique, diplomatique, bien sûr, mais aussi humaine, culturelle et presque familiale.Au plus haut niveau de l’État, cette proximité, qui, vue d’Alger, de Madrid ou de Washington, frise la complicité, ne se dément pas. Nicolas Sarkozy et Mohammed VI entretiennent des relations privilégiées qui dépassent le cadre protocolaire. Des rendez-vous privés à Marrakech, New York où Neuilly, parfois en présence des premières dames et des enfants, jalonnent cette intimité récente, mais profonde. Loin des projecteurs de la vie parisienne, le président français a, comme son prédécesseur, succombé aux charmes du sanctuaire médiatique marocain. L’ambassade de France à Rabat (surnommée « l’agence de voyages » par un diplomate espagnol) veille aux incessants allers-retours des politiques français, qui viennent se ressourcer dans le royaume et réactiver leurs discrets mais puissants réseaux financiers et électoraux.Histoire intimeDominique Strauss-Kahn (qui a grandi à Agadir et qui possède un riad à Marrakech), Dominique de Villepin (né à Rabat), Éric Besson, Élisabeth Guigou (tous deux nés à Marrakech), Rachida Dati (dont le père est marocain), Ségolène Royal (dont le compagnon est né à Casablanca), François Hollande, Jean-Louis Borloo : presque tous les grands acteurs de la vie politique française ont une histoire intime avec le royaume et franchissent régulièrement le détroit de Gibraltar.Le parti présidentiel, l’UMP, dispose d’une demi-douzaine d’antennes régionales, placées sous la direction du délégué national, Jean-Luc Martinet, un industriel natif de Casablanca, propriétaire du fonds d’investissement Aixor et qui supervise la collecte des dons. Le Parti socialiste est également solidement implanté et a mené une campagne active en 2007 pour l’élection de Ségolène Royal auprès d’une communauté française estimée officiellement à 32 000 personnes, à plus du double officieusement. La première secrétaire du PS, Martine Aubry, effectue de fréquentes visites dans le royaume et entretient de solides relations avec les camarades de l’Union socialiste des forces populaires (USFP).Conséquence de ces liens personnels entre décideurs français et marocains : l’actuel ambassadeur de France, Bruno Joubert, ancien Monsieur Afrique de Nicolas Sarkozy et collaborateur de Jean-David Levitte, le sherpa diplomatique du chef de l’État, doit composer, sous la tutelle théorique du Quai d’Orsay, avec un incessant ballet de rendez-vous discrets et souvent frappés du sceau de la « visite privée ». À charge pour les services de l’ambassade de réparer les couacs que ce genre de déplacements a pu susciter (comme le saccage en 2006 d’une chambre d’un palace de Marrakech par la compagne d’un ministre…).Pour l’expertise maghrébine, l’exécutif français peut en outre s’appuyer au Quai d’Orsay sur des diplomates fins connaisseurs des subtilités régionales, comme Bruno Aubert, un ancien conseiller de l’ambassade actuellement à la direction de la prospective, dirigée par l’universitaire Joseph Maïla, spécialiste du monde arabe. À l’Élysée, Levitte s’appuie sur le diplomate Nicolas Galey.Grands contratsÀ Rabat, la chancellerie de la rue Sahnoun reste aussi un point de passage conseillé pour les nombreux investisseurs français qui se font escorter par le service économique, dirigé par Dominique Bocquet, et par la très active Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc, présidée par Bernard Digoit. Les grands contrats, eux, se nouent dans la discrétion des salons de Casablanca, Marrakech ou Rabat.L’entregent et les carnets d’adresses encyclopédiques du conseiller économique de Mohammed VI, André Azoulay, de l’homme d’affaires et communicant fassi Richard Attias (époux actuel de Cécilia ex-Sarkozy), du polytechnicien Jean-René Fourtou (président du conseil de surveillance du géant mondial Vivendi), de Jean-Paul Herteman (PDG du groupe aéronautique et spatial Safran) – tous deux président le Club d’affaires France-Maroc auquel participe aussi Christine Mulot-Sarkozy, l’ex-belle-sœur du chef de l’État – ou encore de Marc Thépot (directeur général du groupe Accor dans le royaume) sont également décisifs pour enraciner ou développer la présence du millier de sociétés françaises installées au Maroc. Dont la quasi-totalité des entreprises du CAC 40, qui emploient près de 100 000 salariés.De la finance (BNP-BMCI, Crédit agricole, Société générale Maroc) à l’énergie (Areva-OCP), en passant par l’eau, l’assainissement et l’électricité (Veolia-Amendis à Tanger, Tétouan et Rabat, Suez-Lydec à Casablanca, dirigé par le très actif Jean-Pierre Ermenault), les télécommunications (Vivendi, Orange), les transports publics et les infrastructures (Alstom, Bouygues) : la politique des grands contrats et la concentration capitalistique restent la colonne vertébrale de l’axe Paris-Rabat.Le Makhzen rend d’ailleurs souvent un hommage appuyé à ces grands « amis du Maroc ». Le roi a ainsi récemment décoré du Wissam Alaouite Jean-Paul Herteman, une distinction déjà accordée à son prédécesseur Jean-Paul Béchat ou encore à l’économiste Christian de Boissieu. À cet aréopage de grands patrons, il convient d’ajouter Dov Zerah, le nouveau directeur général de l’Agence française de développement (AFD). En poste en juin, il a effectué dès septembre son premier voyage à Rabat. Avec 400 millions d’euros d’engagements en 2009, le Maroc est le premier partenaire de l’AFD.Pour nourrir cette relation vivace, les décideurs franco-marocains s’appuient sur le très dense réseau éducatif noué entre les deux pays. Anciens de la « mission » (lycées français René-Descartes de Rabat, Hubert-Lyautey de Casablanca, Victor-Hugo de Marrakech…) ou des grandes écoles parisiennes (Polytechnique, Ponts et Chaussées, Institut d’études politiques…) : les acteurs de cette matrice privilégiée déclinent au quotidien les rendez-vous d’affaires, les colloques et les actions caritatives.Avec, en parrains habiles, et en alibis, les universitaires, les intellectuels, les artistes et les barons médiatiques de « l’amitié franco-marocaine » : Pierre Bergé (après sa déclaration d’amour pour Marrakech, il vient de racheter la villa Léon l’Africain à Tanger), Bernard-Henri Lévy (philosophe dont la chemise blanche hante les vols Paris-Marrakech), Charles Saint-Prot (géopolitologue et militant de la « marocanité » du Sahara occidental), Tahar Ben Jelloun (écrivain), Mehdi Qotbi (peintre et créateur du Cercle d’amitié franco-marocain), Djamel Debbouze (humoriste et producteur qui a l’oreille de Mohammed VI et de son frère Moulay Rachid), le député marseillais UMP Jean Roatta (président du groupe d’amitié parlementaire France-Maroc)…Sans prétendre à l’exhaustivité, ce tour d’horizon des réseaux franco-marocains doit enfin rappeler le rôle joué par la franc-maçonnerie – une demi-douzaine de loges et d’obédiences étant officiellement recensées au Maroc – et la réalité quotidienne des liens toujours étroits que quelque 800 000 Marocains installés en France continuent d’entretenir avec leur pays d’origine. Dès 1914, à la veille de la Grande Guerre, l’officier allemand Von Kalle, en poste à Madrid, avait conclu : « C’est au Maroc que l’on peut couper les jarrets de la France. » Cette analyse reste d’actualité.Par Nicolas MarmiéMond-Infos, 8/12/2010 -
L’axe Paris-Rabat
Le Maroc et sa monarchie restent une exception dans le jeu diplomatique français. La richesse de l’axe Paris-Rabat est protéiforme : économique, diplomatique, bien sûr, mais aussi humaine, culturelle et presque familiale.Quand il était le locataire de l’Élysée, Jacques Chirac, thuriféraire de l’amitié franco-marocaine, aimait souligner la « capillarité » des relations entre la République et le royaume chérifien. Son successeur, Nicolas Sarkozy, l’avait promis : sous son mandat, une « nouvelle ère » entre la France et l’Afrique allait commencer. Mais le Maroc et sa monarchie restent une exception dans le jeu diplomatique français. La richesse de l’axe Paris-Rabat est protéiforme : économique, diplomatique, bien sûr, mais aussi humaine, culturelle et presque familiale.Au plus haut niveau de l’État, cette proximité, qui, vue d’Alger, de Madrid ou de Washington, frise la complicité, ne se dément pas. Nicolas Sarkozy et Mohammed VI entretiennent des relations privilégiées qui dépassent le cadre protocolaire. Des rendez-vous privés à Marrakech, New York où Neuilly, parfois en présence des premières dames et des enfants, jalonnent cette intimité récente, mais profonde. Loin des projecteurs de la vie parisienne, le président français a, comme son prédécesseur, succombé aux charmes du sanctuaire médiatique marocain. L’ambassade de France à Rabat (surnommée « l’agence de voyages » par un diplomate espagnol) veille aux incessants allers-retours des politiques français, qui viennent se ressourcer dans le royaume et réactiver leurs discrets mais puissants réseaux financiers et électoraux.Histoire intimeDominique Strauss-Kahn (qui a grandi à Agadir et qui possède un riad à Marrakech), Dominique de Villepin (né à Rabat), Éric Besson, Élisabeth Guigou (tous deux nés à Marrakech), Rachida Dati (dont le père est marocain), Ségolène Royal (dont le compagnon est né à Casablanca), François Hollande, Jean-Louis Borloo : presque tous les grands acteurs de la vie politique française ont une histoire intime avec le royaume et franchissent régulièrement le détroit de Gibraltar.Le parti présidentiel, l’UMP, dispose d’une demi-douzaine d’antennes régionales, placées sous la direction du délégué national, Jean-Luc Martinet, un industriel natif de Casablanca, propriétaire du fonds d’investissement Aixor et qui supervise la collecte des dons. Le Parti socialiste est également solidement implanté et a mené une campagne active en 2007 pour l’élection de Ségolène Royal auprès d’une communauté française estimée officiellement à 32 000 personnes, à plus du double officieusement. La première secrétaire du PS, Martine Aubry, effectue de fréquentes visites dans le royaume et entretient de solides relations avec les camarades de l’Union socialiste des forces populaires (USFP).Conséquence de ces liens personnels entre décideurs français et marocains : l’actuel ambassadeur de France, Bruno Joubert, ancien Monsieur Afrique de Nicolas Sarkozy et collaborateur de Jean-David Levitte, le sherpa diplomatique du chef de l’État, doit composer, sous la tutelle théorique du Quai d’Orsay, avec un incessant ballet de rendez-vous discrets et souvent frappés du sceau de la « visite privée ». À charge pour les services de l’ambassade de réparer les couacs que ce genre de déplacements a pu susciter (comme le saccage en 2006 d’une chambre d’un palace de Marrakech par la compagne d’un ministre…).Pour l’expertise maghrébine, l’exécutif français peut en outre s’appuyer au Quai d’Orsay sur des diplomates fins connaisseurs des subtilités régionales, comme Bruno Aubert, un ancien conseiller de l’ambassade actuellement à la direction de la prospective, dirigée par l’universitaire Joseph Maïla, spécialiste du monde arabe. À l’Élysée, Levitte s’appuie sur le diplomate Nicolas Galey.Grands contratsÀ Rabat, la chancellerie de la rue Sahnoun reste aussi un point de passage conseillé pour les nombreux investisseurs français qui se font escorter par le service économique, dirigé par Dominique Bocquet, et par la très active Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc, présidée par Bernard Digoit. Les grands contrats, eux, se nouent dans la discrétion des salons de Casablanca, Marrakech ou Rabat.L’entregent et les carnets d’adresses encyclopédiques du conseiller économique de Mohammed VI, André Azoulay, de l’homme d’affaires et communicant fassi Richard Attias (époux actuel de Cécilia ex-Sarkozy), du polytechnicien Jean-René Fourtou (président du conseil de surveillance du géant mondial Vivendi), de Jean-Paul Herteman (PDG du groupe aéronautique et spatial Safran) – tous deux président le Club d’affaires France-Maroc auquel participe aussi Christine Mulot-Sarkozy, l’ex-belle-sœur du chef de l’État – ou encore de Marc Thépot (directeur général du groupe Accor dans le royaume) sont également décisifs pour enraciner ou développer la présence du millier de sociétés françaises installées au Maroc. Dont la quasi-totalité des entreprises du CAC 40, qui emploient près de 100 000 salariés.De la finance (BNP-BMCI, Crédit agricole, Société générale Maroc) à l’énergie (Areva-OCP), en passant par l’eau, l’assainissement et l’électricité (Veolia-Amendis à Tanger, Tétouan et Rabat, Suez-Lydec à Casablanca, dirigé par le très actif Jean-Pierre Ermenault), les télécommunications (Vivendi, Orange), les transports publics et les infrastructures (Alstom, Bouygues) : la politique des grands contrats et la concentration capitalistique restent la colonne vertébrale de l’axe Paris-Rabat.Le Makhzen rend d’ailleurs souvent un hommage appuyé à ces grands « amis du Maroc ». Le roi a ainsi récemment décoré du Wissam Alaouite Jean-Paul Herteman, une distinction déjà accordée à son prédécesseur Jean-Paul Béchat ou encore à l’économiste Christian de Boissieu. À cet aréopage de grands patrons, il convient d’ajouter Dov Zerah, le nouveau directeur général de l’Agence française de développement (AFD). En poste en juin, il a effectué dès septembre son premier voyage à Rabat. Avec 400 millions d’euros d’engagements en 2009, le Maroc est le premier partenaire de l’AFD.Pour nourrir cette relation vivace, les décideurs franco-marocains s’appuient sur le très dense réseau éducatif noué entre les deux pays. Anciens de la « mission » (lycées français René-Descartes de Rabat, Hubert-Lyautey de Casablanca, Victor-Hugo de Marrakech…) ou des grandes écoles parisiennes (Polytechnique, Ponts et Chaussées, Institut d’études politiques…) : les acteurs de cette matrice privilégiée déclinent au quotidien les rendez-vous d’affaires, les colloques et les actions caritatives.Avec, en parrains habiles, et en alibis, les universitaires, les intellectuels, les artistes et les barons médiatiques de « l’amitié franco-marocaine » : Pierre Bergé (après sa déclaration d’amour pour Marrakech, il vient de racheter la villa Léon l’Africain à Tanger), Bernard-Henri Lévy (philosophe dont la chemise blanche hante les vols Paris-Marrakech), Charles Saint-Prot (géopolitologue et militant de la « marocanité » du Sahara occidental), Tahar Ben Jelloun (écrivain), Mehdi Qotbi (peintre et créateur du Cercle d’amitié franco-marocain), Djamel Debbouze (humoriste et producteur qui a l’oreille de Mohammed VI et de son frère Moulay Rachid), le député marseillais UMP Jean Roatta (président du groupe d’amitié parlementaire France-Maroc)…Sans prétendre à l’exhaustivité, ce tour d’horizon des réseaux franco-marocains doit enfin rappeler le rôle joué par la franc-maçonnerie – une demi-douzaine de loges et d’obédiences étant officiellement recensées au Maroc – et la réalité quotidienne des liens toujours étroits que quelque 800 000 Marocains installés en France continuent d’entretenir avec leur pays d’origine. Dès 1914, à la veille de la Grande Guerre, l’officier allemand Von Kalle, en poste à Madrid, avait conclu : « C’est au Maroc que l’on peut couper les jarrets de la France. » Cette analyse reste d’actualité.Par Nicolas MarmiéMond-Infos, 8/12/2010