Mois : décembre 2010

  • AMDH : Rapport de la commission d’enquête sur les événements de El Aaiun

    Association Marocaine des Droits Humains Bureau Central الجمعية المغربية لحقوق الإنسان المكتب المركزي
    Rabat le 24 -12-2010 
    Conférence de presse pour la présentation du rapport de la Commission d’enquête de l’Association Marocaine des Droits Humains sur les événements de Laâyoune du 8 novembre 2010 Déclaration de presse Mesdames et Messieurs les représentantes et les représentants […]

    Rabat le 24 -12-2010
    Conférence de presse pour la présentation du rapport de la Commission d’enquête de l’Association Marocaine des Droits Humains sur les événements de Laâyoune du 8 novembre 2010
    Déclaration de presse
    Mesdames et Messieurs les représentantes et les représentants des instances de presse et des moyens de communication, les organisations des droits humains amies.
    Au nom du Bureau central de l’Association Marocaine des Droits Humains, je vous remercie d’avoir répondu à notre invitation par votre présence à cette conférence de presse que nous organisons pour la présentation du rapport de la Commission d’enquête afin d’évaluer à quel point les droits humains ont été respectés par l’Etat lors des événements survenus à Laâyoune le 8 novembre 2010 pendant le démantèlement du camp « Gdim Izik » et ses répercussions.
    Suite aux événements survenus à Laâyoune le 08 novembre 2010, l’Association Marocaines des Droits Humains a constitué une commission d’enquête composée de membres du Bureau central, de la Commission administrative et d’avocats.
    Toutes les activités de la Commission d’enquête ont été financées du budget de l’Association. La Commission a œuvré durant 4 jours: du vendredi soir 12 novembre au mardi soir 16 novembre 2010.
    La Commission d’enquête a adopté la méthodologie de l’audition et l’entrevue avec les différentes parties concernées. Ainsi, elle a tenu un bon nombre d’entrevues avec des instances gouvernementales, judiciaires et des organismes politiques, syndicaux et associatifs. Elle a, de même, audité des témoignages de citoyennes et de citoyens et a pris connaissance des communiqués officiels et de nombreux écrits dans la presse sur le sujet. Elle a, en outre, organisé des visites illustrées par des photos du théâtre des événements de Laâyoune selon les disponibilités et les possibilités.
    Ce rapport, que nous présentons aujourd’hui à l’opinion publique, se base quant à sa description des violations des droits humains, sur les décisions du système des droits humains et des instruments internationaux dont la sauvegarde et le respect est du ressort de l’Etat.
    I. Le contexte général des événements:
    Durant les derniers mois, la région a connu de nombreuses protestations de la population revendiquant ses droits économiques et sociaux. Les promesses des responsables aux protestataires n’ont pas été tenues. L’atmosphère générale, ayant amené le mouvement revendicatif a organisé un sit-in dans le camp Gdim Izik, était caractérisée par la pression due à la restriction des libertés, la répression des protestations et la détérioration des conditions économiques et sociales. En outre, plusieurs indices affirment que les revendications des manifestants du camp étaient purement sociales et concernaient principalement le logement et l’emploi. Tous les témoignages et communiqués dont ceux de la presse officielle confirment cette thèse. Et comme le reflète les rapports de nombreuses organisations, la région connaît toujours de nombreuses violations des droits humains en dépit de leur baisse notable connue depuis le cessez-le-feu à cause de la poursuite du conflit au Sahara ce qui contribue à la dérive de tout mouvement social pour prendre un caractère politique comme c’était le cas à la suite du démantèlement du camp à Laâyoune.
    II. Les événements et les faits:
    Le rapport de la Commission d’enquête renferme une partie qui concerne l’organisation du camp, les rapports reliant le Comité de dialogue et les protestataires dans le camp, le déroulement des événements ayant eu lieu le 8 novembre selon les déclarations de témoins et des représentants des organismes rencontrés par la Commission en plus des communiqués officiels et des différents rapports sur les événements. Nous en tirons ce qui suit :
    1) Le campement
    § L’installation du camp et le dialogue avec les autorités:
    – Le camp constituait un mécanisme de protestation pour des revendications à caractère social,
    – La bonne organisation du camp, le respect et l’appréciation dont jouissaient les membres du Comité du dialogue parmi les résidents du camp étaient louables.
    – Le nombre des résidents du camp était instable. Il variait entre 8000 et 20000 personnes. La plupart des familles résidentes au camp ont continué à vivre normalement en ville durant la semaine (le travail, la scolarité et les divers besoins) et ne laissaient qu’une personne ou deux dans la tente qu’elles rejoignaient en fin de semaine.
    – Le dialogue a été ouvert avec l’administration centrale après le refus des protestataires de négocier avec le Wali qui n’avait pas honoré ses promesses selon les déclarations des concernés.
    – Le dialogue s’est achevé par un accord en vertu duquel les autorités ont commencé à enregistrer sur place les personnes à besoins spécifiques, les veuves, les divorcées et à déterminer leurs besoins; l’enregistrement des autres catégories devrait avoir lieu ultérieurement.
    – Les vendredi et samedi 4 et 5 novembre 2010, des tentes ont été implantées et l’enregistrement des catégories suscitées a débuté sachant que la suite de l’application de l’accord continuerait en principe durant la matinée du lundi 8 novembre 2010.
    – La nouvelle s’est propagée concernant l’accord conclu entre le Comité de dialogue et les autorités. En vertu de cet accord, des tentes seraient implantées par les autorités pour enregistrer les personnes lésées et déterminer leurs besoins.
    – La tentative d’un bon nombre de citoyens de rejoindre le camp suite à cette nouvelle.
    – De nombreux témoignages déclarent ne pas comprendre la volte-face brusque de la position des autorités qui ont annoncé l’échec du dialogue, la séquestration des femmes et des enfants dans le camp et qui ont qualifié les négociateurs d’assassins.
    – L’encerclement du camp, le renforcement des barrières sécuritaires, l’interdiction aux voitures de rejoindre le camp et les altercations entre les personnes désireuses de rejoindre le camp et les forces publiques qui ont battu des femmes.
    § Le démantèlement du camp :
    – Toutes les données recueillies par la Commission conduisent à penser que l’offensive déclenchée contre le camp a eu lieu à 6 heures et demi du matin et que les résidents n’ont pas eu le temps suffisants pour comprendre ce qui se passe et de se préparer à quitter les lieux vu l’espace de temps réduit séparant l’annonce officielle de la décision d’évacuer le camp et l’intervention des forces publiques.
    – Pour l’évacuation du camp les forces publiques ont utilisées des bombes lacrymogènes, des tuyaux d’eaux chaudes et le lancement de pierres. D’autres témoignages ont évoqué l’utilisation de balles en caoutchouc.
    – Selon certains témoignages « les sons des hélicoptères et des camions couvraient ceux des hauts parleurs; les camions ont pris d’assaut le camp et ont écrasé les tentes. En ces moments, la panique a été semée au sein du camp et les gens couraient dans tous les sens alors que les matraques pleuvaient sur les corps, les bombes lacrymogènes tombaient et les propos obscènes fusaient ».
    – Il s’est avéré, selon les données recueillies, que les forces auxiliaires étaient dans l’incapacité de s’opposer à la riposte de certains protestataires qui était si forte faisant usage d’armes blanches, de cocktails Molotov et de butanes. Cette riposte a entrainé des victimes parmi les forces auxiliaires; certaines victimes sont tombées dans le camp et d’autres après leur transfert à l’hôpital. Selon les déclarations officielles le nombre de victimes s’élève à 11 cas.
    1) Les événements de la ville de Laâyoune:
    Les habitants se sont réveillés le lundi matin en apprenant que le camp est attaqué et que les forces publiques ont « brûlé et démantelé le camp avec leurs familles dedans » ce qui a fait régner une atmosphère d’épouvante, de réprobation et de colère parmi les habitants de la ville qui ont organisé des marches et des manifestations tumultueuses dans différents quartiers: Hay Skikima, Ras al-Khayma, Colomina Nueba, Hay Maâta allah…
    Toutes les déclarations et les témoignages recueillis par la Commission s’accordent sur le fait que les événements que Laâyoune a connus se sont déroulés en deux temps:
    § Le matin :
    – Selon un témoignage « l’attaque contre Laâyoune a été commise par des personnes organisées à bord de voitures à quatre roues motrices appartenant en partie aux trafiquants de la drogue et qui ont utilisé dans leurs opérations les cocktails Molotov et les butanes, le lancement de pierres et ont installé des barricades et brûlé des pneus. »En plus « la méthode adoptée lors de l’attaque confirme que les assaillants sont préalablement entrainés et organisés ce qui s’avère de par la nature de leurs déplacements qui se font en groupes organisés ayant fixé d’avance leurs cibles et exécuté leurs opérations moyennant des voitures à quatre roues motrices ».
    – Selon les constations de la Commission basées sur l’observation ou les déclarations des responsables et des témoins, ce sont les établissements publics et privés qui ont été visés ; ceci est mentionné en détail dans le rapport de la Commission.
    – Un bon nombre de témoins ont confirmé à la Commission que les établissements, les immeubles et les propriétés visés ont été déterminés d’une façon sélective et délibérée et non pas aveuglément.
    – Les témoignages ont déclaré à l’unanimité que l’attention de tout le monde a été attirée par le vide sécuritaire qui a régné dans la ville ce matin.
    – Des déclarations concordantes ont évoqué que dans de nombreux quartiers les « Sahraouis » (c’est-à-dire le groupe qui a mis les feux) se sont retirés du terrain rapidement et de façon organisée à midi.
    § Le soir:
    – La plupart des déclarations ont confirmé qu’après le retrait rapide des « Sahraouis » de l’avenue, à partir de 11 heures et demi, une campagne d’arrestations et de perquisitions ont été menées parmi les habitants sahraouis de Laâyoune avec la participation de jeunes d’origine non saharienne.
    – D’autres témoignages ont évoqué que durant l’après-midi a eu lieu une intervention violente des forces publiques composées d’agents de police, des forces auxiliaires appuyées par l’Armée utilisant excessivement les bombes lacrymogènes. Ainsi, la première étape s’est achevée avec la dispersion des manifestants et notamment de l’avenue Boukraâ et de la route de Smara.
    De nombreux témoignages ont affirmé que, durant la deuxième étape des événements, ayant eu lieu l’après-midi de la même journée, a été caractérisée par des manifestations de jeunes protégés par les forces publiques brandissant les drapeaux du Maroc, scandant des slogans saluant la vie du Roi et attaquant les devantures de locaux commerciaux, les voitures et les biens qu’ils considèrent appartenant aux Sahraouis.
    Des déclarations de nombreuses victimes et de témoins ont affirmé que les forces auxiliaires et les agents de police ont embrigadé de jeunes civils pour perquisitionner et piller les biens tout en recherchant les suspects.
    De nombreuses victimes ont affirmé à la Commission qu’elles ont été attaquées par les forces publiques soutenues par des jeunes embrigadés du « Nord » (appellation pour désigner les habitants d’origine non saharienne) et qu’elles ont été pillées chez elles comme dans leurs commerces.
    Parmi ces victimes, certaines ont déposé des plaintes près du Procureur du Roi demandant l’équité et la réparation. La Commission a appris que les perquisitions ont duré des jours suivant les événements et que les arrestations n’ont pas cessé.
    III- Violations constatées par la commission
    La commission a enregistré de nombreuses violations des droits humains pendant et après les événements. Les plus importantes sont les suivantes :
    1-La violation du droits à la vie 
    L’intervention de la force publique et l’usage de la force, pour le démantèlement du camp de Akdim Izik, les affrontements qui ont suivi, ainsi que les réactions violentes, de certains protestataires du sitting au camp et de manifestants dans la ville de Layoune, aussi bien le matin que dans l’après-midi, ont entrainé le décès de treize ( 13)de personnes, dont onze (11) dans les rangs des forces publiques et deux (2) civils. Par ailleurs, la mort de l’enfant Najem El Ghareh le 24 octobre 2010, survenue avant le démantèlement du camp, fait suite aux tirs des armes à feu par les forces de sécurité, qui étaient stationnées autour du camp, sur la voiture qui le transportait.
    Le rapport contient la liste des noms des membres des forces publiques et des deux civils, El Karkar et Daoudi, décédés. D’ailleurs, ce sont les mêmes noms fournis par les communiqués officiels.
    L’Association Marocaine des Droits Humains, tout en condamnant les actes de violence qui ont fait onze (11) victimes parmi les membres de la force publique et deux civils, selon les déclarations officielles; et ce en partant de son attachement à la défense permanente du Droit à la Vie; dénonce tous les actes ayant fait des victimes aussi bien les membres des forces publiques que les civils. L’AMDH condamne également les actes montrés par la vidéo, diffusée par la télévision marocaine, représentant la mutilation des cadavres et l’atteinte de leur inviolabilité (cadavre égorgé et le fait d’uriner sur un cadavre). Elle appelle à diligenter une enquête intègre et neutre pour établir toutes les responsabilités, directes et indirectes, de ces décès et à prendre les mesures nécessaires dans le cadre du respect des dispositions des conventions internationales des droits humains ainsi que la publication des résultats de l’enquête sur le décès de l’enfant Najem El Ghareh.
    2-Détention, enlèvement, torture, traitemements cruels, inhumains et dégradants
    Au cours de ses travaux à Laâyoune, la commission a reçu les familles des protestataires du sit-in au camp de Akdim Izik, et qui n’ont donné aucun signe de vie, cinq jours après le démantèlement du camp. Certaines familles ont affirmé que leurs proches ont été arrêtés par les autorités publiques.
    Un groupe de personnes ont été détenues à l’occasion de la dispersion du sit-in, ou à la suite des événements de Laayoune. Ils ont été maintenus en garde à vue, au-delà du délai légal. Parmi ces personnes figure l’enfant Naji Ahmed, arrêté le lundi 8 novembre à huit heures du matin et relâché le vendredi 12 novembre, et qui n’est qu’un exemple du non respect du délai légal de la garde à vue.
    -Détention arbitraires et aléatoires :
    La campagne des détentions a été aléatoire, car elle a touché des citoyens qui ont déclaré n’avoir aucune relation avec le camp.
    -Pratique de la torture :
    Il apparaît ; à partir des déclarations de quelques citoyens, de détenus libérés, des affirmations de leur défense ou des constations in visu des membres de la commission ; que les détenus ont fait l’objet de différentes formes de torture de traitements inhumains et dégradants : coups, insultes, diffamations, bandage des yeux, interdiction de sommeil, urine sur eux et menaces de viol. L’un des avocats des détenus a déclaré que l’état de santé physique et psychologique des détenus s’est dégradé (certains ne peuvent se mettre debout et d’autres sont pieds nus) ; et ce en violation flagrante des conventions internationales et des lois internes. Le cas de M. Kachbar Ahmed (qui a été libéré) n’est qu’un exemple qui illustre l’ampleur de la torture dont il a fait l’objet, pendant sa détention. Au cours de sa visite, la commission a trouvé M. Kachbar Ahmed sur une chaise roulante, avec des blessures profondes au niveau de la tête et des ecchymoses au niveau du dos et des yeux.
    Par ailleurs, les avocats des détenus ont déclaré, au juge d’instruction, que « certains détenus ont déclaré avoir été menacés de viol, et que l’un d’entre eux a été effectivement violé, par l’introduction d’une bouteille d’une boisson gazeuse….. La plupart des détenus ne sont pas chaussés, et les habits de tous sont déchirés du fait de l’intensité de la torture… » L’odeur qu’ils dégageaient ; suite à la détention, à la torture qu’ils ont subi, aux produits infectes et à l’urine qu’on déversé sur certains d’entre eux ; était telle qu’il a été impossible de fermer les fenêtres du bureau de l’instruction.
    Le rapport contient une liste, que la commission a reçu, des noms des détenus, y compris les 16 prévenus déférés au tribunal militaire et qui se trouvent à la prison de Salé.
    La commission enregistre, qu’après avoir quitté la ville de Layoune, la campagne des arrestations, en relation avec les événements, continuait dans la ville.
    Le rapport contient aussi un témoignage, de la section de l’AMDH, au sujet une liste de noms d’un certain nombre de personnes ayant déclaré avoir été détenus le jour des événements et libérés le 26 novembre, après avoir été considérés, par leurs familles, comme disparus. Ils ont également déclaré avoir été victimes de coups de feu tirés par les agents de la police.
    3-La violence n’épargne pas les défenseurs des droits humains, les femmes aussi bien que les hommes
    Les défenseurs des droits humains, femmes et hommes, n’ont pas échappé à la torture. En effet, la commission d’enquête a constaté, à Layoune, des traces apparentes de coups sur des parties du corps de Salka Layli, activiste de l’Association Sahraoui des Victimes des Violations Graves des Droits Humains Perpétrées par l’État Marocain. La commission a aussi fait le suivi de l’agression dont a été victime Brahim Al Ansari (membre de Human Right Watch au Maroc) par des coups de poing et de pied et des gifles par des agents de la police. De même que le foyer de la défenderesse Ghalia Jimmi (vice-présidente de l’Association Sahraoui des Victimes des Violations Graves des Droits Humains Perpétrées par l’État Marocain) a été envahi par « plus de dix personnes armés de pistolets mitrailleurs, et comment elle a été humiliée et ses enfants terrorisés ».
    4-Violations des droits des femmes
    La commission a enregistré un cas d’avortement lors du démantèlement du camp, ainsi qu’un cas de viol, de la part des agents de la police. La victime a présenté à la commission un témoignage filmé et a déposé une plainte auprès de l’Organisation qui a envoyé une correspondance, à ce sujet, au ministre de l’intérieur.
    5- Violations des droits des enfants
    La commission a consigné des témoignages qui illustrent l’exploitation, à outrance, des enfants pour provoquer désordre et troubles. Cette couche de la population a également objet de graves violations de ses droits, et victime de la violence de la part des forces publiques. Il y eu le constat du cas de l’enfant Ahmed Naji, âgé de 13 ans, scolarisé à l’École « Attaawone », qui a été détenu cinq (5) jours et privé de nourriture pendant trois (3) jours. Quant à l’enfant Mohammed Hafd Allah, âgé de 11 ans et son frère Mhamid Hafd Allah, âgé de 6 ans, et qui sont les enfants que montre le film, distribué par le ministère de l’intérieur, alors qu’ils étaient entrain de pleurer, dans les bras d’un agent de police, suit à la blessure de leur père: ces deux enfants ont marché à pied, pendant dix sept (17) heures pour atteindre la ville de Layoune. En outre, les incendies et le saccage que les établissements scolaires ont subi, constituent, également une violation du droit à l’éducation des élèves qui y sont inscrits.
    6- Restrictions du droit d’accès à l’information
    La commission d’enquête a assisté à l’interdiction faite à Ali Mrabet, journaliste et au représentant de l’organisation Human Right Watch, de monter dans l’avion à destination de Layoune le 12 novembre 2010. Par la suite, la commission a eu connaissance de l’interdiction ou des tracasseries dont ont été victimes certains journalistes ; de même qu’elle a eu des difficultés lors de sa visite du camp.
    7- Atteinte et destruction des biens
    De nombreux témoignages confirment la destruction et les atteintes aux biens, par les incendies et les sabotages qui ont affecté des établissements publics et privés, administrations publiques, magasins de commerce privés, foyers et mobiliers. Par ailleurs, tout le monde a constaté l’absence, presque totale, des forces de sécurité à Layoune, le matin du lundi 8 novembre.
    IV- CONCLUSIONS :
    Les conclusions de la commission d’enquête sont les suivantes :
    1-L’État assume l’entière responsabilité du déclenchement du mouvement de protestation sociale, à travers l’établissement du camp de Akdim Izik ; et ce du fait des mauvaises politiques de gestion dans la région dans les différents domaines, d’une part ; et de l’échec de son plan de démantèlement du camp à cause des violations des droits humains que cet échec a entrainé, d’autre part.
    2-La commission enregistre l’ambigüité au sujet du volte face des autorités. Position qui est passée de la satisfaction des revendications des protestataires à la décision de la dispersion du camp par la force ; en dépit de la satisfaction du camp suite à l’information relative à la réponse favorable aux revendications des protestataires. C’est ce qui exige de diligenter une enquête à ce sujet.
    3-Lors du démantèlement du camp, les normes légales n’ont pas été respectées. En effet, les autorités publiques ont adopté l’approche sécuritaire, reposant sur l’usage de la force et de la violence pour disperser les protestataires. En plus des conditions de dispersion du sit-in, en termes d’horaire inadéquat, d’appel à la dispertion et du très court délai accordé aux protestataires pour quitter les lieux.
    4-La violence exercée par les forces publiques, la réaction violente de la part de certains protestataires du camp ainsi que des manifestants dans la ville de Layoune, ont donné lieu à de graves violations des droits humains, dont l’atteinte au droit à la vie et à l’intégrité physique. De même qu’elles a entrainé la torture, le viol, la détention arbitraire, les punitions collectives, la destruction de biens publics, la violation des foyers, la spoliation des biens privés, la violence et la terreur à l’encontre des enfants et des personnes âgées….
    5-Lors du démantèlement du camp, les autorités publiques n’ont pas tenu compte des catégories sociales vulnérables qui étaient présentes. En effet, elles n’ont pas pris de mesures spéciales pour l’évacuation massive des personnes âgées, des femmes, des enfants et des handicapés.
    6-La commission a constaté le recours des autorités publiques à monter des populations contre d’autres, pour donner cours à une punition collective à l’encontre du reste des habitants dans certains quartiers. En effet, ces derniers ont subi des coups et des blessures et ils sont vus imposer à scander des slogans contraires à leurs convictions, les portes de leurs maisons ont été cassées et envahies et leur mobilier a été détruit. Cette nouvelle méthode, consistant à assiéger les personnes convaincus par l’idée de l’auto détermination, ne date pas d’aujourd’hui, car les autorités l’ont mise en œuvre par le passé.
    7-La commission d’enquête, à travers de nombreux témoignages et déclarations, a appris que certains détenus, suite aux événements de Layoune, ont fait l’objet d’enlèvement, de dépassement du délai légal de la garde à vue, de la non notification de leur arrestation à leurs familles. Ils ont été torturés, soit dans les commissariats ou lors de leur transfert à la prison de Layoune. Par ailleurs, la justice n’a pas donné suite à la requête de procéder à l’expertise médicale de ces détenus. D’autres détenus (16 selon nos informations) ont été déférés au tribunal militaire, et jusqu’à présent on n’est pas informés es conditions de leurs arrestations. d’une part ; et nous ne savons pas si des arrestations ont eu lieu dans les rangs des participants aux manifestations du soir, impliqués dans les actes d’invasion des foyers, le pillage des biens et les violences à l’encontre de leurs habitants.
    8-La connaissance des événements qui ont eu lieu à l’hôpital militaire, constitue un maillon essentiel pour déterminer l’ampleur et les conséquences de la violence exercée à l’encontre des personnes manifestants – aussi dans le camp que dans la ville de Layoune. C’est ce que la commission n’a pas été en mesure de constater du fait qu’elle n’a pas pu avoir accès à l’hôpital. De ce fait, le nombre des décès auquel la commission est parvenue, est celui qui a été annoncé officiellement.
    9-Les autorités sécuritaires se sont soustraites à leur responsabilité de protection des biens de l’État et des citoyens, à travers leur absence, presque complète, de la ville de Layoune au cours de la matinée du lundi 8 novembre, et l’incitation au pillage et à la destruction des biens au cours de la soirée.
    10- Après avoir terminé son travail de terrain, la commission a reçu un rapport de la section de Layoune. Rapport concernant la réception, par la section, de certains citoyens détenus le jour des évènements et relâchés le 26 novembre. Ces citoyens déclarent avoir reçu des tirs de coups de feu des pistolets d’agents de la police, et qu’ils vont être jugés, en situation de liberté provisoire; et c’est ce qui exige l’ouverture d’une enquête au sujet de ces déclarations, et sur les conditions de l’usage des armes à feu, si la preuve est établie.
    V- RECOMMANDATIONS
    1. L’ouverture d’une enquête pour déceler toute la vérité et établir les responsabilités des évènements que la région de Layoune a connus ; par la mise en œuvre de la justice et du principe de la non impunité de personnes dont la responsabilité serait établie- dans le cadre d’un procès équitable- aussi bien au sujet des causes directs que des facteurs indirects qui sont à l’origine de ces évènements, les violations des droits humains qu’ils ont entrainées. Et ce pour toutes les étapes et tous les faits, dont :
    -La situation sociale qui a donné lieu à l’établissement du camp de Akdim Izik, le 10 octobre 2010, et les promesses précédentes non tenues par les autorités ;
    -Le résultat de l’enquête sur les coups de feu ayant entrainé le décès de l’enfant Najem El Ghareh, et la blessure des ses accompagnateurs ;
    -Les accusations portées contre le comité de dialogue, après de nombreuses réunions tenues avec lui, et le changement surprenant de l’attitude des autorités à son égard ;
    -La décision du choix de l’heure où a eu lieu le démantèlement du camp, à l’aube du 8 novembre 2010, ainsi que le délai entre l’annonce de la décision et l’intervention des forces de l’ordre,
    -La responsabilité du plan d’intervention et sa gestion, depuis le choix des membres des forces de l’ordre jusqu’au niveau de leur formation et la garantie de la sécurité des membres de la force publique ;
    -La responsabilité du décès des membres des forces publiques, ainsi que la mutilation de cadavre et l’atteinte de son inviolabilité contenus dans les rapports officiels ;
    -Les allégations de torture subie par les détenus et le cas de viol, mentionné dans le rapport, et à propos duquel l’AMDH a dressée une correspondance au ministre de l’intérieur.
    2. L’ouverture d’une instruction judiciaire concernant ce qui a eu lieu dans l’hôpital militaire de Layoune, le jour des évènements. En effet, la commission a reçu des témoignages qu’elle n’a pas pu vérifier, au sujet du nombre et de l’ampleur de la violence et de la torture exercées pendant les évènements ainsi que leurs conséquences.
    3. La nécessité de procéder à une enquête intègre et neutre au sujet du changement inopiné de la position des autorités, et sa décision de démanteler le camp par la force, alors que les données indiquent que tout le monde s’attendait à la mise en œuvre des résultats du dialogue.
    4.Mettre un terme, définitivement, à toutes les formes de discrimination sur la base de la relation avec le pouvoir, les notables, les privilégiés et les partis hégémoniques, dans la région, , d’une part ; ainsi que la discrimination sur l’appartenance ou non à la région, d’autre part, discriminations exercée par les autorités et les élites dominantes. En fait, il faut respecter l’égalité des chances pour tous, dans les domaines de l’emploi, de l’habitat ou de la jouissance des potentialités et des richesses de la région.
    5.La nécessité de mettre un terme aux pratiques des autorités, visant à semer la discorde entre les habitants, inciter à l’hostilité et encourager le tribalisme, l’agressivité et la violence dans la région. Pratiques pouvant avoir des conséquences très graves pour la sécurité de la région et l’intégrité de ses habitants. En conséquence, il faut mettre en œuvre l’article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui stipule que : « Tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence est interdit par la loi ».
    6. Le respect des libertés publiques, par les autorités de la région, qui englobent la liberté d’organisation, de rassemblement, d’expression, de presse, de manifestation pacifique, y compris la liberté d’opinion et d’expression pacifique des différentes positions, présentes dans la région, au sujet du conflit du sahara (Sahara Occidental, ancienne colonie espagnole envahie par le Maroc en 1975, ndds).
    7. Donner à toutes les associations des droits humains et à toutes les organisations de la société civile, sans discrimination aucune, l’occasion de travailler dans la région, jeter des passerelles de communication avec ces associations et être à leur écoute. Et permettre aux différents partis politiques de contribuer à l’encadrement et à la formation politique sans pressions ou restrictions, et offrir toutes les possibilités de canalisation des différentes protestations des habitants de manière à garantir le droit à la participation, condition fondamentale de la démocratie, et établir un dialogue avec leurs représentants, avant l’aggravation de la situation.
    8. Offrir à toutes les composantes des médias nationaux et internationaux, et à tous les observateurs le droit d’accès à l’information et à toutes les données de recherche et d’investigation relatives aux évènements de la région, leurs causes et conséquences, pour participer à informer et à éclairer l’opinion publique nationale et internationale et de révéler la vérité, dans le respect totale de la déontologie de la profession de journalisme.
    9. Dispenser aux agents de l’État chargés de l’application des lois une formation sur les droits humains, et leur garantir le droit à une vie digne, d’autant plus que les conditions de pauvreté et de déni de la dignité des agents chargés de la sécurité, qui sont en relation directe avec les citoyens, suscite la haine, l’hostilité et les pratiques violentes de vengeance.
    10. Offrir les conditions d’un procès équitable à tous les détenus, y compris ceux qui ont été déférés au tribunal militaire ; en sachant que le fait de déférer des civils au tribunal militaire constitue, en soi, une violation des normes du procès équitable.
    11.Réparer les préjudices individuels et collectifs engendrés par les événements, en commençant par réparer les préjudices des ayants droit des familles des victimes, indemniser les habitants de la région pour toutes les pertes qu’ils ont subi au cours des évènements du camp ou de Layoune, qu’il s’agisse des biens détruits ou incendiés au camp ou dans la ville de Layoune le lundi matin, les diverses marchandises perdues lors du pillage des magasins le soir du lundi 8 novembre ainsi que les meubles volés au cours de l’invasion des maisons au cours de la même période. Et Finalement toutes les personnes qui ont été victimes d’incendies, destructions ou dévastations, en général, au cours des événements.
    12. L’État doit mettre à exécution ses engagements, relatifs au dossier des graves violations du passé, révéler toute la vérité au sujet des dossiers des disparus sahraouis, communiquer avec les victimes et leurs familles et libérer tous les prisonniers politiques sahraouis, y compris les trois qui restent du groupe Tamek.
    13. L’État marocain doit respecter ses engagements relatifs à l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qu’il a ratifiée depuis 1993, la ratification du Protocole facultatif se rapportant à cette convention pour doter la société d’un mécanisme national de prévention de la torture, ainsi que la ratification de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.
    4. L’AMDH, rappelle sa revendication, aux côtés de nombreuses organisations internationales de défense des droits humains, relative à la mise en place d’un mécanisme international de contrôle des droits humains dans la région.
    15. La nécessité de trouver une solution démocratique au conflit du sahara. Solution susceptible d’éviter davantage de violations des droits dans la région, permettant la réalisation de l’unité des peuples maghrébins, l’édification de la démocratie et le décollage du développement économique et sociale de la région. En effet, les protestations sociales et les violations des droits humains qui les accompagnent, dans de nombreux cas, et la persistance des situations de tension et d’affrontement entre les citoyens et le pouvoir sont alimentés par les conditions engendrés par le conflit autour du sahara qui continu, et qui n’a que trop duré.
    16. L’Association Marocaine des Droits Humains lance un appel à la commission parlementaire d’enquête sur les évènements de Layoune, à ne pas répéter les expériences des commissions parlementaires d’enquête précédentes qui se sont arrêtées à des demi vérités. Les autres impliqués dans les violations que ces commissions ont enregistrées jouissent de l’impunité totale (commission des évènements de Fès en 1990, commission de Sidi Ifni, commission d’enquête sur les détournements des fonds publics…).

    AMDH, 24/12/2010

  • Les évènements d’El Aaiun devraient faire changer de cap la diplomatie française (expert)

    PARIS, 24/12/2010 (SPS) Les événements qui ont embrasé El Aaiun, la capitale occupée du Sahara occidental, le 8 novembre, devraient convaincre la diplomatie française de « changer de cap sur un dossier peu connu, mais qui embarrasse jusqu’aux plus aguerris de ses diplomates », a indiqué le représentant de Human Rights Watch à l’Onu Philippe Bolopion.

    S’exprimant dans un « point de vue » publié sur le Monde.fr, Bolopion a relevé que « depuis plusieurs années, à l’abri des portes closes du Conseil de sécurité de l’ONU, la France use du pouvoir de dissuasion que lui confère son droit de veto pour tenir les Nations unies à l’écart des questions touchant au respect des droits de l’homme dans le territoire annexé par son allié marocain en 1975 ».

    Faute d’un mandat approprié, la mission de l’ONU au Sahara occidental (Minurso) est restée « aveugle » tout au long des événements qui ont opposé le mois dernier les forces de l’ordre marocaines aux militants sahraouis, les troubles les « plus graves » depuis le cessez-le-feu de 1991, a-t-il fait remarquer.

    Pour lui, le Conseil de sécurité de l’ONU, en charge de la paix internationale, « s’est vu dans l’incapacité de faire la part des choses entre le mouvement indépendantiste du Front Polisario, qui a dénoncé sans preuve le massacre de 36 manifestants pacifiques, et le Maroc qui prétendait, sans plus de crédibilité, libérer les milliers de civils sahraouis soi-disant retenus en otage par des « criminels » dans un camp érigé en signe de protestation à proximité de El Aaiun.

    M. Bolopion a estimé que si ces événements s’étaient déroulés en République démocratique du Congo, en Haïti ou au Soudan, des experts en droits de l’homme de l’ONU auraient immédiatement été dépêchés sur place pour établir une version objective des événements et informer le Conseil de sécurité, contribuant ainsi à apaiser les tensions.

    La présence d’observateurs de l’ONU aurait aussi pu s’avérer dissuasive pour les forces de sécurité marocaines qui ont à plusieurs reprises, selon une enquête de Human Rights Watch, passé à tabac des personnes arrêtées à la suite des troubles.

    Toutes les missions de maintien de la paix de l’ONU établies depuis 1991 disposent de ces mécanismes, qui reposent sur le constat que « toute paix durable s’appuie sur le respect des droits de l’homme.

    Partout ailleurs, du Darfour au Timor Leste, en passant par le Kosovo, la France soutient pleinement l’intégration croissante des questions touchant aux droits de l’homme dans les missions de l’ONU.

     » Il n’y a que sur le dossier sahraoui que Paris s’arc-boute, persistant à défendre une anomalie historique », a-t-il déploré.

    « Au lieu de s’aligner sur Rabat, la France devrait convaincre le Maroc qu’il a tout à gagner à améliorer les conditions dans lesquelles vivent les Sahraouis sous son contrôle, souvent muselés et harcelés par les forces de l’ordre marocaines lorsqu’ils osent se prononcer pour l’indépendance », a affirmé le militant de Human Rights Watch, pour qui le renouvellement du mandat de la Minurso, en avril 2011, « offre à la diplomatie française une chance de corriger la situation ».

    « Il est temps que Paris reconnaisse que, sans un strict respect des droits des Sahraouis, garanti par l’ONU, les deux camps continueront à se livrer à des campagnes de désinformation qui ne font que compliquer les efforts du Conseil de sécurité en faveur d’une solution politique », a-t-il conclu.(SPS)

  • Journée de deuil suite au décès du jeune Said Dambar

    Chahid Hafed. – La Présidence de la République Arabe Sahraouie Democratique (RASD), a déclaré aujourd’hui, samedi 25 décembre 2010, jour de deuil national.

    La déclaration est en mémoire du martyr Said Damber qui a été assassiné par deux balles dans la tête par un membre de la police marocaine d’occupation. « Said Damber, victime d’une attaque lâche, perpétrée par la police du Maroc, se joint à la liste des martyrs de la résistance nationale sahraouie pour la liberté et l’indépendance, comme Hamdi Lembarki, Lejlifi Aba Chej, Baba Jaya, Lhusein Lektif, Najem Elgarhi, Brahim Daudi et Babi Elgargar, entre autres », indique le communiqué de la Présidence.

    Dans la note, des mesures urgentes sont demandées aux Nations Unies pour la protection et la vigilance des droits humains dans les territoires occupés du Sahara Occidental qui est sous sa responsabilité, ainsi que l’envoi d’une mission internationale d’investigation au territoire.

    La Présidence de la République déclare aujourd’hui, samedi 25 décembre 2010, jour de deuil national sur tout le territoire national de la République sahraouie et dans les campements de réfugiés, dans les ambassades et les représentations du Front Polisario, le drapeau national sera à moitié hissé.

    De la même manière, il dénonce ce crime lâche qui fait partie d’une dangereuse escalade de la part du régime militaire marocain contre les sahraouis civils sans défense, principalement après l’assaut du campement de Gdeim Izik.

    La Présidence de la République appelle tout le peuple sahraoui à garder une minute de silence à 12:00 heure d’aujourd’hui, en mémoire des martyrs de la cause nationale.

  • Les évènements d’El Aaiun devraient faire changer de cap la diplomatie française (expert)

    PARIS, 24/12/2010 (SPS) Les événements qui ont embrasé El Aaiun, la capitale occupée du Sahara occidental, le 8 novembre, devraient convaincre la diplomatie française de « changer de cap sur un dossier peu connu, mais qui embarrasse jusqu’aux plus aguerris de ses diplomates », a indiqué le représentant de Human Rights Watch à l’Onu Philippe Bolopion.

    S’exprimant dans un « point de vue » publié sur le Monde.fr, Bolopion a relevé que « depuis plusieurs années, à l’abri des portes closes du Conseil de sécurité de l’ONU, la France use du pouvoir de dissuasion que lui confère son droit de veto pour tenir les Nations unies à l’écart des questions touchant au respect des droits de l’homme dans le territoire annexé par son allié marocain en 1975 ».

    Faute d’un mandat approprié, la mission de l’ONU au Sahara occidental (Minurso) est restée « aveugle » tout au long des événements qui ont opposé le mois dernier les forces de l’ordre marocaines aux militants sahraouis, les troubles les « plus graves » depuis le cessez-le-feu de 1991, a-t-il fait remarquer.

    Pour lui, le Conseil de sécurité de l’ONU, en charge de la paix internationale, « s’est vu dans l’incapacité de faire la part des choses entre le mouvement indépendantiste du Front Polisario, qui a dénoncé sans preuve le massacre de 36 manifestants pacifiques, et le Maroc qui prétendait, sans plus de crédibilité, libérer les milliers de civils sahraouis soi-disant retenus en otage par des « criminels » dans un camp érigé en signe de protestation à proximité de El Aaiun.

    M. Bolopion a estimé que si ces événements s’étaient déroulés en République démocratique du Congo, en Haïti ou au Soudan, des experts en droits de l’homme de l’ONU auraient immédiatement été dépêchés sur place pour établir une version objective des événements et informer le Conseil de sécurité, contribuant ainsi à apaiser les tensions.

    La présence d’observateurs de l’ONU aurait aussi pu s’avérer dissuasive pour les forces de sécurité marocaines qui ont à plusieurs reprises, selon une enquête de Human Rights Watch, passé à tabac des personnes arrêtées à la suite des troubles.

    Toutes les missions de maintien de la paix de l’ONU établies depuis 1991 disposent de ces mécanismes, qui reposent sur le constat que « toute paix durable s’appuie sur le respect des droits de l’homme.

    Partout ailleurs, du Darfour au Timor Leste, en passant par le Kosovo, la France soutient pleinement l’intégration croissante des questions touchant aux droits de l’homme dans les missions de l’ONU.

     » Il n’y a que sur le dossier sahraoui que Paris s’arc-boute, persistant à défendre une anomalie historique », a-t-il déploré.

    « Au lieu de s’aligner sur Rabat, la France devrait convaincre le Maroc qu’il a tout à gagner à améliorer les conditions dans lesquelles vivent les Sahraouis sous son contrôle, souvent muselés et harcelés par les forces de l’ordre marocaines lorsqu’ils osent se prononcer pour l’indépendance », a affirmé le militant de Human Rights Watch, pour qui le renouvellement du mandat de la Minurso, en avril 2011, « offre à la diplomatie française une chance de corriger la situation ».

    « Il est temps que Paris reconnaisse que, sans un strict respect des droits des Sahraouis, garanti par l’ONU, les deux camps continueront à se livrer à des campagnes de désinformation qui ne font que compliquer les efforts du Conseil de sécurité en faveur d’une solution politique », a-t-il conclu.(SPS)

  • Le Maroc devient dangereux

    Voyager au Maroc n’est plus ce que c’était. Après les incidents arrivés à El Aaiun même les touristes ne sont pas à l’abri de l’une des polices les plus corrompues de la planète. Donc, d’ici je demande un temps de réflexion pour toutes les personnes qui veulent voyager au Maroc. Faites attention, il est possible que vous vacances durent peu, très peu. Il y a déjà quelques semaines une série de protestations ont eu lieu contre l’occupation marocaine de la principale ville sahraouie qui a déchaîné une forte riposte policière de la part des autorités du Maroc. Les incidents ont eu une grande importance dans la presse espagnole et internationale malgré le fait que le Maroc a expulsé et a interdit l’entrée à tous les médias non autorisés, c’est-à-dire tout média non contrôlé par le monarque Mohamed VI, l’un des plus grands despotes – ça oui, entouré d’une fausse modernité – qui existent actuellement.

    Récemment, est sortie la nouvelle que Rabat a expulsé environ trente touristes espagnols parce que soupçonnés qu’ils étaient des journalistes. La gravité du fait c’est ce que plusieurs parmi eux n’avaient rien à voir avec les médias, avec ce que l’on soupçonnait de pouvoir sortir du pays une information non autorisée. C’est ça, que si vous décidé aller au Maroc, faites gaffe, parce que peut-être que la seule chose sur laquelle tu marches dans ce pays maghrébin c’est l’aéroport. La vérité est que la situation s’est compliquée dernièrement, parce quebien que depuis le gouvernement on assure que les relations avec le pays voisin sont normales, la société espagnole a émis un jugement en forme de critique aux rôles de l’Exécutif de Zapatero. On ne peut pas permettre, quel que soi le degré de voisinage, qu’on traite ainsi les touristes.

    Le conflit entre le Sahara Occidental et le Maroc remonte aux années 70, concrètement à 1976, quand l’Espagne a abandonné la dernière colonie qui lui restait dans les mains du Maroc et de la Mauritanie. Le Sahara n’a pas culminé un processus de décolonisation proprement dit, par conséquent, il n’a pas eu l’occasion d’asseoir des institutions propres. De cette façon, son voisin du nord a profité de lui une et mille fois. C’était l’une des plus scandaleuses et au Maroc ils sont devenus vigilants. Et telle, elle est, leur paranoïa que, même sans être journaliste, ils peuvent t’envoyer à la maison dans des vols non-régulliers. Les menaces policières ne sont pas la meilleure carte de présentation. Le Maroc mérite quelque chose de mieux.

    QDiario, 23/12/2010.
  • Au Maroc, le père Noël est un terroriste

    Les enfants marocains n’auront pas leur photo souvenir avec le bonhomme en rouge cette année, les sécuritaires leur conseillent plutôt d’adopter son homologue local “Baba Aïchour”, estampillé Hallal.
    Au Maroc, le père Noël fait peur aux autorités. Celles-ci lui mènent une guerre secrète depuis 2006, année où les nombreux jeunes qui profitaient des fêtes de fin d’année pour se faire un peu d’argent de poche en enfilant l’habit rouge dans les artères des grandes villes se sont vu refuser le renouvellement de leur autorisation. Depuis des décennies, des générations d’enfants marocains attendaient avec joie d’avoir leur photo souvenir avec le personnage populaire. La disparition de ces pères Noël saisonniers qui travaillaient en binôme avec des photographes est presque passée inaperçue, jusqu’à cette année où les autorités casablancaises ont formellement interdit la circulation de toute personne en costume rouge de père Noël, officiellement pour raison de sécurité.
    Selon le site Addoualia , les forces de l’ordre craindraient que des terroristes n’utilisent le déguisement pour commettre des actes terroristes. D’après des sources sécuritaires, des tracts distribués clandestinement dans la capitale économique auraient menacé de représailles “toute personne qui participe à la fête chrétienne”, ajoutant que c’est une “indignité que des musulmans fêtent l’anniversaire du Christ”, que “l’achat de gâteaux le jour de l’an relève de l’associationnisme*” et que “le personnage à la barbe blanche habillé en rouge symbolise le clergé de l’Eglise”. Le site se demande si cette décision “interdisant de se cacher le visage en portant un masque de père Noël” inclut également les adeptes de la Burqa. Parallèlement, des équipes de police se sont rendues aux écoles étrangères, ambassades, consulats et autres représentations diplomatiques pour vérifier si la fête de Noël y aurait bien lieu et ont renforcé leurs dispositifs de sécurité alentours.
    Toutefois, l’argument sécuritaire ne convainc pas. La figure du père Noël n’étant pas plus chrétienne au Maroc qu’elle ne l’est ailleurs, elle est surtout un personnage festif pour des enfants qui auraient bien du mal à comprendre qu’ils devraient y renoncer en raison de leur identité islamique. Son interdiction est surtout un gage envers les conservateurs qui accusent le vieillard en rouge de velléités d’évangélisation. Sur une émission égyptienne à grande audience, un cheikh d’Al Azhar* a répondu à l’enfant Youssef qu’il ne devrait plus célébrer “Papa Noël”, mais plutôt “Baba Mohammed*”, criant à l’aliénation religieuse et culturelle (voir vidéo).

    Au Maroc, le remplaçant de la figure consumériste née grâce au concours de Coca Cola existe déjà. Il suffit de le dépoussiérer. “Baba Aïchour”, personnage sorti de l’imaginaire populaire, avait pour habitude de distribuer des friandises aux enfants lors des fêtes de l’Achoura. Tombé en désuétude depuis près d’un siècle, il a été ressuscité par l’association Contes’Act en 2005, mais peine encore à remplacer le père Noël faute de marketing. Un groupe facebook appelé “Fans de Baba Aichour et non pas de papa Noël” appelle au retour aux valeurs arabo-musulmanes et accuse les adeptes du bonhomme en rouge “d’imiter les Occidentaux”. Toutefois, là encore, les thuriféraires de l’orthodoxie sunnite crient à la Bid’a*. En effet, même si les scènes d’auto-flagellation qui marquent l’Achoura chez les communautés chiites du Moyen-Orient sont inexistantes au Maroc où la fête revêt surtout un aspect familial, les puristes du sunnisme n’y voient pas moins une acculturation au culte d’Al Hassan et Al Hussein, les deux fils d’Ali. Décidément, on ne peut jamais faire plaisir à tout le monde.
    Et les enfants dans tout ça? En attendant que les fabricants de babioles chinois inondent le marché de peluches et déguisements de Baba Aïchour, ils devront désormais compter sans le père Noël.
    Zineb El Rhazoui
    Vox Maroc, 24/12/2010 
  • Le Maroc devient dangereux

    Voyager au Maroc n’est plus ce que c’était. Après les incidents arrivés à El Aaiun même les touristes ne sont pas à l’abri de l’une des polices les plus corrompues de la planète. Donc, d’ici je demande un temps de réflexion pour toutes les personnes qui veulent voyager au Maroc. Faites attention, il est possible que vous vacances durent peu, très peu. Il y a déjà quelques semaines une série de protestations ont eu lieu contre l’occupation marocaine de la principale ville sahraouie qui a déchaîné une forte riposte policière de la part des autorités du Maroc. Les incidents ont eu une grande importance dans la presse espagnole et internationale malgré le fait que le Maroc a expulsé et a interdit l’entrée à tous les médias non autorisés, c’est-à-dire tout média non contrôlé par le monarque Mohamed VI, l’un des plus grands despotes – ça oui, entouré d’une fausse modernité – qui existent actuellement.

    Récemment, est sortie la nouvelle que Rabat a expulsé environ trente touristes espagnols parce que soupçonnés qu’ils étaient des journalistes. La gravité du fait c’est ce que plusieurs parmi eux n’avaient rien à voir avec les médias, avec ce que l’on soupçonnait de pouvoir sortir du pays une information non autorisée. C’est ça, que si vous décidé aller au Maroc, faites gaffe, parce que peut-être que la seule chose sur laquelle tu marches dans ce pays maghrébin c’est l’aéroport. La vérité est que la situation s’est compliquée dernièrement, parce quebien que depuis le gouvernement on assure que les relations avec le pays voisin sont normales, la société espagnole a émis un jugement en forme de critique aux rôles de l’Exécutif de Zapatero. On ne peut pas permettre, quel que soi le degré de voisinage, qu’on traite ainsi les touristes.

    Le conflit entre le Sahara Occidental et le Maroc remonte aux années 70, concrètement à 1976, quand l’Espagne a abandonné la dernière colonie qui lui restait dans les mains du Maroc et de la Mauritanie. Le Sahara n’a pas culminé un processus de décolonisation proprement dit, par conséquent, il n’a pas eu l’occasion d’asseoir des institutions propres. De cette façon, son voisin du nord a profité de lui une et mille fois. C’était l’une des plus scandaleuses et au Maroc ils sont devenus vigilants. Et telle, elle est, leur paranoïa que, même sans être journaliste, ils peuvent t’envoyer à la maison dans des vols non-régulliers. Les menaces policières ne sont pas la meilleure carte de présentation. Le Maroc mérite quelque chose de mieux.

    QDiario, 23/12/2010.
  • Au Maroc, le père Noël est un terroriste

    Les enfants marocains n’auront pas leur photo souvenir avec le bonhomme en rouge cette année, les sécuritaires leur conseillent plutôt d’adopter son homologue local “Baba Aïchour”, estampillé Hallal.
    Au Maroc, le père Noël fait peur aux autorités. Celles-ci lui mènent une guerre secrète depuis 2006, année où les nombreux jeunes qui profitaient des fêtes de fin d’année pour se faire un peu d’argent de poche en enfilant l’habit rouge dans les artères des grandes villes se sont vu refuser le renouvellement de leur autorisation. Depuis des décennies, des générations d’enfants marocains attendaient avec joie d’avoir leur photo souvenir avec le personnage populaire. La disparition de ces pères Noël saisonniers qui travaillaient en binôme avec des photographes est presque passée inaperçue, jusqu’à cette année où les autorités casablancaises ont formellement interdit la circulation de toute personne en costume rouge de père Noël, officiellement pour raison de sécurité.
    Selon le site Addoualia , les forces de l’ordre craindraient que des terroristes n’utilisent le déguisement pour commettre des actes terroristes. D’après des sources sécuritaires, des tracts distribués clandestinement dans la capitale économique auraient menacé de représailles “toute personne qui participe à la fête chrétienne”, ajoutant que c’est une “indignité que des musulmans fêtent l’anniversaire du Christ”, que “l’achat de gâteaux le jour de l’an relève de l’associationnisme*” et que “le personnage à la barbe blanche habillé en rouge symbolise le clergé de l’Eglise”. Le site se demande si cette décision “interdisant de se cacher le visage en portant un masque de père Noël” inclut également les adeptes de la Burqa. Parallèlement, des équipes de police se sont rendues aux écoles étrangères, ambassades, consulats et autres représentations diplomatiques pour vérifier si la fête de Noël y aurait bien lieu et ont renforcé leurs dispositifs de sécurité alentours.
    Toutefois, l’argument sécuritaire ne convainc pas. La figure du père Noël n’étant pas plus chrétienne au Maroc qu’elle ne l’est ailleurs, elle est surtout un personnage festif pour des enfants qui auraient bien du mal à comprendre qu’ils devraient y renoncer en raison de leur identité islamique. Son interdiction est surtout un gage envers les conservateurs qui accusent le vieillard en rouge de velléités d’évangélisation. Sur une émission égyptienne à grande audience, un cheikh d’Al Azhar* a répondu à l’enfant Youssef qu’il ne devrait plus célébrer “Papa Noël”, mais plutôt “Baba Mohammed*”, criant à l’aliénation religieuse et culturelle (voir vidéo).
    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=5OsCAYIzw9Q?fs=1&hl=fr_FR&w=480&h=385]

    Au Maroc, le remplaçant de la figure consumériste née grâce au concours de Coca Cola existe déjà. Il suffit de le dépoussiérer. “Baba Aïchour”, personnage sorti de l’imaginaire populaire, avait pour habitude de distribuer des friandises aux enfants lors des fêtes de l’Achoura. Tombé en désuétude depuis près d’un siècle, il a été ressuscité par l’association Contes’Act en 2005, mais peine encore à remplacer le père Noël faute de marketing. Un groupe facebook appelé “Fans de Baba Aichour et non pas de papa Noël” appelle au retour aux valeurs arabo-musulmanes et accuse les adeptes du bonhomme en rouge “d’imiter les Occidentaux”. Toutefois, là encore, les thuriféraires de l’orthodoxie sunnite crient à la Bid’a*. En effet, même si les scènes d’auto-flagellation qui marquent l’Achoura chez les communautés chiites du Moyen-Orient sont inexistantes au Maroc où la fête revêt surtout un aspect familial, les puristes du sunnisme n’y voient pas moins une acculturation au culte d’Al Hassan et Al Hussein, les deux fils d’Ali. Décidément, on ne peut jamais faire plaisir à tout le monde.
    Et les enfants dans tout ça? En attendant que les fabricants de babioles chinois inondent le marché de peluches et déguisements de Baba Aïchour, ils devront désormais compter sans le père Noël.
    Zineb El Rhazoui
    Vox Maroc, 24/12/2010 
  • Entretien exclusif avec le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: «Pour donner une chance à la paix, nous sommes disposés à mettre entre parenthèse la RASD que nous avons proclamé

    C’est une interview exclusive, obtenue comme par hasard, mon confrère italien Stefano Liberti du journal «Il Manifesto» m’ayant vendu la mèche d’un rendez-vous avec le président sahraoui pris en marge du déjeuner et moi, à mon tour, en faisant de même avec mon compagnon du site «al akhbar.info». Entretien.
    N.I.-A.N: M. le président notre première question est sans doute de savoir l’état des relations que vous entretenez avec le gouvernement et la classe politique mauritaniens ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: Hum… Hum…. Ce sont des relations fortes et excellentes. Nous sommes voisins et vous savez qu’il y a une même culture, une même langue, les mêmes traditions et une interpénétration des relations humaines et sociales entre le peuple sahraoui et le peuple mauritanien. Sur le plan politique, vous savez que la République Islamique de Mauritanie reconnaît la République Arabe Sahraouie Démocratique, et il y a de grandes relations de bon voisinage que nous cherchons à renforcer pour le bien de nos deux pays et la sécurité dans la région en général.
    N.I.-A.I: Justement au sujet de la sécurité il y a des accusations qui certains estiment que la région est incontrôlée et vont jusqu’à dire que ce que vous appelez les zones libérées sont devenues des zones de terrorisme et de transit des terroristes d’AQMI …
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: Dans les zones libérées, nous avons avec nous les observateurs des Nations Unies, notamment de la MINURSO. De même que dans les zones libérées de notre territoire, il y a l’administration de notre Etat, nos forces armées et ce sont des zones ouvertes à longueur d’années pour les visiteurs internationaux y compris les journalistes et les mauritaniens. Aucun acte relevant de terrorisme ou d’instabilité ou de laisser-aller ou de perte de contrôle ne s’y est produit ni a été opéré depuis le 6 septembre 1991, c’est-à-dire depuis le jour de cessez-le-feu entre l’armée nationale sahraouie de libération et l’armée marocaine et donc ce sont des zones sécurisées. C’est dire que ces accusations sont, en toute franchise l’œuvre du Maroc dont les services officiels s’en font l’écho pour porter atteinte au peuple sahraoui et l’Etat sahraoui et aussi pour jeter la poudre aux yeux de l’opinion publique internationale. De notre point de vue, c’est le royaume du Maroc qui est la principale source d’instabilité dans la sous-région du Nord-Ouest de l’Afrique. Primo c’est un pays qui est considéré parmi les plus anciens pays producteurs de drogue en particulier le Haschisch qu’il exporte partout en particulier vers l’Europe via la mer, l’Algérie, le Sahara occidental, la Mauritanie via l’océan et le sahara désertique et c’est pourquoi il y a des bandes spécialisées dans le trafic de cette drogue qu’est le haschisch. La guerre que mène le Maroc au Sahara occidental pour imposer un état de fait militaire et annexer par la force ce territoire est une source d’instabilité, de tension permanente, de malentendus entre les Etats et les parties qui empêche l’existence de politique de confiance, de coopération et de bon voisinage pour faire face aux problèmes qui existent ou qui peuvent exister. Quant au gouvernement sahraoui et le Front Polisario, il est entendu de par notre parcours, notre orientation, notre politique et aussi de par la reconnaissance de tous que nous sommes contre le chaos, le laisser-aller, le terrorisme, l’instabilité et que nous sommes avec le respect des Etats et des peuples, leurs affaires intérieures des Etats et le droit international et c’est que existe de fait dans les zones libérées de la République Arabe Sahraoui Démocratique. Nous vous invitons, en tant que journalistes, intellectuels, faiseurs d’opinions, à venir quand vous voulez, visiter en toute liberté, les zones libérées de la RASD pour voir de visu ce qui s’y passe et demandons aux autorités marocaines de vous autoriser et d’autoriser d’autres journalistes à en faire autant dans les zones occupées pour faire la différence entre la propagande marocaine et la réalité sur le terrain.
    N.I.-A.I: M. le Président, si vous permettez, une double question: d’abord sur votre participation à ce 50ème anniversaire de la Résolution 15/14 qui vous concerne en premier, le Sahara occidental étant l’un sinon le dernier territoire d’Afrique non décolonisé et ensuite au sujet de vos relations avec la Mauritanie. Que manque-t-il à ces rapports mauritano-sahraouis, quelle coordination entretenez-vous, par exemple, dans la lutte contre le terrorisme ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: En réponse au premier volet de votre question, nous remercions le gouvernement algérien pour son initiative qui a permis de célébrer le 50ème anniversaire de la Résolution 15/14 portant Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux pour exercer leur droit à l’autodétermination et à l’indépendance. Ce fut une grande occasion pour nombre d’hommes et de femmes qui ont largement contribué et de façon dynamique en Afrique, en Amérique latine et particulièrement en Asie, au mouvement mondial de liberté qui est naît, a grandi et a évolué au lendemain de la seconde guerre mondiale avec la génération Ben Bella, Kenneth Kaunda, Thabo Mbeki, Salim Ahmed Salim, Obasanjo, et j’en passe, qui y ont participé avec bien d’autres en allant du Vietnam jusqu’en Afrique. Donc c’est une opportunité leur permettant de se réunir et parmi eux il y en a qui ont fait la résistance et lutté par les armes, par leurs plumes, par la politique, le cinéma, le théâtre … Mais aussi rencontrer ceux, juristes, journalistes, … qui ont accompagné cette dynamique, aidé, soutenu et plaidé en faveur de ce mouvement de liberté dans le tiers-monde, en Europe mais aussi aux USA, ayant abouti à cette résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies du 14 décembre 1960. Mais ce fut aussi la rencontre entre toutes ces personnalités et les nouvelles générations qui avaient suivi pour que tous se retrouvent ensemble et célèbrent les indépendances des pays et des peuples consacrées après l’adoption de cette déclaration 15/14. Cette conférence d’Alger a été également une occasion pour attirer l’attention et rappeler que même si cette déclaration 15/14 a profité à plusieurs peuples et a donné lieu à plusieurs indépendances et au règlement de nombre de questions de décolonisation, il reste encore des pays, des endroits et des peuples qui attendent la mise en œuvre de cette Résolution et donc il s’agit d’un appel à l’opinion publique internationale et à la communauté internationale pour faire pression et mobiliser les forces à nouveau pour l’application de cette résolution et parmi ces Etats le Sahara occidental. Dans notre analyse, cette conférence d’Alger à laquelle ont participé la Ligue Arabe, l’Union Africaine, l’ONU et beaucoup d’autres organisations et personnalités qui ont leur influence et leur rôle à jouer dans le cas sahraoui et dans d’autres cas comme celui de la Palestine. C’est donc une occasion pour dire que le problème de la colonisation est insupportable.
    Pour le deuxième volet de votre question et en ce qui concerne la Mauritanie, comme je l’ai dit nous partageons beaucoup, nous sommes toujours, en tant que politiques, en quête de rehausser le niveau des relations pour répondre aux attentes que nous impose l’Histoire et la culture. Je dois dire toute notre satisfaction de la confiance mutuelle qui existe entre la RASD et la Mauritanie et la nature de la coordination entre nous. Il y a deux Etats voisins, observateurs dans les négociations entre nous et le Maroc sous la supervision de l’envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unie. Tout cela constitue des facteurs importants qui prédisposent la Mauritanie à jouer un rôle de premier rang pour l’avènement de la paix et la construction maghrébine et pour rendre justice aux ayant-droits légitimes.
    N.I.A.I : D’aucuns affirment que vous avancerez des concessions intéressantes, quelle en est la nature ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Vous savez que le 10 avril 2007, nous avons avancé une proposition aux Nations Unies qui l’a présenté à son tour au Maroc. Trois jours plus tard, le Maroc a fait sa propre proposition et depuis, il y a sur la table des négociations deux propositions, la nôtre et celle du Maroc en plus de la recommandation du Conseil de Sécurité qui définit la mission de l’envoyé spécial du Secrétaire Général de l’ONU qui est de trouver une solution garantissant au peuple sahraoui son droit à l’autodétermination. L’avantage de la proposition sahraouie est çà c’est très important, est qu’elle ne rejette pas la proposition marocaine et ne la néglige pas, mais plutôt l’inclus. Mieux, nous avons même dit d’accord: que pour que la proposition marocaine soit l’un choix et que la proposition sahraouie en soit un autre et qu’on les soumette au vote des électeurs sahraouis dans une opération référendaire libre et indépendante pour qu’ils aient le dernier mot. Mais le royaume du Maroc a refusé et rejeté à priori la proposition sahraouie et exige que les négociations soient uniquement dans le cadre de la proposition marocaine et suivant l’idée que s’en fait le Maroc qui est que le Sahara est marocain et que le Maroc annexe le Sahara occidental et partant le point de vue du Maroc change de négociations en vue de trouver une solution qui garantit le droit à l’autodétermination comme le stipule la résolution du Conseil de Sécurité des Nations, à des négociations pour faciliter une opération de reddition des sahraouis. Or la reddition ne demande de négociation. C’est quelque chose qui est rejeté par le droit et rejeté moralement, politiquement et même rejeté par les résolutions des Nations Unies. Nous avons une proposition ouverte et constructive qui ne fait pas table rase de ce que demande le Maroc lequel ne doit pas le rejeter.
    N.I.A.I.: Est-ce que vous avez des concessions à avancer pour les négociations prévues dans quelques jours?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    La principale divergence qui est à l’origine du conflit entre nous et le royaume du Maroc est la souveraineté sur le Sahara Occidental. Or, le droit international met la souveraineté sur le territoire sahraoui entre les mains du seul peuple sahraoui. Nous disons que nous sommes provisoirement disposés à abandonner la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) comme le Maroc doit abandonner provisoirement sa souveraineté sur le Sahara occidental pour demander au peuple sahraoui qui est le seul et légitime souverain: A qui la souveraineté? Est-ce pour l’indépendance nationale au Sahara Occidental ou pour le royaume du Maroc ? Ceci est une concession capitale qu’avance la République Arabe Sahraouie Démocratique qui a 35 ans d’âge et qui a prouvé en temps de guerre, de paix, de négociation, dans tout, qu’elle est un Etat viable et représente un choix et une ambition pour les sahraouis. Elle est membre de plein droits de l’organisation continentale et est actuellement membre-fondateur de l’Union Africaine, elle a des relations diplomatiques avec plus de 80 pays, elle est réputée crédible et son respect du droit international dans la région, elle est devenue une réalité nationale, régionale et internationale et le droit international circonscrit la souveraineté sahraouie. Et, malgré tout cela, nous sommes disposés à mettre entre parenthèse la RASD que nous avons proclamé pour donner une chance à la paix. Nous sommes disposés à mettre au frigo provisoirement tout çà et oublier que nous sommes un Etat souverain, si le Maroc oublie le fait qu’il exerce son autorité sur le territoire pour demander au peuple sahraoui ce qu’il veut. C’est une concession énorme, très, très, très énorme. Mais nous disons même plus: si le peuple sahraoui choisit son indépendance, nous sommes prêts à négocier avec le Maroc, dans un climat serein et avec un esprit d’ouverture et d’entente, et à discuter avec lui de ses préoccupations économiques, stratégiques, sécuritaires de façon ouverte et positive.

    N.I.A.I.: Il y a en Mauritanie ce qu’on appelle le «dossier sécuritaire» dans lequel figureraient des sahraouis qui seraient des militaires arrêtés aux frontières d’il y a quelques mois et détenus à la prison civile mauritanienne. Avez-vous idée sur ce dossier ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Je n’ai pas connaissance que les autorités mauritaniennes ont arrêté des militaires sahraouis sur les frontières. Mais alors absolument pas à ma connaissance. Que le pouvoir mauritanien arrête quelqu’un de quelle nationalité soit-il ou qui qu’il soit, qui ayant, sur le territoire mauritanien, contrevenu aux lois de circulation, du commerce, de la santé ou n’importe quelles lois en vigueur en Mauritanie, les autorités mauritaniennes y ont droit, car elles doivent protéger leurs lois. Mais je n’ai aucunement connaissance que les autorités mauritaniennes ont arrêté ou détiennent un sahraoui militaire soit-il ou civil.
    N.I.A.I.: Lors du rapt des espagnols en Mauritanie en novembre 2009, il avait été dit que les ravisseurs avaient, avant d’arriver au Nord Mali, transité par le Sahara …
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Je crois que ce sujet a dépassé le stade des rumeurs, les autorités mauritaniennes ayant mené les enquêtes nécessaires et s’étant arrêtées sur des réalités. Elles ne nous ont pas dit qu’il y a eu utilisation de notre territoire par les ravisseurs et je reste convaincu jusqu’à présent que, ni avant, ni après l’exécution du crime, le territoire national sahraoui n’a été utilisé.
    N.I.A.I.: Le dernier round des négociations s’est déroulé pendant le démantèlement du camp de Gdim-Izik. Est-ce que vous avez songé à abandonner la table des négociations par rapport à l’attaque du Maroc. Ceci d’une part et d’autre part, beaucoup de gens qui ne sont pas contents dans les camps des réfugiés à Rabouni, à Tindouf, vous demandent de reprendre les armes. Est-ce que le Polisario serait prêt à faire la guerre ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: L’assaut sur Gdim-Izik a été lancé aux alentours de 6H du matin à l’aube du 8 novembre, alors que les négociations de Manhattan étaient programmées pour 9H heures locales de New York. L’attaque de Gdim-Izik est intervenue 8H de temps environ avant le début des négociations à Manhattan. C’est dire combien nous avons vraiment été sous forte pression, où les téléphones, depuis la ville de Laâyoune, nous faisaient entendre le crépitement des armes, le son des avions, les gémissements des femmes et des blessés. Ils nous transmettaient des flashs d’images des camps qui brûlaient et nous appelaient au secours. D’un autre côté, nous étions invités à Manhattan à des négociations. Nous étions soumis à un véritable tiraillement, à savoir agir par sentiments, émotions ou agir avec raison. Parce que le timing de l’attaque nous laissait le sentiment que le Maroc veut se soustraire aux négociations et nous faire porter la responsabilité de leur échec. Mais nous avons compris le piège et nous avons décidé d’aller aux les négociations. Je crois que nous avons déjoué la manœuvre marocaine.
    S’agissant de la guerre, c’est maintenant devenue une exigence collective de tous les sahraouis, parce qu’ils vivent une profonde déception en ce qui concerne la volonté politique au Maroc mais aussi face aux agissements des Nations Unies. Le sentiment des sahraoui et le leitmotiv qui est sur toutes les langues sahraouies aujourd’hui est que les Nations Unies les ont trahis car le 6 septembre 1991, il leur a été demandé d’accepter un cessez-le-feu et qu’en contrepartie les Nations Unies et le Maroc leur accorderont un référendum d’autodétermination au bout de huit (8). Ils en sont aujourd’hui à leur 19ème année et le Maroc dit même officiellement qu’il a tourné la page du référendum et cela devant les Nations Unies qui se sont engagées publiquement à donner au peuple sahraoui sa chance d’aller vers un référendum d’autodétermination. Les sahraouis disent aussi que les Nations Unies ont un siège à Laâyoune à 12 Km de celui de la MINURSO et que le Maroc viole le cessez-le-feu non pas contre l’armée sahraouie mais plutôt contre les femmes, les enfants et les vieillards paisiblement endormis dans les camps de Gdim-Izik. Que même une condamnation ou une enquête n’a pas été faite par l’ONU. Face à ce comportement onusien, le peuple sahraoui se dit que l’ONU est faible, n’existe pas, ou que l’ONU est complice.
    Devant cette situation, nous défendrons nos droits, nos vies, nos femmes et je ne cache pas franchement, que nous sommes, en tant que dirigeants du Front Polisario, sous forte pression de la partie de notre peuple. Nous demandons à Dieu que l’ONU comprenne la complexité et la difficulté de la situation et essaye de sauver ce qui peut être sauvé pour la paix.
    N.I.A.I: Le Maroc vous accuse d’être derrière ce qui s’est passé à Gdim-Izik, que vous avez des groupuscules qui ont organisé ces manifestations et joué les trouble-fêtes …
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Qu’en est-il de ce phénomène. Au départ, il y avait environ 30.000 citoyennes et citoyens de la ville de Laâyoune qui sont sortis à 12 Km construire 8.000 tentes et ont décidé d’y vivre paisiblement, sans arme et sans volonté d’agresser personne ni de recourir à la violence. Ils sont sortis de manière à ne pas entraver ou perturber la vie des citoyens marocains qui se trouvent à Laâyoune et qu’ils ne sentent pas que la protestation sahraouie est une gêne, une provocation. Ils ont établi des revendications légitimes de droit à l’autodétermination, de droit au travail, de droit au logement, et ont appelé le monde à être témoin. Ils sont restés dans cette situation jusqu’à leur agression à l’aube du 8 Novembre ils ont été agressés. Ce que vous dites-là est une pure propagande du Maroc, ce sont des rumeurs d’un agresseur qui tente de faire porter la responsabilité à la victime. Mais pour tordre le coup et définitivement à ces dires, pourquoi le Maroc n’a pas été autorisé la mise en place d’une commission d’enquête internationale indépendante ? Pourquoi le Maroc n’a pas ouvert la région aux observateurs internationaux et la presse internationale? Euh bien parce que le Maroc dissimule le crime. Le journaliste italien en sait quelque chose, lui qui était au camp de Gdim-Izik.
    Propos recueillis à Alger par:
    Mohamed Ould Khattatt pour Nouakchott Info et ani.mr
    Haiba Ould Cheikh Sidaty pour alakhbar.info
    Stefano Liberti pour Il Manifesto

    Source : ani.mr, 24/12/2010
  • Entretien exclusif avec le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: «Pour donner une chance à la paix, nous sommes disposés à mettre entre parenthèse la RASD que nous avons proclamé

    C’est une interview exclusive, obtenue comme par hasard, mon confrère italien Stefano Liberti du journal «Il Manifesto» m’ayant vendu la mèche d’un rendez-vous avec le président sahraoui pris en marge du déjeuner et moi, à mon tour, en faisant de même avec mon compagnon du site «al akhbar.info». Entretien.
    N.I.-A.N: M. le président notre première question est sans doute de savoir l’état des relations que vous entretenez avec le gouvernement et la classe politique mauritaniens ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: Hum… Hum…. Ce sont des relations fortes et excellentes. Nous sommes voisins et vous savez qu’il y a une même culture, une même langue, les mêmes traditions et une interpénétration des relations humaines et sociales entre le peuple sahraoui et le peuple mauritanien. Sur le plan politique, vous savez que la République Islamique de Mauritanie reconnaît la République Arabe Sahraouie Démocratique, et il y a de grandes relations de bon voisinage que nous cherchons à renforcer pour le bien de nos deux pays et la sécurité dans la région en général.
    N.I.-A.I: Justement au sujet de la sécurité il y a des accusations qui certains estiment que la région est incontrôlée et vont jusqu’à dire que ce que vous appelez les zones libérées sont devenues des zones de terrorisme et de transit des terroristes d’AQMI …
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: Dans les zones libérées, nous avons avec nous les observateurs des Nations Unies, notamment de la MINURSO. De même que dans les zones libérées de notre territoire, il y a l’administration de notre Etat, nos forces armées et ce sont des zones ouvertes à longueur d’années pour les visiteurs internationaux y compris les journalistes et les mauritaniens. Aucun acte relevant de terrorisme ou d’instabilité ou de laisser-aller ou de perte de contrôle ne s’y est produit ni a été opéré depuis le 6 septembre 1991, c’est-à-dire depuis le jour de cessez-le-feu entre l’armée nationale sahraouie de libération et l’armée marocaine et donc ce sont des zones sécurisées. C’est dire que ces accusations sont, en toute franchise l’œuvre du Maroc dont les services officiels s’en font l’écho pour porter atteinte au peuple sahraoui et l’Etat sahraoui et aussi pour jeter la poudre aux yeux de l’opinion publique internationale. De notre point de vue, c’est le royaume du Maroc qui est la principale source d’instabilité dans la sous-région du Nord-Ouest de l’Afrique. Primo c’est un pays qui est considéré parmi les plus anciens pays producteurs de drogue en particulier le Haschisch qu’il exporte partout en particulier vers l’Europe via la mer, l’Algérie, le Sahara occidental, la Mauritanie via l’océan et le sahara désertique et c’est pourquoi il y a des bandes spécialisées dans le trafic de cette drogue qu’est le haschisch. La guerre que mène le Maroc au Sahara occidental pour imposer un état de fait militaire et annexer par la force ce territoire est une source d’instabilité, de tension permanente, de malentendus entre les Etats et les parties qui empêche l’existence de politique de confiance, de coopération et de bon voisinage pour faire face aux problèmes qui existent ou qui peuvent exister. Quant au gouvernement sahraoui et le Front Polisario, il est entendu de par notre parcours, notre orientation, notre politique et aussi de par la reconnaissance de tous que nous sommes contre le chaos, le laisser-aller, le terrorisme, l’instabilité et que nous sommes avec le respect des Etats et des peuples, leurs affaires intérieures des Etats et le droit international et c’est que existe de fait dans les zones libérées de la République Arabe Sahraoui Démocratique. Nous vous invitons, en tant que journalistes, intellectuels, faiseurs d’opinions, à venir quand vous voulez, visiter en toute liberté, les zones libérées de la RASD pour voir de visu ce qui s’y passe et demandons aux autorités marocaines de vous autoriser et d’autoriser d’autres journalistes à en faire autant dans les zones occupées pour faire la différence entre la propagande marocaine et la réalité sur le terrain.
    N.I.-A.I: M. le Président, si vous permettez, une double question: d’abord sur votre participation à ce 50ème anniversaire de la Résolution 15/14 qui vous concerne en premier, le Sahara occidental étant l’un sinon le dernier territoire d’Afrique non décolonisé et ensuite au sujet de vos relations avec la Mauritanie. Que manque-t-il à ces rapports mauritano-sahraouis, quelle coordination entretenez-vous, par exemple, dans la lutte contre le terrorisme ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: En réponse au premier volet de votre question, nous remercions le gouvernement algérien pour son initiative qui a permis de célébrer le 50ème anniversaire de la Résolution 15/14 portant Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux pour exercer leur droit à l’autodétermination et à l’indépendance. Ce fut une grande occasion pour nombre d’hommes et de femmes qui ont largement contribué et de façon dynamique en Afrique, en Amérique latine et particulièrement en Asie, au mouvement mondial de liberté qui est naît, a grandi et a évolué au lendemain de la seconde guerre mondiale avec la génération Ben Bella, Kenneth Kaunda, Thabo Mbeki, Salim Ahmed Salim, Obasanjo, et j’en passe, qui y ont participé avec bien d’autres en allant du Vietnam jusqu’en Afrique. Donc c’est une opportunité leur permettant de se réunir et parmi eux il y en a qui ont fait la résistance et lutté par les armes, par leurs plumes, par la politique, le cinéma, le théâtre … Mais aussi rencontrer ceux, juristes, journalistes, … qui ont accompagné cette dynamique, aidé, soutenu et plaidé en faveur de ce mouvement de liberté dans le tiers-monde, en Europe mais aussi aux USA, ayant abouti à cette résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies du 14 décembre 1960. Mais ce fut aussi la rencontre entre toutes ces personnalités et les nouvelles générations qui avaient suivi pour que tous se retrouvent ensemble et célèbrent les indépendances des pays et des peuples consacrées après l’adoption de cette déclaration 15/14. Cette conférence d’Alger a été également une occasion pour attirer l’attention et rappeler que même si cette déclaration 15/14 a profité à plusieurs peuples et a donné lieu à plusieurs indépendances et au règlement de nombre de questions de décolonisation, il reste encore des pays, des endroits et des peuples qui attendent la mise en œuvre de cette Résolution et donc il s’agit d’un appel à l’opinion publique internationale et à la communauté internationale pour faire pression et mobiliser les forces à nouveau pour l’application de cette résolution et parmi ces Etats le Sahara occidental. Dans notre analyse, cette conférence d’Alger à laquelle ont participé la Ligue Arabe, l’Union Africaine, l’ONU et beaucoup d’autres organisations et personnalités qui ont leur influence et leur rôle à jouer dans le cas sahraoui et dans d’autres cas comme celui de la Palestine. C’est donc une occasion pour dire que le problème de la colonisation est insupportable.
    Pour le deuxième volet de votre question et en ce qui concerne la Mauritanie, comme je l’ai dit nous partageons beaucoup, nous sommes toujours, en tant que politiques, en quête de rehausser le niveau des relations pour répondre aux attentes que nous impose l’Histoire et la culture. Je dois dire toute notre satisfaction de la confiance mutuelle qui existe entre la RASD et la Mauritanie et la nature de la coordination entre nous. Il y a deux Etats voisins, observateurs dans les négociations entre nous et le Maroc sous la supervision de l’envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unie. Tout cela constitue des facteurs importants qui prédisposent la Mauritanie à jouer un rôle de premier rang pour l’avènement de la paix et la construction maghrébine et pour rendre justice aux ayant-droits légitimes.
    N.I.A.I : D’aucuns affirment que vous avancerez des concessions intéressantes, quelle en est la nature ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Vous savez que le 10 avril 2007, nous avons avancé une proposition aux Nations Unies qui l’a présenté à son tour au Maroc. Trois jours plus tard, le Maroc a fait sa propre proposition et depuis, il y a sur la table des négociations deux propositions, la nôtre et celle du Maroc en plus de la recommandation du Conseil de Sécurité qui définit la mission de l’envoyé spécial du Secrétaire Général de l’ONU qui est de trouver une solution garantissant au peuple sahraoui son droit à l’autodétermination. L’avantage de la proposition sahraouie est çà c’est très important, est qu’elle ne rejette pas la proposition marocaine et ne la néglige pas, mais plutôt l’inclus. Mieux, nous avons même dit d’accord: que pour que la proposition marocaine soit l’un choix et que la proposition sahraouie en soit un autre et qu’on les soumette au vote des électeurs sahraouis dans une opération référendaire libre et indépendante pour qu’ils aient le dernier mot. Mais le royaume du Maroc a refusé et rejeté à priori la proposition sahraouie et exige que les négociations soient uniquement dans le cadre de la proposition marocaine et suivant l’idée que s’en fait le Maroc qui est que le Sahara est marocain et que le Maroc annexe le Sahara occidental et partant le point de vue du Maroc change de négociations en vue de trouver une solution qui garantit le droit à l’autodétermination comme le stipule la résolution du Conseil de Sécurité des Nations, à des négociations pour faciliter une opération de reddition des sahraouis. Or la reddition ne demande de négociation. C’est quelque chose qui est rejeté par le droit et rejeté moralement, politiquement et même rejeté par les résolutions des Nations Unies. Nous avons une proposition ouverte et constructive qui ne fait pas table rase de ce que demande le Maroc lequel ne doit pas le rejeter.
    N.I.A.I.: Est-ce que vous avez des concessions à avancer pour les négociations prévues dans quelques jours?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    La principale divergence qui est à l’origine du conflit entre nous et le royaume du Maroc est la souveraineté sur le Sahara Occidental. Or, le droit international met la souveraineté sur le territoire sahraoui entre les mains du seul peuple sahraoui. Nous disons que nous sommes provisoirement disposés à abandonner la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) comme le Maroc doit abandonner provisoirement sa souveraineté sur le Sahara occidental pour demander au peuple sahraoui qui est le seul et légitime souverain: A qui la souveraineté? Est-ce pour l’indépendance nationale au Sahara Occidental ou pour le royaume du Maroc ? Ceci est une concession capitale qu’avance la République Arabe Sahraouie Démocratique qui a 35 ans d’âge et qui a prouvé en temps de guerre, de paix, de négociation, dans tout, qu’elle est un Etat viable et représente un choix et une ambition pour les sahraouis. Elle est membre de plein droits de l’organisation continentale et est actuellement membre-fondateur de l’Union Africaine, elle a des relations diplomatiques avec plus de 80 pays, elle est réputée crédible et son respect du droit international dans la région, elle est devenue une réalité nationale, régionale et internationale et le droit international circonscrit la souveraineté sahraouie. Et, malgré tout cela, nous sommes disposés à mettre entre parenthèse la RASD que nous avons proclamé pour donner une chance à la paix. Nous sommes disposés à mettre au frigo provisoirement tout çà et oublier que nous sommes un Etat souverain, si le Maroc oublie le fait qu’il exerce son autorité sur le territoire pour demander au peuple sahraoui ce qu’il veut. C’est une concession énorme, très, très, très énorme. Mais nous disons même plus: si le peuple sahraoui choisit son indépendance, nous sommes prêts à négocier avec le Maroc, dans un climat serein et avec un esprit d’ouverture et d’entente, et à discuter avec lui de ses préoccupations économiques, stratégiques, sécuritaires de façon ouverte et positive.

    N.I.A.I.: Il y a en Mauritanie ce qu’on appelle le «dossier sécuritaire» dans lequel figureraient des sahraouis qui seraient des militaires arrêtés aux frontières d’il y a quelques mois et détenus à la prison civile mauritanienne. Avez-vous idée sur ce dossier ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Je n’ai pas connaissance que les autorités mauritaniennes ont arrêté des militaires sahraouis sur les frontières. Mais alors absolument pas à ma connaissance. Que le pouvoir mauritanien arrête quelqu’un de quelle nationalité soit-il ou qui qu’il soit, qui ayant, sur le territoire mauritanien, contrevenu aux lois de circulation, du commerce, de la santé ou n’importe quelles lois en vigueur en Mauritanie, les autorités mauritaniennes y ont droit, car elles doivent protéger leurs lois. Mais je n’ai aucunement connaissance que les autorités mauritaniennes ont arrêté ou détiennent un sahraoui militaire soit-il ou civil.
    N.I.A.I.: Lors du rapt des espagnols en Mauritanie en novembre 2009, il avait été dit que les ravisseurs avaient, avant d’arriver au Nord Mali, transité par le Sahara …
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Je crois que ce sujet a dépassé le stade des rumeurs, les autorités mauritaniennes ayant mené les enquêtes nécessaires et s’étant arrêtées sur des réalités. Elles ne nous ont pas dit qu’il y a eu utilisation de notre territoire par les ravisseurs et je reste convaincu jusqu’à présent que, ni avant, ni après l’exécution du crime, le territoire national sahraoui n’a été utilisé.
    N.I.A.I.: Le dernier round des négociations s’est déroulé pendant le démantèlement du camp de Gdim-Izik. Est-ce que vous avez songé à abandonner la table des négociations par rapport à l’attaque du Maroc. Ceci d’une part et d’autre part, beaucoup de gens qui ne sont pas contents dans les camps des réfugiés à Rabouni, à Tindouf, vous demandent de reprendre les armes. Est-ce que le Polisario serait prêt à faire la guerre ?
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz: L’assaut sur Gdim-Izik a été lancé aux alentours de 6H du matin à l’aube du 8 novembre, alors que les négociations de Manhattan étaient programmées pour 9H heures locales de New York. L’attaque de Gdim-Izik est intervenue 8H de temps environ avant le début des négociations à Manhattan. C’est dire combien nous avons vraiment été sous forte pression, où les téléphones, depuis la ville de Laâyoune, nous faisaient entendre le crépitement des armes, le son des avions, les gémissements des femmes et des blessés. Ils nous transmettaient des flashs d’images des camps qui brûlaient et nous appelaient au secours. D’un autre côté, nous étions invités à Manhattan à des négociations. Nous étions soumis à un véritable tiraillement, à savoir agir par sentiments, émotions ou agir avec raison. Parce que le timing de l’attaque nous laissait le sentiment que le Maroc veut se soustraire aux négociations et nous faire porter la responsabilité de leur échec. Mais nous avons compris le piège et nous avons décidé d’aller aux les négociations. Je crois que nous avons déjoué la manœuvre marocaine.
    S’agissant de la guerre, c’est maintenant devenue une exigence collective de tous les sahraouis, parce qu’ils vivent une profonde déception en ce qui concerne la volonté politique au Maroc mais aussi face aux agissements des Nations Unies. Le sentiment des sahraoui et le leitmotiv qui est sur toutes les langues sahraouies aujourd’hui est que les Nations Unies les ont trahis car le 6 septembre 1991, il leur a été demandé d’accepter un cessez-le-feu et qu’en contrepartie les Nations Unies et le Maroc leur accorderont un référendum d’autodétermination au bout de huit (8). Ils en sont aujourd’hui à leur 19ème année et le Maroc dit même officiellement qu’il a tourné la page du référendum et cela devant les Nations Unies qui se sont engagées publiquement à donner au peuple sahraoui sa chance d’aller vers un référendum d’autodétermination. Les sahraouis disent aussi que les Nations Unies ont un siège à Laâyoune à 12 Km de celui de la MINURSO et que le Maroc viole le cessez-le-feu non pas contre l’armée sahraouie mais plutôt contre les femmes, les enfants et les vieillards paisiblement endormis dans les camps de Gdim-Izik. Que même une condamnation ou une enquête n’a pas été faite par l’ONU. Face à ce comportement onusien, le peuple sahraoui se dit que l’ONU est faible, n’existe pas, ou que l’ONU est complice.
    Devant cette situation, nous défendrons nos droits, nos vies, nos femmes et je ne cache pas franchement, que nous sommes, en tant que dirigeants du Front Polisario, sous forte pression de la partie de notre peuple. Nous demandons à Dieu que l’ONU comprenne la complexité et la difficulté de la situation et essaye de sauver ce qui peut être sauvé pour la paix.
    N.I.A.I: Le Maroc vous accuse d’être derrière ce qui s’est passé à Gdim-Izik, que vous avez des groupuscules qui ont organisé ces manifestations et joué les trouble-fêtes …
    Le président sahraoui Mohamed Abdel Aziz:
    Qu’en est-il de ce phénomène. Au départ, il y avait environ 30.000 citoyennes et citoyens de la ville de Laâyoune qui sont sortis à 12 Km construire 8.000 tentes et ont décidé d’y vivre paisiblement, sans arme et sans volonté d’agresser personne ni de recourir à la violence. Ils sont sortis de manière à ne pas entraver ou perturber la vie des citoyens marocains qui se trouvent à Laâyoune et qu’ils ne sentent pas que la protestation sahraouie est une gêne, une provocation. Ils ont établi des revendications légitimes de droit à l’autodétermination, de droit au travail, de droit au logement, et ont appelé le monde à être témoin. Ils sont restés dans cette situation jusqu’à leur agression à l’aube du 8 Novembre ils ont été agressés. Ce que vous dites-là est une pure propagande du Maroc, ce sont des rumeurs d’un agresseur qui tente de faire porter la responsabilité à la victime. Mais pour tordre le coup et définitivement à ces dires, pourquoi le Maroc n’a pas été autorisé la mise en place d’une commission d’enquête internationale indépendante ? Pourquoi le Maroc n’a pas ouvert la région aux observateurs internationaux et la presse internationale? Euh bien parce que le Maroc dissimule le crime. Le journaliste italien en sait quelque chose, lui qui était au camp de Gdim-Izik.
    Propos recueillis à Alger par:
    Mohamed Ould Khattatt pour Nouakchott Info et ani.mr
    Haiba Ould Cheikh Sidaty pour alakhbar.info
    Stefano Liberti pour Il Manifesto

    Source : ani.mr, 24/12/2010